Attendu qu'entre janvier et juillet 1993 la caisse primaire d'assurance maladie a pris en charge des frais pharmaceutiques et des frais médicaux de consultations et de visites de médecins, exposés, de leur propre chef, par des assurés sociaux hébergés dans la section de cure médicale de la maison de retraite de Sainte-Mère-l'Eglise ; qu'à l'issue d'un contrôle, la Caisse a estimé que ces dépenses, étant comprises dans le forfait de soins de la section de cure médicale versé à l'établissement en exécution de son budget prévisionnel annuel, avaient fait l'objet d'une double prise en charge ; qu'elle a demandé à la maison de retraite la restitution des sommes ainsi versées à tort ; que le recours du directeur de la maison de retraite contre cette décision a été accueilli par le tribunal des affaires de sécurité sociale ;
Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches :
Attendu que la Caisse reproche au tribunal d'avoir accueilli le recours du directeur de la maison de retraite, en ce qu'était contestée la restitution du remboursement d'honoraires médicaux, alors, selon le moyen, d'une part, que le jugement viole l'article 1er du décret n° 78-477 du 29 mars 1978 et l'article 1er du décret n° 78-478 du même jour, le premier de ces textes prévoyant, dans les sections de cure médicale, que les dépenses afférentes aux soins sont assumées au moyen d'un forfait global, qui inclut donc les frais médicaux sans restriction, et le second spécifiant non pas que les forfaits concernent " l'achat des médicaments et produits usuels ", mais les sommes afférentes à la rémunération des médecins... et à l'achat des médicaments ; que le principe du libre choix du médecin n'implique nullement que la Caisse et non l'établissement assure en outre le remboursement des médecins généralistes, ce qui traduit aussi une violation par voie de fausse application de l'article 1er du décret n° 81-449 du 8 mai 1981 ; alors, d'autre part, que le jugement ne tire pas les conséquences légales de ses propres constatations dans la mesure où il ordonne le remboursement de visites de généralistes en sus du forfait tout en constatant lui-même que " le forfait global de soins apparaît comme couvrant les besoins médicaux ainsi que le remboursement des médicaments et des produits usuels afférents aux traitements d'entretien ", privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 1er du décret n° 78-477 du 29 mars 1978 et 1er du décret n° 78-478 du 29 mars 1978 ; alors, enfin, que le jugement ne pouvait refuser d'examiner l'argumentation de la Caisse fondée sur des circulaires interministérielles (circulaire 220 du 16 novembre 1987 et du 23 février 1988) applicables aux établissements conventionnés et précisant que la rémunération à l'acte des interventions des généralistes et non des spécialistes doit être prise en charge dans le forfait ; que tout effet ne pouvant être refusé à ces circulaires confortant les textes par voie de rejet global et non motivé, le Tribunal a violé les articles 1er et 1134 du Code civil et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que, selon l'article 1er du décret n° 78-478 du 29 mars 1978, qui a ajouté un article 37-2 au décret n° 58-1202 du 11 décembre 1958, le forfait annuel de prise en charge des soins dispensés dans les sections de cure médicale est calculé à partir des dépenses prévisionnelles de soins qui comprennent notamment " les sommes afférentes à la rémunération des médecins, infirmiers et autres auxiliaires médicaux ainsi que les aides soignants affectés à cette section " ; qu'il s'ensuit que seules sont incluses dans le forfait de soins d'une section de cure médicale les rémunérations des médecins qui sont attachés à ladite section ;
Attendu que le Tribunal, ayant justement énoncé que les assurés hébergés dans les sections de cure médicale, qui conservent le libre choix du médecin, ont droit au remboursement par la caisse des honoraires du praticien non attaché à l'établissement, a ainsi fait ressortir que cette prise en charge est effectuée en sus du forfait annuel de soins ; que, dès lors, les juges du fond, qui n'étaient pas liés par des circulaires dépourvues de portée obligatoire, ont exactement décidé que la maison de retraite n'était pas tenue de restituer à la Caisse les paiements litigieux ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, pour dire que la caisse devait prendre en charge les produits pharmaceutiques prescrits, la décision attaquée retient que le forfait global de soins couvre les médicaments et les produits usuels afférents aux traitements d'entretien dispensés dans une section de cure médicale ;
Attendu, cependant, que dans ses conclusions, la maison de retraite indiquait ne pas contester le reversement du coût de la pharmacie, tandis que celles de la Caisse, en prenant acte, demandaient la condamnation de la maison de retraite au seul paiement des frais médicaux ;
Que dès lors, en statuant sur le chef de demande initiale relatif aux produits pharmaceutiques, le tribunal a modifié les termes du litige dont il était saisi par les dernières conclusions ; qu'il a ainsi violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'il y a lieu de mettre fin au litige conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile en appliquant la règle de droit appropriée, la maison de retraite de Sainte-Mère-l'Eglise ne contestant pas, tant dans ses conclusions devant le tribunal des affaires de sécurité sociale que dans son mémoire en défense devant la Cour de Cassation, devoir rembourser le coût des produits pharmaceutiques ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré le directeur de la maison de retraite de Sainte-Mère-l'Eglise bien fondé à refuser de restituer le montant du remboursement des produits pharmaceutiques et a dit que la caisse devait en supporter la charge, le jugement rendu le 8 septembre 1994, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Lô ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
CONDAMNE la maison de retraite de Sainte-Mère-l'Eglise à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Manche la somme de 88,20 francs du chef du coût des produits pharmaceutiques.