REJET du pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse, chambre correctionnelle, en date du 11 janvier 2001, qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 30 000 francs d'amende, et a prononcé sur l'action civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 221-6, alinéa 1, du Code pénal, 121-3 du même Code tel que modifié par la loi du 10 juillet 2000, 485 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'homicide involontaire sur la personne de Y... et l'a condamné à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende ;
" aux motifs que tous les éléments du dossier sont en faveur de l'accident caractérisé par la compression de l'abdomen qui fait obstacle à l'irrigation normale du muscle cardiaque puis du cerveau avec le risque d'entraîner des complications neurologiques : cette compression a du reste laissé une marque matérielle objectivée par l'observation de l'anesthésiste ci-dessus rappelée ; envisagé par la littérature spécialisée commentée par les experts, ce type d'accident peut être évité par le choix d'une table d'opération appropriée, celle dite de "Maquet" choisie par le docteur X..., notamment parce qu'il n'y en avait pas d'autre de disponible, n'étant pas la plus recommandée par rapport du moins à cet objectif en ce qu'elle n'assure pas un appui des épaules susceptible de relayer celui de la zone sternale ; mais que, en tout cas, l'existence d'un tel risque nécessite de la part du chirurgien et de l'anesthésiste une extrême attention au positionnement adéquat de la patiente avant le début de l'intervention ; qu'à cet égard les deux praticiens ont précisé qu'ils avaient eux-mêmes avec l'aide du personnel soignant, installé Y... sur la table, et les experts considèrent effectivement que le concours du chirurgien et de l'anesthésiste est nécessaire en raison de la technicité du geste ; exposant qu'aucun élément du dossier ne permet d'imputer à l'un ou à l'autre un positionnement défectueux à l'origine, les docteurs X... et Z... émettent l'hypothèse, qu'à supposer celui-ci établi, il soit survenu progressivement en cours d'intervention, ce qui les exonérerait de toute responsabilité du fait que le travail opératoire en général et l'occultation par les champs en particulier auraient rendu impossible toute révélation à leurs yeux de cette anomalie ; qu'une telle argumentation ne saurait pourtant être retenue : l'intérêt vital connu des praticiens, qui s'attache à l'évitement de toute compression abdominale aurait dû les conduire à une vigilance accrue que ce soit à l'origine ou en cours d'intervention et ce, alors qu'ils n'utilisaient pas le matériel le plus adéquat ; que la survenance du processus qui sera fatal à la patiente selon un lien de causalité directe et certain dénote à tout le moins une négligence dont les deux prévenus ne peuvent sérieusement faire admettre que, pendant l'intervention, l'obstacle lié à la présence des champs opératoires et des matériels d'intubation était de nature à lui enlever tout caractère fautif : il leur appartenait à cet égard de prendre, même à l'avance, toutes dispositions utiles, au besoin en ayant recours à l'aide des autres personnes devant assister ou ayant assisté à l'acte opératoire ; que l'ensemble des éléments et circonstances de fait relevés au terme d'une instruction suffisante à la manifestation de la vérité à laquelle une nouvelle expertise n'ajouterait rien, est exclusif de la part des deux praticiens de toute diligence, normal compte tenu de leur mission respective de chirurgien et d'anesthésiste compétents dans un domaine hautement spécialisé, l'un et l'autre, comme étaient en droit de l'attendre la patiente et sa famille, dotés des pouvoirs et des moyens normaux en pareille circonstance, aucune défaillance n'ayant été mise en évidence à cet égard ;
" alors que, d'une part, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 2000 modifiant l'article 121-3 du Code pénal, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer, que le docteur X... n'a pas causé directement de dommage mais aurait contribué à créer la situation qui a permis sa réalisation en ne prenant pas à l'avance "toutes dispositions utiles" ; qu'en conséquence, en se bornant, pour déclarer le docteur X... coupable d'homicide involontaire, a retenir qu'il avait commis une négligence en relation avec le dommage sans constater ni qu'il avait violé de façon délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ni qu'il avait commis une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des dispositions nouvelles de la loi du 10 juillet 2000 et des textes visés au moyen " ;
" alors que, d'autre part et en toute hypothèse, le docteur X... aurait-il même causé directement le dommage la cour d'appel n'a pour autant nullement caractérisé une maladresse, imprudence, ou négligence de sa part ; qu'elle s'est en effet borné à affirmer qu'il appartenait au docteur X... de prendre à l'avance toutes dispositions utiles, au besoin en ayant recours à l'aide des autres personnes devant assister ou ayant assisté à l'acte opératoire, pour éviter le déplacement progressif du malade sur la table d'opération au cours de l'intervention, déplacement occulté par les champs opératoires, sans préciser quelles dispositions auraient pu être prises ; que la cour d'appel a déduit l'existence d'une négligence de la simple survenance du processus qui s'est révélé malheureusement fatal à la patiente et a ainsi violé l'article 226-1, alinéa 1er, du nouveau Code pénal " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Y..., opérée d'une scoliose, le 24 juin 1992, par X..., chirurgien hospitalier, a présenté, le lendemain, des difficultés respiratoires et un hématome cérébral ;
Qu'après un épisode comateux, de multiples complications et des séquelles neurologiques, elle est décédée le 24 avril 1994, à la suite d'un arrêt cardio-respiratoire ;
Attendu que, pour déclarer X... coupable d'homicide involontaire, la cour d'appel retient que, selon l'expertise médico-légale, le décès de la patiente est dû au grave processus de détresse neurologique observé immédiatement après l'intervention chirurgicale ; que les juges relèvent que cet état de choc périopératoire a pour origine une compression de l'abdomen qui a fait obstacle à l'irrigation normale du muscle cardiaque, puis du cerveau, due à un mauvais positionnement de l'opérée sur la table d'opération mal adaptée à ce type d'intervention ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que X... n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient compte tenu de la nature de sa mission et de sa fonction, de sa compétence ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions, a constaté que le prévenu a causé directement le dommage et a, ainsi, justifié sa décision au regard des articles 121-3 et 221-6 du Code pénal, tant dans leur rédaction antérieure à la loi du 10 juillet 2000, que dans leur rédaction issue de cette loi ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.