LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° s Y 12-13. 961 formé par la société Marionnaud, B 12-14. 401 formé par la société Sephora, A 12-14. 584 formé par la société Nocibé France, N 12-14. 595 formé par la société Guerlain, Q 12-14. 597 formé par la société Parfums Christian Dior, R 12-14. 598 formé par la société LVMH Fragrance Brands (Parfums Givenchy et Kenzo parfums), U 12-14. 624 formé par la société L'Oréal produits de luxe France (la société L'Oréal), V 12-14. 625 formé par la société Yves Saint Laurent beauté (la société YSL), C 12-14. 632 formé par la société Clarins Fragrance group (la société Clarins) et V 12-14. 648 formé par la société Chanel, qui attaquent le même arrêt ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 23 novembre 2010, pourvoi n° 09-72. 031), que le Conseil de la concurrence (le Conseil), devenu l'Autorité de la concurrence (l'Autorité) s'est saisi d'office, le 21 octobre 1998, de la situation de la concurrence dans le secteur de la parfumerie de luxe ; que, par décision n° 06- D-04 bis du 13 mars 2006 rectifiée le 24 mars 2006, le Conseil a notamment dit établi que les sociétés Guerlain, Givenchy, et Kenzo aux droits desquelles vient la société LVMH Fragrance Brands (la société LVMH), Dior, Chanel, Sephora, YSL, Marionnaud, L'Oréal, Nocibé, et Thierry Mugler parfums aux droits de laquelle vient la société Clarins, avaient participé à des ententes sur les prix entre 1997 et 2000, et leur a infligé des sanctions pécuniaires allant de 90 000 à 12 800 000 euros ;
Sur le premier moyen des pourvois, n° s A12-14. 584 pris en ses huitième à treizième branches, B 12-14. 401 pris en sa cinquième branche, C 12-14. 632- U12-14. 624- V 12-14. 625 pris en leurs cinquième et sixième branches, N 12-14. 595- Q 12-14. 597- R 12-14. 598- V 12-14. 648 pris en leur huitième branche, N 12-14. 595- Q 12-14. 597- V 12-14. 648 pris en leur neuvième branche, U 12-14. 624 pris en sa dixième branche et Y 12-13. 961 pris en ses quatrième et cinquième branches, rédigés en termes similaires ou identiques, réunis :
Attendu que les sociétés Nocibé, Sephora, Clarins, L'Oréal, YSL, Guerlain, Dior, LVMH, Chanel et Marionnaud font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande d'annulation de la décision du Conseil, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en dehors de l'article L. 123-22 du code de commerce qui impose la conservation pendant dix ans des documents comptables et des pièces justificatives, aucune disposition légale ou réglementaire n'oblige les entreprises à garder, pendant un certain délai, les pièces de nature à justifier de la légalité de leur comportement en matière de concurrence ; que, sauf à méconnaître le principe d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme, une telle obligation ne procède pas du devoir général de prudence pesant sur toute personne ; qu'en retenant, en l'espèce, que la société Nocibé avait manqué au devoir de prudence auquel elle était tenue pour justifier de la licéité de ses pratiques en matière au regard des exigences de la concurrence, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du code civil ensemble l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ qu'en considérant qu'il appartient aux distributeurs de conserver, pendant un certain délai, la preuve de leur liberté tarifaire et que la société Nocibé aurait dû garder les éléments de preuve susceptibles de justifier de la licéité de ses pratiques et notamment de l'effectivité de sa liberté tarifaire, la cour d'appel a méconnu la présomption d'innocence et violé les articles l'article 6, paragraphe 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 9-1 du code civil ;
3°/ qu'elle a, par-là même, également méconnu les règles de la charge de la preuve des pratiques anticoncurrentielles, et violé l'article 1315 du code civil ensemble les articles 81 du Traité CE (devenu 101 du TFUE) et L. 420-1 du code de commerce ;
4°/ qu'à supposer qu'une entreprise mise en cause à raison de pratiques anticoncurrentielles soit tenue à un devoir de prudence incluant la conservation d'éléments de preuve lui permettant de réfuter les griefs susceptibles de lui être notifiés, le manquement à un tel devoir ne peut être opposé, pour exclure que le dépassement du délai raisonnable de traitement de l'affaire par l'autorité de la concurrence ait porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense, que si l'entreprise s'est séparée ou n'a pas assuré la conservation de documents utiles à sa défense avant la date à laquelle le délai de traitement de l'affaire par l'autorité de la concurrence est devenu excessif ; qu'en considérant que la société Nocibé était tenue de conserver les documents justifiant de la licéité de ses pratiques jusqu'à l'expiration du délai de prescription ou l'énoncé d'une décision de non-lieu, la cour d'appel a violé l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
5°/ que la société Nocibé faisait valoir qu'elle ne s'était pas séparée d'éléments comptables tels que les tickets de caisse correspondant aux ventes journalières de chacun des points de vente mais que ces éléments n'étaient plus exploitables, d'une part, puisqu'ils étaient imprimés au moyen d'une encre thermique devenue illisible et, d'autre part, parce que les codes des articles utilisés sur ces tickets avaient changé et étaient devenus inexploitables, et elle produisait une attestation en ce sens ; qu'en ne recherchant pas si les difficultés invoquées par la société Nocibé n'étaient pas de nature à écarter, s'agissant des tickets de caisse, la méconnaissance d'un devoir général de prudence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ensemble l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
6°/ que l'information selon laquelle les enquêteurs agissaient en 1999 sur le fondement des articles 45 et 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 n'était pas de nature à éclairer les personnes auditionnées de ce que l'enquête menée était susceptible d'aboutir à une procédure devant le Conseil de la concurrence ni, à tout le moins, de les renseigner sur le cadre dans lequel l'enquête avait été ordonnée et sur l'objet exact de celle-ci ; qu'ainsi, en retenant que la société Nocibé aurait dû, dès 1999 et jusqu'à l'expiration du délai de prescription, conserver les éléments propres à justifier de la licéité des pratiques examinées par le Conseil de la concurrence sans déterminer la date à laquelle celle-ci avait eu connaissance de ce l'enquête de 1999 était en lien avec une procédure pendant devant le Conseil de la concurrence et portait sur des ententes verticales entre fournisseurs et distributeurs dans le secteur de la parfumerie et des cosmétiques de luxe, la cour d'appel, qui a pourtant relevé que les actes des enquêteurs (ne mentionnaient pas spécifiquement que cette enquête était menée sous l'égide du Conseil de la concurrence), a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ensemble l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7°/ que sauf à avoir été préalablement informé de l'objet de l'enquête le concernant, un opérateur économique n'est pas tenu d'un devoir général qui lui imposerait de conserver, en sus des documents comptables mentionnés par l'article L. 123-22 du code de commerce, tous les documents commerciaux de nature à lui permettre de se défendre, le cas échéant, de toute accusation de pratique anticoncurrentielle ; que, pour juger que les causes de déperdition des preuves à décharge invoquées par la société Sephora n'étaient pas en lien avec la durée de l'instruction, mais exclusivement imputables à un manquement de cette société à son devoir général de prudence, la cour d'appel a énoncé que la simple connaissance de ce qu'une enquête administrative avait été conduite en application de l'article 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, peu important que les procès-verbaux n'aient pas mentionnés que l'enquête était menée sous l'égide du Conseil de la concurrence, aurait dû conduire les entreprises concernées à conserver tous éléments de preuve de la légalité de leurs pratiques commerciales au sein de leurs réseaux de distribution sélective jusqu'à l'expiration du délai de prescription ou jusqu'au prononcé d'une éventuelle décision de non-lieu, afin de pouvoir, le moment venu, justifier du respect de l'entière liberté tarifaire de leurs distributeurs ; qu'en mettant ainsi à la charge de la société Sephora un devoir de conservation des preuves à décharge dont elle n'était pas tenue à défaut d'avoir été informée de l'objet de l'enquête, la cour d'appel a violé l'article 6, paragraphe 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article L. 123-22 du code de commerce ;
8°/ que l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales oblige les Etats contractants à organiser leur système judiciaire de telle sorte que les juridictions puissent remplir chacune de ses exigences, y compris l'obligation de trancher les causes dans des délais raisonnables ; qu'en retenant en l'espèce que, nonobstant le fait qu'il n'était pas mentionné que celle-ci était menée sous l'égide du Conseil de la concurrence, la simple connaissance de ce qu'une enquête administrative était conduite dans les conditions prévues par les articles 45 et 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et les arrêtés des 22 janvier 1993 et 11 mars 1993 modifiés obligeait, jusqu'à l'expiration du délai de prescription ou le prononcé d'une éventuelle décision de non-lieu, les entreprises concernées à conserver, non seulement les documents comptables et les pièces justificatives prévues par l'article L. 123-22 du code de commerce, mais également, plus largement, à conserver tous éléments de preuve de la légalité de leurs pratiques commerciales au sein de leur réseau de distribution sélective, et notamment à pouvoir justifier du respect de l'entière liberté tarifaire de leurs distributeurs, la cour d'appel, qui fait ainsi peser sur les entreprises les conséquences d'un possible manquement des juridictions à leur obligation de statuer dans des délais raisonnables en mettant à leur charge, pour pallier à ce manquement, une obligation générale de prudence allant au-delà de leurs obligations légales, a violé ensemble l'article 6 précité et les articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
9°/ que le droit à un procès équitable comporte, en application du principe de l'égalité des armes qui en découle, la possibilité raisonnable pour chacune des parties au procès d'exposer sa cause dans des conditions qui ne la désavantagent pas d'une manière appréciable par rapport à la partie adverse ; qu'en mettant à la charge des entreprises un devoir général de prudence les obligeant à conserver et pré-constituer tous éléments de preuve leur permettant de se prémunir de façon générale et abstraite contre un possible manquement du Conseil de la concurrence à ses obligations de traiter les causes dans un délai raisonnable à raison d'un délai excessif entre le dépôt du rapport administratif d'enquête et la notification des griefs, la cour d'appel a violé ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
10°/ qu'il incombe aux États contractants d'organiser leur système judiciaire de telle sorte que leurs juridictions puissent remplir chacune de ses exigences, y compris l'obligation de trancher les causes dans des délais raisonnables ; que la seule circonstance que la durée excessive d'une procédure soit imputable à l'autorité poursuivante dont la carence a compromis les droits de la défense suffit à justifier l'annulation de la procédure ; qu'en affirmant au contraire qu'il appartenait aux entreprises, avant même toute accusation officielle de se prémunir par avance contre le risque d'être accusées d'avoir participé à une entente verticale sur les prix jusqu'à l'expiration du délai de prescription ou le prononcé d'une éventuelle décision de non-lieu en conservant les preuves nécessaires, la cour d'appel qui a rendu les entreprises mises en cause responsables des conséquences de l'incapacité du Conseil de la concurrence à mener une instruction avec diligence et célérité, a violé l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
11°/ qu'incombe aux États contractants d'organiser leur système judiciaire de telle sorte que leurs juridictions puissent remplir chacune de ses exigences, y compris l'obligation de trancher les causes dans des délais raisonnables ; que la seule circonstance que la durée excessive d'une procédure soit imputable à l'autorité poursuivante dont la carence a compromis les droits de la défense suffit à justifier l'annulation de la procédure ; qu'en reprochant au contraire aux sociétés Guerlain, Dior, Givenchy et Kenzo parfums d'avoir manqué à un prétendu devoir général de prudence dans la conservation de leurs archives tant que le délai de prescription n'est pas expiré ou encore d'avoir omis de vérifier que l'enquête dont elles avaient fait l'objet en 1999 avait effectivement été clôturée, la cour d'appel qui a ajouté à la loi a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
12°/ qu'en affirmant de façon générale qu'il était encore possible lors de la notification de griefs en 2005 « d'interroger les personnes responsables de l'entreprise qui étaient en fonction entre 2000 et 2003 sur la politique commerciale de l'entreprise au cours de la période considérée », sans répondre aux conclusions de la société exposante faisant valoir, d'une part qu'elle avait connu en 1999 une réorganisation qui s'était accompagnée d'un déménagement, afin de rassembler au sein d'un même site à Levallois ses différentes marques, ce qui avait conduit à un regroupement des systèmes informatiques de chaque marque et à ne conserver que les données soumises à une obligation légale de conservation, alors que les capacités de stockage des serveurs informatiques étaient à l'époque bien plus faibles qu'à l'heure actuelle, d'autre part, qu'en 2005, « les principaux dirigeants et responsables commerciaux et opérationnels de l'Oréal Luxe France à l'époque des faits couverts par la décision avaient quitté l'entreprise et le groupe L'Oréal auquel celle-ci appartient » et qu'elle n'avait pas en conséquence « autorité en 2005 pour solliciter des explications » de la part de personnes ayant quitté l'entreprise et le groupe et enfin, que l'écoulement d'une période de six années et demi l'avait empêchée de se procurer, auprès d'instituts spécialisés dans les études, relevés et statistiques, tels que la société EPI international, des relevés de prix sur la période d'infraction retenue (1997-2000) et donc, de pouvoir contester les relevés effectués par l'administration, qui lui ont été opposés ce qui lui était d'autant plus préjudiciable qu'ayant pu obtenir certains relevés de prix auprès d'une société DRP, ceux-ci avaient montré que le magasin Sephora des Champs-Élysées vendait une grande majorité des produits des marques L'Oréal produits de luxe France à des prix inférieurs aux prix prétendument préconisés, la cour d'appel a entaché sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
13°/ qu'en se bornant à retenir que la société YSL beauté ne justifierait « d'aucune circonstance concrète précise rendant impossible à la date de la notification des griefs l'audition des cadres et personnels ayant quitté l'entreprise, ni de la teneur et de la portée des propos que ceux-ci auraient été en mesure de tenir », « qu'autrement dit, elle n'établit pas en quoi ces propos auraient pu influencer le contenu de la décision pour aboutir à un résultat différent de celui retenu par celle-ci », sans répondre aux conclusions de la société YSL beauté faisant valoir, d'une part qu'elle n'était pas en mesure en 2005 de contester les déclarations des distributeurs, établies en 1999, alors qu'un nombre significatif des distributeurs cités à charge (les trois quarts de ces seize distributeurs) avaient disparu, cessé leur activité ou quitté le réseau YSL avant la notification des griefs et, d'autre part, que l'écoulement d'une période de six années et demi l'avait empêchée de se procurer, auprès d'instituts spécialisés dans les études, relevés et statistiques, tels que la société EPI international, des relevés de prix sur la période d'infraction retenue (1997-2000) et donc, de pouvoir contester les relevés effectués par l'administration, qui lui ont été opposés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
14°/ qu'il incombe aux États contractants d'organiser leur système judiciaire de telle sorte que leurs juridictions puissent trancher les causes dans des délais raisonnables ; que la seule circonstance que la durée excessive d'une procédure soit imputable à l'autorité poursuivante dont la carence a compromis les droits de la défense suffit à justifier l'annulation de la procédure ; qu'en reprochant au contraire à la société Chanel un manquement à son devoir général de prudence dans la conservation des éléments de preuve établissant la licéité de ses pratiques commerciales, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi, a violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 41 et 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
15°/ qu'en n'établissant pas comme cela le lui était demandé, que la société Marionnaud avait été placée dans une situation d'égalité au regard du standard de la preuve et en mesure de produire des documents et pièces de nature à contrer effectivement et réellement les éléments de preuve versés à charge par le Conseil de la concurrence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 § 1 de la Convention ;
16°/ qu'en posant une obligation de conservation de documents non comptables qui outrepasse les prescriptions de l'article L. 122-23 du code de commerce, la cour d'appel a violé le principe de la présomption d'innocence garanti par l'article 6 § 2 de la Convention et l'article 9-1 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant justifié la durée de la procédure par les circonstances de la cause qu'elle a relevées, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen des pourvois, n° s A1214584 pris en ses deuxième à cinquième branches et B 12-14. 401 pris en ses troisième à cinquième branches, réunis :
Attendu que les sociétés Nocibé et Sephora, font grief à l'arrêt d'avoir retenu qu'elles avaient participé à une entente sur les prix et de les avoir sanctionnées à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ que la cour d'appel a énoncé que la preuve d'une entente verticale sur les prix exige celle d'un accord de volontés entre fournisseur et distributeur en vue de faire échec aux règles du marché et que, à défaut de clauses contractuelles claires dans le contrat de distribution sélective, cet accord de volontés et, en particulier, l'acquiescement même tacite du distributeur à l'invitation du fournisseur à pratiquer une entente sur les prix est démontré par la réunion d'un faisceau d'indices portant sur la connaissance par le distributeur du prix de vente souhaité par le fournisseur, sur sa participation à la police des prix mise en place par ce dernier et sur l'application significative desdits prix par le distributeur, « chacune des trois branches du faisceau étant une condition nécessaire à la démonstration de l'entente » ; qu'elle a, en outre, estimé déterminant pour la preuve de l'entente « l'engagement de surveillance intramarques » pris par le distributeur ; qu'en retenant, cependant, que, bien que la participation de la société Nocibé à une police des prix ne soit pas établie, la manifestation de la volonté de cette société de voir appliquer les prix conseillés caractérisait son accord pour participer à l'entente sanctionnée par le Conseil de la concurrence, la cour d'appel a violé les articles 81 du Traité CE, devenu 101 du TFUE, et L. 420-1 du code de commerce ;
2°/ qu'en se bornant à évoquer l'existence d'« accords entre la société Nocibé et des fournisseurs » sans en préciser l'objet exact et sans constater que ces accords constitueraient une clause du contrat de distribution sélective de nature à établir, en elle-même, la preuve de la volonté des parties de s'entendre sur les prix pour faire échec aux règles du marché, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ;
3°/ que l'entente verticale sur les prix suppose que le prix déterminé par le fournisseur ait été effectivement appliqué par le distributeur ; qu'après avoir énoncé que cette condition est équivalente à celle (d'application significative des prix imposés) posée par le Conseil de la concurrence, la cour d'appel a affirmé qu'il lui appartenait de vérifier au cas par cas, pour chaque société, la portée des relevés de prix réalisés par les services de la DGCCRF ; qu'elle a, par ailleurs, considéré que ces relevés de prix ne permettant pas une démonstration statistique du respect des prix imposés, ne pouvaient à eux seuls établir l'acquiescement des distributeurs à l'entente et qu'ils devraient être complétés par d'autres indices graves, précis et concordants ; qu'en se contentant néanmoins de déduire la preuve de la participation de la société Nocibé à une entente sur le prix de la seule « volonté » de celle-ci de « voir appliquer les prix conseillés » et en considérant qu'il n'était pas nécessaire de se référer non seulement aux relevés de prix établis par la DGCCRF mais aussi à ceux produits par la société Nocibé, la cour d'appel, qui n'a pas recherché quels étaient les prix effectivement appliqués par cette société, a privé sa décision de base légale au regard des articles 81 du Traité CE (devenu 101 du TFUE) et L. 420-1 du code de commerce ;
4°/ que la liberté tarifaire des opérateurs économiques, qui inclut la liberté de consentir des remises aux consommateurs, s'apprécie au regard des prix effectifs appliqués et non des prix affichés ; qu'en retenant que les remises, même fondées sur des critères objectifs et non discriminatoires, qui sont accordées individuellement en fonction des caractéristiques du client et non de celles du produit, ne peuvent être prises en considération dans l'appréciation de la politique tarifaire du distributeur vis-à-vis du fournisseur, la cour d'appel a violé les articles 81 du Traité CE (devenu 101 du TFUE) et L. 420-1 du code de commerce ;
5°/ que l'exercice par un distributeur d'actions de surveillance des prix pratiqués par ses concurrents situés dans la même zone de chalandise ne peut à elle seule caractériser la preuve d'une renonciation à sa propre liberté tarifaire et d'un acquiescement à la mise en application de prix minimaux de revente conseillés par un fournisseur ; qu'après avoir énoncé que la preuve d'un concours de volontés en vue de faire échec aux règles du marché exigeait la réunion d'un faisceau de trois indices cumulatifs tenant, premièrement, à l'évocation entre le fournisseur et ses distributeurs des prix de revente au public, deuxièmement, à la mise en oeuvre d'une police ou au moins d'une surveillance des prix et, troisièmement, au constat de ce que les prix évoqués ont été effectivement appliqués, la cour d'appel a néanmoins affirmé que « la note de coeur du faisceau d'indices retenu par le Conseil pour établir la réalité de la pratique d'entente verticale est à l'évidence, l'engagement de surveillance intramarques propice à démontrer non seulement, l'invitation du fournisseur mais également, sous un autre aspect, l'acquiescement du distributeur, cette police ayant nécessairement favorisé la transparence du marché considéré lequel est un marché concentré » ; qu'en réduisant par-là le nombre d'indices graves, précis et concordants requis pour démontrer l'existence d'une entente de trois à un seul élément, la cour d'appel a violé de plus fort les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE ;
6°/ que la caractérisation d'une entente verticale sur les prix impose de rechercher si les prix de revente au détail préconisés par le fournisseur ont été effectivement appliqués par ce distributeur dans ses rapports avec sa clientèle ; qu'il s'ensuit que doivent seuls être considérés les prix de revente au détail nets des réductions de prix accordées en caisse aux consommateurs et non les prix théoriques affichés en magasins ; qu'en jugeant néanmoins que, dans le cadre d'une analyse concurrentielle, la politique tarifaire d'un distributeur devait être appréciée à la seule lumière des prix affichés en magasins et qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte des remises accordées en caisse aux consommateurs, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE ;
7°/ qu'en se bornant, pour dire l'acquiescement de la société Sephora à l'entente proposée par ses fournisseurs suffisamment caractérisé, à faire état de déclarations isolées de trois responsables locaux de parfumeries à l'enseigne Sephora censées attester de ce que la politique habituelle de l'enseigne était de se conformer aux préconisations tarifaires des fournisseurs, sans répondre aux conclusions par lesquelles la société Sephora faisait valoir que cette stratégie prétendue se trouvait démentie de manière flagrante par les nombreuses protestations qu'avait suscitées sa politique de prix bas, de la part de distributeurs concurrents, qui démontraient en réalité que la chaîne Sephora était en mesure, grâce à la puissance économique dont elle jouissait, de s'abstraire des recommandations de prix des fournisseurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt constate que les comptes-rendus de réunion produits font état d'accords entre la société Nocibé et ses fournisseurs et relève la convergence entre ces éléments et les déclarations du président du directoire de cette société ; qu'il retient que l'accord de la société Sephora à l'entente avec ses fournisseurs est établi par les déclarations de trois dirigeants de magasins ayant indiqué que la politique de prix de l'enseigne est de respecter les préconisations tarifaires des « grandes marques » en s'abstenant de « casser les prix » ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations souveraines, desquelles il résulte que l'adhésion à l'entente des sociétés Nocibé et Sephora a été établie au moyen de preuves directes, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches ni de répondre à des conclusions que ces constatations rendaient inopérantes, et qui s'est référée aux paragraphes de la décision du Conseil indiquant précisément que les comptes-rendus appréhendés étaient relatifs à un accord sur les prix et taux de remises autorisés, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa branche unique et le troisième moyen, pris en ses première, quatrième et cinquième branches, du pourvoi n° Y 12-13. 961, réunis :
Attendu que la société Marionnaud fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours en annulation de la décision du Conseil alors, selon le moyen :
1°/ qu'en ne recherchant pas comme elle y était invitée si le Conseil de la concurrence n'avait pas méconnu le principe de l'égalité des armes en refusant d'examiner une preuve essentielle présentée par la société Marionnaud-le relevé des prix effectivement pratiqués en caisse – la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ qu'en considérant qu'il serait inutile de déterminer quels distributeurs ont effectivement appliqué les prix évoqués, quand il est nécessaire, pour établir l'existence d'une entente sur les prix, de constater l'application au moins significative des prix évoqués, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 81 § 1 (devenu 101 § 1) du Traité et L. 420-1 du code de commerce ;
3°/ qu'en refusant de tenir compte des remises effectuées en caisse et de la mise en oeuvre par la société Marionnaud de son système de carte de fidélité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 81 § 1 (devenu 101 § 1) du Traité et L. 420-1 du code de commerce ;
4°/ qu'en n'examinant pas les relevés de prix pertinents présentés, seules données objectives et concrètes permettant d'attester du comportement réel de la société Marionnaud face aux invitations des fournisseurs à pratiquer certains prix, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 81 § 1 (devenu 101 § 1) du Traité et L. 420-1 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt relève les déclarations de dirigeants de magasins Marionnaud mentionnant le respect de la politique tarifaire souhaitée par « les marques » au sein de leur chaîne, et la production de notes internes de plusieurs fournisseurs corroborant ces déclarations ; qu'il en déduit qu'il n'est pas nécessaire d'analyser en détail la pertinence des relevés de prix réalisés tant par la DGCCRF que par la société Marionnaud ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, caractérisant au moyen d'une preuve directe l'acquiescement de ce distributeur à l'entente reprochée, la cour d'appel, qui n'a pas porté atteinte au principe de l'égalité des armes et qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ces constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi, n° C 12-14. 632 pris en ses première, deuxième, troisième et sixième branches, n° s N 12-14. 595, Q 12-14. 597, R 12-14. 598 pris en leurs deuxième et troisième branches, U 12-14. 624 pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième et septième branches, V 12-14. 625 en ses première, deuxième, troisième, sixième, et septième branches, le troisième moyen des pourvois n° s N 12-14. 595, Q 12-14. 597, R 12-14. 598 pris en leur première à troisième, et sixième à huitième branches, le quatrième moyen des pourvois n° s N 12-14. 595 et Q 12-14. 597 pris en leurs deuxième et troisième branches, Q 12-14. 597 pris en ses cinquième à septième branches, R 12-14. 598 pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches et V 12-14. 648, pris en ses première à troisième branches et sixième à huitième branches, le cinquième moyen des pourvois n° s R 12-14. 598 pris en ses deuxième, quatrième, cinquième et septième branches et V 12-14. 648 pris en ses deuxième à sixième branches, pour certains rédigés en termes similaires ou identiques, réunis :
Attendu que les sociétés Clarins, Guerlain, Dior, LVMH, L'Oréal, YSL et Chanel font également le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que l'existence d'une entente verticale généralisée sur les prix entre un fournisseur et ses distributeurs suppose que soit établi un concours de volontés entre le fournisseur et chacun de ses distributeurs sans que l'acquiescement de certains distributeurs à une entente puisse faire présumer celui d'autres distributeurs ; qu'en retenant, en l'espèce, que « des prix évoqués, des mesures mises en oeuvre par le fournisseur visant à les faire appliquer, conjugués à une application significative de ces prix établissent … la réalité d'une pratique d'entente imputable au fournisseur sans qu'il soit besoin de rechercher quels distributeurs particuliers ont participé à l'entente », la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
2°/ que l'existence d'une entente verticale sur les prix entre un fournisseur et ses distributeurs suppose que soit établi un acquiescement volontaire des distributeurs et partant une application effective par eux de prix de reventes qui auraient été imposés par le fournisseur ; que l'acquiescement de certains distributeurs à une pratique tarifaire du fournisseur ne peut donc faire présumer celui d'autres distributeurs ; qu'en retenant en l'espèce que « le critère retenu par le Conseil « d'application significative des prix imposés » doit … être considéré … comme équivalent au critère habituel selon lesquels « les prix ainsi déterminés ont été effectivement pratiqués par les distributeurs », la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Ttraité CE, devenu l'article 101 du TFUE. ;
3°/ que l'existence d'une entente verticale sur les prix entre un fournisseur et ses distributeurs suppose que soit établi un concours de volonté de part et d'autre ; et que soit en conséquence établi un acquiescement volontaire des distributeurs et partant que les prix imposés par le fournisseur ont été effectivement appliqués par eux ; qu'ayant retenu que « le critère retenu par le Conseil « d'application significative des prix imposés » doit … être considéré … comme équivalent au critère habituel selon lesquels « les prix ainsi déterminés ont été effectivement pratiqués par les distributeurs », la cour d'appel ne pouvait ensuite jugé établi l'existence de l'infraction à l'encontre de la société Clarins sans constater ni qu'une part significative de ses distributeurs aurait acquiescé volontairement à des prix imposés, ni d'autre part une application significative desdits prix ; qu'en statuant ainsi elle n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
4°/ que l'acquiescement des distributeurs à des prix de revente imposés par un fournisseur susceptible de caractériser une entente suppose nécessairement une application effective de ces prix de revente par les distributeurs, c'est-à-dire que les prix de revente effectivement et réellement pratiqués auprès des clients ne soient pas inférieurs aux prix conseillés par le fournisseur ; qu'en refusant en l'espèce de prendre en compte dans l'appréciation de la politique tarifaire des distributeurs et de leur acquiescement à une invitation du fournisseur à pratiquer les prix de détail conseillés les remises effectuées en caisse, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
5°/ qu'en concluant à l'existence d'une entente généralisée entre chaque fournisseur et ses distributeurs après avoir constaté que les distributeurs indépendants absents de la procédure n'avaient pas pris une part significative à l'entente et que « le distributeur Douglas, initialement poursuivi, a été finalement mis hors de cause », la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE devenu 101 § 1 du TFUE ;
6°/ que la diffusion par le fournisseur de prix de revente conseillés est licite ; que l'adhésion du distributeur à une politique assimilant le prix de revente conseillé à un prix minimum implique nécessairement que les prix conseillés par le fournisseur aient été effectivement appliqués par les revendeurs ; qu'en affirmant que la notion « d'application significative des prix imposés » retenue en l'espèce par le conseil de la concurrence était équivalente au critère habituel selon lequel « les prix ainsi déterminés ont été effectivement pratiqués par les distributeurs », la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE devenu101 § 1 du TFUE ;
7°/ que l'existence d'une entente verticale sur les prix entre un fournisseur et ses distributeurs suppose que soit établi un concours de volonté entre le fournisseur et ses distributeurs dans chaque cas particulier ; que l'acquiescement de certains distributeurs à une politique tarifaire du fournisseur ne peut donc faire présumer celui d'autres distributeurs ; qu'ayant constaté en l'espèce que le distributeur Douglas avait été mis hors de cause ; que les relevés de prix réalisés sur une période de quatre mois au cours de l'année 1999 « ne présentent pas (…) toutes les caractéristiques suffisantes à une démonstration statistiques du respect des prix imposés et ne peuvent à eux seuls établir l'acquiescement des distributeurs à l'entente », la cour d'appel ne pouvait retenir qu'un acquiescement de l'ensemble des distributeurs de la société L'Oréal à une entente sur les prix et une prétendue application effective des prix préconisés par le fournisseur concernant un nombre de points de vente qu'elle qualifie de « significatifs » seraient caractérisés en se fondant sur les seules déclarations de quelques distributeurs ou « note interne de la société Lancôme relative à la parfumerie de M.
X...
» qui n'impliquaient aucun acquiescement de l'ensemble des distributeurs de la société exposante à une politique tarifaire ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
8°/ que l'existence d'une entente verticale sur les prix entre un fournisseur et ses distributeurs suppose que soit établi un concours de volonté de part et d'autre ; qu'ayant néanmoins considéré que la démonstration d'une entente verticale anticoncurrentielle n'exigerait pas l'identification de tous les distributeurs et que ce qui importerait ce serait que le nombre de distributeurs soit analysé comme étant suffisamment significatif pour pouvoir altérer le fonctionnement du marché, la cour d'appel ne pouvait ensuite retenir l'existence d'une entente verticale généralisée sur les prix entre la société L'Oréal et ses distributeurs sur la base d'indices et « fragments d'indice » qui, comme le faisait valoir cette société, ne concernait que certaines des marques qu'elle exploitait (3 sur 9) et pour une de ses marques (Armani) seulement certains de ses produits, sans constater à tout le moins que serait ainsi établi une entente du fournisseur avec ses distributeurs ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
9°/ que l'existence d'une entente verticale sur les prix entre un fournisseur et ses distributeurs, suppose que soit établi un concours de volonté de part et d'autre dans chaque cas particulier ; que démontrant que le Conseil n'avait constaté aucun indice d'une infraction commise par elle avec les trois grandes chaînes de distribution Marionnaud, Nocibé et Sephora, représentant, selon les années concernées, 50 à 80 % de la distribution de ses produits en France, la société YSL beauté faisait valoir que l'existence d'une entente généralisée sur les prix avec ses distributeurs n'était donc pas caractérisée à son encontre ; qu'en retenant en l'espèce l'existence d'une entente verticale sur les prix commise par la société YSL beauté avec l'ensemble de ses distributeurs sans constater d'indices spécifiques d'infraction commise par YSL beauté avec l'un quelconque de ses trois grands distributeurs (Marionnaud, Nocibé et Sephora) qui figuraient en la cause, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
10°/ que l'existence d'une entente verticale généralisée sur les prix entre un fournisseur et ses distributeurs suppose que soit établi un concours de volontés du fournisseur et de chacun des distributeurs individualisés en vue de faire échec aux règles du marché ; que démontrant que le Conseil n'avait constaté aucun indice d'une infraction commise par elle avec les trois grandes chaînes de distribution Marionnaud, Nocibé et Sephora, représentant, selon les années concernées, 50 à 80 % de la distribution de ses produits en France, la société YSL beauté faisait valoir que l'existence d'une entente généralisée sur les prix avec ses distributeurs n'était donc pas caractérisée à son encontre ; qu'en constatant de façon générale que « la démonstration d'une entente verticale anticoncurrentielle reprochée à un fournisseur n'exige jamais l'identification de tous les distributeurs », que « l'ensemble des distributeurs tel qu'envisagé et retenu dans la décision » s'analyse « comme l'ensemble de ceux désignés dans le corps du rapport final, postérieur à la notification de griefs », autrement dit « avec la grande majorité de leurs distributeurs agréés de parfums et de cosmétiques de luxe au premier rang desquels les sociétés Marionnaud, Nocibé et Sephora », et « que ce qui importe est que le nombre de distributeurs concernés soit analysé comme étant suffisamment significatif pour pouvoir altérer le fonctionnement du marché », sans rechercher ensuite s'il existait des indices spécifiques d'infraction commise par YSL beauté avec les trois enseignes représentant l'essentiel de son réseau de distribution ni constater que les indices retenus par le Conseil et par elle pour établir un acquiescement des distributeurs de la société YSL beauté à une invitation à une entente concernaient à tout le moins un nombre significatif de distributeurs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
11°/ qu'ayant constaté d'une part, que la preuve d'une entente verticale sur le prix entre un fabricant et ses distributeurs, qui suppose un accord de volonté entre les entreprises, résulterait de « la réunion d'un faisceau d'indices précis, graves et concordants comprenant 1) l'évocation entre le fournisseur et ses distributeurs des prix de revente des produits au public, 2) la mise en oeuvre d'une police ou au moins d'une surveillance de ces prix et, enfin 3) le constat que les prix évoqués ont été effectivement appliqués » ou, ce qui serait un critère équivalent, « une application significative des prix imposés » et, d'autre part, que les relevés de prix, « ne présentent pas … toutes les caractéristiques suffisantes à une démonstration statistique du respect des prix imposés et ne peuvent à eux seuls établir l'acquiescement des distributeurs à l'entente », et « ne constituent qu'un indice parmi d'autres au sein du troisième élément du faisceau », la cour d'appel ne pouvait ensuite retenir que ces « fragments d'indice sont, au cas présent, corroborés par les déclarations circonstanciées et concordantes des parfumeries » Rayon d'or et Patchouli à Morlaix, Freddy parfums et Royal Opéra à Paris, parfumerie Poulie à Cahors et Parfumerie Bleue à Périgueux, « qui ont tous confirmé avoir volontairement et en connaissance de cause respecté les prix imposés par la marque », sans constater qu'il en résulterait une « application significative des prix imposés » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, devenu l'article 101 du TFUE ;
12°/ qu'une entente verticale n'est établie que si chacune des parties y a librement consenti ; qu'ainsi l'adhésion d'un distributeur à la politique tarifaire voulue par son fournisseur désormais nécessaire pour caractériser une entente verticale de prix ne saurait être déduite de la seule volonté du fournisseur ; qu'une entente n'est caractérisée qu'à la condition de démontrer l'existence d'un concours de volontés dans chaque cas particulier ; qu'en affirmant qu'une entente généralisée du fournisseur avec ses distributeurs en général et l'un d'entre eux en particulier était suffisamment caractérisée lorsque les prix de vente souhaités par le fournisseur sont connus des distributeurs, qu'une police des prix a été mise en place pour en assurer le respect et que ces prix sont significativement appliqués par les distributeurs « sans qu'il soit besoin de rechercher quels distributeurs particuliers ont participé à l'entente », quand ces indices ne suffisent pas à établir l'adhésion libre et volontaire d'un distributeur particulier à la politique tarifaire voulue par le fournisseur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du code de commerce et 101 § 1 du TFUE ;
13°/ que le consentement libre et éclairé des parties à l'entente verticale est un élément constitutif de l'infraction ; qu'une entente n'est caractérisée qu'à la condition de démontrer l'existence d'un concours de volontés dans chaque cas particulier ; qu'ainsi une entente verticale entre fournisseur et distributeurs n'est établie qu'entre les parties ayant librement consenti à celle-ci ; qu'en décidant qu'en cas d'adhésion d'un distributeur à la politique tarifaire du fournisseur et d'application de ces prix par d'autres points de vente, il y avait lieu d'en déduire l'existence d'une entente généralisée du fournisseur avec ses distributeurs, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 § 1 du TFUE ;
14°/ qu'en concluant à l'existence d'une entente généralisée entre chaque fournisseur et ses distributeurs après avoir constaté que les distributeurs indépendants absents de la procédure n'avaient pas pris une part significative à l'entente et que « le distributeur Douglas, initialement poursuivi, a été finalement mis hors de cause », la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 § 1 du TFUE ;
15°/ que l'adhésion des distributeurs à une politique de prix imposés du fournisseur implique nécessairement que les prix de revente effectivement pratiqués ne soient pas inférieurs aux prix conseillés par le fournisseur pendant la période considérée ; qu'il s'ensuit que le prix de revente effectivement pratiqué à retenir s'entend de celui effectivement payé par le client déduction faite des rabais, remises ou ristournes de toute nature dont celui-ci a éventuellement pu bénéficier ; qu'en décidant qu'il n'y avait pas lieu, dans le cadre d'une analyse concurrentielle de prendre en considération les remises effectuées en caisse dans l'appréciation de la politique tarifaire du distributeur vis-à-vis des fournisseurs que les remises en caisse devaient être exclues de l'étude des prix effectivement pratiqués par les revendeurs quand elles contribuent pourtant à abaisser le prix de revente des produits en dessous du prix conseillé, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du TFUE ;
16°/ qu'en décidant que les remises en caisse devaient être exclues de l'étude des prix effectivement pratiqués par les revendeurs, tout en admettant qu'il n'y a entente collusoire que lorsque les prix conseillés par le fournisseur, sont en réalité considérés comme des prix imposés par les parties, ce dont il résulte que toute remise abaissant le prix de revente devait être prise en compte, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du TFUE ;
17°/ qu'en décidant que l'acquiescement des distributeurs des sociétés Guerlain/ Dior/ Chanel résultait à suffisance des déclarations de quelques distributeurs indépendants et en reprochant à chacune d'elles d'avoir participé à « une entente généralisée sur les prix pratiqués (avec) ses distributeurs » de 1997 à 1999, après avoir considéré que le Conseil de la concurrence était en droit de ne pas mettre en cause dans la procédure au fond suivie devant lui les distributeurs qui, compte tenu des constatations de l'enquête et de l'instruction, ne lui apparaissaient pas avoir eu une part significative dans la constitution des pratiques dénoncées, ce dont il ressortait que les distributeurs indépendants absents de la procédure n'avaient donc pas pris une part significative à l'entente, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
18°/ qu'une entente verticale entre fournisseur et distributeurs n'est établie qu'entre les parties ayant librement consenti à la politique tarifaire décidée d'un commun accord ; qu'ainsi le consentement à la politique tarifaire du fournisseur de certains détaillants ne peut laisser présumer de celui des autres, qu'en retenant à l'encontre des société Guerlain, Dior, Givenchy, Kenzo et Chanel une entente verticale de prix généralisée avec leurs distributeurs au titre des années 1997 à 1999, après avoir constaté formellement le prétendu acquiescement à cette politique de quelques distributeurs seulement, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du Traité TFUE ;
19°/ qu'en reprochant à la société Dior de s'être concertée avec la chaîne de distribution Marionnaud sans relever le moindre élément attestant de son adhésion à la politique tarifaire du fournisseur, ni même de pressions exercées à son encontre par celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du TFUE ;
20°/ qu'en reprochant encore à la société Dior d'avoir participé à une entente sur les prix avec la chaîne de distribution Nocibé, sans relever le moindre élément attestant de son adhésion à la politique tarifaire du fournisseur, ni même de pressions exercées à son encontre par celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du TFUE ;
21°/ qu'une entente verticale entre fournisseur et distributeurs n'est établie qu'entre les parties ayant librement consenti à la politique tarifaire décidée d'un commun accord ; qu'ainsi le consentement à la politique tarifaire du fournisseur de certains détaillants ne peut laisser présumer de celui des autres ; qu'en décidant que l'acquiescement de quelques distributeurs indépendants à la politique tarifaire du fournisseur suffisait à établir une « entente généralisée sur les prix pratiquée entre la société Givenchy et ses distributeurs » de 1997 à 1999 impliquant spécialement trois chaînes de distribution tout en constatant que les chaînes de distribution, dont Marionnaud, pratiquaient quant à elles une concurrence agressive sur les prix tolérée par les fournisseurs, ce dont il résultait que ces grands distributeurs n'avaient jamais acquiescé à une quelconque entente, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du Traité TFUE ;
22°/ que le consentement libre et éclairé des parties à l'entente verticale est un élément constitutif de l'infraction ; qu'une entente n'est caractérisée qu'à la condition d'établir l'existence d'un concours de volonté entre le fournisseur et chaque distributeur particulier participant à l'entente ; qu'ainsi, une entente verticale entre fournisseur et distributeurs n'est établie qu'entre les parties ayant librement consenti à celle-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir retenu que le Conseil de la concurrence avait pu valablement décider « de ne pas mettre en cause dans la procédure au fond suivie devant lui les distributeurs qui, compte tenu des constatations de l'enquête et de l'instruction, ne lui apparaissaient pas avoir eu une part significative dans la constitution des pratiques dénoncées », a imputé à la société Chanel une entente généralisée avec ses principaux distributeurs, définis « comme l'ensemble de ceux désignés dans le corps du rapport final, postérieur à la notification de griefs, autrement dit « avec la grande majorité de leurs distributeurs agréés de parfums et de cosmétiques de luxe au premier rang desquels les sociétés M. Nocibé et Sephora » ; que la cour d'appel a donc retenu une entente généralisée entre fournisseurs et distributeurs, y compris avec l'ensemble des revendeurs indépendants qui tantôt n'ont jamais été interrogés, tantôt n'ont pas été attraits dans la cause après que le Conseil a considéré qu'ils n'avaient pas pris une part significative aux faits dénoncés ; que la cour d'appel a donc décidé qu'en cas d'adhésion de certains distributeurs particuliers à la politique tarifaire du fournisseur et d'application de ses prix, il y avait lieu d'en déduire l'existence d'une entente généralisée du fournisseur avec ses distributeurs ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
23°/ que la volonté du fournisseur d'interdire des rabais constitue un comportement unilatéral échappant à l'interdiction des ententes tant qu'il n'apparaît pas que cette politique tarifaire a été effectivement et volontairement respectée par des revendeurs réalisant un chiffre d'affaires important ; qu'ainsi l'application effective voire seulement significative des prix et marges de revente conseillés par le fournisseur à ses distributeurs est une condition nécessaire de l'entente, le constat de simples pressions prétendument exercées par le fournisseur pour faire remonter le prix de revente étant insuffisant à caractériser une entente ; qu'en décidant qu'une entente généralisée sur les prix pratiquée entre la société Kenzo et ses distributeurs pouvait être établie même en l'absence de tout relevé de prix sur les produits de la marque Kenzo venant corroborer les dires de quelques distributeurs indépendants, quand de tels relevés de prix attestant de l'uniformité des prix de revente réellement pratiqués dans un grand nombre de points de vente sont devenus indispensables dans la démonstration d'une entente, la cour d'appel a violé les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
24°/ qu'en affirmant que « l'existence d'une entente généralisée sur les prix pratiquée entre la société Kenzo et ses distributeurs pour toute la période considérée (1997-1999) » était établie, après avoir constaté l'agressivité des chaînes de distribution en matière de prix et spécialement de « Marionnaud qui fait du discount », ce dont il résulte que tous les distributeurs n'avaient pas adhéré à l'entente, la cour d'appel a violé les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
25°/ que l'existence d'une entente verticale sur les prix peut être rapportée par la réunion d'un faisceau d'indices précis, graves et concordants comprenant l'évocation entre le fournisseur et ses distributeurs des prix de revente des produits au public, la mise en oeuvre d'une police des prix et enfin le constat que les prix évoqués ont été effectivement appliqués ; qu'établir que les prix évoqués ont été effectivement appliqués suppose démontrée une homogénéité exemplaire des prix au détail sur l'ensemble du territoire national ; qu'en l'espèce, pour retenir que les distributeurs appliquaient effectivement les prix conseillés par la société Chanel, la cour d'appel s'est appuyée sur les relevés de prix effectués par la DGCCRF, qui ne concernaient que soixante-quatorze distributeurs sur plus de deux mille magasins de distribution de produits cosmétiques, et sur quelques déclarations éparses des distributeurs, qui ne concernaient que quelques villes de banlieue parisienne et des villes moyennes de province ; que ces éléments ne pouvaient donc établir une homogénéité exemplaire et généralisée des prix sur l'ensemble du territoire national ; qu'en se fondant pourtant sur ces deux seuls éléments pour retenir qu'était établie une entente verticale sur les prix, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
26°/ qu'en reprochant à la société Chanel de s'être concertée avec les chaînes de distribution Marionnaud et Nocibé, sans relever le moindre élément attestant de l'adhésion de ces deux distributeurs à la politique tarifaire du fournisseur, ni même de pression exercée par la société Chanel à leur encontre, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
27°/ que la volonté unilatérale d'un fournisseur d'imposer des prix de revente à ses détaillants ne suffit pas à établir l'existence d'une entente verticale sur les prix ; qu'en retenant, pour dire qu'une telle entente était établie entre la société Chanel (/ la société Dior) et la société Sephora France, sur le plan national, que le directeur du magasin Sephora de Saint-Brieuc avait attesté de l'intervention de la marque pour faire remonter les prix, la cour d'appel qui a statué par des motifs impropres à établir l'existence d'une entente verticale sur les prix a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir exactement énoncé que la démonstration d'une entente verticale anticoncurrentielle reprochée à un fournisseur n'exige pas l'identification de tous les distributeurs ayant participé à l'entente, l'arrêt précise que l'ensemble des distributeurs tel qu'envisagé et retenu dans la décision du Conseil ne s'analyse pas autrement que comme l'ensemble de ceux désignés dans le corps du rapport final, postérieur à la notification de griefs, autrement dit la grande majorité des distributeurs agréés de parfums et de cosmétiques de luxe au premier rang desquels les sociétés Marionnaud, Nocibé et Sephora ; qu'ayant ainsi délimité le champ des ententes, qui n'ont pas été retenues à l'encontre de tous les distributeurs des différents réseaux, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait, peu important les mises hors de cause et l'absence de certains distributeurs de la procédure ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant souverainement analysé les différentes pièces produites qui font état de l'application effective de prix minimum et de taux de remises communiqués par chacun des fournisseurs en cause au sein de leurs réseaux respectifs, incluant des déclarations par lesquelles des dirigeants de magasins ou de responsables au sein des chaînes Marionnaud, Sephora et Nocibé confirment cette situation, constitutives de preuves directes mettant en cause des chaînes nationales représentant une part significative de la distribution concernée, et d'une pratique à la fois générale à la profession et précisément partagée par les fournisseurs et distributeurs qui ont été sanctionnés, la cour d'appel, qui a établi l'existence d'un concours de volonté entre les différents participants aux ententes, excluant ainsi le caractère unilatéral allégué, et qui a procédé aux recherches que ces appréciations ne rendaient pas inopérantes, a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en troisième lieu, qu'ayant justement énoncé que la preuve d'une entente sur les prix requiert de manière générale que soient démontrés, d'une part, l'existence d'une invitation à l'accord émanant d'une des entreprises en cause et, d'autre part, un acquiescement des autres parties à cette invitation, et rappelé qu'en la matière la preuve est libre, c'est à bon droit que la cour d'appel, recherchant le caractère non équivoque de l'acquiescement du distributeur auquel il est opposé, a retenu que la référence faite à « l'application significative des prix imposés » devait être considérée comme équivalente au critère habituel selon lequel « les prix ainsi déterminés ont été effectivement pratiqués par les distributeurs » et que les relevés de prix ne constituaient qu'un indice parmi d'autres de ce dernier critère ;
Et attendu, en quatrième lieu, qu'après avoir exactement retenu que la politique tarifaire d'un distributeur est définie par les prix affichés en magasin, nets des remises annoncées dans le point de vente, et ne saurait recouvrir les remises effectuées en caisse, qui constituent des gestes commerciaux accordés individuellement en fonction des caractéristiques du client et non en considération du produit vendu, et que la preuve de l'entente peut se faire par tout moyen, l'arrêt relève la concordance entre les différentes déclarations et documents internes émanant des différentes sociétés poursuivies ou les mettant en cause, qui font état des interventions des fournisseurs pour maintenir les prix à un certain niveau et du respect de cette politique tarifaire par les distributeurs ; que l'arrêt relève encore, par motifs propres et adoptés, à l'occasion de l'examen individuel de chaque situation, la convergence des affirmations émanant de différents distributeurs répartis sur l'ensemble du territoire national relatives au respect de la politique des prix instaurée par les fournisseurs ; qu'il relève en outre l'acquiescement de trois chaînes de distribution de dimension nationale à la politique des prix de ces derniers ; qu'il précise que la grande majorité des distributeurs appartenant à ces chaînes sont reliés par un réseau informatique leur permettant de communiquer sur les prix, leurs magasins appliquant les consignes du siège ; que de ces constatations, rendant inopérantes les allégations relatives au caractère agressif de la politique de prix menée par ces distributeurs, la cour d'appel a pu, sans avoir à faire d'autres recherches, déduire que l'altération de la concurrence, inscrite dans le cadre de relations contractuelles suivies et mises en oeuvre sur un marché spécifique de produits de luxe, avait une dimension nationale à l'égard de chacun des fournisseurs ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen des pourvois n° s A 12-14. 584 pris en sa septième branche, N 12-14. 595, Q 12-14. 597 et R 12-14. 598 pris en leur troisième branche, et V 12-14. 648 pris en ses cinquième et sixième branches, le troisième moyen des pourvois n° s C 12-14. 632 pris en ses sixième et septième branches, U 12-14. 624 en ses huitième et neuvième branches et V 12-14. 625 pris en ses sixième et septième branches, le cinquième moyen des pourvois n° s N 12-14. 595 pris en ses huitième et neuvième branches et Q 12-14. 597, pris en ses huitième et neuvième branches et le sixième moyen des pourvois n° s R 12-14. 598 pris en ses huitième et neuvième branches et V 12-14. 648, pris en ses septième et huitième branches, pour certains rédigés en termes identiques, réunis :
Attendu que les sociétés Nocibé, Clarins, Guerlain, Dior, LVMH, L'Oréal, YSL, et Chanel font grief à l'arrêt d'avoir rejeté les moyens d'annulation à l'encontre de la décision du Conseil et de leur avoir infligé une sanction, alors, selon le moyen :
1°/ que la société Nocibé faisait valoir subsidiairement que le Conseil ne disposait d'aucun élément pour affirmer qu'elle aurait participé à une entente de septembre 1999 à décembre 2000, tous les éléments du dossier étant antérieurs à septembre 1999 en ce qui la concerne ; qu'en ne recherchant pas si la décision du Conseil de la concurrence n'encourait pas l'annulation pour avoir dit établie la participation de cette société à l'entente relevée pour la période comprenant le dernier trimestre 1999 et l'année 2000, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il ressort expressément de la décision déférée que le Conseil de la concurrence avait expressément reproché aux sociétés mises en cause de s'être entendues « entre les années 1997 et 2000 chacune pour ce qui la concerne, avec des distributeurs de leurs produits, … pour faire cesser toute concurrence sur les prix » et plus précisément encore que le Conseil de la concurrence a retenu « les années 1997 à 2000 pour lesquelles la preuve de l'entente est rapportée » ; qu'en affirmant que le Conseil de la concurrence avait considéré la pratique d'entente comme établie pour la période 1997-1999 à l'exclusion de l'année 2000, la cour d'appel qui a dénaturé la décision déférée a violé les articles 1134 du code civil et 4 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en considérant que le Conseil de la concurrence avait pu, à suffisance de droit, caractériser une pratique d'entente verticale généralisée sur la période 1997-1999, tout en admettant que ce n'est que dans ses dernières observations devant la cour de renvoi que l'Autorité de la concurrence avait clarifié le fait que l'année 2000 ne saurait faire partie de la période d'infraction finalement retenue, ce dont il résulte que le Conseil de la concurrence avait bien inclus par erreur l'année 2000 dans la période d'infraction retenue, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les articles L. 420-1 du code de commerce et du Traité CE, applicable en la cause ;
4°/ qu'au point 782 de sa Décision, le Conseil de la concurrence a expressément indiqué retenir, pour apprécier le dommage à l'économie causé par les pratiques, « les années 1997 à 2000 pour lesquelles la preuve de l'entente est rapportée » ; qu'en indiquant au contraire que le « Conseil a, à suffisance, relevé au point 782 de la décision que les ententes sanctionnées étaient des ententes générales portant sur tout le territoire français et relatives aux années 1997 à 1999 inclus », la cour d'appel a dénaturé la décision du Conseil de la concurrence, en violation des articles 1134 du code civil et 4 du code de procédure civile ;
5°/ qu'en retenant que le Conseil aurait « à suffisance, relevé au point 782 de la décision que les ententes sanctionnées étaient des ententes générales portant sur tout le territoire français et relatives aux années 1997 à 1999 inclus », tout en relevant que « l'Autorité (anciennement Conseil) clarifie … dans ses dernières observations le fait que l'année 2000 ne saurait faire partie de la période d'infraction finalement retenue », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article L. 464-2 du code de commerce et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
6°/ qu'il ressort expressément du paragraphe 782 de la décision déférée que, pour évaluer la durée de l'infraction et le dommage à l'économie, le Conseil de la concurrence a retenu « les années 1997 à 2000 pour lesquelles la preuve de l'entente est rapportée » ; qu'en affirmant que selon le point 782 de la décision déférée, le Conseil de la concurrence n'avait, en réalité pas tenu compte de l'année 2000 pour fixer la durée de l'entente retenue dans le calcul de la sanction, la cour d'appel a dénaturé la décision susvisée en violation des articles 1134 du code civil et 4 du code de procédure civile ;
7°/ qu'en affirmant que le Conseil de la concurrence n'avait, en réalité pas tenu compte de l'année 2000 pour fixer la durée de l'entente retenue dans le calcul de la sanction, tout en admettant que ce n'est que dans ses dernières observations devant la cour de renvoi que l'Autorité de la concurrence avait clarifié le fait que l'année 2000 ne saurait faire partie de la période d'infraction finalement retenue, ce dont il résulte que le Conseil de la concurrence avait bien inclus par erreur l'année 2000 dans la période d'infraction retenue, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble, l'article L. 464-2 du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel ayant déterminé de manière individuelle le montant de la sanction en considération pour chaque entreprise de faits d'entente intervenus de 1997 à 1999, et ainsi exercé son contrôle sur la proportionnalité des sanctions prononcées au regard de cette période de référence, le grief de dénaturation de la décision du Conseil est inopérant ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant apprécié le montant des sanctions pécuniaires prononcées en fonction des critères définis à l'article L. 464-2 du code de commerce, la cour d'appel a souverainement estimé que seules certaines d'entre elles devaient être réduites ;
Et attendu, enfin, qu'ayant circonscrit dans le temps les pratiques incriminées et retenu qu'eu égard au faisceau d'éléments précis et convergents, qu'elle a analysés, celles-ci étaient établies pour toute la période considérée, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations et appréciations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses deuxième, quatrième et sixième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le deuxième moyen des pourvois n° s N 12-14. 595, Q 12-14. 597, R 12-14. 598 pris en leur première branche et V 12-14. 648 pris en ses quatre premières branches, et le sixième moyen du pourvoi n° V 12-14. 648 pris en sa neuvième branche, réunis :
Attendu que les sociétés Guerlain, Dior, LVMH et Chanel font grief à l'arrêt d'avoir retenu qu'elles avaient chacune participé à une entente sur les prix et de les avoir sanctionnées à ce titre, alors, selon le moyen :
1°/ qu'afin d'établir l'existence d'une infraction globale unique et continue, il doit être prouvé que l'entreprise entendait contribuer par son propre comportement aux objectifs communs poursuivis par l'ensemble des participants et qu'elle avait connaissance des comportements matériels envisagés ou mis en oeuvre par d'autres entreprises dans la poursuite des mêmes objectifs ; qu'une entente globale suppose ainsi établie l'existence d'un plan général poursuivant un objectif commun, la contribution intentionnelle de l'entreprise à ce plan et le fait qu'elle avait connaissance des comportements infractionnels des autres participants ; que pour retenir que l'entente imputée à la société Chanel était une entente généralisée, la cour d'appel a relevé que « chaque entreprise entendue avait conscience de participer à une orientation globale, à telle enseigne que la police de prix constatée dans chaque entente retenue impliquait chaque fournisseur et ses distributeurs et que l'entente sanctionnée est une entente généralisée ; que la similitude de stratégie tarifaire des fournisseurs était prise en compte par les distributeurs au point que nombre de ceux-ci, lors de leurs auditions respectives, n'ont pas hésité à citer les comportements et exigences similaires des « grandes marques » ; que cette circonstance, même à l'admettre, n'établissait ni en quoi chaque distributeur aurait eu conscience de la politique de prix pratiquée par les autres distributeurs et aurait entendu participer à un plan global, ni qu'il aurait eu la volonté de participer à une entente généralisée sur les prix ; qu'en retenant pourtant que la société Chanel aurait participé à une entente généralisée sur les prix, sans caractériser la conscience et l'intention de chacune des entreprises en cause de participer à un plan global, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
2°/ qu'est qualifiée de pratique continue au sens du droit de la concurrence, toute pratique dont l'état répréhensible se prolonge dans le temps par la réitération constante et la persistance de la volonté de l'auteur après l'acte initial ; qu'une pratique n'est continue que si les comportements incriminés ont été adoptés en permanence, sans interruption, pendant la période de référence, ce qui suppose démontré que ces comportements ont été adoptés en tous leurs éléments constitutifs au début de la période de référence, puis à intervalles réguliers et enfin à l'achèvement de la période de référence ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que « les indices qualifiés de généraux par le Conseil et les coïncidences relevées par lui ont pu à suffisance de droit, être appréciés sur la durée totale affectée par les pratiques (1997 à 1999) et non, uniquement par année calendaire » ; que la cour d'appel a ainsi retenu que l'entente pouvait s'apprécier globalement, sans que soit démontrée la persistance de la pratique incriminée durant chaque année calendaire de la période de référence ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'une pratique continue suppose établie l'existence d'une pratique constante à tout moment de la période de référence, la cour d'appel a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
3°/ qu'est qualifiée de pratique continue au sens du droit de la concurrence, toute pratique dont l'état répréhensible se prolonge dans le temps par la réitération constante et la persistance de la volonté de l'auteur après l'acte initial ; que la preuve de la participation à une entente de caractère continu suppose notamment de démontrer que l'infraction était parfaitement caractérisée au moins à deux dates précises, la date de départ et la date d'achèvement de la période de référence ; que pour se dispenser de déterminer précisément la date de départ et la date d'achèvement de la période de référence, la cour d'appel s'est contentée de relever que « l'infraction concernée est une infraction continue se caractérisant par le morcellement et le caractère disparate des pratiques concernées ainsi que par l'échelonnement de celles-ci dans le temps » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le standard de preuve d'une entente continue et violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
4°/ qu'une pratique n'est continue que si les comportements incriminés ont été adoptés en permanence et sans interruption pendant la période de référence ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour d'appel que « l'infraction concernée est une infraction continue se caractérisant par le morcellement et le caractère disparate des pratiques concernées ainsi que par l'échelonnement de celles-ci dans le temps » ; qu'en retenant le caractère continu des pratiques en cause, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que les comportements incriminés étaient « disparates » et « morcelés », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
5°/ que la preuve de la participation à une entente de caractère continu suppose notamment de démontrer que l'infraction était parfaitement caractérisée à deux dates précises ; qu'en retenant pour établir l'existence d'une entente soi-disant généralisée entre fournisseurs et distributeurs entre 1997 et 1999 que « l'infraction concernée est une infraction continue se caractérisant par le morcellement et le caractère disparate des pratiques constatées ainsi que par l'échelonnement de celles-ci dans le temps (et) que les mêmes indices révèlent non seulement l'existence mais également la durée des comportements anticoncurrentiels considérés, après avoir exactement rappelé qu'est « qualifiée de pratique continue au sens du droit de la concurrence, toute pratique dont l'état répréhensible se prolonge dans le temps par la réitération constante ou la persistance de la volonté de l'auteur après l'acte initial, la cour d'appel qui a méconnu le standard de la preuve d'une entente a violé les articles L. 420-1 du code de commerce et 101 du TFUE ;
6°/ qu'est qualifiée de pratique continue au sens du droit de la concurrence, toute pratique dont l'état répréhensible se prolonge dans le temps par la réitération constante et la persistance de la volonté de l'auteur après l'acte initial ; qu'une pratique n'est continue que si les comportements incriminés ont été adoptés en permanence, sans interruption, pendant la période de référence, ce qui suppose démontré que ces comportements ont été adoptés en tous leurs éléments constitutifs au début de la période de référence, puis à intervalles réguliers, et enfin à l'achèvement de la période de référence ; que pour que le montant de l'amende puisse être déterminé en fonction de l'intégralité de la période de référence, il doit être rapporté la preuve que l'infraction, serait-elle continue, était constituée en tous ses éléments constitutifs pendant toute la période de référence ; qu'à défaut, l'amende ne doit être calculée que pour le temps pour lequel il est effectivement démontré que l'infraction a été commise ; qu'en l'espèce, pour déterminer le montant de la sanction en fonction de l'intégralité de la période de référence, la cour d'appel a cru pouvoir se dispenser du constat de tous les éléments de l'entente pour « chaque année calendaire et chaque entreprise » au prétexte qu'il s'agissait de sanctionner des « pratiques continues » ; qu'en statuant ainsi, cependant que le caractère continu de l'infraction ne dispense pas l'autorité de contrôle qui calcule le montant de l'amende en fonction de l'intégralité de la période de référence d'établir la persistance de l'infraction pendant toute cette période, la cour d'appel a violé
les articles L. 420-1 du code de commerce et 81 du Traité CE, applicable en la cause ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que l'entente généralisée sur les prix retenue à l'encontre de chacun des fournisseurs avait pour finalité de partager la rente unitaire que le prix final, élevé, permettait d'obtenir du consommateur, en fixant en commun les parts respectives du profit unitaire réalisé sur chaque vente entre le fournisseur et ses distributeurs, l'arrêt retient l'acquiescement des distributeurs en cause à la mise en oeuvre du système initié par les fournisseurs dont il s'agit ; qu'il retient encore, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, qu'il est établi que chaque entreprise entendue avait conscience de participer à une orientation globale et que la similitude de stratégie tarifaire des fournisseurs était prise en compte par les distributeurs, englobant, d'une part, une stratégie d'alignement sur les prix les plus bas localement pratiqués dans la zone de chalandise considérée à partir du prix conseillé par la marque et, d'autre part, une surveillance intramarques impliquant les fournisseurs et les distributeurs ; qu'ayant ainsi caractérisé la conscience et l'intention de chacune des entreprises en cause de participer à un plan global, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, en deuxième lieu, qu'après avoir justement énoncé qu'est qualifiée de continue au sens du droit de la concurrence, toute pratique dont l'état répréhensible se prolonge dans le temps par la réitération constante ou la persistance de la volonté de l'auteur après l'acte initial, l'arrêt relève qu'en l'espèce chaque infraction est fondée sur un ensemble de pratiques anticoncurrentielles s'inscrivant dans le cadre d'une infraction à caractère unique et continu poursuivant une seule finalité et retient que des éléments de preuve précis et convergents provenant de sources variées sont rapportés au cours de la durée totale affectée par les pratiques, soit de1997 à 1999 ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, rendant le caractère morcelé et disparate des comportements en cause sans incidence sur l'existence de ces ententes et permettant d'inférer la durée du comportement anticoncurrentiel d'un certain nombre de coïncidences et d'indices, sans méconnaître les exigences requises en matière de preuve, la cour d'appel en a déduit à bon droit qu'il n'était pas nécessaire de démontrer la persistance de la pratique incriminée durant chaque année calendaire de la période de référence et pour chaque entreprise ;
Et attendu, en troisième lieu, que s'étant référée, par motifs propres et adoptés, aux documents produits par le Conseil, et notamment ceux mentionnés aux points 164 et 168 de sa décision concernant la société Guerlain, aux points 95 et 92, concernant la société Dior, aux points 148 et 153 concernant la société Givenchy, aux points 169 et 170 concernant la société Kenzo, aux points 66 et 64 concernant la société Chanel, établissant, en eux-mêmes, à leur date respective, la participation de ces sociétés à l'entente qui a été décrite lors des auditions effectuées en 1999, soit pour la société Guerlain d'octobre 1997 à septembre 1999, pour la société Dior de juin 1997 à août 1999, pour la société Givenchy de janvier 1997 à juin 1999, pour la société Kenzo à compter du plan d'action instauré pour l'année 1997 jusqu'à septembre 1999, et pour la société Chanel à compter de l'année 1997 jusqu'à juin 1999, ce dont il résultait une délimitation temporelle de la durée de participation à l'entente reprochée à chacune de ces sociétés, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le cinquième moyen du pourvoi n° R 12-14. 598, pris en sa première branche :
Attendu que la société LVMH fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande d'annulation de la décision du Conseil et de l'avoir sanctionnée au titre de l'entente imputée à la société Kenzo alors, selon le moyen, qu'en affirmant que « l'existence d'une entente généralisée sur les prix pratiquée entre la société Kenzo et ses distributeurs pour toute la période considérée (1997-1999) était établie » tout en admettant par ailleurs « que l'entente de la société Kenzo avec ses distributeurs est plus spécifiquement établie par les documents visés au paragraphe la concernant pour les années 1998 et 1999 », ce dont il résulte que la preuve de l'entente n'est pas rapportée à suffisance de droit pour l'année 1997, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé les articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce ;
Mais attendu qu'après avoir qualifié l'entente d'infraction continue et retenu qu'elle était établie à l'égard de la société Kenzo pour toute la période de référence, l'arrêt relève, au titre de l'individualisation de la sanction à laquelle il procède, que l'entente reprochée à cette société est plus spécifiquement établie pour les années 1998 et 1999, faisant ainsi ressortir qu'elle avait joué un rôle moins actif en 1997, et que sa part de marché n'en faisait pas au cours de la période de référence l'un des acteurs « incontournables » du marché des parfums et cosmétiques de luxe ; qu'ayant réduit le montant de la sanction pécuniaire prononcée en considération de ces éléments, c'est sans méconnaître les conséquences légales de ses constatations que la cour d'appel s'est prononcée comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen du pourvoi n° Y 12-13. 961, pris en sa troisième branche :
Attendu que la société Marionnaud fait grief à l'arrêt de l'avoir sanctionnée, alors, selon le moyen, qu'en refusant de tenir compte de la durée précise de sa participation alléguée à l'infraction prétendue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 464-2 du code de commerce dans sa version applicable à l'espèce ;
Mais attendu que s'étant référée, par motifs propres et adoptés, aux télécopies et lettres notamment énumérées aux points 283 et suivants de la décision du Conseil, lesquelles étaient datées du 11 janvier 1997 pour la première dénonciation et du 29 novembre 1999, pour la dernière, la cour d'appel, qui a tenu compte de la durée de la participation de la société Marionnaud aux infractions d'ententes verticales retenues, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen des pourvois n° s C 12-14. 632 et V 12-14. 625 pris en leur quatrième branche et U 12-14. 624 pris en sa sixième branche et le cinquième moyen des pourvois n° s N 12-14. 595 et Q 12-14. 597 en leur sixième branche, et le sixième moyen des pourvois n° s R 12-14. 598 pris en sa sixième branche et V 12-14. 648 pris en sa cinquième branche, rédigés en termes identiques ou similaires, réunis :
Attendu que les sociétés Clarins, Guerlain, Dior, LVMH, L'Oréal, YSL et Chanel font encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que le dommage à l'économie à proportion duquel doit être fixé le montant de la sanction d'une entente sur les prix doit être apprécié en tenant compte de la sensibilité de la demande au prix ; qu'en retenant que le Conseil de la concurrence a « motivé à suffisance l'appréciation du dommage à l'économie » quand le Conseil a expressément reconnu ne pas « connaître l'élasticité de la demande de parfum et de cosmétique à leur prix » (cf. décision n° 782), la cour d'appel a violé l'article L. 464-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable en la cause antérieure à la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 ;
Mais attendu que l'arrêt retient justement que le dommage à l'économie s'apprécie notamment en fonction de l'étendue du marché affecté par la pratique anticoncurrentielle, de sa durée et de ses effets conjoncturels et structurels ; qu'il ajoute que le Conseil, qui n'est pas tenu de le quantifier précisément, doit cependant en évaluer l'existence et l'importance en se fondant sur une analyse aussi complète que possible des éléments du dossier ; qu'après avoir constaté, par motifs propres et adoptés, que les pratiques illicites établies pour la période considérée, sur l'ensemble du territoire national, impliquant la moitié des trente principales marques de parfums et de cosmétiques de luxe françaises et les trois principales chaînes de distribution sélective du pays, sont intervenues sur le marché très spécifique de la parfumerie et cosmétique de luxe et relevé l'existence d'un surcoût en résultant pour le consommateur, établi par les illustrations tirées d'éléments précis du dossier, l'arrêt retient que les effets de ces pratiques sont d'autant plus dommageables que sur ce marché la concurrence par les prix est restreinte du fait de l'absence d'élasticité de la demande inhérente aux produits concernés ; qu'ayant ainsi pris en compte les critères de référence pour mesurer l'importance du dommage causé à l'économie par les pratiques en cause, parmi lesquels celui tiré de la sensibilité de la demande au prix, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen du pourvoi n° Q 12-14. 597, pris en sa dixième branche :
Attendu que la société Dior fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son recours, alors, selon le moyen, que les sanctions pécuniaires, prononcées par le Conseil de la concurrence doivent être proportionnées à la gravité des faits reprochés, à l'importance du dommage causé à l'économie, à la situation de l'organisme ou de l'entreprise sanctionné ou du groupe auquel l'entreprise appartient et à l'éventuelle réitération de pratiques prohibées et déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné, le tout de façon motivée pour chaque sanction ; que les critères de l'article L. 464-2 du code de commerce sont à la fois impératifs et limitatifs ; qu'ainsi, seuls les événements personnels et spécifiques à chaque société peuvent être pris en compte au titre de l'individualisation de la sanction : qu'en affirmant pour individualiser la sanction de la société Christian Dior que les pratiques reprochées avaient au moins partiellement contribué au phénomène de regroupement des distributeurs, la cour d'appel qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé l'article susvisé ;
Mais attendu que la société Dior ayant soutenu dans ses écritures que l'importance de son rôle devait être minorée par la circonstance que la profession des détaillants en parfumerie connaissait à l'époque des faits un phénomène de regroupement caractérisant un véritable retournement du rapport de force au détriment des fabricants en général, c'est en réponse à ce moyen, et sans ajouter à la loi, que la cour d'appel a relevé que les pratiques reprochées avaient nécessairement contribué à ce phénomène de regroupement des distributeurs et a déterminé le montant de la sanction au regard des critères de référence ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen du pourvoi n° A 12-14. 584, pris en sa neuvième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour fixer la sanction infligée à la société Nocibé, l'arrêt retient que l'entente de cette dernière avec l'un de ses fournisseurs est plus particulièrement établie pour les années 1998 et 1999 et que les autres éléments du dossier permettent d'affirmer qu'elle a participé à la police des prix mise en place par les fournisseurs au titre des années 1997 à1999 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que la seule pièce évoquant clairement la participation de la société Nocibé à la police des prix des fournisseurs, citée au point 306 de la décision du Conseil, ne concerne pas la période de référence et que la lettre visée au point 303 ne peut servir à accréditer la thèse d'une participation à une police des prix, faute de pouvoir être identifiée avec précision, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission des pourvois ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois n° B 12-14. 401, C 12-14. 632, N 12-14. 595, Q 12-14. 597, R 12-14. 598, U 12-14. 624, V 12-14. 625, V 12-14. 648, Y 12-13. 961 ;
Et sur le pourvoi n° A 12-14. 584 :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé à 3 150 000 euros la sanction infligée à la société Nocibé France, l'arrêt rendu le 26 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne l'Autorité de la concurrence à supporter les dépens exposés par la société Nocibé France et laisse aux autres parties la charge de leurs propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Vu l'article R. 470-2 du code de commerce, dit que sur les diligences du directeur de greffe de la Cour de cassation, le présent arrêt sera notifié, par lettre recommandée avec accusé de réception, à la Commission européenne et au ministre de l'économie ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille treize.