Attendu que M. X..., dit Daurel, titulaire de la carte de journaliste professionnel, a été engagé en 1976 par la société Compagnie française d'études et de constructions, dite Technip, exploitant une entreprise d'ingénierie relevant de la Convention collective nationale de l'industrie du pétrole, en qualité de cadre et chargé d'élaborer, à l'usage du personnel et des actionnaires de la société, des bulletins d'information, ainsi que des cassettes destinées à être diffusées par une station radiophonique interne ; que, le 19 juin 1984, il a été licencié pour faute grave ; qu'il a saisi la commission arbitrale des journalistes pour obtenir le paiement de l'indemnité de congédiement prévue par l'article L. 761-5 du Code du travail ; que, par sentence du 25 juillet 1985, cette commission a accueilli la demande en écartant l'exception d'incompétence soulevée par la société ; que l'arrêt de la cour d'appel, qui avait déclaré l'appel irrecevable, a été cassé pour fausse application de l'article L. 761-5 du Code du travail qui n'exclut l'appel que lorsque la commission a statué dans les limites de sa compétence ; que la cour d'appel de renvoi, estimant que la commission avait effectivement statué dans les limites de sa compétence, a déclaré, en conséquence, l'appel irrecevable ; que sa décision a été également cassée ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt rendu sur renvoi après cette seconde cassation d'avoir déclaré l'appel recevable et annulé la sentence arbitrale, alors, selon le moyen, d'une part, que le bénéfice d'une carte professionnelle suppose que son titulaire satisfait aux conditions de l'article L. 761-2 du Code du travail ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté que M. X... était titulaire de la carte d'identité professionnelle de journaliste n 29091 et que celle-ci avait été renouvelée pendant toute la durée de son activité au service de la société Technip ; que, dès lors, en déclarant que cette circonstance était sans incidence sur la solution du litige, la cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles L. 761-2, L. 761-1, alinéa 2, R. 761-3, alinéa 2, du Code du travail, 6 de la convention collective des journalistes, ensemble le principe ayant valeur constitutionnelle de la séparation des pouvoirs ; alors, d'autre part, à titre subsidiaire, que les dispositions du Code du travail applicables aux journalistes relevant d'un ordre public de protection, il était loisible aux parties de se placer volontairement sous leur empire ; que dès lors, en déclarant qu'il importait peu que M. X... ait pu être considéré comme journaliste par la société Technip sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si les parties, et spécialement l'employeur, par son comportement, avaient manifesté l'intention dépourvue d'équivoque, de placer leurs relations contractuelles sous l'empire des dépositions litigieuses, ce qui emportait nécessairement la compétence de la Commission arbitrale des journalistes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, L. 761-1 et suivants du Code du travail ;
Mais attendu, d'abord, qu'il résulte des articles L. 761-4 et L. 761-5 du Code du travail que seules les personnes mentionnées à l'article L. 761-2 du même Code et liées à une entreprise de journaux et périodiques peuvent prétendre à l'indemnité de congédiement instituée par l'article L. 761-5 du Code du travail ; que la cour d'appel, ayant constaté que la société Technip n'était pas une entreprise de presse, a décidé exactement que la commission arbitrale n'était pas compétente pour statuer sur la demande de M. X... en paiement d'indemnité de congédiement, peu important que le salarié ait été titulaire d'une carte de journaliste professionnel ;
Attendu, ensuite, que la compétence de la Commission arbitrale des journalistes ayant un caractère exceptionnel qui ne saurait être étendu à des cas autres que ceux prévus par la loi, la cour d'appel n'avait pas à répondre à des conclusions inopérantes ;
Que le moyen ne saurait être accueilli en aucune de ses branches ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1153 du Code civil ;
Attendu que la partie qui doit restituer une somme qu'elle détenait en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution ;
Attendu que la cour d'appel, qui a condamné M. X... à restituer à la société les sommes perçues en exécution de la sentence arbitrale, a assorti ces sommes des intérêts au taux légal à compter du jour où ces sommes lui avaient été versées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que jusqu'à la décision annulant la sentence arbitrale, M. X... détenait les sommes litigieuses en vertu d'un titre qui avait force exécutoire par application de l'article L. 761-6 du Code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il convient d'appliquer au litige la règle de droit appropriée en vertu de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition fixant le point de départ des intérêts au taux légal à compter de la date du versement des sommes que M. X... est condamné à restituer, l'arrêt rendu le 30 mai 1994, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DIT que les intérêts courent à compter de la notification de l'arrêt annulant la sentence arbitrale et ordonnant la restitution.