LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Aix-en-Provence, 25 juin 2007), qu'un jugement du tribunal d'instance, du 27 mai 2002, a condamné solidairement Mauricette X..., dont l'ayant droit est M. Y..., et Mme Z..., sa locataire, à procéder à l'enlèvement, sous astreinte, de divers aménagements faits par cette dernière dans une cour grevée d'une servitude non aedificandi au profit de l'immeuble appartenant à Mme A... et prenant appui sur celui-ci ; que Mme Z..., mise en redressement judiciaire, le 24 avril 2003, a bénéficié d'un plan de redressement par voie de continuation arrêté le 10 février 2004 ; que, le 7 mai 2005, Mme A..., a assigné Mme Z... et M. Y... pour faire constater le défaut d'exécution du jugement du 27 mai 2002 et les voir condamner solidairement à enlever les installations litigieuses, sous astreinte, et à lui verser des dommages-intérêts ; que Mme A... a relevé appel du jugement du tribunal d'instance ayant rejeté ses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à Mme A... la somme de 5 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte, alors, selon le moyen, que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; que la fixation d'une astreinte définitive pour contraindre le débiteur à une obligation de faire née antérieurement au jugement d'ouverture entraîne pour celui-ci le paiement d'une somme d'argent ; que, la créance de Mme A... étant née avec le jugement du 27 mai 2002 qui avait prononcé l'astreinte provisoire et étant ainsi antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de Mme Z... du 24 avril 2003, celle-ci ne pouvait être condamnée à payer une somme d'argent au titre de la liquidation de cette astreinte ; qu'en statuant comme elle a fait la cour d'appel a violé l'article L. 621-40 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 12 juillet 2005 ;
Mais attendu que l'arrêt constate que le jugement ordonnant l'astreinte est intervenu alors que Mme Z... était maîtresse de ses biens et que depuis le 10 février 2004, date du jugement ayant arrêté son plan de redressement par voie de continuation judiciaire, elle était à la tête de ses affaires ; qu'ayant ainsi fait ressortir que le 20 juin 2005, jour d'introduction de la demande de Mme A..., la règle de l'arrêt des poursuites individuelles avait cessé de s'appliquer, la cour d'appel, a par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et, sur le second moyen :
Attendu que Mme Z... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à enlever un panneau accolé contre le mur appartenant à Mme A..., alors, selon le moyen, que l'astreinte est liquidée par le juge qui l'a ordonnée s'il reste saisi ou s'il s'en est expressément réservé le pouvoir ; qu'appelée à liquider l'astreinte prononcée par le jugement du 27 mai 2002, la cour d'appel qui ne pouvait modifier le dispositif de cette décision en y ajoutant une condamnation à enlever un panneau a violé l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Mais attendu que le tribunal d'instance est compétent pour connaître des actions possessoires ; qu'ayant été saisi d'un trouble autre que celui dont le jugement du 27 mai 2002 avait ordonné la cessation, il était compétent, non seulement pour liquider l'astreinte dont il s'était réservé le contentieux, mais encore pour ordonner la cessation du trouble résultant de l'apposition du panneau litigieux survenue depuis ce jugement, en assortissant à cet effet sa décision d'une astreinte ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme A... la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blanc, avocat aux conseils de Mme Z...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST REPROCHE à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Mme Z... à payer à Mme A... la somme de 5.000 au titre de la liquidation de l'astreinte,
AUX MOTIFS QU'à la date du 7 janvier 2004, qui était celle du constat de l'huissier de justice, il était établi que le jugement du 27 mai 2002 n'avait pas été respecté ; que cette date du 7 janvier 2004 était postérieure au jugement de redressement judiciaire du 24 avril 2003 concernant Mme Z... ; qu'ainsi les articles L.621-43 et suivants du code de commerce relatifs à la procédure de déclaration de créance n'avaient pas à être appliqués et que Mme A... n'avait pas à déclarer sa créance ; que, de plus, Mme Z... avait bénéficié d'un plan de continuation le 10 février 2004 et était réputée in bonis ;
ALORS QUE le jugement d'ouverture du redressement judiciaire interdit toute action en justice de la part des créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; que la fixation d'une astreinte définitive pour contraindre le débiteur à une obligation de faire née antérieurement au jugement d'ouverture entraîne pour celui-ci le paiement d'une somme d'argent ; que, la créance de Mme A... étant née avec le jugement du 27 mai 2002 qui avait prononcé l'astreinte provisoire et étant ainsi antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective de Mme Z... du 24 avril 2003, celle-ci ne pouvait être condamnée à payer une somme d'argent au titre de la liquidation de cette astreinte (violation de l'article L.621-40 du Code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 12 juillet 2005).
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST REPROCHE à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Mme Z... à enlever un panneau accolé contre le mur de Mme A...,
AUX MOTIFS QU'il était établi, d'une part, que le jugement du 27 mai 2002 n'avait pas été respecté et, d'autre part, que de nouveaux éléments étaient installés en contravention avec la servitude non aedificandi sur la partie de cour,
ALORS QUE l'astreinte est liquidée par le juge qui l'a ordonnée s'il reste saisi de l'affaire ou s'il s'en est expressément réservé le pouvoir ; qu'appelé à liquider l'astreinte prononcée par le jugement du 27 mai 2002, le juge ne pouvait modifier le dispositif de cette décision en y ajoutant une condamnation à enlever un panneau (violation de l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991).