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22/09/2010 | FRANCE | N°08-21313

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 22 septembre 2010, 08-21313


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que la Caisse fédérale du Crédit mutuel Nord Europe (la CFCMNE) est associée commanditaire minoritaire de la Banque Delubac et compagnie (la Banque) ; que les statuts de cette dernière comportent une clause compromissoire prévoyant, en cas de litige avec un de ses associés, la désignation d'un arbitre par chacune des parties dans les trente jours de la mise en demeure adressée par l'autre partie ainsi que la saisine, par voie de requête,

du président du tribunal de commerce en cas d'absence de cette désigna...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que la Caisse fédérale du Crédit mutuel Nord Europe (la CFCMNE) est associée commanditaire minoritaire de la Banque Delubac et compagnie (la Banque) ; que les statuts de cette dernière comportent une clause compromissoire prévoyant, en cas de litige avec un de ses associés, la désignation d'un arbitre par chacune des parties dans les trente jours de la mise en demeure adressée par l'autre partie ainsi que la saisine, par voie de requête, du président du tribunal de commerce en cas d'absence de cette désignation ; qu'un litige étant survenu et la CFCMNE n'ayant pas désigné son arbitre dans les délais, la Banque a obtenu la désignation d'un arbitre pour le compte de son adversaire, par ordonnance sur requête du 6 janvier 2004 ; que, statuant sur l'appel formé contre une ordonnance du président du tribunal de commerce ayant refusé de rétracter l'ordonnance sur requête, la cour d'appel de Nîmes, statuant comme en matière de référé, a notamment, par arrêt du 3 novembre 2005, d'abord dit que la disposition des statuts de la Banque prévoyant la désignation d'un arbitre par voie d'ordonnance sur requête était réputée non écrite, puis rétracté l'ordonnance sur requête du 6 janvier 2004, ensuite dit n'y avoir lieu à désignation d'un arbitre hors la saisine de la juridiction en la forme des référés conformément aux dispositions de l'article 1457 du code de procédure civile ; que, saisi par les deux parties de demandes contraires, le président du tribunal de commerce d'Annonay, par ordonnance du 2 mai 2006 a, en particulier, désigné un arbitre pour le compte de la CFCMNE ; que celle-ci ayant formé un appel nullité contre cette ordonnance, la cour d'appel de Nîmes par arrêt du 20 septembre 2007, a, d'abord, reprenant les dispositions de son précédant arrêt, rétracté une ordonnance du 23 avril 2005 désignant un arbitre puis, avant dire droit, sur la recevabilité de l'appel nullité interjeté contre l'ordonnance du 2 mai 2006, rendue en la forme des référés, sur la demande de désignation d'un arbitre, relevé d'office la fin de non-recevoir tirée du défaut de respect du délai et de la forme du contredit imposés à l'appel pour excès de pouvoir d'une décision rendue au visa de l'article 1444 du code de procédure civile ;

Attendu que la CFCMNE fait grief à l'arrêt attaqué (Nîmes, 11 septembre 2008) d'avoir déclaré irrecevable son appel nullité, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 1457 du code de procédure civile, en son alinéa 2, ne soumet au régime du contredit de compétence que l'appel formé contre l'ordonnance du président du tribunal déclarant n'y avoir lieu à désignation d'un arbitre pour l'une des causes prévues à l'article 1444, alinéa 3, du même code ; qu'en appliquant cette disposition à l'hypothèse, qu'il ne prévoit pas, dans laquelle l'excès de pouvoir commis par le président du tribunal ayant désigné un arbitre ouvre un appel nullité à l'encontre de son ordonnance, par dérogation à l'alinéa 1er de l'article 1457 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé par fausse application l'alinéa 2 de ce texte ;

2°/ qu'à supposer même que l'appel nullité formé contre la décision par laquelle le président du tribunal désigne un arbitre relève des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 1457 du code de procédure civile, il en résulterait seulement que cet appel nullité doit être formé dans le délai prévu en matière de contredit de compétence, les règles du contredit n'ayant, pour le surplus, pas vocation à s'appliquer ; de sorte qu'en déclarant l'appel nullité formé par la CFCMNE irrecevable bien qu'ayant constaté que celui-ci avait été interjeté le 16 mai 2006 contre une ordonnance du président du tribunal de commerce d'Annonay du 2 mai 2006, c'est-à-dire dans le délai de quinze jours prévu en matière de contredit de compétence, la cour d'appel aurait en toute hypothèse violé les dispositions de ce texte ;

Mais attendu que l'arrêt retient à juste titre, d'abord, que l'ordonnance par laquelle le président du tribunal de commerce, statuant en la forme des référés, désigne un arbitre n'est, aux termes de l'article 1457, alinéa 1er , du code de procédure civile, pas susceptible de recours, hormis l'appel nullité pour excès de pouvoir ; ensuite, que l'inobservation des délais d'exercice d'une voie de recours et des formes exigées constitue une fin de non-recevoir devant, selon l'article 125 du même code, être soulevée d'office ; enfin, que l'appel des décisions par lesquelles le juge d'appui refuse de désigner un arbitre pour une cause autre que celle prévue à l'article 1444, alinéa 3, du code de procédure civile, doit, en application de l'article 1457, alinéa 2, de ce code, être formé, instruit et jugé comme en matière de contredit de compétence ; qu'étant donnée la proximité de ces décisions avec celles taxées d'excès de pouvoir, la cour d'appel en a exactement déduit que l'appel nullité de ces dernières devait être interjeté dans les délais et les formes du contredit ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la CFCMNE aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux septembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils, pour la Caisse fédérale du Crédit mutuel Nord Europe

En ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel nullité interjeté le 16 mai 2006 par le Crédit Mutuel contre l'ordonnance du président du tribunal de commerce d'Annonay statuant en la forme de référé le 2 mai 2006 en ce qu'il avait désigné Monsieur X... en qualité d'arbitre et rejeté sa demande subsidiaire de constater la désignation de Monsieur le professeur Y... en qualité d'arbitre, ainsi que la demande plus subsidiaire tendant à voir ce dernier désigné en qualité d'arbitre par cette juridiction commerciale ;

Aux motifs qu'il résulte des dispositions de l'article 1457 du nouveau code de procédure civile, que l'appel des décisions par lesquelles le président du tribunal de grande instance ou du tribunal de commerce refuse de désigner un ou des arbitres pour une cause autre que celle prévue à l'article 1444 alinéa 3 du nouveau code de procédure civile, doit être formé dans les formes et le délai fixé en matière de contredit de compétence ; qu'ainsi que l'a rappelé la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt du 10 juillet 2003 (publié au Bulletin II, n° 235 p. 195), puis le 29 janvier 2004, il en va de même lorsque la décision de désignation contestée en appel procède d'un excès de pouvoir, ainsi que l'allègue en l'espèce le Crédit Mutuel, au soutien de la recevabilité de son appel-nullité ; que contrairement à ce que soutient la Caisse fédérale de Crédit Mutuel nord Europe, il n'y a pas lieu de distinguer selon que ce recours tend à contester la compétence de la juridiction de la juridiction arbitrale ou est fondé sur un autre moyen, le texte légal ni aucun texte réglementaire n'opérant une telle distinction, que l'arrêt susvisé de la Cour de cassation n'effectue pas non plus ; que comme dans la jurisprudence susvisée, la décision attaquée a aussi été rendue en application d'une clause compromissoire fixant un délai pour désigner son arbitre, ce qui était l'objet de la contestation des parties ; que contrairement à ce qu'elle allègue, au visa de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme et du droit à bénéficier d'un procès civil équitable, cette forme de recours n'est pas illusoire et ne correspond pas, en son cas, à une absence d'ouverture de voie de recours en cas d'excès de pouvoir, au motif qu'elle ne pourrait articuler aucun moyen quant à la compétence d'une autre juridiction à l'appui de son contredit ni désigner celle-ci ; qu'en effet la procédure de contredit de compétence, prévue aux articles 82 et suivants du code de procédure civile, exige que le recours soit, à peine d'irrecevabilité, motivé et remis au secrétariat de la juridiction qui a rendu la décision dans les 15 jours de celle-ci, mais nullement qu'y figure nécessairement la désignation d'une autre juridiction compétente ;

Que cette exigence de désignation d'une autre juridiction compétente est prévue à l'article 75 du code de procédure civile, uniquement pour les exceptions d'incompétence soulevées par les parties et n'a d'autre sanction que l'irrecevabilité de l'exception d'incompétence soulevée, ce qui est sans objet ni effet dans le cas soumis à la Cour, qui ne concerne nullement l'invocation d'une exception d'incompétence mais seulement un recours pour excès de pouvoirs soumis à la forme et au délai de la procédure de contredit ; qu'en l'espèce l'appel-nullité pour excès de pouvoir a été interjeté à l'encontre de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce d'Annonay, statuant en référé, par déclaration au greffe de la cour d'appel de Nîmes le 16 mai 2006 ; que les conditions tenant à la remise d'un acte d'appel-nullité motivé au secrétariat de la juridiction ayant statué en première instance dans le délai de 15 jours n'ont pas été respectées, au vu des pièces versées aux débats ; qu'il convient en conséquence de déclarer irrecevable l'appel-nullité interjeté le 16 mai 2006 par la Caisse fédérale de Crédit Mutuel nord Europe contre l'Ordonnance du président du tribunal de commerce d'Annonay, statuant en la forme des référés le 2 mai 2006, en ce qu'il a désigné Monsieur X... en qualité d'arbitre et rejeté sa demande subsidiaire de constater la désignation de Monsieur le professeur Y... en qualité d'arbitre, ainsi que la demande plus subsidiaire tendant à voir ce dernier désigner en qualité d'arbitre par cette juridiction commerciale ;

1°/ Alors que l'article 1457 du code de procédure civile, en son alinéa 2, ne soumet au régime du contredit de compétence que l'appel formé contre l'ordonnance du président du tribunal déclarant n'y avoir lieu à désignation d'un arbitre pour l'une des causes prévues à l'article 1444, alinéa 3, du même code ; qu'en appliquant cette disposition à l'hypothèse, qu'il ne prévoit pas, dans laquelle l'excès de pouvoir commis par le président du tribunal ayant désigné un arbitre ouvre un appel nullité à l'encontre de son ordonnance, par dérogation à l'alinéa 1 er de l'article 1457 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé par fausse application l'alinéa 2 de ce texte ;

2°/ Et alors, subsidiairement, qu'à supposer même que l'appel-nullité formé contre la décision par laquelle le président du tribunal désigne un arbitre relève des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 1457 du code de procédure civile, il en résulterait seulement que cet appel-nullité doit être formé dans le délai prévu en matière de contredit de compétence, les règles du contredit n'ayant, pour le surplus, pas vocation à s'appliquer ; de sorte qu'en déclarant l'appel-nullité formé par le Crédit Mutuel irrecevable bien qu'ayant constaté que celui-ci avait été interjeté le 16 mai 2006 contre une ordonnance du président du tribunal de commerce d'Annonay du 2 mai 2006, c'est-à-dire dans le délai de 15 jours prévu en matière de contredit de compétence, la cour d'appel aurait en toute hypothèse violé les dispositions de ce texte.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-21313
Date de la décision : 22/09/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ARBITRAGE - Convention d'arbitrage - Clause compromissoire - Désignation des arbitres - Désignation par le président du tribunal - Ordonnance - Voies de recours - Détermination - Portée

ARBITRAGE - Convention d'arbitrage - Compromis - Désignation des arbitres - Désignation par le président du tribunal - Ordonnance - Voies de recours - Détermination - Portée

L'ordonnance par laquelle le président du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, désigne un arbitre n'est, aux termes de l'article 1457, alinéa 1er, du code de procédure civile, pas susceptible de recours, hormis l'appel-nullité pour excès de pouvoir qui doit alors être interjeté dans les formes et délais du contredit de compétence


Références :

article 1457, alinéa 1er, du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 11 septembre 2008

Sur la forme et le délai de recours s'agissant d'une décision de refus de désignation pour une des causes prévues à l'article 1444, alinéa 3, du nouveau code de procédure civile, à rapprocher :2e Civ., 10 juillet 2003, pourvoi n° 01-16551, Bull. 2003, II, n° 235 (cassation partielle sans renvoi)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 22 sep. 2010, pourvoi n°08-21313, Bull. civ. 2010, I, n° 175
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, I, n° 175

Composition du Tribunal
Président : M. Pluyette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Pagès
Rapporteur ?: Mme Pascal
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.21313
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