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17/12/2014 | FRANCE | N°14-86560

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 17 décembre 2014, 14-86560


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société UBS AG,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 22 septembre 2014, qui, dans l'information suivie contre elle des chefs de démarchage bancaire ou financier illicite et de blanchiment aggravé, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction modifiant le contrôle judiciaire;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits;
Sur le premier moyen de cassa

tion, pris de la violation des articles 591, 593, 706-62, 706-58, 706-61 du code...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- La société UBS AG,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 22 septembre 2014, qui, dans l'information suivie contre elle des chefs de démarchage bancaire ou financier illicite et de blanchiment aggravé, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction modifiant le contrôle judiciaire;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 591, 593, 706-62, 706-58, 706-61 du code de procédure pénale ensemble le respect des droits de la défense et du contradictoire garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
"en ce que l'arrêt a confirmé l'ordonnance de modification du contrôle judiciaire ayant élevé de 2 875 000 à 1 100 000 000 euros le montant du cautionnement de la banque helvétique au rappel des déclarations d'un témoin anonymes ;
"alors que la déclaration d'inconstitutionnalité partielle de l'article 706-62 du code de procédure pénale interdira, pour entrer en voie de condamnation et partant pour prononcer une mesure coercitive à l'encontre d'un mis en examen, l'usage d'un témoignage anonyme ordonné suite à une requête qui n'a, comme en l'espèce, jamais fait l'objet d'un versement au dossier de l'instruction interdisant ainsi à la personne mis en examen, par elle-même ou par son avocat, de contester les conditions dans lesquelles ont été recueillis les éléments de preuve qui fondent sa mise en cause " ;
Attendu que, par arrêt de ce jour, la Cour de cassation a déclaré irrecevable la question relative à la constitutionnalité des dispositions de l'article 706-62 du code de procédure pénale ;
Qu'il s'ensuit que le moyen est inopérant ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er du protocole additionnel n°1 à la Convention européenne, 6, § 2, 8, de la Convention européenne des droits de l'homme, 113-2 et 324-1 du code pénal, préliminaire, 138, 142, 800-1, 599, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt a confirmé l'ordonnance de modification du contrôle judiciaire ayant élevé de 2 875 000 à 1 100 000 000 euros le montant du cautionnement de la banque helvétique ;
"aux motifs qu'il convient de rappeler le périmètre de la saisine des juges d'instruction :- par réquisitoire introductif du 12 avril 2012, l'information a été ouverte des chefs de démarchage bancaire ou financier illicite de prospects français ou résidant sur le territoire national (commis par des personnes non habilitées) et complicité du même délit ; blanchiment en bande organisée de fonds obtenus à l'aide de démarchages bancaires ou financiers illicites ; blanchiment aggravé de fraude fiscale ;- le réquisitoire supplétif du 27 juin 2012 visait les mêmes chefs d'infractions, mais élargissait la période des faits et ajoutait l'infraction de recel et un second réquisitoire supplétif était pris en date du 26 mars 2014 des chefs du blanchiment de fraude fiscale des sommes qui n'étaient pas le produit du démarchage illicite ; qu'il y a a lieu de constater que cette saisine dès l'ouverture de l'information par le réquisitoire introductif du 12 Avril 2012 portait à la fois sur des faits commis entre 2007 et 2011 de démarchage illicite bancaire ou financier de citoyens français ou de résidents sur le territoire national et complicité de ce délit, de blanchiment en bande organisée de fonds obtenus à l'aide de ces démarchages, et de blanchiment aggravé de fraude fiscale ; qu'elle a été précisément élargie par le réquisitoire supplétif du 27 juin 2012 portant sur les mêmes infractions et sur le recel, pour les années 2004 à 2006 ; qu'elle a été à nouveau élargie parle réquisitoire supplétif du 26 mars 2014, comme précisé si dessus ;que les réquisitions supplétives du 21 juillet 2014, prises à rencontre de l'UBS AG n'ont pas modifié le périmètre de la saisine actualisée, mais ont eu pour objet de requérir la mise en examen de cette dernière, pour blanchiment aggravé de fraude fiscale, et de requérir l'augmentation du montant du cautionnement dont elle devait s'acquitter ; qu'au regard de l'effet dévolutif de l'appel et de la règle de l'unique objet, il n'y a pas lieu en l'état de se prononcer sur l'existence d'indices graves ou concordants au regard des faits reprochés à UBS AG ; que cependant il existe des raisons plausibles de la soupçonner d'avoir pris part à l'une et l'autre de ces infractions ; que, quant à l'infraction de démarchage illicite bancaire ou financier, au vu des mécanismes mis au jour par l'enquête préliminaire, puis par l'information, à l'encontre dans un premier temps de UBS France comme complice, puis de sa maison mère, tels que ci dessus exposés et détaillés (approche de la clientèle française ou étrangère en relation avec l'administration fiscale française, tels que les résidents, directement, ou par le recours à des "events" par des chargés d'affaires établis en France, avec des objectifs déterminés pour faire ouvrir et déposer des avoirs sur des comptes ouverts chez UBS en Suisse, comptes nominatifs ou numérotés, comptes au nom de personnes physiques ou d'entités, fondations ou structures Off Shore, ou encore par la mise en place et l'utilisation pendant plusieurs années d'une comptabilité parallèle manuelle et occulte, parles consignes faites aux CA de rédiger les contrats d'ouverture hors de France, consignes de dissimuler leurs démarches par l'emploi d'un langage codé, crypté, qu'il apparaissait difficile à UBS France, complice, puis à UBS AG, auteur principal, de nier cette première infraction réputée commise de 2004 à 2011, de sorte qu'UBS AG ne contestera pas alors, le 6 juin 2013, son placement sous contrôle judiciaire et le montant du cautionnement, alors fixé à 2,8 millions d'euros, qu'elle paiera, à l'issue de sa mise en examen, de ce premier chef ; qu'il ne peut pas être imaginé que de telles méthodes risquées mises en place en France de manière dissimulée en connaissance de cause et à l'initiative de UBS AG (cf le système ATA) n'avaient pas pour objectif de faciliter l'évasion fiscale, voire surtout la fraude fiscale de la part des citoyens français fortement imposés ou d'autres citoyens (non nationaux) tenus à de obligations fiscales vis à vis de l'Etat français, et que si ces sujets devaient y trouver leur compte, il peut aisément être déduit qu'UBS France et UBS AG y trouvaient également avantage par la somme des actifs déposés et de par les gains générés par leur gestion ; que le blanchiment est un délit autonome de l'infraction primaire ; que point n'est nécessaire ici que la présente information vise le délit de fraude fiscale et que les juges d'instruction en soient saisis ; qu'en effet si l'infraction de fraude fiscale nécessite à la fois une plainte de l'administration française, conformément aux dispositions de l'art. L. 228 du code des procédures fiscales et un réquisitoire du parquet pour que le juge d'instruction puisse régulièrement instruire, il en va différemment quant au délit de blanchiment ; que la Cour de cassation a jugé, arrêts des 20 février 2008 et 31 Mai 2012, que la poursuite du délit de blanchiment de fraude fiscale n'est pas soumise aux dispositions de l'art. L. 228 du livre des procédures fiscales exigeant, préalablement au dépôt de plainte, un avis conforme de la CIF ; qu'en effet, «l'article 324-1 du code pénal n'impose pas que des poursuites aient été préalablement engagées ni qu'une condamnation ait été prononcée du chef du crime ou du délit ayant permis d'obtenir les sommes d'argent blanchies ... il suffit que soient établis les éléments constitutifs de l'infraction principale ayant procuré les sommes litigieuses », et que dès lors, « la poursuite du délit de blanchiment, infraction générale, distincte et autonome, n'est pas soumise aux dispositions de l'art. L. 228 du livre des procédures fiscales » (Crim. 20 février 2008, n° 07-82.977) ; qu'il a aussi été jugé que les autorités de poursuite, procureur de la République ou juge d'instruction, peuvent se dispenser de la plainte préalable de l'administration française, si elles décident de retenir une qualification de droit commun distincte de la qualification pénale fiscale (C. Crim 14 juin 2006) ; qu'il suffit pour le juge d'instruction de s'attacher à établir les présomptions de l'existence de l'infraction principale de fraude fiscale ayant procuré les sommes litigieuses, en l'espèce des manoeuvres et stratagèmes concourant à la dissimulation des sommes sujettes à l'impôt, l'élément intentionnel surabondant laissé à l'appréciation du juge du fond, se déduisant notamment d'une attitude constante, réitérée, et de l'importance de sommes enjeu constatées par le recours à ce mécanisme de démarchage illicite répété sur plusieurs années et étendu en Franc et dans d'autres états ; que le délit de blanchiment défini par les dispositions de l'art. 324-1 du code pénal, contrairement à ce qui est soutenu, est un délit autonome ; qu'il existe, en l'état de l'information et contrairement à ce que soutient la défense de la banque UBS AG, des présomptions, l'établissement de la preuve de l'infraction n'étant pas exigée à ce stade des poursuites, de la commission du délit de blanchiment aggravé, la mise en examen, la banque, offrant de manière habituelle, depuis de nombreuses années et au moins entre 2004 et 2011, les moyens habituels renouvelés pour apporter son concours à des opérations de dissimulation de fonds, notamment par ces méthodes de démarchage illégal ci dessus décrites, par l'ouverture de comptes dans ses livres en Suisse et avec des méthodes de gestion garantissant l'anonymat au titulaires détenteurs ou propriétaires des actifs déposés et des revenus générés qu'ils souhaitaient soustraire à l'impôt sur le sol français ; que dès lors, dans le cadre de cette information, les juges d'instruction ne sont pas saisis de fraude fiscale, mais qu'il n'est juridiquement pas nécessaire qu'ils le soient pour pouvoir instruire du chef de blanchiment, blanchiment aggravé, comme il a été requis par le deux réquisitoires supplétifs du 27 juin 2012 8 (blanchiment de fraude fiscale des sommes provenant du démarchage illicite de 2004 à 2012) et du 14 Mars 2014, comme ci-dessus rappelés ; que la cour étant saisie de l'unique appel frappant l'ordonnance de contrôle judiciaire du 23 juillet 2014, elle n'a pas à se prononcer ici sur la régularité de cette saisine, sur la compétence des juridictions françaises, sur l'existence ou non d'indices graves ou concordants de ces infractions et au surplus sur l'existence démontrée ou non d'un élément intentionnel ; que c'est au vu des éléments rassemblés par l'information au fil de son évolution entre juin 2013 et le 23 juillet 2014, à l'encontre d'UBS AG, de ses déclarations, de la production des documents internes helvétiques que celle-ci a estimé pouvoir produire, au regard de ses obligations légales nationales, que le juges d'instruction ont estimé devoir mettre en examen UBS AG du chef de blanchiment aggravé de fraude fiscale, pour avoir sur le territoire national et en Suisse, de 2004 jusqu'en 2012, apporté son concours, de manière habituelle et en utilisant les facilités que procure l'exercice de l'activité d'établissement bancaire, à des opérations de placement du produit de la fraude fiscale à l'impôt sur les revenus, sur la fortune ou sur les sociétés, commis par des contribuables du Trésor public français, par l'ouverture de comptes bancaires en dehors de France et la mise en place de procédés destinés à dissimuler ledit contribuable de ses obligations légales à l'impôt, et qu'ils ont estimé nécessaire de modifier le montant du cautionnement fixé initialement le 6 juin 2014 à la somme de 2 875 000 (deux millions huit cent soixante quinze mille) euros et de déterminer ce nouveau montant au regard des considérations sus-exposées, motivations que la Cour fera partiellement siennes et auxquelles elle ajoutera ou retranchera par substitution de motifs ; quant aux objectifs d'un cautionnement : que selon les dispositions de l'article 142 du code de procédure pénale, ce cautionnement ou ces sûretés garantissent :1 ° La représentation de la personne mise en examen, du prévenu ou de l'accusé à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement, ainsi que, le cas échéant, l'exécution des autres obligations qui lui ont été imposées ;2° Le paiement dans l'ordre suivant :a) De la réparation des dommages causés par l'infraction et des restitutions, ainsi que de la dette alimentaire lorsque la personne mise en examen est poursuivie pour le défaut de paiement de cette dette ;b) Des amendes ; que la décision du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention, détermine les sommes affectées à chacune des deux parties du cautionnement ou des sûretés. Le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention peut toutefois décider que les sûretés garantiront dans leur totalité le paiement des sommes prévues au 2° ou l'une ou l'autre de ces sommes ; que lorsque les sûretés garantissent, en partie ou en totalité, les droits d'une ou plusieurs victimes qui ne sont pas encore identifiées ou qui ne sont pas encore constituées parties civiles, elles sont établies, dans des conditions précisées par décret en Conseil d'Etat, au nom d'un bénéficiaire provisoire agissant pour le compte de ces victimes et, le cas échéant, du Trésor ; que quant à la nécessité du cautionnement pour garantir la représentation en justice de la banque, que la chambre criminelle de la Cour de cassation par sa décision du 20 juin 1989 dit, que selon l'article 142 du code de procédure pénale, le cautionnement garantit à la fois la représentation de l'inculpé et le paiement des amendes, dès lors les juges ne peuvent ordonner un cautionnement tout en relevant que l'intéressé offre des garanties de représentation ;qu'au surplus, en l'espèce, si UBS AG a répondu aux convocations des juges d'instruction, rien ne permet de déduire qu'elle respectera cette attitude au regard de l'évolution de la procédure et de son issue, une personne morale, même réputée fiable, pouvant cependant décider de ne plus honorer ses engagements au vu de l'évolution d'une situation économique et financière nationale et internationale, la partie du cautionnement affectée à cette représentation en justice étant restituable à l'issue de la procédure (art. 142-2 code de procédure pénale), comme le sera le montant affecté à la seconde partie du cautionnement qui n'aura pas à être versé à la victime (art. 142-3 du code de procédure pénale) ; que, dès lors, fixer à un million d'euros le montant du cautionnement imposé à UBS AG, entité étrangère, pour garantir sa représentation en justice jusqu'à l'exécution d'un éventuel jugement apparaît nécessaire et proportionné ; que, quant aux présomptions des éléments constitutifs du blanchiment aggravé prévu et réprimé par les art. 324-1 et 324-2 du Code pénal et reprochés à UBS AG ; que le principe de l'autonomie du délit de blanchiment a déjà été examiné, que sans que ce soit non plus ici le cadre juridique pertinent pour examiner l'existence d'indices graves ou concordants des deux infractions reprochées à l'appelante, on peut noter qu'il n'est pas contesté que l'UBS AG établissement bancaire helvétique que ses structures, son coeur de métier ont offert, notamment entre 2004 et 2011, via le démarchage à l'étranger, de façon habituelle, des facilités pour justifier l'origine mensongère de biens ou de revenus de l'auteur (d'un crime) ou d'un délit, ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect, ou encore il n'est pas contestable, par ce qui a été exposé plus haut, que UBS AG a apporté son concours à des opérations de placement (par l'ouverture de comptes dans ses livres) de dissimulation ou de conversion (par les mécanismes offerts à ses clients, français ou ayant un lien fiscal avec la France, tels que comptes numérotés anonymes, documents bancaires conservés en Suisse, recours à des structures Off Shore ou assurances-vie) ; que, dès lors, de sérieuses présomptions de l'infraction de blanchiment aggravé ont été mises en évidence par l'information à l'encontre de UBS AG, comme il a été ci-dessus exposé, sans qu'il soit nécessaire, en l'état d'individualiser chaque opération, qu'en conséquence, les juges d'instruction régulièrement saisis du délit de blanchiment aggravé (art. 324-1 al2 du code de procédure pénale) pouvaient poser le principe du paiement d'un cautionnement par la personne morale, destiné entre autres à garantir le paiement des amendes et la répartition du préjudice ; que s'il est exact que les juges d'instruction ont mis l'accent sur la nécessité du cautionnement pour garantir le paiement de l'amende et ont plus particulièrement orienté leurs motivations sur cet objectif, la garantie de l'indemnisation des dommages est également visée par ladite ordonnance, et que dès lors, il appartient à la cour d'expliciter la seconde partie de l'objectif de ce cautionnement, et ce en ajoutant aux motifs des juges d'instruction ; quant à l'existence d'un préjudice pour l'Etat français : que si certes, les juges d'instruction ne sont pas saisis du délit de fraude fiscale, ils sont en revanche, pour les motifs ci-dessus exposés régulièrement saisis du délit de blanchiment aggravé, que si l'infraction de fraude fiscale cause un préjudice direct à la Direction Générale des Finances Publiques, le délit de blanchiment cause lui un préjudice à l'Etat français, en l'espèce constitué uniquement partie civile pour blanchiment aggravé dans la présente procédure ; qu'étant rappelé les termes de l'art. 1741 du code général des impôts en vigueur au moment de la commission des faits : "sans préjudice des dispositions particulières relatées dans la présente codification, quiconque s'est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l'établissement ou au paiement total ou partiel des impôts visés dans la présente codification, soit qu'il ait volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu'il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l'impôt, soit qu'il ait organisé son insolvabilité ou mis obstacle par d'autres manoeuvres au recouvrement de l'impôt, soit en agissant de toute autre manière frauduleuse, est passible, indépendamment des sanctions fiscales applicables, d'une amende de 500 000 6 et d'un emprisonnement de cinq ans", les agissements reprochés à UBS France et à UBS Suisse ne recouvrent pas seulement les droits éludés mais également les biens dont le capital est soumis à l'impôt français" ;qu'en effet le délit de blanchiment aggravé reproché à la banque française ou étrangère, facilitant, par la fourniture de moyens adéquats, l'incitation à la fraude fiscale et la dissimulation, par des personnes physiques ou morales de biens (actifs de toutes sortes) et de leur revenus à l'Etat français, si seuls les revenus de ces sommes sont susceptibles d'être imposées à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés, l'ensemble de ces actifs en capital sont susceptibles d'être imposés à l'impôt sur la fortune, l'assiette de l'impôt étant alors la valeur des biens eux mêmes dissimulés, et non pas seulement les revenus en découlant, contrairement à ce que soutient la défense pour ne retenir, pour chiffrer le montant du préjudice, que les droits éludés, que dès lors le principe du préjudice pour l'Etat est certain ; qu'en l'état, au stade de l'information, point n'est nécessaire que l'Etat français puisse ou doive chiffrer le montant de son préjudice, la dissimulation des biens et des droits éludés entraînant obligatoirement des dommages financiers importants, compte tenu de l'ancienneté, de l'habitude et de l'importance de la fraude, entraînant nécessairement pour l'Etat la mise en oeuvre de procédures judiciaires pour faire valoir ses droits et recouvrer ses créances, indépendamment du préjudice économique et budgétaire déjà actuel, caractérisé par l'absence de rentrée des recettes fiscales dues, et tout particulièrement en cette période d'importants déficits budgétaires au plan national ; quant à la proportionnalité du montant du cautionnement et quant aux méthodes de calcul pour déterminer, d'une part, le montant éventuel de l'amende encourue et d'autre part, le montant de la réparation des dommages causés par le blanchiment aggravé à l'Etat français et voire des restitutions, selon les objectifs légaux visés par l'article 142 1° et 2° a et b quant à la détermination du montant du cautionnement ; que certes le montant de ce cautionnement ne peut être fixé au regard de l'attitude de la banque mise en examen dont on ne peut légalement attendre qu'elle participe à son incrimination, par des aveux ou par la production de chiffres ou documents déterminant l'étendue de sa participation aux faits reprochés, qu'on peut seulement déduire de ce comportement, contraire à celui qui a été adopté par UBS AG avec l'autorité judiciaire américaine, mais dont les finalités procédurales sont différentes des nôtres, le souhait de laisser la partie poursuivante seule mettre au jour les éléments à charge, fondement des poursuites, de vouloir tirer bénéfice de l'absence d'une coopération judiciaire internationale en matière de fraude fiscale, entre la France et la Confédération helvétique, et de miser sur une absence de preuves matérielles déterminantes, tout en tentant d'opposer la subjectivité des témoignages, dont toutefois la constance et les convergences, confirmées par les déclarations de mis en examen, ne peuvent être éliminées par ce seul argument ; que la prise en compte d'un ouvrage, nécessairement emprunt de subjectivité pour démontrer telle ou telle thèse, ne saurait être retenue ; qu'en revanche, que les éléments de l'enquête judiciaire menée aux USA et de son aboutissement ne sauraient être écartés, quand bien même les finalités des procédures judiciaires des USA et de la France ne sont pas les mêmes, et qu'il ne convient pas ici de retenir qu' UBS AG a plaidé coupable, UBS étant soucieuse de distinguer les principes de culpabilité et de responsabilité, qu'en revanche, peuvent être mises en exergue certaines similitudes dans le schéma des agissements reconnus par UBS AG devant les autorités américaines et les agissements que la présente information s'emploie à dégager, qu'ainsi, aux USA, UBS AG a admis l'existence d'une entente d'un groupement dans le but de participer à une fraude fiscale, entre 2000 et 2007, les poursuites étant intervenues en 2008 aux USA, que les mécanismes de la fraude utilisés et décrits sont plutôt proches, du moins, dans leur grandes lignes, de ceux mis en évidence par la présente enquête, qu'UBS AG, reconnaissant alors sa responsabilité a accepté de s'acquitter de la somme de 780 000 000 USD, que dès lors le principe d'une comparaison, entre les chiffres retenus par la justice américaine et ceux que l'information s'efforce d'établir avec difficultés parce qu'elle n'est pas aidée, n'est pas sans fondement, puisqu'au surplus à l'aide d'une règle de trois, ce principe retient une proportionnalité avec les "chiffres français", dégagés à partie des témoignages recueillis et des chiffres avancés, comme par exemple, le chiffre moyen des chargés d'affaires ayant exercé en France nécessairement supérieur au chiffre de 2014 (76) et le chiffre moyen annuel des opérations réalisées par chargé d'affaires en France, soit 130 millions, chiffre résultant de données figurant en procédure (D1856), chiffres étayés par les calculs de l'assistant spécialisé fournis le 18 juillet 2014, soit avant la fixation du cautionnement ; que peuvent être considérés comme suffisamment sérieux, les chiffres et calculs, retenus à partir de l'idée que ces démarchages illicites, suivis d'ouverture de comptes en Suisse et de dépôts d'avoirs avaient pour raison essentielle de soustraire les propriétaires ou titulaires de ces avoirs, au niveau de leur capital et ou de leurs revenus, à l'impôt français et que outre le délit de fraude fiscale, des faits de blanchiment, par les mécanismes tels que décrits plus haut, ont été commis, sans qu'il soit nécessaire en l'état d'en établir le montant avec précision et certitude, la présente mesure étant conservatoire, et calculée sur la moitié de la valeur des fonds sur lesquels ont porté les opérations de blanchiment, de sorte qu'une marge de chiffrage est pris en compte et retire tout caractère confiscatoire à ladite mesure, contrairement à ce que soutient la défense ; que les investigations ont établi que les sommes collectées chez UBS hors de France, ayant donné lieu à des reconnaissances d'affaires, ou ATA, entre des clients non français et des CA d'UBS autres que ceux d'UBS France, entre 2004 à 2012, ATA enregistrées dans le système d'information de la banque, ont été évaluées à 1 588 000 000 6 (un milliard, cinq cent quatre vingt huit millions d'euros), que les juges retiennent qu'UBS a expliqué que 231 ATA correspondaient à cette somme, dont 195 identifiés représentaient 1.335.000.000.6, que restaient 27 ATA, non ou partiellement identifiées, correspondant à 212 millions d'euros, qu'au final UBS a reconnu n'avoir pu identifier 29 ATA pour un total de 276 000 000 euros générés entre 2005 et 2008 ; que les juges d'instruction retiennent qu'une partie de ces ATA "sont passées par le Head Front", ATA précisément inscrites dans les carnets de lait, mais qu'il est impossible d'identifier si ces ATA sont le produit d'un démarchage illégal et/ou l'objet d'un blanchiment de fraude fiscale, à hauteur de 176 millions d'euros ; que l'amende encourue est alors de 88 000 000 euros ; que quant au montant des sommes sous gestion de France International, faute de renseignements fournis par UBS en réponse à leur demande, les juges d'instruction, se référant d'une part aux chiffres produits devant l'autorité judiciaire américaine, prenant des chiffres moyens quant au nombre de CA travaillant pour France International (94) et quant au montant moyen des actifs sous gestion, soir 130 millions d'euros en 2010 ont évalué à minima à 12,2 milliards 2 le montant total de ces actifs, et faisant une péréquation avec les "chiffres américains" actifs américains Offshore sous gestion UBS, les magistrats ont évoqué une fourchette haute à 23 milliards d'euros, somme à laquelle UBS AG n'a pas apporté de démenti chiffré et ou argumenté ; que quant à l'évaluation des sommes non déclarées et blanchies par UBS AG, s'il n'est pas nécessaire que ces sommes soient précisément chiffrées, il y a lieu de noter que sans retenir la position d'UBS AG vis à vis de l'autorité judiciaire américaine, mais en considérant comme pertinente la comparaison des agissements (cf supra) outre-atlantique avec ceux commis en Europe, en France et hors de France, par la banque helvétique, et tels que rapportés de manière convergente par plusieurs témoins et mis en examen, les juges d'instruction retiennent le chiffre bas de 12,2 milliards d'euros multiplié par 80% pour évaluer à 9 760 000 000 6 (12,2 x 80%), par an, le montant des sommes fraudées et blanchies par UBS AG en Suisse, et qu'ils en déduisent que l'amende encourue serait donc de 4 880 000 000 6, alors qu'il doit être souligné qu'UBS AG a persisté dans ces pratiques illégales et lucratives, malgré les différentes alertes, avertissements des différentes autorités, françaises ou étrangères ; que, quant aux ressources de la banque suisse, que les chiffres avancés, soit les résultats annuels positifs après impôts pour les exercices 2010, 2011, 2012, 2013, les résultats dégagés hors Etats-Unis sur cette même période, le montant des fonds propres, qui au 31 Décembre 2013 s'élevaient à plus de 39 milliards d'euros, tous chiffres détaillés dans l'ordonnance et non contestés par l'appelante, permettent de déduire qu'un cautionnement fixé à 1,1 milliard d'euros, correspondant à 42,6% de la dernière année de bénéfices après impôt et à 2,8% des fonds propres de la banque UBS AG, ne constitue pas une somme disproportionnée aux ressources de la banque ; qu'en conséquence, adoptant certains des motifs de l'ordonnance ajoutant ou y substituant les siens, la Cour dit que la présente ordonnance modificative de contrôle judiciaire sera confirmée dans son principe, son montant et ses modalités de paiement ;
"1°) alors que, pour être valablement prononcé le cautionnement suppose que les juridictions françaises soient compétentes pour statuer ; qu'il s'évince des motifs mêmes de la Chambre de l'instruction que les nouveaux faits supposés de blanchiment justifiant la modification du contrôle judiciaire auraient été commis exclusivement en Suisse ; qu'en confirmant néanmoins l'ordonnance ayant porté le cautionnement à plus d'un milliard d'euros aux motifs erronés que, saisie de l'unique appel, elle n'aurait pas à se prononcer sur la compétence des juridictions françaises et que le blanchiment serait une infraction autonome, lorsque, à défaut d'avoir caractérisé un quelconque élément constitutif de fraudes fiscales en France, il n'existait aucun élément de rattachement du blanchiment au territoire de la République et qu'elle était donc incompétente pour statuer, la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs en méconnaissance des articles 113-2, 324-1 du code pénal et 142 du Code de procédure pénale ;
"2°) alors que, a méconnu le principe de territorialité de la loi pénale la chambre de l'instruction qui pour élever le cautionnement d'UBS AG à la somme de 1 100 000 000 euros, relève le comportement de l'établissement de crédit, lui reprochant « le souhait de laisser la partie poursuivante seule mettre au jour les éléments à charge » et de « vouloir tirer bénéfice de l'absence d'une coopération judiciaire internationale en matière de fraude fiscale », faisant ainsi d'une mesure du contrôle judiciaire un moyen de pression aux fins de contourner la loi de blocage nationale qui interdit à une banque suisse de divulguer à un Etat étranger des pièces pour des faits commis sur son propre sol ;
"3°) alors que toute mesure de contrainte dont une personne suspectée ou poursuivie peut faire l'objet doit être «proportionnée à la gravité de l'infraction reprochée » ; que la notion de nécessité implique que l'ingérence soit fondée sur un besoin social impérieux et proportionnée au but légitime recherché, la Cour européenne des droits de l'homme rappelant que la législation et la pratique doivent offrir des garanties adéquates et suffisantes contre les abus ; que la chambre de l'instruction ne pouvait se borner à justifier le montant du cautionnement par les objectifs fixés à l'article 142 du code de procédure pénale, sans s'assurer du respect de la proportionnalité de la mesure au sens de l'article 8, de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article 1er du protocole additionnel n°1 à la Convention européenne ;
"4°) alors que, afin d'assurer l'application des droits et libertés que la Convention européenne garantit, il appartient à la Cour de cassation, premier interprète de ces dispositions fondamentales, d'exercer elle même, le contrôle de proportionnalité que la Cour européenne sera, le cas échéant, amené à porter ; qu'en l'espèce ne saurait répondre à cette exigence le cautionnement de plus d'un milliard imposé à une banque internationale qui ne présente aucune difficulté de solvabilité ou de représentation ;
"5°) alors qu'au surplus, s'est prononcée par des motifs hypothétiques la chambre de l'instruction qui a considéré, pour arrêter le montant du cautionnement, comme pertinente la comparaison des agissements outre atlantique avec ceux commis en Europe, en France et hors de France, et a retenu arbitrairement comme mode de calcul un chiffre bas de 12,2 milliards d'euros multiplié par 80 % pour évaluer à 9 760 000 000 euros (12,2 x 80 %) par an, le montant des sommes fraudées et blanchies par UBS AG en Suisse, sans avancer aucun élément tangible qui puisse établir la réalité de cette fraude fiscale, et, a fortiori, son montant ;
"6°) alors que, le cautionnement, quand bien même il tend, selon l'article 142 du code de procédure pénale, à garantir le paiement de l'amende et des dommages intérêts, n'en demeure pas moins une mesure de contrainte devant, comme telle, être justifiée par les nécessités de l'instruction et notamment celle de s'assurer de la présence durant la procédure du mis en examen ; qu'en retenant que « rien n'empêchait de déduire » que la société UBS AG, personne morale « réputée fiable » et qui a « répondu aux convocations des juges d'instruction », ne décide de « ne plus honorer ses engagements au vu de l'évolution d'une situation économique et financière nationale et internationale », la chambre de l'instruction s'est de nouveau prononcé par les motifs hypothétiques pour contourner les garanties évidentes de représentation qu'elle-même constatait ;
"7°) alors que le cautionnement n'a vocation à garantir que le paiement de la réparation des dommages causés par l'infraction et les restitutions et des amendes, à l'exclusion des frais avancés par la partie civile et par la partie publique depuis l'entrée en vigueur de la loi n°93-2 du 4 janvier 1993 ; qu'en confirmant l'ordonnance ayant fixé le cautionnement à un montant de 1 100 000 000 euros destiné à garantir, notamment, les frais avancés par la partie civile, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 142 et 800-1 du code de procédure pénale ;
"8°) alors que toute personne étant présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie, toute mesure impliquant, serait-ce implicitement, une reconnaissance de responsabilité pénale avant toute déclaration de culpabilité porte atteinte à la présomption d'innocence ; qu'il résulte de la combinaison des articles 706-45 du code de procédure pénale et 434-47 du code pénal, qu'en cas de violation du contrôle judiciaire, la personne morale qui est y soumise encourt la peine de confiscation, exposant ainsi UBS AG à la confiscation de " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société UBS AG a été mise en examen des chefs de démarchage bancaire ou financier illicite et de blanchiment aggravé ; que, par ordonnance du 6 juin 2013, le juge d'instruction l'a placée sous contrôle judiciaire avec obligation de fournir un cautionnement de 1,875 millions d'euros destiné à garantir le paiement de l'amende encourue et de 1 million d'euros pour assurer sa représentation en justice ; que, par ordonnance du 23 juillet 2014, les obligations du contrôle judiciaire ont été modifiées et le cautionnement mis à la charge de la société UBS AG a été porté à 1,1 milliard d'euros, dont 1 million pour sa représentation en justice, la somme restante devant garantir les frais avancés par la partie civile, la réparation des dommages causés par l'infraction, les restitutions et les amendes ;
Attendu que, pour confirmer cette dernière ordonnance, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, ni insuffisantes ni hypothétiques, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
Que, d'une part, la société UBS AG a été mise en examen pour des faits susceptibles d'avoir été commis en partie sur le territoire français, certaines des sommes objet du blanchiment ayant été collectées auprès de contribuables démarchés en France ;
Que, d'autre part, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction a justifié, par des motifs dépourvus d'insuffisance comme de contradiction, la proportionnalité du cautionnement au regard du montant des sommes, objet des infractions, ainsi que des ressources et charges de la société ;
Qu'enfin, le versement d'un cautionnement est destiné à garantir le paiement de l'ensemble des sommes énumérées à l'article 142 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guérin, président, M. Soulard, conseiller rapporteur, Mmes Nocquet, Ract-Madoux, de la Lance, Chaubon, MM. Germain, Sadot, conseillers de la chambre, M. Azema, Mme Pichon, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lagauche ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 14-86560
Date de la décision : 17/12/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 22 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 17 déc. 2014, pourvoi n°14-86560


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:14.86560
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