LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé par M. Y... le 1er juillet 2005 en qualité d'attaché commercial, a été licencié pour faute grave le 20 septembre 2005 ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L.1232-6 du code du travail ;
Attendu que pour décider que le licenciement du salarié était abusif, l'arrêt retient que le grief relatif aux rapports journaliers est insuffisamment précis ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que le fait pour le salarié de rédiger des rapports journaliers inexploitables, comme ne contenant notamment aucun compte-rendu détaillé des visites effectuées, en dépit des rappels à l'ordre de l'employeur constitue un motif de licenciement matériellement vérifiable qui peut être précisé et discuté devant les juges du fond, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur la seconde branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. Y... à payer à M. X... diverses sommes pour licenciement abusif, l'arrêt rendu le 4 novembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize avril deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Blanc, avocat aux conseils pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que Monsieur X... bénéficiait de la classification II-2 de la convention collective de la publicité et condamné Monsieur Y... à lui payer la somme de 22.695 € à titre de rappel de salaires, outre les congés payés y afférents,
Aux motifs que la convention collective de la publicité prévoyait trois niveaux de classification, niveaux I, II et III, comprenant chacun des sous-niveaux ; que Monsieur X... demandait à bénéficier du niveau II-2, alors qu'il existait un sous-niveau II-1, mais que Monsieur Y... ne revendiquait nullement que la prétention soit limitée à ce sous-niveau ; que le niveau II était applicable aux techniciens et agents de maîtrise, le sous-niveau II-2 concernant le personnel commercial ayant la responsabilité de la prospection et du suivi de clientèle dans un ou plusieurs centres de distribution, traitant les commandes et habilité à signer les contrats de vente pour le compte de l'entreprise, conformément aux directives de celle-ci ; qu'il résultait du contrat de travail que la «principale fonction sera le démarchage auprès de la clientèle, la prospection de nouveaux clients, et suivant le besoin une aide terrain pour le contrôle et la distribution» ; qu'il résultait de la plaquette de présentation de l'activité de l'entreprise que Monsieur X... était présenté aux clients comme leur interlocuteur ; qu'il résultait de la lettre de licenciement elle-même que l'employeur reprochait un manque de résultat de prospection ; que Monsieur Y... ne saurait donc réduire, pour les besoins de la discussion, les fonctions de son salarié à une simple activité de «distribution de prospectus principalement publicitaires» ; que l'absence de diplômes n'était pas un critère de compétence limitée ; que la classification I-3, comme employé, correspondait à une fonction de simple assistant commercial, sédentaire, d'un commercial lui-même en charge de la gestion des clients ; que les fonctions réellement exercées par Monsieur X..., avec détermination d'un champ géographique de prospection, répondaient au contraire à la définition du niveau II-2 ;
Alors que la classification d'un salarié, au sein d'une convention collective, dépend des fonctions réellement exercées ; qu'après avoir rappelé que le sous-niveau II-2 de la convention collective de la publicité concernait «le personnel commercial ayant la responsabilité de la prospection et du suivi de clientèle dans un ou plusieurs centres de distribution. Traite les commandes, est habilité à signer les contrats de vente pour le compte de l'entreprise, conformément aux directives de celle-ci», la cour d'appel, qui s'est bornée à analyser certains des termes du contrat de travail du salarié, de la plaquette de présentation de l'activité de l'entreprise et de la lettre de licenciement, ce qui était insusceptible de caractériser en quoi le salarié rapportait la preuve qui lui incombait que «les fonctions réellement exercées par lui répondent…à la définition du niveau II-2 », a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et de la grille des critères définissant le système de classification des qualifications professionnelles de la convention collective de la publicité.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement de Monsieur X... ne reposait pas sur une faute grave, était abusif, et condamné Monsieur Y... à lui payer les sommes de 3.072,52 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, 2.652 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;
Aux motifs que la lettre concernait aux dires de l'employeur un refus de respect de directives et une absence de résultat ; que cette dernière était cependant présentée (page 2, 1er paragraphe de la lettre) comme «oubliée» ; qu'en tout état de cause, aucun objectif n'avait été fixé d'un commun accord ; que le refus de respect des directives visait le contenu des rapports journaliers, un refus de relancer téléphoniquement les prospects, un refus de contacter l'employeur deux fois par semaine, l'usage du véhicule personnel et une non restitution de matériel ; que le grief relatif à l'utilisation du véhicule était manifestement inopérant, en présence d'un contrat de travail prévoyant une telle utilisation et en l'absence de tout avenant supprimant cette utilisation ; que la prétendue interdiction d'utilisation était sans objet, et l'évocation supplémentaire, dans la lettre de licenciement, d'un défaut de justification d'assurance ne reposait sur aucune preuve d'obligation de présentation du document, alors au surplus que des indemnités kilométriques avaient bien été servies ; que pour le surplus, l'employeur se référait clairement à sa lettre du 25 mars 2005, «redéfinissant les fonctions…conformément à la fonction dont vous vous réclamiez» ; qu'elle constituait sans ambiguïté une définition unilatérale nouvelle du contrat, par modification du contrat initial notamment quant à la fixation d'objectifs chiffrés, et était inopposable au salarié ; que surabondamment, le grief sur les rapports journaliers, existants mais «inexploitable» était vague, celui tenant aux appels téléphoniques aux clients se heurtait à l'absence de mise à disposition d'un téléphone portable, dès lors que la remise d'une carte téléphonique, seulement prévue «pour communiquer avec les services administratifs», ne pouvait sérieusement y suppléer s'agissant d'un commercial en permanence en déplacement, et le grief de refus de restitution de matériel se heurtait pour sa part à l'absence de preuve d'une réclamation antérieure ; que ces griefs étaient mal fondés ; que s'agissant enfin du refus de contact de l 'employeur les lundi et mercredi, l'obligation résulterait d'une lettre du 26 juillet 2005, adressée alors que le salarié venait d'être en congé maladie, et juste avant ses vacances, de sorte que la procédure de licenciement conduite à son encontre dès son retour ne pouvait avoir, à supposer le défaut d'exécution démontré, ce qui n'est pas le cas, sérieusement eu celui-ci pour motif disciplinaire ; qu'il résultait de l'ensemble de ces éléments qu'aucune mauvaise volonté délibérée n'est établie et que l'employeur ne rapportait pas la preuve de la faute grave qui lui incombait ;
Alors 1°) que reprocher au salarié la rédaction de rapports journaliers inexploitable en dépit des rappels à l'ordre de l'employeur constitue un motif de licenciement précis ; qu'en ayant décidé au contraire que le grief sur les rapports journaliers, existants mais inexploitables, était «vague», la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail ;
Alors 2°) que la faute privative du préavis résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, et ne suppose ni intention maligne ni comportement volontaire ; qu'en ayant énoncé «qu'aucune mauvaise volonté délibérée » n'était établie pour décider que «l'employeur ne rapporte pas la preuve de la faute grave qui lui incombe », la cour d'appel a violé les articles L. 1233-3 et 1234-1 du Code du travail.