CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Guy,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, en date du 8 septembre 1994, qui, pour infractions à la législation sur les contributions indirectes, l'a condamné à diverses amendes et pénalités fiscales, notamment pour tenir lieu de confiscation.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 290 quater I et III du Code général des impôts, 50 sexies B, 50 sexies G et, 50 sexies H de l'année IV du même Code, 1791 et 1791 bis dudit Code, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable d'irrégularités commise en matière de délivrance et de détention de billeterie dans un établissement de spectacles comportant un droit d'entrée ;
" aux motifs qu'à l'exception des élèves du premier degré au nombre de 25 à 30 participants à ces soirées dansantes, et des élèves des 2e, 3e et 4e degrés ayant payé leurs cours par abonnement, d'autres personnes participaient à ces soirées dansantes, à l'exclusion des spectateurs pouvant y assister gratuitement ; que le nombre total des participants à la soirée du 30 juin 1989 n'est pas précisé ; qu'il résulte toutefois des constatations faites que le nombre des billets d'entrées délivrés pour cette soirée s'est élevé à 63, étant précisé qu'aucun élément n'établit que les 110 billets délivrés, résultant des deux carnets saisis, l'aient été au cours de la même soirée ;
" qu'il résulte aussi de ces éléments, d'une part, que des personnes extérieures à l'école exploitée par Guy X... pouvaient participer à ces soirées dansantes et, d'autre part, qu'aucun contrôle systématique n'était opéré, quant à la qualité d'élève de l'école, en ce qui concerne les personnes à qui un ticket d'entrée était délivré contre paiement d'une somme de 27 francs ; que les 63 billets délivrés le 30 juin 1989 restent anonymes et la délivrance de tels billets ne peut correspondre à une activité d'enseignement qui dure nécessairement plusieurs séances, mais correspond, en revanche, à la délivrance de billets d'entrée à des participants à ces soirées dansantes extérieures à l'école dont ils n'étaient pas les élèves ;
" qu'il apparaît, dès lors, qu'à l'occasion de ces soirées dansantes, Guy X... se comportait aussi en organisateur de spectacles, le nombre des billets d'entrée anonymes délivrés ne pouvant correspondre à une activité marginale au cours d'une activité d'enseignement ;
" que la billetterie utilisée, ne comportant notamment ni le nom de l'établissement ni le prix global payé par le spectateur, ne répondait pas aux dispositions des articles 290 quater du CGI, 50 sexies B et G de l'annexe IV dudit Code ;
" que, selon les déclarations de Guy X..., ces soirées dansantes étaient organisées une fois par semaine, le vendredi soir ; que celui-ci a donc commis les infractions en matière de délivrance de billetterie dans un établissement de spectacles comportant un droit d'entrée, visées à la prévention ;
" alors que la qualité d'exploitant d'un établissement de spectacles au sens de l'article 290 quater du Code général des impôts, ne saurait résulter à la charge d'un professeur de danse de ce que celui-ci organise, dans le cadre de ses cours, une soirée par semaine et qui constitue le prolongement des cours dispensés dans les locaux professionnels ; que, dès lors, en l'espèce où la participation à la soirée dansante est liée à la qualité d'élève du cours de danse, l'ouverture des séances à des personnes étrangères étant marginale, les séances de danses du vendredi soir doivent être considérées comme des cours collectifs de danse et non comme des bals ou spectacles ; que, par suite, la cour d'appel a violé le texte susvisé en prétendant qu'il était applicable " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que, pour écarter les conclusions de Guy X... et déclarer celui-ci coupable d'infractions à la législation sur les contributions indirectes en matière de spectacles, notamment par délivrance irrégulière de billets d'entrée et détention de billets irréguliers, la cour d'appel, après avoir exposé que l'intéressé, directeur d'une école de danse, organisait le vendredi soir dans ses locaux professionnels des soirées dansantes, relève que l'entrée dans la salle était payante, sauf pour les élèves du premier degré, et que des personnes extérieures à l'école pouvaient participer à ces soirées en réglant la somme de 27 francs ; qu'elle constate que la billetterie saisie ne mentionne ni le nom de l'établissement, ni le prix du billet et que 63 souches de billets vendus le 30 juin 1989 restent anonymes ; qu'elle conclut que la délivrance de billets ne peut correspondre à une activité d'enseignement et que le prévenu s'est comporté en organisateur de spectacles sans respecter les prescriptions des articles 290 quater du Code général des impôts, 50 sexies B et G de l'annexe IV du même Code ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance et relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des faits et circonstances de la cause soumis au débat contradictoire, la cour d'appel a caractérisé en tous leurs éléments les infractions reprochées ;
Que, dès lors, le moyen ne peut être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 272 du Livre des procédures fiscales, 749 et suivants du Code de procédure pénale, 593 du même Code, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré que la contrainte par corps, le cas échéant, sera exercée conformément aux dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale ;
" alors qu'en vertu de l'article L. 272 du Livre des procédures fiscales, la contrainte par corps n'est applicable qu'aux condamnations pécuniaires en matière d'impôts directs et de taxe assimilées et non lorsque les fraudes fiscales portent sur l'établissement total ou partiel des droits indirects ou de la TVA, en sorte qu'en ordonnant cette mesure dans le cadre de poursuites intentées pour infractions en matière de billetterie de spectacles, les juges du fond ont fait une fausse application du texte précité " ;
Attendu que l'arrêt attaqué, après avoir condamné le prévenu à diverses amendes, pénalités et confiscations fiscales pour infractions à la législation sur les contributions indirectes, a dit que la contrainte par corps sera exercée, s'il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'en prononçant ainsi la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet il résulte des dispositions combinées des articles L. 240, L. 272 du Livre des procédures fiscales et 749 du Code de procédure pénale, qu'en matière de contributions indirectes il y a lieu à application de la contrainte par corps pour le recouvrement des amendes, pénalités et confiscations fiscales, sauf lorsque les condamnations concernent des fraudes réprimées par l'article 1741 du Code général des impôts ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le moyen relevé d'office et pris de la violation des articles 1791 du Code général des impôts et 593 du Code de procédure pénale :
Vu lesdits articles ;
Attendu que le juge répressif ne peut prononcer la pénalité proportionnelle prévue à l'article 1791 du Code général des impôts, dont le montant est compris entre une et trois fois celui des droits fraudés ou compromis, que pour autant qu'il a recherché et déterminé ces droits avec exactitude ;
Attendu en outre que la confiscation prévue par le texte précité est une sanction réelle qui ne peut être prononcée que lorsque les objets sur lesquels elle porte ont été préalablement et effectivement saisis en contravention ; que cette saisie peut être, le cas échéant, effectuée fictivement à la condition, en ce cas, qu'il n'y ait pas de contestation sur la consistance et la valeur des objets de fraude ;
Attendu que l'arrêt attaqué, après avoir déclaré Guy X... coupable d'infractions à la législation sur les contributions indirectes en matière de billetterie de spectacles, l'a notamment condamné pour délivrance irrégulière de 6 741 billets, du 1er octobre 1986 au 29 juin 1989, à 6 741 amendes de 100 francs, à une pénalité proportionnelle de 28 544,09 francs et au paiement de 182 007 francs pour tenir lieu de confiscation des recettes correspondant aux billets saisis fictivement ;
Attendu que, pour estimer à 6 741 le nombre de billets délivrés irrégulièrement au cours de la période considérée et retenir ce chiffre comme base de calcul du nombre d'amendes, de la pénalité proportionnelle et de la somme tenant lieu de confiscation, la cour d'appel relève que, selon le procès-verbal de constat, 63 clients ont été admis dans la salle de spectacles le 30 juin 1984 en acquittant le prix de 27 francs contre remise de billets non conformes à la réglementation ; qu'elle en déduit que ce chiffre correspond à la moyenne des entrées payantes hebdomadaires au cours des 3 années précédant le contrôle ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, après avoir procédé par extrapolation, au-delà de ce qui a été effectivement constaté, à la reconstitution d'une billetterie dont la consistance supposée résultait seulement d'une estimation contestée par l'intéressé, la cour d'appel a méconnu les principes susrappelés et n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la légalité de la décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le deuxième moyen proposé :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Toulouse, en date du 8 septembre 1994, mais en ses seules dispositions prononçant des condamnations pécuniaires pour délivrance irrégulière de billets de spectacles au cours de la période du 1er octobre 1986 au 29 juin 1989, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée.