LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 6 janvier 2015 ), que Pierre X... et son épouse, Yanne Y..., sont décédés respectivement les 17 août et 11 décembre 2012, laissant pour leur succéder trois enfants, Anne, Jean-François et Patrick ; que les deux premiers ont saisi le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, pour être autorisés à faire procéder à la vente aux enchères publiques de trois véhicules en vue d'acquitter le paiement des droits de succession ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Patrick X... fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen, que si, en matière de succession, le président du tribunal de grande instance peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun des indivisaires, il ne dispose pas pour autant du pouvoir de passer outre les règles du partage successoral ; que le juge procédant au partage de la masse successorale ne peut ordonner la licitation d'un bien indivis que si ce bien n'est pas aisément partageable ; qu'il en résulte que le président du tribunal de grande instance ne peut autoriser la vente d'un bien indivis que si ce bien n'est pas aisément partageable ; qu'en se bornant, pour autoriser M. Jean-François X... à faire procéder à la vente aux enchères publiques de trois véhicules de marque Ferrari, à énoncer que Mme Anne X... et M. Jean-François X... ne pouvaient faire face au règlement des droits de succession, dont les indivisaires étaient tenus solidairement, sans constater que ces biens meubles n'étaient pas aisément partageables, à défaut de quoi le partage en nature devait être ordonné, à l'exclusion de toute licitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 815, 815-6 du code civil et 1361 et 1377 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la licitation de biens indivis, autorisée sur le fondement de l'article 815-6 du code civil, ne réalisant pas un partage puisque le prix de vente se substitue dans l'indivision aux biens vendus, la cour d'appel n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Patrick X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. Jean-François X... la somme de 3 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. Patrick X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir autorisé Monsieur Jean-François X... à faire procéder à la vente aux enchères publiques de trois véhicules de marque FERRARI, modèle 275 Winner LM, numéro de série 0816 année 1961, modèle 375 plus Winner LM, numéro de série 0396 AM 1954, et modèle 335 S, numéro de série 0674, année 1957, en vue d'acquitter le paiement des de succession ;
AUX MOTIFS QUE les circonstances de l'affaire ont évolué depuis le prononcé de l'ordonnance entreprise puisque, par lettre du 25 novembre 2014, l'administration fiscale a avisé le notaire chargé par Madame Anne X... et M. Jean-François X... du règlement de la succession de leur mère que la déchéance du régime du règlement fractionné des droits qui avait été sollicité pour le compte de ces derniers avait été prononcée à défaut de garantie suffisante, de telle sorte que ces droits étaient devenus intégralement exigibles ; que rien ne permet de dire, comme l'affirme M. Patrick X..., que cette déchéance serait imputable à l'appelant en raison de son « incurie » dans la recherche d'une garantie ; qu'en effet, le notaire qui a procédé au dépôt de la déclaration à laquelle Patrick X... a refusé de se joindre indique qu'il n'existe, que ce soit dans la succession qui n'est composée que de valeurs et biens mobiliers ou dans le patrimoine personnel des déclarants, aucun immeuble ayant une valeur suffisante pour constituer la garantie hypothécaire à laquelle l'administration fiscale subordonne l'octroi du régime du règlement fractionné ou par laquelle les banques contactées par les héritiers conditionnent la délivrance d'une garantie bancaire susceptible de remplacer une garantie réelle ; qu'il convient de rappeler sur ce point que le total des droits dus par les trois héritiers s'élève à près de 33 millions d'euros si l'on inclut les véhicules que l'appelant demande d'être autorisé à vendre, comme le requiert l'administration ; que la déchéance du régime du règlement fractionné est par conséquent un état de fait dont on ne peut pas retenir qu'il soit spécialement imputable à l'appelant et dont il doit être tenu compte pour apprécier l'existence des conditions de l'application de l'article 815-6 du code civil relatives à l'urgence et à l'intérêt commun ; que sur le premier point, il est manifeste que l'exigibilité des droits qui s'élèvent, pour Anne et Jean-François X... seulement et sans prise en compte des trois voitures qu'il est demandé de mettre en vente, à une somme totale de 12 854 178 ¿ répond à la condition de l'urgence, dès lors que cette exigibilité est immédiate et incompatible avec la durée que nécessitent des opérations de liquidation et de partage qui peuvent être complexes et longues compte tenu du désaccord entre les héritiers et des libéralités accordées par leurs parents ; que l'urgence résulte en particulier des intérêts de retard au taux de 0,40 % qui courent rétroactivement à compter du premier jour du mois ayant suivi la date d'expiration du dépôt de la déclaration et de la majoration de 5 % que les héritiers sont susceptibles d'encourir au titre de l'article 1727-2 du code général des impôts selon la lettre précitée de notification de la déchéance du régime du règlement fractionné des droits ; qu'en second lieu, M. Patrick X... ne peut pas soutenir que la mesure sollicitée par son frère, seul désormais puisque Madame Anne X... dont on ignore la position ne s'est pas associée à l'appel de ce dernier, ne serait pas requise par l'intérêt commun ; qu'en effet, il est constant que, si le règlement de leur part dans les droits de succession est une obligation personnelle des indivisaires, chacun d'eux est solidairement tenu pour la totalité à l'égard de l'administration, qui peut les recouvrer indifféremment contre l'un ou l'autre ; que la défaillance d'un de ces indivisaires crée bien, par conséquent, une menace pour l'indivision qui, dans son ensemble, a le plus grand intérêt à ce que les droits soient acquittés intégralement et dans le bref délai exigé par la législation fiscale, de telle façon que la majoration et les intérêts de retard ne puissent être encourus avec leur conséquence ruineuse sur le montant des sommes susceptibles d'être recouvrées sur les biens indivis ; qu'il apparaît par ailleurs que la position de M. Patrick X... n'est pas aussi claire qu'il le prétend ; qu'il a procédé lui même, dans des conditions qui sont contestées dans la mesure où ses droits sur ce véhicule qui provient lui aussi de la collection de son père n'ont pas été officialisés, sinon par le fait que la carte grise a été mise à son nom, à la vente d'une voiture FERRARI dont le produit, correspondant à la somme de 38 millions d'euros, l'a mis en mesure de s'acquitter des impositions lui incombant, ce qu'il déclare avoir fait ; que M. Patrick X... ne produit toutefois aucune justification de ce paiement, ni aucune déclaration de succession établie à son nom faisant apparaître le montant des droits lui incombant ; qu'en toute hypothèse, le montant des droits qui sont réclamés à M. Jean-François X... et à sa soeur est tel qu'ils ne peuvent s'en acquitter, que ce soit au moyen des liquidités figurant dans la succession qui sont de seulement de 443.746 ¿ ou de leur fortune personnelle puisque le montant de ces droits, de l'ordre de 10 millions d'euros pour chacun si l'on prend en compte l'estimation des trois voitures dont la vente est sollicitée, excède celui des actifs déclarés au titre de l'ISF en 2014 majoré des sommes provenant des donations et des contrats d'assurance vie de leurs parents ; qu'en ce qui concerne M. Jean François X..., qui est seul appelant, son patrimoine est évalué à 3.275.623 ¿ et si l'on ajoute la somme de 2.000.000 ¿ provenant de la donation du 13 décembre 2013 ainsi que celle de 859.274,46 ¿ provenant des contrats d'assurance vie, le total, bien que considérable, reste inférieur au montant des droits qui sont devenus immédiatement exigibles par suite de la déchéance du régime du règlement fractionné ; que l'on ignore la position de Madame Annie X... qui, toutefois, apparaît concernée, à la lecture de la lettre de l'administration fiscale, par la déchéance dudit régime ; que sa fortune personnelle est supérieure à celle de son frère (5.205.324 ¿) mais, sauf à supposer qu'elle en aliène la plus grande partie, ce qui n'est pas concevable, les donations de ses parents et le bénéfice des contrats d'assurance vie ne lui permettent pas de s'acquitter des droits devenus exigibles autrement que par l'aliénation d'une partie des biens de l'indivision ; qu'il apparaît au regard de ces diverses observations, que la mesure sollicitée sur le fondement de l'article 815-6 du code civil répond aux conditions relatives à l'urgence et, compte tenu de la solidarité des héritiers à l'égard du recouvrement de la créance de l'administration fiscale, à l'intérêt commun des indivisaires ; que l'argument selon lequel la vente aux enchères des plus beaux fleurons de la collection de véhicules de course X... serait contraire à l'intérêt commun de la succession n'est pas pertinent ; que la collection n'a en elle même d'intérêt que pour M. Patrick X..., qui est propriétaire du domaine sur lequel elle est entreposée et, celui-ci n'ayant pas la propriété exclusive des objets qui la compose, elle a d'une manière ou d'une autre vocation à être partagée ; que les véhicules sont des biens mobilisables et ne sont pas l'objet d'une exploitation au plan économique ; qu'ils ont été choisis en fonction de l'évaluation qui en a été faite par les commissaires-priseurs ayant procédé à l'inventaire, parce que le total de leurs valeurs permettait de couvrir le montant des droits de succession ; que M. Patrick X... n'a pas formulé d'autre proposition de vente que celle sollicitée par l'appelant ; que l'argument qu'il tire de ce qu'une vente de gré à gré serait mieux appropriée, comme le démontre le prix qu'il a lui même retiré de la vente d'une FERRARI 250 GTO qui lui aurait été donnée par ses parents, n'est pas sérieux puisque c'est précisément son refus de vendre d'autres véhicules de la collection qui et à l'origine de l'actuelle procédure ; que la demande formulée devant la Cour par l'appelant en cas d'impossibilité de procéder à la vente aux enchères prévue en février 2015 n'est pas une demande nouvelle qui serait irrecevable en application des dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile dés lors qu'elle se justifie par le raccourcissement du délai pour procéder à ladite vente et tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge ; qu'enfin, le produit de la vente étant affecté à l'intérêt de l'ensemble des indivisaires, M. Patrick X... ne peut pas soutenir que le versement de ce prix entre les mains des notaires chargés du règlement de la succession serait susceptible de le léser ; qu'une créance lui sera reconnue dans les comptes de l'indivision s'il s'avère exact qu'il s'est acquitté des droits lui incombant personnellement ; qu'il y a lieu de réformer la décision entreprise et d'accueillir les demandes de M. Jean François X... selon les modalités qui seront précisées dans le dispositif ;
ALORS QUE si, en matière de succession, le président du tribunal de grande instance peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun des indivisaires, il ne dispose pas pour autant du pouvoir de passer outre les règles du partage successoral ; que le juge procédant au partage de la masse successorale ne peut ordonner la licitation d'un bien indivis que si ce bien n'est pas aisément partageable ; qu'il en résulte que le président du tribunal de grande instance ne peut autoriser la vente d'un bien indivis que si ce bien n'est pas aisément partageable ; qu'en se bornant, pour autoriser Monsieur Jean-François X... à faire procéder à la vente aux enchères publiques de trois véhicules de marque FERRARI, à énoncer que Madame Anne X... et Monsieur Jean-François X... ne pouvaient faire face au règlement des droits de succession, dont les indivisaires étaient tenus solidairement, sans constater que ces biens meubles n'étaient pas aisément partageables, à défaut de quoi le partage en nature devait être ordonné, à l'exclusion de toute licitation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 815, 815-6 du Code civil et 1361 et 1377 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, après avoir autorisé Monsieur Jean-François X... à faire procéder à la vente aux enchères publiques de trois véhicules de Marque FERRARI , modèle 275 Winner LM, numéro de série 0816 année 1961, modèle 375 plus Winner LM, numéro de série 0396 AM 1954, et modèle 335 S, numéro de série 0674, année 1957, d'avoir dit que si la vente ne pouvait avoir lieu lors du salon RETROMOBILE, Monsieur Jean-François X..., à défaut d'accord entre les cohéritiers, se concerterait avec les commissaires-priseurs afin de déterminer la meilleure vente publique permettant de procéder à la vente des véhicules ;
AUX MOTIFS QU'il apparaît que la mesure sollicitée sur le fondement de l'article 815-6 du Code civil répond aux conditions relatives à l'urgence et, compte tenu de la solidarité des héritiers à l'égard du recouvrement de la créance de l'administration fiscale, à l'intérêt commun des indivisaires (¿) ;qu'il y a lieu de réformer la décision entreprise et d'accueillir les demandes de M. Jean François X... selon les modalités qui seront précisées dans le dispositif ;
ALORS QUE le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun ; qu'il doit déterminer lui-même ces mesures, sans pouvoir conférer à l'une des parties le pouvoir de décider des mesures qui seront mises en oeuvre et d'en déterminer les modalités ; qu'en autorisant Monsieur Jean-François X..., à défaut d'accord entre les cohéritiers, à choisir, en concertation avec les commissaires-priseurs, la meilleure vente aux enchères pour procéder à la vente des véhicules de marque FERRARI et à fixer lui-même les modalités de la vente, la Cour d'appel a violé l'article 815-6 du Code civil.