AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 30 janvier 2003) que, le 24 août 1994, la société BNP Bail Nation Equipement a consenti à la société Serra, franchisée de la société Sidec sous l'enseigne "Pains et Friandises", un crédit bail destiné à l'acquisition de divers matériels de boulangerie, pour un prix total de 438 300 francs, garanti par un nantissement du fonds de commerce ; que, par acte du 24 janvier 1994, M. X... s'est constitué caution solidaire de la société Serra, à concurrence de la somme de 688 246,71 francs, couvrant le principal, les indemnités, frais et accessoires dus au titre du contrat de crédit bail; que la société Serra ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, les 28 août et 17 septembre 1997, la société BNP Bail Nation Equipement, aux droits de laquelle est la société BNP Paribas Lease Group, a déclaré sa créance et a assigné M. X... en paiement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné, en sa qualité de caution de la société Serra, à verser la somme de 267 742,64 francs à la société BNP Paribas Lease, au titre du crédit-bail déclaré valide, alors, selon le moyen, que les notaires, huissiers, greffiers, avoués, avocats, ne peuvent agir sur un acte, registre ou effet de commerce non écrit sur papier timbré du timbre prescrit ou non visé pour timbre ; que pour rejeter le moyen soulevé par M. X... qui avait soulevé la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité à agir de la société BNP Paribas Lease, faute de timbre apposé sur son acte de caution, la cour d'appel a affirmé que cette disposition légale ne l'empêcherait pas de condamner à paiement un débiteur ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 895 du Code général des impôts ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que si les dispositions de l'article 899 du Code général des impôts soumettent au droit de timbre les actes de cautionnement, l'article 895 du même Code contient seulement interdiction aux greffiers, avoués et aux officiers publics, ainsi qu'aux avocats d'agir sur un acte ou un registre non écrit sur papier timbré ; qu'il en résulte que les parties peuvent se prévaloir d'un acte de cautionnement, fût-il non revêtu du timbre ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, qu'est intermédiaire en opération de banque toute personne qui, à titre de profession habituelle, met en rapport les parties intéressées à la conclusion d'une opération de banque sans se porter ducroire à la condition d'être titulaire d'une carte professionnelle ; que M. X... avait fait valoir que la société Sidec qui avait fait signer les documents de la société BNP Lease sans carte professionnelle, ce qui était de nature à entacher de nullité l'ensemble de l'opération de crédit-bail assortie de son engagement de caution et à voir déclarer opposables à cette société de crédit, les manoeuvres diligentées par cette société Sidec ; que la cour d'appel, qui n'a pas procédé aux recherches sollicitées de nature à établir le rôle exact d'intermédiaire conseil joué par la société Sidec, sans la carte professionnelle requise à peine de nullité des actes établis par ses soins, a privé son arrêt de base légale au regard des articles 65 de la loi du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit et 11 alinéa 2 de la loi du 28 décembre 1966 ;
Mais attendu que l'arrêt relève que les attestations produites ne font état que du rôle joué par la société Sidec dans l'implantation des enseignes "Pains et Friandises" laquelle, selon un témoignage, promettait à ses franchisés de "s'occuper de tout", ce qui implique la recherche d'une solution de financement du matériel sans pour autant établir que cette société agissait en qualité d'agent de la société BNP Lease ou de courtier en opérations de banque ; qu'il retient encore que le seul fait que l'acte de crédit bail ait été signé par la société BNP Lease le 6 septembre 1994, alors qu'il avait été signé par les sociétés Sidec et Serra dès le 24 août, ne peut suffire à établir cette délégation de pouvoirs, dès lors que l'instruction d'un dossier de crédit par un établissement financier précède la signature de l'acte par cet établissement ; qu'en l'état de ses constatations et appréciations, la cour d'appel a effectué les recherches qui lui étaient demandées ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt du rejet de son action en responsabilité à l'encontre de la société BNP Lease, alors, selon le moyen :
1 ) qu'une société de crédit-bail est tenue à l'instar de tout professionnel à une obligation de renseignement et de conseil renforcée à l'égard de preneurs néophytes ; que, tout en constatant que la société BNP Lease avait consenti un crédit-bail à M. X..., par le truchement de la société Sidec, la cour d'appel qui a cependant dégagé cette société de crédit-bail de tout manquement à son obligation de conseil et d'information au motif inopérant que M. X... aurait contracté avec la société Sidec, n'a pas tiré les conséquences de ses observations au regard de l'article 1135 du Code civil ;
2 ) que toute organisme bancaire engage sa responsabilité professionnelle à l'égard des cautions, lorsqu'il consent un crédit à un preneur, sans avoir préalablement étudié le dossier de financement ;
qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la circonstance que le contrat de crédit-bail avait été conclu une semaine après la livraison du matériel au crédit preneur, n'était pas de nature à établir que la société BNP Lease avait donné son accord de financement, à partir des seules affirmations de la société Sidec, sans examen de la situation effective de la société Serra, crédit emprunteur, ce qui était constitutif d'une faute de nature à engager sa responsabilité professionnelle à l'égard des cautions, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que l'arrêt constate, par motifs adoptés, que M. X... verse aux débats un document, établi par la société Sidec, faisant état de prévisions de rentabilité et d'un plan de financement avec un apport personnel de MM. Y... et X... de 340 000 francs ; qu'il relève encore que l'activité de la société s'était poursuivie pendant trois ans avant le prononcé de la procédure collective ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que l'établissement de crédit n'avait pas financé une activité dépourvue de toute viabilité, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches impropres à établir une faute de la part de cet établissement, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... à payer à la société BNP Paribas Lease groupe la somme de 1 800 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux février deux mille cinq.