LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 17 février 2010) et la procédure, que M. X... s'est vu notifier entre 1976 et 1980 plusieurs avis de mise en recouvrement au titre de divers impôts ; qu'il a fait l'objet le 20 mars 1979 d'une procédure de liquidation de biens ; qu'il a formé le 15 juillet 1999 une demande d'admission au bénéfice du dispositif de désendettement des rapatriés prévu par le décret du 4 juin 1999 ; que, par arrêt du 5 février 2002, la cour d'appel de Bordeaux a ordonné l'arrêt des effets de la liquidation des biens et le dessaisissement des organes de la procédure ; que, par décision du10 novembre 2005, la Commission nationale de désendettement des rapatriés installés dans une profession non salariée (la Conair) a déclaré inéligible la demande de M. X... ; que ce dernier a formé un recours contre cette décision ; qu'il a ensuite assigné le comptable des impôts du service des impôts d'Agen et le trésorier principal de Bordeaux rive gauche afin de voir notamment constater que les créances fiscales sont prescrites et ordonner la mainlevée des hypothèques inscrites sur ses immeubles et la suspension des poursuites ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande de suspension des poursuites et de mainlevée des hypothèques inscrites par le trésorier de Bordeaux rive gauche, alors, selon le moyen :
1°/ que M. X... dans ses conclusions s'était prévalu du bénéfice de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999, ce que le trésorier de Bordeaux rive gauche avait expressément retenu dans ses conclusions ainsi que le comptable des impôts du service des impôts des entreprises centralisateur d'Agen dans les siennes si bien qu'en énonçant au soutien de sa décision que M. X... n'aurait pas sollicité "le bénéfice de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999 mais uniquement celui des dispositions de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997", la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il résulte de l'application combinée des dispositions de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997, modifiées par l'article 25 de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 et complétées par l'article 5 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999, de l'article 21 de la loi de finances rectificative n° 99-1173 du 30 décembre 1999, modifié par l'article 62-4 de la loi de finances n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 que "les personnes qui ont déposé un dossier auprès d'une commission d'aide aux rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ou auprès de la Commission nationale de désendettement des rapatriés bénéficient de plein droit d'une suspension provisoire des poursuites engagées à leur encontre jusqu'à la décision définitive de l'autorité administrative compétente, jusqu'à la décision de l'autorité administrative ayant eu à connaître des recours gracieux contre celle-ci le cas échéant, ou, en cas de recours contentieux, jusqu'à la décision définitive de l'instance juridictionnelle compétente ; que ces dispositions s'imposent à toutes les juridictions, même sur recours en cassation, et s'appliquent aux procédures collectives et aux mesures conservatoires ainsi qu'aux dettes fiscales" ; qu'ainsi, la cour d'appel qui a rejeté la demande de suspension des poursuites présentée par M. X... sans rechercher, en réfutation des conclusions de l'exposant faisant valoir que le Conseil d'Etat était saisi de son recours contre la décision de la Conair du 17 novembre 2005, si l'autorité juridictionnelle compétente saisie avait définitivement statué sur le recours de M. X..., n'a pas justifié légalement sa décision au regard des textes susvisés ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que M. X... était seulement en droit de solliciter en application de l'article 21 de la loi de finance rectificative du 30 décembre 1999 et de l'article 62 de la loi de finance rectificative pour l'année 2000, la suspension des poursuites jusqu'à la décision de la Conair du 10 novembre 2005, et que, celle-ci ayant statué et aucun recours suspensif n'étant possible, s'agissant de créances fiscales, le tribunal a justement débouté M. X... de la demande qu'il a formée à ce titre ; qu'ainsi la cour d'appel, qui s'est prononcée sur la demande formée sur le fondement de ce texte, n'a pas méconnu les termes du litige ;
Et attendu, d'autre part, que le sursis de paiement et la suspension corrélative des poursuites, institués au profit de certains débiteurs par l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999, modifié par l'article 62-4 de la loi du 30 décembre 2000, pour les dettes fiscales, demeurent en vigueur soit jusqu'à la décision de l'autorité administrative compétente déclarant l'irrecevabilité ou l'inéligibilité de la demande d'admission, soit, si l'éligibilité de la demande a été reconnue, jusqu'à la notification de la décision de la Commission nationale de désendettement constatant l'échec de la négociation du plan d'apurement, ou la notification de la décision de la Commission nationale de désendettement rejetant la demande d'aide de l'Etat, ou la décision d'octroi de cette même aide, notifiée par le ministre chargé des rapatriés ; que la cour d'appel n'avait dès lors pas à procéder à la recherche demandée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à voir déclarer prescrites des dettes fiscales et à voir ordonner la mainlevée des hypothèques inscrites par le trésorier de Bordeaux rive gauche, alors, selon le moyen, qu'à supposer que, comme l'a énoncé l'arrêt attaqué, le litige se place uniquement dans le cadre de l'application de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997 et non de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999, il en résulterait alors que la demande formulée par M. X... auprès de la Conair le 15 juillet 1999 n'aurait pas concerné les dettes fiscales, si bien que, après cessation des effets de la procédure collective en suite de l'arrêt du 5 février 2002, le cours de la prescription aurait repris pour les dettes fiscales, et que celle-ci serait acquise au 14 avril 2006 ; qu'ainsi la cour d'appel aurait méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997, ensemble les articles 274 et 275 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant statué sur la demande formée en application de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999, le moyen est inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de suspension des poursuites, et de mainlevée des hypothèques inscrites par le TRESORIER DE BORDEAUX RIVE GAUCHE ;
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... ne sollicitant pas le bénéfice de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999 mais uniquement celui des dispositions de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997, il convient seulement de rechercher si ce texte est applicable dans la présente procédure ; qu'il ressort de l'alinéa 3 de cet article que la suspension provisoire des poursuites qu'il institue ne concerne pas les dettes fiscales qui sont expressément exclues du dispositif mis en place ; qu'en l'espèce il n'est pas discuté que les créances du Trésorier de Bordeaux Rive Gauche et du Comptable des Impôts d'Agen sont de nature fiscale ; que les dispositions de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997 ne s'appliquent donc pas dans la cause ; que la demande de suspension des poursuites par Monsieur X... sur le fondement de ce texte est dès lors mal fondée ; que Monsieur X... était seulement en droit de solliciter en application de l'article 21 de la loi de finance rectificative du 30 décembre 1999 et de l'article 62 de la loi de finance rectificative pour l'année 2000, la suspension des poursuites jusqu'à la décision de la CONAIR en date du 10 novembre 2005 ; que celle-ci ayant statué et aucun recours suspensif n'étant possible s'agissant de créances fiscales, le Tribunal a justement débouté Monsieur X... de la demande qu'il a formulée à ce titre ;
ALORS QUE, D'UNE PART, Monsieur X... dans ses conclusions (p. 7, paragraphes 3 et suivants, et p. 15, paragraphes 3 et 4) s'était prévalu du bénéfice de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999, ce que le TRESORIER DE BORDEAUX RIVE GAUCHE avait expressément retenu dans ses conclusions (p. 4 in fine) ainsi que le COMPTABLE DES IMPOTS DU SERVICE DES IMPOTS DES ENTREPRISES CENTRALISATEUR D'AGEN dans les siennes (p. 3 et 6 et suivantes) si bien qu'en énonçant au soutien de sa décision que Monsieur X... n'aurait pas sollicité « le bénéfice de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999 mais uniquement celui des dispositions de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997 », la Cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'il résulte de l'application combinée des dispositions de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997, modifiées par l'article 25 de la loi n° 98-1267 du 30 décembre 1998 et complétées par l'article 5 du décret n° 99-469 du 4 juin 1999, de l'article 21 de la loi de finances rectificative n° 99-1173 du 30 décembre 1999, modifié par l'article 62-4 de la loi de finances n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 que « les personnes qui ont déposé un dossier auprès d'une commission d'aide aux rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ou auprès de la Commission nationale de désendettement des rapatriés bénéficient de plein droit d'une suspension provisoire des poursuites engagées à leur encontre jusqu'à la décision définitive de l'autorité administrative compétente, jusqu'à la décision de l'autorité administrative ayant eu à connaître des recours gracieux contre celle-ci le cas échéant, ou, en cas de recours contentieux, jusqu'à la décision définitive de l'instance juridictionnelle compétente ; que ces dispositions s'imposent à toutes les juridictions, même sur recours en cassation, et s'appliquent aux procédures collectives et aux mesures conservatoires ainsi qu'aux dettes fiscales » ; qu'ainsi, la Cour d'appel qui a rejeté la demande de suspension des poursuites présentée par Monsieur X... sans rechercher, en réfutation des conclusions de l'exposant faisant valoir que le Conseil d'Etat était saisi de son recours contre la décision de la CONAIR du 17 novembre 2005, si l'autorité juridictionnelle compétente saisie avait définitivement statué sur le recours de Monsieur X..., n'a pas justifié légalement sa décision au regard des textes susvisés.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(Subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande tendant à voir juger prescrites des dettes fiscales, et à voir ordonner la mainlevée des hypothèques inscrites par le TRESORIER DE BORDEAUX RIVE GAUCHE ;
AUX MOTIFS QUE jusqu'à l'achèvement de la procédure collective de Monsieur X..., qui est intervenue suite à l'arrêt de cette Cour du 5 février 2002, la prescription a été interrompue ; que même si cet arrêt a ordonné l'arrêt total des effets de la liquidation judiciaire, il n'en reste pas moins qu'il n'a pas effectivement annulé les actes interruptifs de la prescription qui sont intervenus pendant cette période et notamment la production de créance du Trésorier ; que la prescription n'a donc pas joué jusqu'à la date du 5 février 2005 sus mentionnée ; qu'il importe peu à ce titre que le comptable du Trésor n'ait pas été privé de tout droit d'agir la production de la créance ayant interrompu la prescription jusqu'à la fin de la procédure collective ; que suite à la demande formulée par Monsieur X... auprès de la CONAIR le 15 juillet 1999, il n'était pas en droit de reprendre ses poursuites en recouvrement tant que celle-ci n'avait pas statué sur la demande ; que Monsieur X... ne peut à la fois avoir bénéficié de la suspension des poursuites prévue à l'article 100 de la loi du 31 décembre 1998 et invoquer la prescription pour la période correspondant à cette suspension ; que la prescription n'a pu courir du 15 juillet 1999 jusqu'à la décision de la CONAIR du 17 novembre 2005 ; que le comptable des impôts d'AGEN ayant accompli des actes de poursuites le 14 avril 2006, puis par actes d'huissier du 12 décembre 2007 et du 27 juillet 2007, il en résulte que la prescription n'a pas joué ;
ALORS QU'à supposer que, comme l'a énoncé l'arrêt attaqué, le litige se place uniquement dans le cadre de l'application de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997 et non de l'article 21 de la loi du 30 décembre 1999, il en résulterait alors que la demande formulée par Monsieur X... auprès de la CONAIR le 15 juillet 1999 n'aurait pas concerné les dettes fiscales, si bien que, après cessation des effets de la procédure collective en suite de l'arrêt du 5 février 2002, le cours de la prescription aurait repris pour les dettes fiscales, et que celle-ci serait acquise au 14 avril 2006 ; qu'ainsi la Cour d'appel aurait méconnu les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997, ensemble les articles 274 et 275 du Livre des procédures fiscales.