Joint les pourvois numéros 85-60.647 et 85-60.685 en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité des pourvois contre le chef du jugement attaqué statuant sur la validité de la désignation de représentants syndicaux conventionnels au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail :
Vu les articles 605 du nouveau Code de procédure civile, R. 311-1, R. 311-1 et R. 321-18 du Code de l'organisation judiciaire ;
Attendu qu'aux termes du premier de ces textes, le pourvoi en cassation n':est ouvert qu'à l'encontre de jugements en dernier ressort et que, selon le deuxième, le tribunal de grande instance connaît, à charge d'appel, de toutes les affaires pour lesquelles compétence n'est pas attribuée expressément à une autre juridiction, en raison de la nature ou du montant de la demande ;
Attendu que la Société Gardiloire s'est pourvue en cassation contre le chef du jugement attaqué qui a déclaré régulière la désignation de représentants syndicaux conventionnels C.F.D.T. et C.G.T. au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de cette entreprise ;
Atttendu cependant que l'alinéa 3 de l'article L. 236-5 du Code du travail, résultant de l'article 20 de la loi n° 85-10 du 3 janvier 1985, ne prévoit la compétence du tribunal d:instance, qui statue en dernier ressort, qu'en ce qui concerne les contestations relatives à la délégation des représentants du personnel au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ;
Qu'il en résulte que le jugement attaqué a été à cet égard rendu en premier ressort et que les pourvois ne sont donc pas recevables contre ce chef de la décision ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE les pourvois IRRECEVABLES contre le chef du jugement attaqué statuant sur la validité de la désignation des représentants syndicaux conventionnels au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ;
Sur le premier moyen des pourvois, pris de la violation des articles L. 236-1 et suivants, L. 236-5, L. 236-13, R. 236-1 du Code du travail, 2 et 1134 du Code civil, de la dénaturation de documents et du manque de base légale :
Attendu que la Société Gardiloire reproche au jugement attaqué d'avoir déclaré régulière la désignation, le 5 septembre 1985, d'une délégation du personnel de dix membres au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, alors, d'une part, que la loi n° 82-1097 du 23 décembre 1982 a créé des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, institution nouvelle comprenant une délégation du personnel dont la composition a été fixée par le décret n° 83-844 du 23 septembre 1983 (article R. 236-1 du Code du travail) ; qu'ainsi l'existence d'un usage consistant à désigner une délégation du personnel supérieure en nombre à la délégation prévue par l'article R. 236-1 du Code du travail ne pouvait être retenue que si une telle pratique avait été suivie au sein des comités après la mise en vigueur du décret précité ; qu'en l'espèce le jugement s'est borné à constater que le nombre des représentants du personnel était, avant comme après la promulgation
de la loi du 23 décembre 1982, supérieure au nombre légal ; qu'ainsi le jugement, qui a par ailleurs relevé que la désignation antérieure à celle qui était contestée, remontait au 4 juillet 1983, soit avant la publication du décret fixant la composition de la délégation, n'a pas caractérisé l'existence d'un usage en vigueur au sein des comités consistant à procéder à la désignation de dix représentants du personnel au lieu de quatre, alors, d'autre part, que par suite de la disparition des anciens comités d'hygiène et de sécurité et de la création par la loi du 23 décembre 1982 de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, institution nouvelle, autonome et distincte du comité d'entreprise, dotée d'attributions et de pouvoirs différents de ceux des anciens comités, les usages en vigueur au sein des comités désormais abrogés sont devenus caducs ; que le tribunal d'instance ne pouvait donc décider que la filiation existant entre les nouveaux et les anciens comités s'opposait à la suppression des usages antérieurs plus favorables que les dispositions légales alors en vigueur, alors, encore, que la loi du 23 décembre 1982 n'envisageait la possibilité d'aménager par voie d'accord ou d'usage les dispositions légales dans un sens plus favorable qu'en ce qui concerne le fonctionnement et les pouvoirs du comité (article L. 236-13 du Code du travail dans sa rédaction initiale) ; qu'ainsi la loi du 9 juillet 1984, en offrant désormais une possibilité analogue en ce qui concerne la composition des comités, n'a pu disposer que pour l'avenir, sans avoir pour effet de conférer une portée juridique aux pratiques dérogatoires qui s'étaient instaurées avant sa publication ; que le juge du fond ne pouvait donc décider que la loi du 9 juillet 1984 visait les accords et usages instaurés avant sa promulgation sans conférer une portée rétroactive à la loi précitée, et alors, enfin, que l'employeur a la faculté de mettre fin unilatéralement à un usage de l'entreprise ; qu'en l'espèce il résulte des documents de la cause (procès-verbaux des réunions du comité d'entreprise du 2 décembre 1983 et convocations aux réunions du comité d'hygiène et des conditions de travail des 5 février, 1er mars et 13 mai 1985) que la Société Gardiloire n'avait cessé de protester contre le nombre trop élevé de représentants du personnel composant la délégation du personnel, manifestant ainsi son intention de mettre un terme à cette pratique dérogatoire et de s'en tenir au nombre de quatre membres fixé par le texte réglementaire ; qu'en considérant néanmoins que la société n'avait pas protesté contre la désignation d'une délégation surnuméraire, le tribunal a dénaturé les documents précités ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la loi du 23 décembre 1982 avait créé une institution unique regroupant les attributions du comité d'hygiène et de sécurité, d'une part, et de la commission des conditions de travail, d'autre part, et ce, afin de corriger le déséquilibre que provoquait le partage de compétence existant antérieurement, le juge du fond a exactement décidé que cette loi n'avait pas rendu caducs les usages antérieurs plus favorables que les dispositions légales et concernant la composition du comité ; qu'ayant constaté que le nombre des représentants du personnel avait été dans la société, avant la date en vigueur de la loi nouvelle, supérieur au nombre légal et qu'il en avait été de même après la promulgation de cette loi, que lors du passage de l'ancien comité au nouveau le collège avait élu dix représentants, sans protestation ou contestation en justice de l'employeur et que ce nombre correspondait aux propositions qu'il avait lui-même formulées lors d'une réunion du 26 octobre 1982, le tribunal d'instance, qui n'a pas dénaturé les documents susvisés, a, sans encourir les griefs des pourvois, légalement justifié sa décision ;
Et attendu que le second moyen, commun aux pourvois, concerne la désignation des représentants syndicaux conventionnels au comité ; qu'il n'y a donc pas lieu de l'examiner dès lors que les pourvois sont, à cet égard, déclarés irrecevables ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois