LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mohamed X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 6 juillet 2012, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 octobre 2012 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Leprey ;
Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de Me SPINOSI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LACAN ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 145, 201, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté le moyen de nullité tiré de la violation du délai maximum d'incarcération provisoire de quatre jours ouvrables et a refusé de prononcer la libération immédiate de l'exposant ;
" aux motifs qu'il résulte des éléments susexposés qu'il existe à l'encontre de M. X... des indices graves ou concordants rendant vraisemblable sa participation comme auteur ou complice à la commission des faits qui lui sont reprochés ; que, lors de sa présentation devant le juge des libertés et de la détention, à l'issue de son interrogatoire de première comparution du vendredi 22 juin 2012, la personne, mise en examen, a fait connaître à ce magistrat qu'elle souhaitait bénéficier d'un délai pour préparer sa défense, en application des dispositions des alinéa 7 et 8 de l'article 145 du code de procédure pénale ; que, faisant suite à cette demande, le juge des libertés et de la détention, a, par ordonnance du même jour, prescrit l'incarcération provisoire de la personne mise en examen, par application du texte susvisé et ce, jusqu'à sa comparution à son audience du mercredi 27 juin 2012 à 14 heures et qu'au terme du débat différé qui s'est tenu le mercredi 27 juin 2012 à partir de 14h15, M. X... a été placé en détention provisoire ; qu'il se déduit des dispositions de l'alinéa 8, de l'article 145 du code de procédure pénale que la personne mise en examen ayant fait connaître au juge des libertés et de la détention qu'elle sollicite un délai pour préparer sa défense doit comparaître à nouveau devant ce magistrat, si elle fait l'objet d'une ordonnance d'incarcération provisoire, dans un délai de quatre jours ouvrables ; qu'en l'espèce, la mention du juge des libertés et de la détention prescrivant l'incarcération provisoire de la personne mise en examen jusqu'à sa comparution à son audience du mercredi 27 juin 2012 à 14 heures ne peut avoir pour effet de fixer à cette date et surtout à cette heure le terme de la détention provisoire de la personne provisoirement incarcérée dès lors que, la détention provisoire, à ce titre, expirait le jeudi 28 juin 2012 à 00 heure, que la durée de la détention provisoire ne se calcule pas d'heure à heure et que, alors qu'il était régulièrement convoqué devant le magistrat des libertés et de la détention le mercredi 27 juin 2012 à 14 heures, M. X... devait se tenir à sa disposition dans les locaux du palais de justice attendant que l'audience commence alors qu'à cette date l'ordonnance prescrivant son incarcération provisoire et le mandat de dépôt y faisant corps restaient exécutoires, le débat contradictoire prescrit par les textes ayant été organisé avant l'expiration de la détention provisoire prescrite au titre des textes susvisés ;
1°) " alors que l'heure de comparution fixée par le juge des libertés et de la détention pour la tenue du débat différé n'est naturellement qu'indicative au regard des contraintes du cabinet de ce magistrat et que le débat en question a eu effectivement lieu avant le mercredi 27 juin 2012 à 00 heure, la personne mise en examen ne peut de surcroît arguer d'aucun grief dès lors que, par application des dispositions des alinéa 7 et 8 de l'article 145 du code de procédure pénale elle a comparu devant le juge des libertés et de la détention dans le délai de quatre jours ouvrables suivant son incarcération provisoire ; qu'il s'ensuit que M. X... est mal fondé à soutenir que le procès-verbal de débat contradictoire et l'ordonnance de placement en détention provisoire, en date du 27 juin 2012 seraient entachés de nullité et que la requête présentée par le conseil de ce dernier doit être rejeté ;
2°) " alors que, à la différence de la détention provisoire, en matière d'incarcération provisoire, le délai de la privation de liberté fixé par la loi est un délai maximum auquel il peut être spécifiquement dérogé ; qu'en l'espèce, l'incarcération provisoire de M. X... avait été expressément fixée, par ordonnance, jusqu'au mercredi 27 juin 2012 à 14 heures ; qu'en considérant que cette mention était seulement indicative quand il était acquis que le débat contradictoire différé avait eu lieu postérieurement à cette heure, la chambre de l'instruction, ne pouvait, sans contradiction, refuser d'annuler le procès-verbal de ce débat et, partant, prononcer la mise en liberté d'office de l'exposant " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., mis en examen le vendredi 22 juin 2012 des chefs précités, a sollicité, lors de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention, que lui soit accordé un délai pour préparer sa défense en application des dispositions de l'article 145, alinéa 7, du code de procédure pénale ; que le juge des libertés et de la détention a prescrit son incarcération provisoire jusqu'au 27 juin 2012 à 14 heures ; que la personne mise en examen a comparu de nouveau devant le juge des libertés et de la détention le mercredi 27 juin 2012, pour le débat contradictoire, à la suite duquel ce magistrat a ordonné son placement en détention ; qu'ayant interjeté appel de cette ordonnance, M. X... a excipé, dans le mémoire déposé devant la chambre de l'instruction, de la nullité de l'ordonnance de placement en détention et a demandé que cette juridiction constate qu'il était détenu sans droit ni titre depuis le 27 juin 2012 à 14 heures, alléguant au cours des débats qu'il aurait comparu après 14 heures devant le juge des libertés et de la détention ;
Attendu que, pour rejeter le moyen de nullité tiré de la violation du délai d'incarcération provisoire et confirmer l'ordonnance, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, la Cour de cassation a été mise en mesure d'exercer son contrôle sur la régularité de la procédure dès lors que le délai de l'article 145, alinéa 8, du code de procédure pénale se calcule de jour à jour et non d'heure à heure et que le débat différé critiqué a débuté au jour fixé par le juge des libertés et de la détention ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucune des dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 145-1, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. X... ;
" aux motifs que, sur le fond, il convient, alors que les agissements incriminés s'inscrivent dans un contexte de grande délinquance organisée, d'empêcher des concertations frauduleuses entre la personne mise en examen et ses coauteurs et complices ;
1°) " alors que, notamment, l'information ne fait que commencer et que la personne mise en examen a refusé de s'expliquer ; de garantir son maintien à la disposition de la justice dès lors qu'il a tenté de s'échapper lors de son interpellation, qu'il a déjà été lourdement condamné pour évasion et que la lourdeur de la peine encourue de vingt années d'emprisonnement pourrait l'inciter à ne pas se présenter alors qu'il semble disposer de contacts et de relais en Espagne et au Maroc ; que le risque de renouvellement des infractions est, par ailleurs, maximum alors que la personne mise en examen a déjà été condamnée à douze reprises dont deux fois les 21 juin 2006 et 29 mai 2009 par le tribunal correctionnel et la cour correctionnelle de Lyon à neuf années et six années d'emprisonnement, d'une part, pour des faits d'importation de stupéfiants et de contrebande et, d'autre part, d'évasion en bande organisée et de participation à une association de malfaiteurs, peines qu'il purgeait, lors de la commission des faits qui lui sont reprochés, sous le régime de la libération conditionnelle depuis le 11 avril 2011 ayant été à cette date, assigné à résidence sous surveillance électronique jusqu'au 10 octobre 2011, la libération conditionnelle prenant fin le 5 mai 2015 ; que, dans ces conditions, la détention provisoire de M. X... est entièrement justifiée tant par les nécessités de l'instruction qu'à titre de mesure de sûreté et qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un des objectifs fixés par l'article 144 du code de procédure pénale ci-dessus rappelés ; que, par ailleurs, une mesure de contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence sous surveillance électronique serait grossièrement insuffisante pour prévenir les risques ci-dessus rappelés quelles qu'en soient les modalités en ce qu'elles ne permettent aucunement de contrôler les contacts et relations de l'intéressé et de prévenir le risque de fuite ;
2°) " alors qu'en se contentant d'indiquer que la détention provisoire constitue l'unique moyen d'empêcher des concertations frauduleuses entre la personne mise en examen et ses coauteurs et complices, de mettre fin aux infractions ou d'en prévenir leur renouvellement ou de garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice sans faire état ni de considérations de fait et de droit sur le caractère insuffisant des obligations du contrôle judiciaire, ni d'éléments précis et circonstanciés propres à justifier la décision de mise en détention de M. X..., âgé de 36 ans, de nationalité française, chauffeur-livreur en situation de concubinage, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées, s'est déterminée par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-sept octobre deux mille douze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.