Attendu, selon le jugement attaqué, que la société Le Moulin de Modenheim, dont la réclamation tendant au remboursement de sommes qu'elle avait payées au titre de la taxe parafiscale de stockage des céréales entre le 1er juillet 1986 et le 31 mai 1988 n'avait pas reçu de réponse, a assigné le directeur des services fiscaux du Haut-Rhin pour obtenir l'annulation de cette décision et le dégrèvement sollicité ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les auteurs du pourvoi reprochent au jugement d'avoir déclaré cette demande recevable, alors, selon le pourvoi, que, dès lors que l'Administration, après le dépôt de la déclaration céréales effectué par le collecteur, émet un document dénommé soit " avertissement ", soit " avis de recouvrement ", le collecteur agréé doit assortir sa réclamation du document émis par l'Administration, à peine d'irrecevabilité ; qu'en décidant que la production d'un document émanant de l'Administration n'était pas nécessaire pour assurer la recevabilité de la réclamation et qu'une simple pièce établie par le commissaire aux comptes de la société collectrice suffisait à justifier du versement ou de la retenue de la taxe, les juges du fond ont violé les dispositions de l'article R. 193-1 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la taxe de stockage ne donne pas lieu à l'établissement d'un rôle, ni, lorsqu'elle est acquittée dans les délais légaux, à celui d'avis de mise en recouvrement, le Tribunal a pu statuer comme il a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 9 à 12 du traité de Rome ;
Attendu que pour décider que la taxe parafiscale de stockage constitue une imposition équivalente à un droit de douane, le Tribunal énonce qu'une taxe qui est perçue à l'importation de certains produits et est remboursée à la fabrication de ces produits en territoire national a ce caractère, relève que le décret qui l'institue prévoit que " les produits dérivés des céréales importés ou exportés donnent lieu respectivement à la perception ou au remboursement de la taxe compte tenu des quantités de céréales correspondantes prévues par les règlements de la Communauté économique européenne " et en déduit que seuls sont soumis à la taxe les produits qui sont importés ;
Attendu qu'en tirant une telle conclusion de prémisses qui, en l'absence de toute indication sur le régime applicable aux produits dérivés d'origine nationale commercialisés en France, ne l'impliquaient en rien, le Tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
Et, sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 12 et 95 du traité de Rome ;
Attendu que pour déclarer, à la demande de la société Le Moulin de Modenheim, la taxe incompatible avec le droit communautaire, le jugement retient qu'à supposer qu'elle ne soit pas équivalente à un droit de douane elle serait une imposition intérieure discriminatoire au sens de l'article 95 du Traité à raison de l'affectation d'excédents au financement de mesures d'intervention ne profitant qu'aux productions nationales ;
Attendu qu'en appliquant, sans faire de distinction selon l'origine, nationale ou non, des produits taxés, les mêmes principes pour apprécier la validité de la taxe au regard de l'article 95 et de l'article 12 du Traité, le Tribunal n'a pas justifié sa décision au regard des articles susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 24 mars 1995, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Mulhouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Toulouse.