Sur le moyen unique :
Vu les articles 1147 et 1315 du Code civil ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Technisonor, titulaire d'un compte ouvert au Crédit commercial de France (la banque), procédait, selon une pratique convenue, à des retraits d'espèces au moyen de chèques signés par le directeur général de cette société qui, dès leur émission, les endossait à un préposé, lequel en percevait le montant au guichet de la banque ; qu'une personne s'est fait payer par la banque un chèque sur lequel étaient apposées de fausses signatures du directeur général ; que, deux jours plus tard, la société Technisonor s'étant aperçue que des chéquiers lui avaient été dérobés, dont l'un contenant la formule sur laquelle avait été établi le faux chèque, a fait opposition et a déposé plainte ; que l'enquête effectuée n'a pas permis d'identifier l'auteur du vol et la personne s'étant présentée au guichet de la banque ; que la société Technisonor a assigné la banque en paiement d'une somme représentant le montant du faux chèque ;
Attendu que, pour débouter la société Technisonor de sa demande, la cour d'appel après avoir énoncé le principe selon lequel le banquier n'est pas libéré envers son client qui lui a confié des fonds quand il se défait de ces derniers sur présentation d'un faux ordre de paiement revêtu dès l'origine de la fausse signature du client et n'ayant pas de ce fait la qualité légale de chèque, a retenu que, pour s'exonérer de sa responsabilité contractuelle, la banque invoquait la faute de la société Technisonor ayant consisté dans le défaut de surveillance de ses chéquiers, que le vol de ceux-ci, à une date qui n'avait pu être déterminée, même approximativement, était intervenu dans les locaux de la société Technisonor sans qu'il y ait eu effraction, que cette société prétendait que la personne ayant présenté le chèque au paiement n'appartenait pas à son personnel et que l'auteur du vol avait dû émettre le chèque litigieux, mais que, par cette affirmation, il appartenait à la société Technisonor d'établir les conditions de surveillance et de conservation de ses chéquiers et les circonstances exactes de leur disparition et qu'à défaut par elle d'apporter la moindre précision à cet égard, elle ne prouvait pas qu'elle n'avait pas commis la faute que lui imputait la banque ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 décembre 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles