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05/04/2011 | FRANCE | N°10-81488

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 05 avril 2011, 10-81488


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Jean X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 12 février 2010, qui, pour outrage à personnes dépositaires de l'autorité publique, l'a condamné à 1 500 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 5 § 1, 5 § 2, 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme,

préliminaire, 63, 63-1, 591, 593 et 803 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Jean X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-7, en date du 12 février 2010, qui, pour outrage à personnes dépositaires de l'autorité publique, l'a condamné à 1 500 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 5 § 1, 5 § 2, 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 63, 63-1, 591, 593 et 803 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a rejeté les exceptions de nullité de la procédure ;

"aux motifs qu'il résulte du procès-verbal d'interpellation établi et signé par le gardien de la paix Y..., signé par les trois autres policiers présents, que le prévenu a outragé une première fois les fonctionnaires qui l'ont informé qu'il allait faire l'objet d'une verbalisation pour épanchement d'urine sur la voie publique et que s'il persistait dans ses propos outrageants, il serait conduit dans les locaux de police pour outrage à personne dépositaire de l'autorité publique ; qu'il a alors réitéré ses outrages ce qui a conduit à son interpellation dont il ne pouvait ignorer le motif ; que le prévenu affirme qu'il n'était pas sous l'empire d'un état alcoolique, qu'il avait bu, avec son fils, une bouteille de vin rosé au déjeuner et qu'il était en pleine possession de ses moyens ; qu'il invoque, tout en contestant certains de ses éléments, un document établi par l'hôpital Cochin le 21 octobre à 18h10 intitulé ‘cru-compte rendu des urgences' selon lequel son Glasgow à 15 ainsi qu'un rapport d'expertise du Dr Z... selon lequel : lorsque le chiffre est de 15, comme pour M. X..., cela veut dire que l'état de conscience est tout à fait normal (bonnes réponses verbales et bien orientées, bonne mobilité des membres faite à la demande et ouverture des yeux spontanée) ; que ce test normal ne permet pas d'éliminer une éventuelle imprégnation alcoolique ; qu'il est à noter que dans le rapport de Cochin il est fait état que M. X... reconnaît son état d'ébriété mais il n'est rapporté aucun signe clinique d'un tel état ; que sur ma demande M. X... dit qu'il n'était pas ivre lors des faits ; compte tenu des documents vus, il semble que M. X... était en état de comprendre la notification de ses droits ; que le document précité établi par le service des urgences de Cochin mentionne : motif : certificat de non admission ; état d'ivresse aigüe… Conclusion Patient amené au CNA au 5e pour ivresse et CNA pas d'ATCD en dehors pb d'arthrose, ivresse reconnue par le patient ; qu'il résulte du procès-verbal d'interpellation que le prévenu présentait certaines caractéristiques de l'ivresse à savoir les yeux brillants et une haleine sentant fortement l'alcool' et qu'il a refusé se soumettre à une vérification de l'imprégnation alcoolique, ce dernier point étant confirmé par les déclarations du brigadier chef A... ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments, pour certains contradictoires, que le prévenu se trouvait sous l'empire d'un état alcoolique dont il a refusé la vérification ; que dès lors il n'est pas démontré qu'il ait été retenu de manière arbitraire ; que le prévenu soutient que l'égalité des armes n'a pas été respectée car il a été entendu sans l'assistance d'un avocat et sans avoir pris connaissance des faits qui lui étaient reprochés ; que, cependant qu'il ne pouvait ignorer avoir été interpellé en raison des propos outrageants formulés à l'encontre des fonctionnaires de police et non pour avoir uriné sur la voie publique ; qu'alors, sa garde à vue a été levée sur instruction du parquet sans qu'il ait été entendu par les enquêteurs, son audition s'est effectuée le 19 décembre 2006 soit près de deux mois après les faits, sans qu'il soit placé sous le régime de la garde à vue, dans un cadre qui ne peut être assimilé à celui de l'instruction préliminaire menée par la police au sens de la jurisprudence européenne ; qu'en outre, l'absence d'assistance d'un avocat, qui n'est pas contraire à la loi, n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne dans la mesure où le prévenu s'est borné à contester les faits reprochés et à mettre en cause le comportement des fonctionnaires de police ; que le prévenu affirme avoir été victime de sévices ; que le certificat médical qu'il produit n'apparaît pas suffisamment probant alors qu'il a été rédigé deux jours après la fin de la garde à vue, par un médecin généraliste et non par un spécialiste des urgences médico-judiciaires auquel le plaignant pouvait parfaitement s'adresser ; que l'existence des violences policières alléguées par M. X... n'est pas corroborée
par les pièces du dossier et se trouve contredite d'une part par les déclarations concordantes et circonstanciées des policiers intervenants et par les conclusions du rapport de l'inspection générale des services ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'il y a lieu de rejeter les exceptions de nullité de la procédure ;

"1) alors que le simple fait que le parquet ait levé la mesure de garde à vue sans que l'intéressé ait été auditionné par la police suffit à démontrer son caractère injustifié au regard des nécessités de l'enquête ; qu'en refusant d'annuler ladite mesure, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"2) alors qu'en plaçant en garde à vue le prétendu suspect sans l'informer du motif de la mesure et en l'auditionnant sans l'assistance d'un avocat, les juges du fond ont manifestement méconnu les droits de la défense, corollaires du droit à un procès équitable ;

"3) alors qu'en refusant tout à la fois de se prononcer sur la nudité imposée à une personne privée de sa liberté et de présumer que les violences subies par elle, constatées par un certificat médical, avaient bien été infligées par la police, en se fondant sur un rapport sommaire de l'Inspection générale des services et sur le fait que le certificat médical n'émanait pas d'un spécialiste des urgences médicojudiciaires mais d'un médecin généraliste, la cour d'appel a méconnu les exigences légales et conventionnelles relatives à la prohibition absolue des mauvais traitements à l'égard d'une personne privée de sa liberté et ses règles particulières en matière probatoire ;

"4) alors qu'enfin a privé sa décision d'une motivation suffisante, la cour d'appel, qui n'a pas répondu au moyen de l'intéressé qui faisait état du menottage injustifié et inhumain qu'il avait subi lorsque, souffrant d'une pathologie ayant nécessité la pose d'une broche à l'épaule, il en avait informé la police qui l'avait entravé" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 21 octobre 2006, à 17 h 15, une patrouille de police a interpellé M. X..., qui, au cours d'un contrôle d'identité pour état d'ivresse manifeste, avait réitéré des propos outrageants ; que, conduit au commissariat de police, où il a refusé la vérification de son imprégnation alcoolique, il a été présenté, à 17 h 55, à l'officier de police judiciaire, qui l'a placé en garde à vue et qui a différé la notification de cette mesure et des droits y afférents, estimant que son état d'ivresse ne lui permettait pas d'en saisir pleinement la portée ; que, sur instruction du procureur de la République, cette mesure a été levée à 20 h 45, avant toute audition de l'intéressé, lequel a été entendu le 19 décembre 2006, après avoir répondu à la convocation des services de police ;

Attendu que, pour écarter les moyens de nullité présentés par M. X..., fondés sur l'irrégularité de sa garde à vue, la violation des droits de la défense et l'absence d'avocat lors de son audition, l'arrêt, après avoir analysé les pièces de la procédure ainsi que celles produites par le prévenu, prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dont il résulte que, lors de son placement en garde à vue, il existait à l'encontre de M. X... des indices laissant présumer qu'il avait commis une infraction, que celui-ci, se trouvait dans un état d'ivresse ne lui permettant pas de comprendre la portée de ses droits, qu'il n'a fait l'objet d'aucune violence policière, et qu'il a été entendu par les enquêteurs en dehors de toute mesure de contrainte, les griefs allégués ne sont pas encourus ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en ses troisième et quatrième branches, ne peut qu'être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a rejeté les exceptions de nullité du jugement ;

"aux motifs que le prévenu soutient que le jugement serait nul en raison de la violation des principes de l'égalité des armes et de l'accès à un tribunal indépendant et impartial ; que, cependant, la motivation succincte du jugement sur les nombreuses exceptions de nullité soulevées par le prévenu et leur rejet parfois implicite ne peuvent être assimilés à une absence de motivation ; que les critiques formulées à l'encontre du jugement concernent essentiellement l'absence de prise en compte, par la juridiction, de la thèse de M. X... ; que l'ensemble des exceptions de nullité étant soumis à l'examen de la cour, il n'y a pas lieu à l'annulation du jugement ;

"alors que la cour d'appel, qui a relevé le caractère succinct du jugement sur les exceptions de nullité soulevées par le prévenu ainsi que leur rejet parfois implicite (sic) devait nécessairement constater la nullité d'un jugement rendu en contradiction avec les exigences légales et conventionnelles en matière de motivation des décisions de justice et, en particulier, des décisions de condamnation" ;

Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que l'arrêt attaqué n'ait pas annulé le jugement, dès lors qu'en cas d'annulation, la cour d'appel aurait été tenue d'évoquer et de statuer au fond en application de l'article 520 du code de procédure pénale ;

Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 433-5 et 433-22 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a condamné le prévenu du chef d'outrage à personne dépositaire de la force publique ;

"aux motifs qu'en dépit des dénégations du prévenu, les faits d'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique sont établis par les déclarations concordantes et circonstanciées :
- des quatre policiers présents lors de son interpellation dont il résulte qu'il leur a déclaré à plusieurs reprises ‘vous m'emmerdez' et leur a demandé s'ils n'avaient pas ‘autre chose à foutre' ;
- de l'adjoint de sécurité Disant, du gardien de la paix Y... et du brigadier chef Mme A... dont il résulte qu'il a traité cette dernière de ‘connasse' ;
- de l'adjoint de sécurité Disant et du gardien de la paix Y... dont il ressort qu'à l'hôpital Cochin, il a miné des coups de tête à destination de l'adjoint de sécurité Disant et que lors du retour au commissariat il a déclaré à ce dernier "petit con, tu n'iras pas loin dans le métier" ; que ces propos, adressés à des policiers en uniforme dans l'exercice de leurs fonctions sont de nature à porter à la dignité et au respect dû à la fonction des fonctionnaires de police ; que la douleur invoquée par M. X... du fait de son menottage et de la présence d'une broche dans le bras droit est postérieure aux premiers propos outrageants et ne saurait constituer une cause d'exonération de sa responsabilité, celle-ci pouvant tout au plus être atténuée ; qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement sur la déclaration de culpabilité et de le réformer sur la peine, une peine de 1 500 euros d'amende apparaissant plus adaptée à la nature des faits et à la personnalité du prévenu, jamais condamné ;

"alors qu'en se fondant sur les seules déclarations policières, à la fois juge et partie, en dehors de tout élément extérieur, afin d'entrer en voie de condamnation à l'encontre du prévenu, la cour d'appel n'a pas préservé l'équilibre des droits des parties et, partant, a violé le droit à un procès équitable" ;

Attendu que, pour confirmer le jugement sur la déclaration de culpabilité, l'arrêt, qui a pris en compte, non seulement les déclarations des parties civiles, mais aussi les témoignages de leurs collègues, prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 000 euros la somme globale que M. X... devra payer à M. B..., Mme A... et M. Y... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Radenne conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Téplier ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-81488
Date de la décision : 05/04/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 05 avr. 2011, pourvoi n°10-81488


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.81488
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