LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Geos International Consulting du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Alstom Power systems ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 19 du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 ;
Attendu, selon ce texte, qu'un employeur ayant son domicile sur le territoire d'un État membre peut être attrait devant les tribunaux de l'État membre où il a son domicile, ou, dans un autre État membre, devant le tribunal du lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail, devant le tribunal du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail, ou, lorsque le travailleur n'accomplit pas ou n'a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant le tribunal du lieu où se trouve ou se trouvait l'établissement qui a embauché le travailleur ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 20 mars 2008, M. X... a signé avec la société de droit anglais Geos International Consulting, filiale de la société Geos dont le siège est à Montrouge (France), un contrat de travail en qualité de responsable de la sécurité d'une durée de trois mois, pour une mission au Nigéria ; qu'un nouveau contrat a été signé le 1er août 2008 pour les mêmes fonctions pour une mission en Algérie ; que le 4 août 2009, le salarié a été informé de son retrait du chantier Alstom en Algérie et que, le 6 octobre 2009, il a été licencié pour faute ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour déclarer compétente la juridiction française, la cour d'appel retient que le règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 n'a pas pour effet d'écarter l'application des dispositions légales impératives du code du travail, qu'en outre l'article 19 du Règlement dispose qu'un employeur ayant son domicile sur le territoire d'un Etat membre, peut être attrait devant le tribunal du lieu où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur et que la gestion des ressources humaines, qui intègre la décision de procéder à l'embauche des salariés du groupe Geos, dépend de la société Geos située à Montrouge ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si le salarié n'avait pas accompli habituellement son travail dans le même pays, en exécution du contrat de travail conclu le 1er août 2008 et rompu le 6 octobre 2009, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré la juridiction française compétente pour statuer sur la demande du salarié à l'égard de la société Geos International Consulting, l'arrêt rendu le 17 janvier 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne M. X... et la société Geos SAS aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Geos International Consulting Limited
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Geos SAS dispose de la qualité d'employeur conjoint de M. X..., avec la société Geos International Consulting Limited, signataire du contrat de travail, déclaré le contredit bien fondé, dit que l'affaire doit être jugé par la juridiction française et renvoyé les parties devant le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt pour les débats sur le fond de l'affaire à la plus proche audience ;
Aux motifs que « les sociétés GEOS SAS et GEOS International Consulting Limited, se prévalent d'une clause attributive de compétence aux tribunaux anglais, stipulée à l'article 28-3 du contrat de travail ; que dès lors que la société GEOS SAS se voit reconnaître la qualité de co-employeur, le salarié demandeur dispose de son option ouverte par l'article R. 1412-1 du code du travail, qui l'autorise à saisir la juridiction compétente du siège de l'employeur ; que s'agissant de la clause attributive de compétence figurant dans le contrat de travail, elle doit être annulée comme étant contraire aux dispositions de l'article R.1412-4 du code du travail ; que le règlement de l'Union n°4412001 n'a pas pour effet d'écarter l'application de ces dispositions légales impératives ; qu'en outre, l'article 19 du règlement dispose qu'un employeur ayant son domicile sur le territoire d'un Etat membre, peut être attrait devant le tribunal du lieu où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur ; qu'il ressort des motifs précédemment énoncés, que la gestion des ressources humaines, qui intègre la décision de procéder à l'embauche des salariés du groupe GEOS, dépend de la société GEOS SAS située à MONTROUGE ; que par suite, le conseil de prud'hommes a considéré à tort qu'il n'était pas compétent pour statuer sur les demandes de Monsieur X... à l'encontre des deux sociétés, GEOS SAS et GEOS International Consulting Limited ; que le contredit est donc bien fondé » ;
Alors, d'une part, que l'article 19 du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 instaure des règles de compétence spéciales qui interdisent à l'Etat membre saisi par un salarié d'une demande dirigée contre son employeur domicilié dans un autre Etat membre de se référer à ses propres règles de compétence pour déterminer quelle est la juridiction compétente ; qu'en se fondant sur les règles de droit interne pour retenir la compétence des juridictions françaises pour juger des demandes formulées par M. X... à l'encontre de son employeur, la société Geos International Consulting, société de droit anglais dont le siège social se trouve au Royaume-Uni, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Alors, d'autre part, qu'aux termes de l'article 19, point 2, du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, l'employeur domicilié dans un Etat membre peut être attrait dans un autre Etat membre, soit devant le tribunal du lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant le tribunal du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail, soit lorsque le travailleur n'accomplit pas habituellement ou n'a pas accompli habituellement son travail dans un même pays, devant le tribunal du lieu où se trouve ou se trouvait l'établissement qui a embauché le travailleur ; que la circonstance que l'employeur soit reconnu co-employeur avec une société domiciliée dans un autre Etat membre ne permet pas de déroger à la règle susvisée pour l'attraire devant les juridictions de l'Etat où est domicilié le co-employeur ; qu'en se fondant sur la circonstance que la société Geos International Consulting et Geos SAS étaient les coemployeurs de M. X... pour retenir la compétence des juridictions françaises, comme celles du domicile de la société Geos SAS, pour connaître des demandes formées par celuici contre la société Geos International Consulting, société de droit anglais domiciliée au Royaume-Uni, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Alors, ensuite, qu'aux termes de l'article 19, point 2, du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, l'employeur domicilié sur le territoire d'un Etat membre peut être attrait devant le tribunal du lieu où se trouve ou se trouvait l'établissement qui a embauché le travailleur à la condition que celui-ci n'accomplit pas ou n'a pas accompli habituellement son travail dans un même pays ; qu'après avoir constaté que M. X... avait été embauché aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée conclu le 1er août 2008 devant s'exécuter dans un seul et même pays, l'Algérie (arrêt attaqué, p. 2, § 5), ce dont il résultait qu'il accomplissait habituellement son travail dans un même pays, la cour d'appel a néanmoins retenu que la société Geos International Consulting, domiciliée au Royaume-Uni, pouvait être attraite devant les juridictions françaises, lieu d'embauche de M. X... ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard du texte susvisé qu'elle a ainsi violé ;
Alors, enfin et à titre subsidiaire, qu'aux termes de l'article 19, point 2, du Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000, l'employeur domicilié sur le territoire d'un Etat membre peut être attrait devant le tribunal du lieu où se trouve ou se trouvait l'établissement qui a embauché le travailleur lorsque celui-ci n'accomplisse pas ou n'ait pas accompli habituellement son travail dans un même pays ; que le lieu de situation de l'établissement d'embauche au sens de ce texte n'est pas assimilable au lieu où l'employeur centralise ses services des ressources humaines mais au lieu où se trouve l'établissement au sein duquel le travailleur a effectivement été embauché ; qu'en retenant la compétence des juridictions françaises pour connaître des demandes de M. X... contre la société Geos International Consulting au motif inopérant que la gestion des ressources humaines de cette société était centralisée au niveau du groupe, au siège de la société mère, la société Geos SAS, domicilié à Montrouge, la cour d'appel a violé le texte susvisé.