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25/02/2015 | FRANCE | N°13-86951

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 février 2015, 13-86951


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-13, en date du 26 septembre 2013, qui, pour complicité de fraude fiscale et d'omission d'écritures en comptabilité, exercice illégal de la profession d'expert-comptable, l'a condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 janvier 2015

où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 5-13, en date du 26 septembre 2013, qui, pour complicité de fraude fiscale et d'omission d'écritures en comptabilité, exercice illégal de la profession d'expert-comptable, l'a condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 janvier 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme de la Lance, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de Mme le conseiller DE LA LANCE, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAUTHIER ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 63 et 63-1 anciens, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a rejeté les exceptions de nullité soulevées par le demandeur ;
"aux motifs que M. X... a été entendu en qualité de témoin le 13 juillet 2009 pour s'expliquer sur son activité de comptable au sein de la SARL Etisol qui était l'objet d'une plainte pour fraude fiscale et défaut de comptabilité de la part des services fiscaux ; que M. X..., comme l'a relevé le tribunal, s'est présenté librement à la convocation des services de police le 13 juillet 2009 à 9 heures 40 ; qu'il a été entendu sans qu'aucune contrainte n'ait été exercée entre 9 heures 40 et 11 heures 20 soit le temps strictement nécessaire à son audition ; qu'il résulte, par ailleurs, de la lecture du procès-verbal d'audition du 13 juillet 2009 que M. X... a bien été interrogé sur son activité en lien avec la SARL Etisol et à cette occasion, a spontanément et en parfaite connaissance de cause révélé l'existence d'un système de minoration dans les déclarations fiscales portant sur la TVA et l'impôt sur les sociétés ; qu'il a également tenté de minimiser sa responsabilité en indiquant avoir établi ces déclarations fiscales minorées sur les instructions de MM. Z... et A... ; que le fait pour les enquêteurs d'avoir mentionné dans un procès-verbal de recherches du 2 septembre 2009 que M. X... "avait été cité le 8 janvier 2007 dans une affaire de travail clandestin par dissimulation de salarié puis le 12 mars 2008 pour travail clandestin " ne constitue pas une atteinte à la présomption d'innocence car les renseignements fournis ne font état que d'une simple mise en cause ; que ces renseignements ne figurent pas sur le bulletin n°1 du casier judiciaire de M. X... joint à la procédure et n'ont pu de ce fait fausser l'appréciation des magistrats et lui causer grief ; que les exceptions de nullité soulevées par le prévenu seront donc rejetées ;
"alors qu'en vertu de l'article 63 du code de procédure pénale, toute personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de penser qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction doit être placée en garde à vue et bénéficier de l'ensemble des droits attachés à ce régime ; qu'il ressort des termes de l'arrêt attaqué que le prévenu a été entendu le 13 juillet 2009 pour s'expliquer sur son activité de comptable au sein de la SARL Etisol laquelle faisait déjà l'objet d'une plainte de la part des services fiscaux pour fraude fiscale et défaut de comptabilité quand le gérant avait préalablement affirmé aux enquêteurs s'en être entièrement remis à ce dernier pour la tenue des comptes ; que la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, refusé d'annuler la première audition du prévenu en tant que témoin quand il résultait de ses propres constatations qu'il existait des raisons plausibles de penser qu'il s'était rendu coupable des infractions faisant l'objet de l'enquête préliminaire" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que lors de l'enquête ouverte à la suite de la plainte de l'administration fiscale, des chefs de fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, contre la société Etisol, son gérant a déclaré s'en être remis, pour l'établissement des déclarations critiquées, au comptable, M. X..., auquel il faisait toute confiance ; que celui-ci a été entendu comme témoin le 13 juillet 2009 pour s'expliquer sur son activité au sein de cette société puis a fait l'objet, le 19 octobre 2009, d'une nouvelle audition après avoir été placé en garde à vue ;
Attendu que, pour refuser d'annuler le procès-verbal de l'audition du 13 juillet 2009 et la procédure subséquente, les juges énoncent que M. X... s'est présenté librement à la convocation des services de police et a été entendu entre 9 h 40 et 11 h 20, soit le temps strictement nécessaire, sans qu'aucune contrainte n'ait été exercée ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors qu'au cours d'une enquête préliminaire, la personne qui s'est présentée librement et n'a pas été maintenue à la disposition des enquêteurs sous la contrainte peut être entendue sur les faits susceptibles de lui être reprochés sans être placée en garde à vue, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-6 et 121-7 du code pénal, 1741 du code général des impôts, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a déclaré le demandeur coupable d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable et de complicité de fraude fiscale ;
"aux motifs qu'aux termes de l'article 1741 du code général des impôts, le délit de fraude fiscale est réalisé soit par omission volontaire de déclaration dans les délais prescrits, soit par dissimulation d'une part des sommes sujettes à l'impôt excédant le 10ème de la somme imposable ou le chiffre de 153 euros ; que M. Ali Z..., pris en sa qualité de gérant de droit de la SARL Etisol, a été définitivement condamné pour dissimulation de sommes en matière de TVA et d'impôt sur les sociétés pour 2004, 2005 et 2006 ainsi que d'omission de passation d'écritures comptables pour les exercices clos en 2004, 2005 et 2006 ; que la complicité de ce délit de fraude fiscale et d'omission de passation d'écritures comptables qui est reprochée à M. X... repose sur le fait que celui-ci, selon ses propres déclarations, établissait intentionnellement sur les instructions du gérant de droit M. Z... les documents comptables et les déclarations fiscales de manière non sincère afin de réduire les montants imposables ; que lors de la vérification de comptabilité de la société, aucun document comptable obligatoire n'a pu être examiné au titre des périodes vérifiées ce qui a amené l'administration fiscale à établir un procès-verbal de défaut de présentation de comptabilité ; que M. X... a précisé avoir conservé la comptabilité de la SARL Etisol jusqu'en 2007 et l'avoir remise à sa demande à M. Selahattin B... ; qu'il convient, en conséquence, de confirmer la déclaration de culpabilité de M. X... du chef de complicité de fraude fiscale et d'omission de passation d'écritures comptables ; qu'il est également poursuivi du chef d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable pour s'être occupé, selon ses propres déclarations, de la comptabilité ainsi que des obligations sociales et fiscales en établissant les bilans d'une vingtaine de sociétés dont la SARL Etisol ; que l'enquête a permis d'établir que l'activité qu'il avait développée, sous couvert de l'exercice en nom propre de la profession de conseil en entreprise, était exercée en violation du monopole des experts comptables car elle consistait à réaliser des travaux de tenue et d'arrêt de comptabilité ; que M. X... a d'ailleurs reconnu avoir clôturé des comptes ou établi des bilans annuels pour le compte d'une douzaine de clients dont la SARL Etisol alors qu'il n'était pas inscrit au tableau des experts comptables ; que M. X... soulève l'incompatibilité de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 qui réglemente le titre et la profession d'expert-comptable dans sa version consolidée au 25 juillet 2010 avec les principes fondamentaux de la liberté d'établissement et de la libre prestation de services ; qu'il précise également que cette ordonnance est contraire à la directive 200611 23lCE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 et demande subsidiairement à la cour de solliciter, à titre préjudiciel, l'avis de la Cour de justice des Communautés européennes sur ces points et de surseoir à statuer en l'attente de la réponse ; que selon l'article 9 (1) de la directive services "Les Etats membres ne peuvent subordonner l'accès à une activité de service et son exercice à un régime d'autorisation que si les conditions suivantes sont réunies : a) le régime d'autorisation n'est pas discriminatoire à l'égard du prestataire visé ; b) la nécessité d'un régime d'autorisation est justifiée par une raison impérieuse d'intérêt général ; c) l'objectif poursuivi ne peut pas être réalisé par une mesure moins contraignante ..."que, selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, la notion de "raisons impérieuses d'intérêt général" englobe la protection des destinataires de services et des consommateurs ; qu'en l'espèce, le régime d'autorisation mise en place par l'ordonnance no 45-2 138 du 19 septembre 1945 répond à ce critère du droit communautaire en imposant un diplôme reconnu, une déontologie ainsi qu'une assurance professionnelle obligatoire pour protéger les destinataires de services en cas de faute professionnelle ; qu'il n'y a par conséquent, pas lieu à question préjudicielle sur la compatibilité de l'ordonnance n°45-2138 du 19 septembre 1945 avec le droit communautaire ; qu'il convient, en revanche, de confirmer la déclaration de culpabilité de M. X... du chef d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable ; que M. X... n'a jamais été condamné et peut bénéficier du sursis ; qu'il convient de confirmer la peine de huit mois d'emprisonnement assortie en totalité du sursis qui est adaptée à la gravité des faits, aux circonstances particulières dans lesquelles ils ont été commis et à la personnalité de leur auteur ;
"alors que, pour retenir la culpabilité du complice d'une infraction, les juges doivent précisément identifier l'un des modes de commission prévus par l'article 121-7 du code pénal ; qu'en se bornant à relever péremptoirement que M. X... établissait intentionnellement des documents comptables faussés sur les instructions du gérant, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériel qu'intentionnel, les délits de complicité de fraude fiscale et d'omission d'écritures en comptabilité, ainsi que d'exercice illégal de la profession d'expert-comptable, dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq février deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-86951
Date de la décision : 25/02/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 26 septembre 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 fév. 2015, pourvoi n°13-86951


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.86951
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