LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 septembre 2011), que la société Pewterpassion.com, spécialisée dans la promotion et la vente sur internet des produits de la société Saumon's, a, ainsi que cette dernière société, fait assigner la société Leguide.com, ayant pour objet le développement de sites internet, et demandé que celle-ci soit condamnée à identifier ses sites comme étant des sites publicitaires ainsi qu'à réparer le préjudice qu'elles imputaient aux pratiques déloyales et trompeuses de cette société ;
Attendu que la société Leguide.com fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à cette identification, alors, selon le moyen :
1°/ que toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle ; qu'une publicité en ligne est caractérisée par une démarche active de sollicitation de l'attention du public sur un bien ou sur un service ; qu'en l'espèce, la société Leguide.com soutenait dans ses conclusions que son site comparateur ne contenait aucune publicité puisqu'il reposait sur une attitude purement passive de la société Leguide.com, qui se contentait de répondre aux demandes d'information des internautes, sans aucune démarche active de sollicitation des consommateurs ; qu'en retenant pourtant que la société Leguide.com exerce une activité de prestataire de service publicitaire, sans nullement caractériser une quelconque démarche active de sollicitation de l'attention du public, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 20 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 ;
2°/ que toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle ; qu'une publicité en ligne est caractérisée par le contenu éminemment subjectif, car purement promotionnel, de l'information relative à un bien ou un service ; qu'en l'espèce, la société Leguide.com soutenait dans ses conclusions que son site comparateur ne contenait aucune publicité puisqu'il ne faisait que retranscrire le contenu totalement objectif des offres émises par les e-marchands référencés sans mettre particulièrement en valeur l'une de ces offres ; qu'en retenant pourtant que la société Leguide.com exerce une activité de prestataire de service publicitaire en retenant que le site comparateur "permet aux e.marchands bénéficiant du référencement prioritaire de voir leurs produits ou offres classés de façon prioritaire avant ceux des autres, ce qui assure de façon indirecte leur promotion", sans nullement caractériser le contenu promotionnel des offres des e-marchands référencés, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 20 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 ;
3°/ qu'une pratique commerciale peut être qualifiée de trompeuse ou de déloyale lorsqu'elle altère, ou est susceptible d'altérer, de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service ; que pour caractériser l'altération substantielle du comportement du consommateur, les juges du fond doivent rechercher concrètement, au besoin même d'office, si la pratique litigieuse a conduit un nombre significatif de personnes à acheter le produit sur la foi du message trompeur ; qu'en l'espèce, pour retenir que le système de référencement utilisé par les sites de la société Leguide.com constituerait une pratique commerciale trompeuse et déloyale, la cour d'appel a relevé que "la clientèle potentielle d'un commerçant pouvant être détournée vers des concurrents qui ont payé pour obtenir un référencement prioritaire" ; qu'en statuant ainsi par un motif purement abstrait sans rechercher concrètement si un nombre significatif de clients de la société Leguide.com avait été amené à acheter les produits faisant l'objet d'un référencement prioritaire plutôt que ceux ne faisant pas l'objet d'un tel référencement, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 120-1 du code de la consommation ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir constaté que, moyennant rémunération, la société Leguide.com permet aux e-marchands bénéficiant du référencement prioritaire de voir leurs produits ou offres classés de façon prioritaire avant ceux des autres, l'arrêt relève qu'il est nécessaire à l'internaute, pour être informé de la différence de classement entre e.commerçants "payants" ou non, de consulter les mots "en savoir plus sur les résultats" ou "en savoir plus" ou encore "espaces marchands" ; qu'en l'état de ces constatations desquelles elle a pu déduire, sans avoir à faire les recherches visées aux première et deuxième branches, que la société Leguide.com assurait de façon indirecte la promotion des produits ou services proposés par les e-marchands bénéficiant du référencement prioritaire et que, de ce fait, elle exerçait une activité de prestataire de service commercial et publicitaire, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant retenu que l'absence d'identification claire du référencement prioritaire est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur qui est orienté d'abord vers les produits et offres des e-marchands "payants" et ne dispose pas ainsi de critères objectifs de choix, ce dont elle a pu déduire, sans avoir à faire d'autre recherche, l'existence d'une pratique commerciale déloyale et trompeuse, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Leguide.com aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer aux sociétés Pewterpassion.com et Saumon's la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Leguide.com.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir :
- condamné la société LEGUIDE.COM, dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt et sous astreinte de 1 000 € par jour de retard, à identifier sur ses sites les espaces dans lesquels sont référencés de manière payante les marchands et les produits comme étant un contenu à caractère publicitaire, dans le respect des dispositions de l'article 20 de la loi du 21 juin 2004 ;
- condamné la société LEGUIDE.COM à payer aux sociétés SAUMON'S et PEWTERPASSION.COM la somme de 15 000 € à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QU' « la société Leguide.com fournit aux e.marchands des espaces sous formes de tableaux dans lesquels les marchandises sont inscrites par catégories de produits ou de prix pratiqués avec un lien permettant à l'internaute intéressé d'accéder au secteur marchand et de procéder à un achat, que moyennant rémunération, elle permet aux e.marchands bénéficiant du référencement prioritaire de voir leurs produits ou offres classés de façon prioritaire avant ceux des autres, ce qui assure de façon indirecte leur promotion ; que ce faisant, la société Leguide.com exerce une activité de prestataire de service commercial et publicitaire ; que c'est en vain qu'elle allègue que ses sites informent précisément le consommateur ; qu'en effet, il est nécessaire pour l'internaute de consulter les mots « en savoir plus sur les résultats » ou « en savoir plus » ou encore « espaces marchands » pour être informé de la différence de classement entre e.commercants « payants » ou non ; qu'elle ne satisfait donc pas à l'article 20 de la loi du 21 juin 2004 relative à la confiance dans l'économie numérique qui dispose que toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service en ligne doit pouvoir être clairement identifiée comme telle et doit rendre clairement identifiable la personne physique ou morale pour le compte de laquelle elle est réalisée ; qu'en conséquence, il convient de la condamner, sous astreinte, à identifier sur ses sites les espaces dans lesquels sont référencés de manière payante les e.marchands et leurs produits comme étant un contenu à caractère publicitaire ; que l'absence d'identification claire du référencement prioritaire est susceptible d'altérer de manière substantielle le comportement économique du consommateur qui est orienté d'abord vers les produits et offres des e-marchands « payants » et ne dispose pas ainsi de critères objectifs de choix ; qu'elle constitue une pratique trompeuse au sens des dispositions de l'article L. 121-1 du code de la consommation, de même qu'une pratique déloyale au sens de l'article L. 120-1 du même code, la clientèle potentielle d'un commerçant pouvant être détournée vers des concurrents qui ont payé pour obtenir un référencement prioritaire » ;
1/ ALORS QUE toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle ; qu'une publicité en ligne est caractérisée par une démarche active de sollicitation de l'attention du public sur un bien ou sur un service ; qu'en l'espèce, l'exposante soutenait dans ses conclusions que son site comparateur ne contenait aucune publicité puisqu'il reposait sur une attitude purement passive de la société LEGUIDE.COM, qui se contentait de répondre aux demandes d'information des internautes, sans aucune démarche active de sollicitation des consommateurs (conclusions, p. 26) ; qu'en retenant pourtant que la société LEGUIDE.COM exerce une activité de prestataire de service publicitaire, sans nullement caractériser une quelconque démarche active de sollicitation de l'attention du public, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 20 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 ;
2/ ALORS QUE toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle ; qu'une publicité en ligne est caractérisée par le contenu éminemment subjectif, car purement promotionnel, de l'information relative à un bien ou un service ; qu'en l'espèce, l'exposante soutenait dans ses conclusions que son site comparateur ne contenait aucune publicité puisqu'il ne faisait que retranscrire le contenu totalement objectif des offres émises par les e-marchands référencés sans mettre particulièrement en valeur l'une de ces offres (conclusions, p. 28 et s.) ; qu'en retenant pourtant que la société LEGUIDE.COM exerce une activité de prestataire de service publicitaire en retenant que le site comparateur « permet aux e.marchands bénéficiant du référencement prioritaire de voir leurs produits ou offres classés de façon prioritaire avant ceux des autres, ce qui assure de façon indirecte leur promotion » (arrêt, p. 8, dernier alinéa), sans nullement caractériser le contenu promotionnel des offres des e-marchands référencés, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 20 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 ;
3/ ALORS QU'une pratique commerciale peut être qualifiée de trompeuse ou de déloyale lorsqu'elle altère, ou est susceptible d'altérer, de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service ; que pour caractériser l'altération substantielle du comportement du consommateur, les juges du fond doivent rechercher concrètement, au besoin même d'office, si la pratique litigieuse a conduit un nombre significatif de personnes à acheter le produit sur la foi du message trompeur ; qu'en l'espèce, pour retenir que le système de référencement utilisé par les sites de la société LEGUIDE.COM constituerait une pratique commerciale trompeuse et déloyale, la Cour d'appel a relevé que « la clientèle potentielle d'un commerçant pouvant être détournée vers des concurrents qui ont payé pour obtenir un référencement prioritaire » (arrêt, p. 9, alinéa 4) ; qu'en statuant ainsi par un motif purement abstrait sans rechercher concrètement si un nombre significatif de clients de la société LEGUIDE.COM avait été amené à acheter les produits faisant l'objet d'un référencement prioritaire plutôt que ceux ne faisant pas l'objet d'un tel référencement, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 120-1 du Code de la consommation.