AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Angers, 3 février 2004), Mme X... a été engagée en 1972 en qualité d'employée par la société de contrôle d'exploitation des transports auxiliaires, aux droits de laquelle est la société Géodis BM ; que son lieu de travail était à Saint-Pierre-des-Corps (Indre-et-Loire) et qu'elle a été mutée à Angers (Maine-et-Loire) le 12 mars 1999 ; qu'ayant refusé sa mutation à Avrillé (Maine-et-Loire), qui lui avait été proposée les 22 décembre 2000 et 13 février 2001 en raison de la fermeture de l'établissement d'Angers, elle a été licenciée le 20 mars 2001 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande en paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1 / que le secteur géographique à l'intérieur duquel le salarié peut être mobilisé sans son accord préalable ne peut se définir que par rapport au lieu de travail initial mentionné dans le contrat de travail, l'employeur ne pouvant éloigner légitimement le salarié de son lieu de travail initial par mutations successives entrant chacune dans un secteur géographique différent ; qu'il appartenait en conséquence à la cour d'appel d'apprécier le second transfert du lieu de travail de la salariée, par rapport au lieu de travail initial mentionné dans le contrat de travail, et non par rapport au lieu de travail résultant du premier transfert ; qu'en affirmant néanmoins que l'exécution du contrat de travail était à Angers depuis mars 1999, de sorte que le transfert à Avrillé devait être considéré à partir d'Angers et non pas de Saint-Pierre-des-Corps, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé, violant les dispositions de l'article L. 121-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
2 / qu'il résultait des conclusions de Mme X... que la salariée avait fait l'objet de deux mutations géographiques en l'espace de 18 mois, mutations qui avaient eu pour conséquence de porter son temps de trajet de quelques minutes à une moyenne de 6 heures par jour ; qu'il s'en déduisait nécessairement que l'employeur avait abusé du pouvoir de direction qui lui était conféré, ôtant en conséquence au refus de la salariée un caractère fautif justifiant son licenciement ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions pourtant déterminantes de la solution du litige, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ;
3 / qu'il résulte des dispositions des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 du Code civil, et L. 212-4-3, alinéa 5, du Code du travail que lorsqu'un changement proposé par l'employeur n'est pas compatible avec le respect de la vie privée et familiale, le salarié peut légitimement le refuser ; qu'en affirmant néanmoins que le changement d'exécution du lieu de travail devait être apprécié de façon objective et nullement en fonction des contraintes personnelles ou familiales du salarié, la cour d'appel a méconnu les dispositions des textes susvisés ;
Mais attendu que la cour d'appel, après avoir retenu que le contrat de travail de l'intéressée ne comportait aucune clause relative au lieu de travail et constaté que l'affectation qui lui avait été proposée se trouvait dans la "couronne urbaine" du chef-lieu de département où elle était affectée, c'est-à-dire dans le même secteur géographique, a estimé que la mutation ne constituait qu'une modification des conditions de travail qui ne pouvait être refusée ; qu'elle a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, que le licenciement de la salariée avait une cause réelle et sérieuse ;
Et sur la quatrième branche du moyen :
Attendu que sous le couvert d'un grief de défaut de réponse à conclusions, le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande ; que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du nouveau Code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille six.