Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 21 janvier 2009), que Mme X..., engagée le 1er février 2005 en qualité d'employée de bureau par l'EURL Jean-Michel Y... a été convoquée le 21 septembre 2006 pour le 2 octobre 2006 à un entretien préalable au licenciement qui n'a pas eu de suite, puis, le 3 novembre 2006, à un second entretien fixé au 14 novembre 2006 ; qu'elle a été licenciée pour faute grave le 20 novembre suivant ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire ce licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que :
1° / l'employeur qui convoque un salarié à un entretien préalable au licenciement et renonce alors à poursuivre la procédure ne se prive pas par là du droit d'invoquer les faits antérieurs à cet entretien à l'appui d'un licenciement prononcé ultérieurement, qu'en retenant que, dès lors qu'il n'était pas établi qu'il les ait découverts après le 2 octobre 2006, l'employeur ne pouvait se prévaloir des fréquents retards de la salariée, de ses abandons de poste répétitifs, de la prise de congés payés sans son accord, du fait que celle-ci entretenait un chat dans son bureau et l'y laissait enfermé le week-end malgré son opposition formelle, et encore de l'inexécution des tâches incombant à la salariée, la cour d'appel a violé les articles L. 1331-1 et L. 1333-1, du code du travail ;
2° / les juges du fond qui retiennent que les faits reprochés à un salarié ne constituent pas une faute grave sont tenus de rechercher s'ils ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en se bornant à juger que « le licenciement pour fautes graves n'apparaît pas en conséquence fondé contrairement à ce qu'a décidé le premier juge », sans rechercher si ceux des faits reprochés à la salariée et dont elle ne déniait pas la réalité ne pouvaient pas constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu d'abord, que selon l'article L. 1332-2 du code du travail, la sanction disciplinaire envisagée par l'employeur ne peut intervenir plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien préalable ; que l'expiration de ce délai interdit à l'employeur aussi bien de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable pour les mêmes faits que de sanctionner disciplinairement ces faits, sauf si une procédure conventionnelle devait être suivie dans l'intervalle, ou si l'employeur démontre avoir dû procéder à des investigations conformes à l'intérêt du salarié et rendues nécessaires par ses déclarations au cours de l'entretien préalable ; qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que l'employeur ne démontrait pas qu'à l'exception du grief tiré de l'utilisation abusive du téléphone portable et de la divulgation à l'un de ses correspondants de l'emploi du temps de son employeur, les faits reprochés à la salariée dans la lettre de licenciement étaient survenus ou avaient été portés à sa connaissance postérieurement au 2 octobre 2006, date du premier entretien préalable ;
Attendu ensuite que, constatant par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la divulgation d'une information sur l'emploi du temps de son employeur n'était pas établie, et retenant par des motifs non critiqués que l'utilisation du téléphone cellulaire mis à la disposition de la salariée n'était abusive ni en elle-même ni en raison des conditions de son utilisation ou des destinataires des appels, elle a décidé, exerçant le pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Jean-Michel Y... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Jean-Michel Y... à verser à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocats, la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Jean-Michel Y...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de Virginie X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné l'EURL Jean-Michel Y... à lui payer une indemnité de préavis et des dommages-intérêts,
AUX MOTIFS QUE Jean-Michel Y... a convoqué Madame X... le 2 octobre 2006 pour un entretien préalable au licenciement ; qu'en l'état des explications fournies, il a néanmoins été décidé d'accorder à la salariée le bénéfice du doute (sic) et de ne lui notifier aucune sanction ; que l'employeur, qui s'est placé sur le terrain disciplinaire en notifiant à Madame X... un licenciement pour fautes graves, ne peut valablement invoquer que des faits fautifs s'étant produits ou révélés postérieurement au 2 octobre 2006, date de la convocation au premier entretien préalable, puisqu'il a lui-même renoncé à poursuivre cette première procédure disciplinaire, reconnaissant ainsi que les faits dont il avait alors connaissance ne pouvaient justifier la sanction envisagée ; qu'ainsi, certains agissements, dont il n'est pas établi qu'ils sont survenus ou ont été découverts par l'employeur après le 2 octobre 2006, ne sauraient être invoqués à l'appui du licenciement, comme les fréquents retards de la salariée le matin à sa prise de service, le fait qu'elle ait, malgré l'interdiction faite, continué à nourrir un chat et enfermé celui-ci le week-end, dans le bureau, le temps perdu à se maquiller ou à jouer aux jeux sur l'ordinateur et l'inexécution de tâches lui incombant telles l'établissement des bons de commande, devis et factures ou la mise à jour du registre des entrées et sorties du personnel ; que le reproche qui lui est également fait de « s'être mise » en intempérie en septembre 2006 et d'avoir pris des congés payés sans l'accord préalable de l'employeur ne peut davantage être retenu, s'agissant de faits antérieurs à l'engagement de la première procédure de licenciement ; que pour le surplus, l'employeur communique les factures détaillées des consommations téléphoniques du portable mis à la disposition de Madame X..., pour les mois de septembre et octobre 2006, ainsi qu'un procès-verbal de constat établi les 4 et 11 octobre 2006 par Maître A..., huissier de justice ; qu'il en résulte, en premier lieu, qu'en septembre 2006, la salariée a passé 99 appels et 129 SMS soit à Madame B..., l'épouse en instance de divorce du gérant soit à Madame C..., la mère d'un salarié de l'entreprise décédé ; que 61 appels et 36 SMS ont été envoyés à ces dernières au mois d'octobre 2006 ; que certains de ces appels, bien que de courte durée, ont été passés pendant le temps de travail et qu'en outre, la salarié a utilisé son téléphone pour adresser des e-mails ou appeler des numéros spéciaux (comme le n° 72600 recevant les SMS de la chaîne M6 pour les différents jeux organisés par cette chaîne) ; qu ‘ il ressort cependant des attestations concordantes d'une ancienne salariée de l'entreprise et de l'épouse du gérant de l'EURL que Madame X... était autorisée à utiliser à des fins personnelles le téléphone portable mis à sa disposition par l'employeur ; que de plus la plupart des appels et SMS envoyés, l'ont été en dehors des horaires de travail et il n'est pas justifié que le fonctionnement de l'entreprise ait été altéré par les quelques appels et SMS passés par la salariée aux temps et lieu de travail ; que le licenciement pour fautes graves de la salariée n'apparaît pas en conséquence fondé contrairement à ce qu'a décidé le premier juge ;
1° ALORS QUE l'employeur qui convoque un salarié à un entretien préalable au licenciement et renonce alors à poursuivre la procédure ne se prive pas par là du droit d'invoquer les faits antérieurs à cet entretien à l'appui d'un licenciement prononcé ultérieurement, qu'en retenant que, dès lors qu'il n'était pas établi qu'il les ait découvert après le 2 octobre 2006, l'employeur ne pouvait se prévaloir des fréquents retards de la salariée, de ses abandons de poste répétitifs, de la prise de congés payés sans son accord, du fait que celle-ci entretenait un chat dans son bureau et l'y laissait enfermé le week-end malgré son opposition formelle, et encore de l'inexécution des tâches incombant à la salariée, la cour d'appel a violé les article L. 122-40 et L. 122-43, devenus L. 1331-1 et L. 1333-1, du Code du travail ;
2° ALORS QUE les juges du fond qui retiennent que les faits reprochés à un salarié ne constituent pas une faute grave sont tenus de rechercher s'ils ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en se bornant à juger que « le licenciement pour fautes graves n'apparaît pas en conséquence fondé contrairement à ce qu'a décidé le premier juge », sans rechercher si ceux des faits reprochés à la salariée et dont elle ne déniait pas la réalité ne pouvaient pas constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3, recodifié aux articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du Code du travail.