CASSATION PARTIELLE par voie de retranchement et sans renvoi sur le pourvoi de :
- X... Patrice,
contre un arrêt de la Cour d'appel d'Angers, Chambre correctionnelle, du 7 mars 1985 qui, pour blessures involontaires, l'a condamné à 3 000 francs d'amende et ordonné l'affichage de la décision.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article 320 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné le requérant pour blessures involontaires ;
" aux motifs que X... a reconnu n'avoir pas accompagné la bille de bois dans sa trajectoire à travers la scierie, et jusqu'à destination pour la guider et veiller à ce que des ouvriers ne se placent pas sous la charge, qui évoluait au-dessus de leur tête ; qu'il appartenait encore à X..., gérant de la société, d'organiser le travail dans sa scierie de telle façon que le cariste commandant la grue soit en mesure à tout instant de suivre des yeux les charges de bois qu'il faisait évoluer dans les airs ;
" alors que dans ses conclusions, demeurées sans réponse, le requérant soutenait que Y... n'était pas à la place où il aurait dû être lorsque la bille de bois a été transportée par la grue ; que ce fait est affirmé, non seulement par le prévenu mais encore par Z..., cariste expérimenté et camarade de travail de Y..., qui s'est exprimé ainsi : " cet accident est dû à un concours de circonstances car la bille a glissé de la griffe, chose qui n'arrive que très rarement, et aussi la présence à côté de la scie de Y... qui pendant le temps de l'approvisionnement ne se trouve pas d'habitude en ce lieu, mais de l'autre côté du hangar à la reconstitution des billes débitées " ; que la Cour, faute d'avoir répondu à ces conclusions, a entaché son arrêt d'un défaut de motif évident ;
" et alors que l'accident était donc dû à la présence anormale de la victime, que la Cour n'a pas légalement motivé son arrêt et a commis une erreur manifeste de qualification des faits, qui doit en entraîner la cassation ; "
Attendu qu'il appert des énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme qu'une bille de bois s'étant accidentellement décrochée de la griffe d'une grue qui la transportait, Y... Gaston, aide-scieur au service de X... Patrice, a eu le pied gauche écrasé et a subi, en conséquence, une incapacité totale de travail personnel supérieure à trois mois ;
Attendu que pour dire X... coupable du délit de blessures involontaires, les juges, se fondant sur les éléments de conviction régulièrement produits devant eux, ont relevé que le prévenu d'une part avait reconnu n'avoir pas accompagné la bille de bois lors de son trajet à travers la scierie et veillé à ce que des ouvriers ne se placent pas sous la charge qui passait au-dessus d'eux et d'autre part n'avait pas organisé le travail de telle façon que le cariste pilotant la grue soit en mesure, à tout instant, de suivre des yeux les billes de bois véhiculées, écartant ainsi nécessairement les conclusions de X... aux termes desquelles l'accident était imputable au seul Y... qui ne se serait pas trouvé à son poste de travail alors qu'il était établi que ce dernier n'avait pas été défini de façon telle que soit rendu impossible l'accès à la zone d'évolution de la grue et, a fortiori, auprès des charges transportées ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations souveraines les juges qui n'ont pas délaissé les conclusions du demandeur ont caractérisé la faute retenue à son encontre ainsi que le lien de causalité existant entre celle-ci et les blessures subies par la victime ;
d'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le moyen pris d'office de la violation des articles 4 et 5 du Code pénal et de l'article L. 263-6 du Code du travail en ce que l'arrêt attaqué a ordonné l'affichage de la décision alors que le prévenu n'était condamné que pour le délit de blessures involontaires ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les juges ne sauraient prononcer une peine non prévue par la loi ;
Attendu que par l'arrêt attaqué la Cour d'appel a condamné le demandeur pour le seul délit de blessures involontaires retenu par la prévention et ordonné l'affichage de la décision pour une durée de 15 jours à la porte de l'entreprise X... par application des dispositions de l'article L. 263-6 du Code du travail ;
Mais attendu que le texte visé n'édicte pas une telle mesure dans le cas où la condamnation a été prononcée du seul chef de blessures involontaires ; qu'il en est de même de l'article 320 du Code pénal ;
D'où il suit que l'arrêt encourt la cassation pour avoir méconnu le principe ci-dessus rappelé ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE par voie de retranchement et sans renvoi l'arrêt de la Cour d'appel d'Angers du 7 mars 1985 mais dans ses seules dispositions concernant l'affichage de la condamnation à 3 000 francs d'amende pour blessures involontaires, les autres dispositions de l'arrêt étant expressément maintenues.