LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° G 12-15. 948 et A 12-21. 898 ;
Sur le moyen unique, identique, des deux pourvois :
Vu les articles L. 122-2, L. 433-1 et R. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'expulsion de M. X... ayant été pratiquée le 31 août 2010, un procès-verbal d'enlèvement de biens présentant une valeur marchande a été établi le 15 septembre 2010, par M. Y..., associé de la SCP Y...-B..., huissier de justice, ces biens étant transférés chez un commissaire-priseur ; qu'un procès-verbal d'enlèvement des biens sans valeur marchande comprenant des effets personnels et des documents a été établi le 16 septembre 2010 par l'huissier de justice, les biens étant transférés en un autre lieu ; que, précédemment, un procès-verbal de saisie-vente avait été dressé et signifié à M. X... ; que M. X... a sollicité, devant le juge de l'exécution, la condamnation de l'huissier de justice à des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par le fait de n'avoir pu récupérer ses effets personnels et sa documentation professionnelle que le 25 novembre 2010 ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient que les biens se trouvant dans le local avaient fait l'objet de plusieurs saisies mobilières, que le commissaire-priseur avait reçu deux avis à tiers détenteur et que l'huissier de justice ne disposait plus, à compter de la désignation du séquestre d'aucun pouvoir et d'aucune qualité pour restituer le mobilier et les effets personnels de M. X... ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indisponibilité résultant des mesures d'exécution forcées précédemment exercées ne pouvait porter sur les effets personnels de M. X..., que la personne expulsée est en droit d'obtenir la restitution de ses biens personnels pendant le délai d'un mois à compter de la signification du procès-verbal d'expulsion et que l'huissier de justice, seul responsable de l'exécution de la mesure d'expulsion, reste tenu de l'obligation de restitution, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. Y... et la SCP Y... et Mazure aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à verser à M. X... la somme globale de 2 500 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen identique produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur aux pourvois n° G 12-15. 948 et A 12-21. 898
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté un locataire expulsé de son habitation (M. X..., l'exposant) où avait été pratiquée à son encontre une saisievente, de sa demande tendant à voir l'huissier ayant poursuivi l'expulsion (Me Y... et la SCP Y...-B...) responsable de son préjudice consécutif à la remise tardive de ses effets personnels non saisis ;
AUX MOTIFS QUE le procès-verbal d'expulsion diligenté en exécution de l'ordonnance de référé du 19 novembre 2009 ordonnant l'expulsion de M. X... de son habitation sise à PARIS, avait été dressé le 31 août 2010 ; que la SCP Y...-B... avait établi le 16 mars 2010 un procès-verbal de saisie-vente en exécution de ladite ordonnance ; que, le 15 septembre 2010, il avait été procédé par le commissaire-priseur, Me Z..., en présence de l'huissier et d'un témoin, à l'enlèvement du mobilier présentant une valeur marchande ; que, le 16 septembre 2010, un nouveau procèsverbal d'enlèvement avait été établi concernant le mobilier sans valeur marchande qui avait été enlevé et transporté aux établissements GABARD à NEUILLY-SUR-MARNE ; qu'aux termes de l'article 201-3 du décret du 31 juillet 1992, la personne expulsée devait retirer les biens laissés sur place ou déposés par l'huissier en un lieu approprié dans le délai d'un mois à compter du procès-verbal d'expulsion ; qu'il s'agissait, aussi, d'un droit pour la personne expulsée ; que les demandes de M. X... aux fins de récupérer ses effets personnels et des documents professionnels avaient été formulées à la SCP Y...-B... par courrier du 20 septembre 2010 ; que celle-ci avait répondu le 21 septembre suivant que l'ensemble du mobilier avait fait l'objet d'un enlèvement par Me Z..., commissaire-priseur, les 15 et 16 septembre 2010, et que M. X... devait prendre attache dorénavant avec ce dernier pour une récupération de son mobilier ; qu'en effet, les biens se trouvant dans le local d'ailleurs occupé par M. X... et M. A... avaient fait l'objet de plusieurs saisies mobilières ; que Me Z..., commissaire-priseur chargé de procéder à la vente du mobilier, avait reçu de la part du trésor public deux avis à tiers détenteur ; que, conformément à l'article 200 du décret du 31 juillet 1992, ces mesures d'exécution forcée impliquaient qu'à l'occasion des opérations d'expulsion un séquestre fût désigné concernant les biens situés dans le local ; qu'il appartenait au séquestre désigné en la personne de Me Z... de procéder, sous sa responsabilité, aux procèsverbaux des 15 et 16 septembre 2010 ; que d'ailleurs, le conseil de M. X... s'était adressé dès le 24 septembre 2010 à Me Z... afin de connaître les conditions de restitution du mobilier saisi et des modalités pratiques pour récupérer les effets personnels de son client ; que, le 29 septembre suivant, Me Z... avait répondu que les effets personnels étaient à la disposition de ce dernier ; qu'en conséquence, la SCP Y...-B... ne disposait plus, à compter de la désignation du séquestre, d'aucun pouvoir et d'aucune qualité pour restituer le mobilier et les effets personnels de M. X... ; que ce dernier ne rapportait pas en conséquence la preuve d'une faute commise par la SCP Y...-B... susceptible d'engager sa responsabilité (arrêt attaqué, p. 3, in fine, p. 4, 1er à 3ème alinéas, 5ème alinéa, 7ème à 10ème alinéas, p. 5, 1er alinéa) ;
ALORS QUE seuls sont remis à un séquestre les biens indisponibles en raison d'une saisie, situés dans un local dont est expulsé l'occupant, lequel est en droit d'obtenir la restitution de ses biens personnels non saisis dans le délai d'un mois suivant le procès-verbal d'expulsion ; qu'en retenant que la restitution au locataire expulsé de ses effets personnels relevait du pouvoir du séquestre désigné à l'occasion de la saisie visant les meubles situés dans les lieux loués, la cour d'appel a violé les articles 200 et 201-3° du décret du 31 juillet 1992 ;
ALORS QUE, en toute hypothèse, le mandant répond à l'égard des tiers des fautes de son mandataire ; qu'en décidant que, à compter de la désignation du séquestre, l'huissier poursuivant ne pouvait se voir reprocher de faute au titre de la restitution tardive des effets personnels du locataire expulsé, sans examiner, ainsi qu'elle y était invitée, si le séquestre avait agi en qualité de mandataire de l'officier ministériel qui lui avait fourni des instructions précises sur les modalités d'enlèvement desdits effets, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1991 et suivants du code civil.