Sur le moyen unique, pris en sa première branche, et en la seconde, qui n'est pas nouvelle :
Attendu que M. X..., qui est domicilié et exerce son activité en France, a demandé à l'URSSAF le remboursement des sommes qu'il estime avoir indûment payées au titre de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) ; que la cour d'appel (Dijon, 8 janvier 1998) l'a débouté de sa demande ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen, 1° qu'un Etat membre de la Communauté européenne ne peut instituer de discrimination de nature à porter atteinte à la liberté de circulation des travailleurs, laquelle comporte la liberté d'établissement et de prestation de services ; que dans la mesure où l'Acte unique européen a décidé la constitution d'un " marché intérieur comportant un espace sans frontières intérieures ", l'application du Traité instituant la communauté européenne ne peut plus être réservée aux seuls travailleurs franchissant une frontière intérieure ; qu'ainsi, les personnes qui restent travailler dans leur Etat d'origine peuvent s'opposer, en invoquant les libertés fondamentales garanties par le Traité, aux discriminations à rebours, par lesquelles l'Etat membre où elles sont établies les traite de façon plus sévère que les travailleurs migrants ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé qu'il s'évince de l'article 13, paragraphe 2 du règlement 1408-71 du 14 juin 1971, tel que modifié par le règlement n° 1390-81, du 12 mai 1981 que les travailleurs frontaliers qui exercent leur activité hors de France sont soumis de plein droit à la seule législation sociale de l'Etat où ils travaillent ; qu'il en résulte qu'une personne qui réside en France et qui travaille dans un autre Etat membre n'est pas tenue au regard du droit communautaire de payer la CSG et la CRDS ; que dès lors , la France ne peut valablement, sauf à créer une discrimination à rebours au sein du marché intérieur, assujettir au paiement des cotisations sociales les personnes qui travaillent en France et y ont leur domicile fiscal ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a pourtant jugé que M. X..., qui habite et travaille en France, devait payer la CSG et la CRDS parce qu'il exerce une activité sur le territoire français et qu'il a son domicile fiscal en France ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 7, 48, 52 et 59 du Traité instituant la Communauté européenne, 13 de l'Acte unique européen des 17 et 28 février 1986 et 13 du Règlement CEE n° 1408-71 du 14 juin 1971 ; et alors, 2° qu'aux termes de l'article 7 du pacte international de New York relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, du 19 décembre 1966, auquel la France a adhéré le 29 janvier 1981, toute personne a le droit de jouir de conditions de travail justes et favorables qui assurent notamment à tous les travailleurs un salaire juste et équitable et une rémunération égale pour un travail de valeur égale sans distinction aucune ; que l'article 7 dudit Pacte reconnaît le droit à toute personne à la sécurité sociale, y compris les assurances sociales ; que l'article 2.2 de ce Pacte prohibe toute discrimination dans les droits ci-dessus fondée notamment sur l'origine nationale ou sur " toute autre situation " ; qu'il résulte de ces textes que toute personne habitant en France ne peut être soumise à des cotisations sociales, telles que la CSG ou la CRDS, de façon discriminatoire par rapport à d'autres personnes habitant en France ; qu'en jugeant néanmoins que M. X..., qui habite et travaille en France, doit payer la CSG et la CRDS, bien que d'autres personnes qui, comme lui, habitent en France, ne sont pas soumises au regard du droit communautaire à ces cotisations sociales parce qu'elles travaillent dans un pays voisin, la cour d'appel a violé les textes ci-dessus ;
Mais attendu, d'une part, que, selon l'article L. 131-6 du Code de la sécurité sociale, il est institué une contribution sociale sur les revenus d'activité des personnes considérées comme domiciliées en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu ; que l'article 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 énonce qu'une contribution pour le remboursement de la dette sociale est ajoutée sur les revenus des personnes visées à l'article L. 131-6 précité ; qu'il résulte de ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de justice des communautés, qu'en raison de l'affectation sociale de ces deux contributions, celles-ci entrent dans le champ d'application de l'article 13 du règlement n° 1408-71 du 14 janvier 1971, du Conseil des Communautés, de sorte qu'elles ne s'appliquent pas aux travailleurs domiciliés en France et qui exercent leur activité dans un autre Etat membre ;
Attendu, d'autre part, que n'est pas discriminatoire, au sens des textes précités, l'application d'un traitement différent à des personnes se trouvant dans une situation dissemblable, dès lors que la différence de traitement est en rapport direct avec l'objet des dispositions qui l'ont établie ;
Et attendu que la cour d'appel a retenu, à bon droit, que M. X..., domicilié en France, doit se voir appliquer la législation sociale de l'Etat français en tant qu'il exerce en France son activité salariée, de même que les travailleurs frontaliers domiciliés en France sont soumis à la seule législation sociale de l'Etat membre où ils exercent leur activité, de sorte que la différence de traitement est en rapport avec l'objet social des dispositions litigieuses ; que, par ce seul motif, l'arrêt est légalement justifié ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu à renvoi préjudiciel :
REJETTE le pourvoi.