LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Marie-Cécile X..., épouse Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 30 novembre 2012, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte contre personne non dénommée du chef de viols, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 9 octobre 2013 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Foulquié conseiller rapporteur, M. Pometan, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller FOULQUIÉ, les observations de la société civile professionnelle BARADUC et DUHAMEL, de Me SPINOSI, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général VALDÈS BOULOUQUE ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme,222-22, 222-23, 222-24, 222-29, 222-30 et 222-31 du code pénal, 211 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale et défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre contre M. Y... du chef de viols ou d'agressions sexuelles commis à l'encontre d'Adrien et d'Elsa Y... ;
"aux motifs qu'il appartient à la chambre de l'instruction d'apprécier s'il existe des charges suffisantes que des faits de viol ou d'agression sexuelle ont été commis à l'encontre d'Adrien et d'Elsa Y... ; que les déclarations des enfants n'ont pas été dénuées d'ambiguïté ; qu'Adrien a mis son père en cause au terme d'un processus particulièrement compliqué, dans lequel est évoqué un cauchemar empreint d'éléments peu vraisemblables ; que les déclarations d'Elsa quant au bouchon qui lui aurait été mis dans les fesses par son oncle, puis par une dame, puis par une dame marron puis par un ours lequel serait finalement son père sont également très équivoques ; que les examens médicaux n'ont pas mis en évidence d'éléments objectifs de l'existence des abus dénoncés ; que les examens psychologiques effectués par des experts judiciaires désignés par l'autorité judiciaire et non par des personnes choisies par la plaignante émettent des doutes quant à la réalité des faits dénoncés ; que M. Y... a constamment contesté les déclarations accusatrices ; que ces seuls éléments, mis en regard des indices contraires, pour l'essentiel, de la conviction de témoins pour qui une souffrance psychique ne peut avoir d'autre origine qu'un abus sexuel, ce qui ne constitue qu'une déduction incertaine, ne peuvent constituer des charges suffisantes que les faits dénoncés ont été commis ; que le fait que les experts aient, en l'absence d'élément objectif, refusé d'exclure la possibilité que les faits aient eu lieu ne saurait davantage caractériser des charges suffisantes ; que la partie civile appelante demande d'ailleurs le renvoi de son ex-mari devant la juridiction « compétente » sans être en mesure d'affirmer que se dégagent du dossier des charges suffisantes que ce sont des viols ou des agressions sexuelles ou les deux qui auraient été commis, que cette incertitude dans laquelle se trouve l'appelante est caractéristique de l'insuffisance des charges ; que dès lors que, sans qu'il soit nécessaire de s'arrêter aux conditions de révélation des faits et au rôle qui aurait pu être joué par Marie-Cécile X... et par sa mère ainsi qu'aux modalités de prononcé du divorce, il y a lieu de constater que le dossier n'établit pas l'existence de charges suffisantes que les infractions objet de l'information aient pu être commises ; qu'aucun autre acte n'apparaît de nature à pouvoir palier cette insuffisance de charges ; qu'il convient donc de confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise ;
"1°) alors que les arrêts de chambre de l'instruction sont déclarés nuls s'ils ne contiennent pas de motifs ou ne répondent pas aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que dans son mémoire, outre les déclarations précises d'Adrien et d'Elsa qui mentionnaient, pour le premier, le fait qu'un « fantôme » qui était son père lui avait mis « quelque chose en béton dans les fesses » et un « liquide gluant et rose »dans la gorge et dans les fesses et, pour la seconde, que son père lui avait mis un « bouchon dans les fesses », Mme X... avait fait état des mimes d'actes de fellation et de sodomie par Adrien aux enquêteurs, de ses dessins très tourmentés et fortement sexués, de ses désordres alimentaires ainsi que des comptes-rendus du docteur Z... et de Mme A..., respectivement neuropédiatre et psychologue ayant régulièrement suivi les enfants, desquels il ressortait que ces derniers présentaient tous les signes d'enfants sexuellement abusés (mémoire, p. 4 § 5 et s.); qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par le mémoire de la partie civile, si ces éléments corroboraient sa plainte etles déclarations des enfants et constituaient des charges suffisantes de viols ou d'agressions sexuelles, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale ;
"2°)alors qu'il appartient à la chambre de l'instruction d'apprécier s'il existe des charges suffisantes justifiant la saisine de la juridiction de jugement ; que la chambre de l'instruction est tenue d'examiner les faits, objet de la plainte, sous toutes les qualifications possibles ; qu'en l'espèce, la partie civile demandait le renvoi de M. Y... devant la juridiction de jugement du chef de viols ou d'agressions sexuelles sur Adrien et Elsa Y... ; qu'en énonçant que « cette incertitude dans laquelle se trouve la partie civile est caractéristique de l'insuffisance de charges »(arrêt, p. 9 § 2), jugeant ainsi de façon inopérante que l'incertitude de qualification par la partie civile induisait une incertitude sur la réalité des faits, la chambre de l'instruction a méconnu son office" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le délit reproché, ni toute autre infraction ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
DIT n'y avoir lieu à application, au profit de M. Y..., de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt novembre deux mille treize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;