LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 10 juillet 2014), que la SCI de l'Etoile César est propriétaire d'un immeuble donné à bail à compter du 1er janvier 1995 à M. X..., aux droits duquel se trouve la société FTA ; que la locataire a, suivant acte du 4 juin 2010, demandé le renouvellement du bail ; que la bailleresse a accepté ce renouvellement par acte du 19 août 2010, puis, par acte du 26 octobre 2010, a signifié à la société preneuse un congé, rétractant son acceptation et portant refus de renouvellement sans indemnité d'éviction, pour défaut d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ; que la bailleresse a assigné la société FTA en constatation de la déchéance du droit au renouvellement et expulsion ;
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, sans dénaturation, que la seule lettre du 13 juin 2005 de l'ancien conseil de la SCI de l'Etoile César, antérieure de cinq années à la demande de renouvellement du bail, était insuffisante à caractériser la connaissance par le bailleur du défaut d'immatriculation de la société FTA, et qu'en toute hypothèse la seule connaissance par le bailleur du défaut d'immatriculation de FTA en 2005 ne suffisait pas à caractériser sa volonté non équivoque de renoncer à se prévaloir des conditions auxquelles est subordonné le statut des baux commerciaux, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société FTA aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société FTA, la condamne à payer à la SCI de l'Etoile César la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour la société FTA.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, disant régulier le congé signifié par la SCI de L'ETOILE CESAR le 26 octobre 2010, ordonné l'expulsion de la Société FTA du local à usage commercial qu'elle louait 42, avenue Kurssal à CUCQ STELLA PLAGE ;
AUX MOTIFS QUE la SCI de L'ETOILE CESAR, propriétaire d'un immeuble à usage commercial, sis 42, avenue Kurssal à CUCQ STELLA PLAGE (PAS-DE-CALAIS) a loué cet immeuble à Monsieur X... par acte du 27 novembre 1995, avec effet rétroactif au 1er janvier 1995, pour y exercer un commerce de café-brasserie ; que le 1er octobre 1997, Monsieur X... a cédé son fonds de commerce à Monsieur Y... dont les héritiers ont, par acte du 22 février 2005, cédé le même fonds à la Société FTA ; que par acte du 4 juin 2010, la Société FTA a fait signifier à la SCI de L'ETOILE CESAR une demande de renouvellement du bail à compter du 1er janvier 2011 ; que par acte du 19 août 2010, la bailleresse a déclaré accepter le renouvellement du bail aux clauses et conditions du précédent, sauf le loyer à fixer à 12.000 ¿ HT par an ; que se prévalant de ce que la Société FTA n'était pas immatriculée au Registre du commerce et des sociétés au titre du fonds de commerce exploité à CUCQ STELLA PLAGE, la bailleresse a fait signifier, le 26 octobre 2010, à la Société FTA, un congé avec refus de renouvellement, avec rétractation de l'acceptation du renouvellement et sans indemnité d'éviction ; que le 5 novembre 2010, la Société FTA a régularisé, au greffe du Tribunal de commerce de BOULOGNE-SUR-MER, son inscription pour le fonds de commerce exploité 42, avenue Kurssal, à CUCQ STELLA PLAGE ; que par acte du 26 janvier 2011, la SCI de L'ETOILE CESAR a assigné la Société FTA devant le Tribunal de grande instance de BOULOGNE-SUR-MER aux fins d'obtenir l'expulsion de la locataire ; que le Tribunal a rendu le jugement entrepris ; que la bailleresse a, par acte du 19 août 2010, expressément accepté le renouvellement du bail ; qu'elle ne pouvait revenir sur cet accord qu'en invoquant un motif grave et légitime antérieur à la demande de renouvellement dont elle ignorait l'existence ; que le bénéfice du droit au renouvellement du bail est subordonné à ce que le preneur remplisse les conditions générales d'application du statut des baux commerciaux, prévues par l'article L. 145-1 du Code de commerce, notamment être immatriculé, en tant que propriétaire du fonds, au Registre du commerce et des sociétés ; qu'il est constant que la condition relative à l'immatriculation du preneur pour le fonds de commerce de STELLA PLAGE -qui ne saurait se confondre avec un simple changement d'adresse du fonds précédemment exploité par la Société FTA au TOUQUET, dont l'activité avait cessé le 2 février 2004- n'était remplie ni à la date de la demande de renouvellement du bail ni à celle du congé donné par la bailleresse ; que la procédure n'établit ni la connaissance en 2010, par la bailleresse de l'absence d'immatriculation du preneur, la seule lettre du 13 juin 2005 de l'ancien conseil de la SCI de L'ETOILE CESAR à la Société FTA antérieure de cinq années à la demande de renouvellement du bail, étant insuffisante à caractériser une telle connaissance, -ni, en admettant que la de la SCI de L'ETOILE CESAR ait été informée de l'absence d'immatriculation, une renonciation non équivoque de la bailleresse à se prévaloir de cet élément, la seule connaissance par le bailleur du défaut d'immatriculation de la Société FTA en 2005 pour le fonds de commerce de STELLA PLAGE ne suffisant pas à caractériser la volonté non équivoque du bailleur de renoncer à se prévaloir des conditions auxquelles est subordonné le statut des baux commerciaux ; qu'à cet égard, le fait que la bailleresse se soit abstenue de vérifier si le preneur avait régularisé la situation -alors que c'est à la locataire qu'il appartenait de justifier de sa situation- est insuffisante à démontrer la volonté de la bailleresse de renoncer à invoquer la condition d'immatriculation ; que le défaut d'immatriculation de la Société FTA à la date de la demande de renouvellement de bail et l'exercice, par cette dernière, d'une activité commerciale pendant plus de cinq années sans immatriculation constituent un motif grave et légitime justifiant le congé donné au preneur le 26 octobre 2010 ; qu'en conséquence, la Cour infirmera le jugement entrepris, dira régulier le congé signifié par la SCI de L'ETOILE CESAR et ordonnera l'expulsion de la locataire ; qu'en application de l'article L. 145-17 I du Code de commerce, le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant ; que tel étant le cas en l'espèce, la Société FTA sera déboutée de sa demande d'indemnité d'éviction (arrêt, p. 3 à 5) ;
1°) ALORS QUE si le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité, s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant, il peut toutefois renoncer, sans équivoque et en connaissance de cause, à se prévaloir du défaut d'immatriculation de son locataire au Registre du commerce et des sociétés pour lui accorder le renouvellement du bail commercial ; que, dans une lettre en date du 13 juin 2005 du conseil de la SCI de L'ETOILE CESAR à la Société FTA, il était indiqué que « La SCI L'ETOILE CESAR me remet la sommation interpellative qui a été délivrée par Maître FONTAINE le 7 juin dernier concernant l'occupation des locaux 42, avenue du Kurssal à STELLA PLAGE appartenant à ma cliente. Aux termes de cette sommation vous avez répondu que la Société FTA était propriétaire en vertu d'un acte reçu par Maître QUILLET. Ma cliente m'indique ne pas être informée de cette cession et d'ailleurs le droit au bail ne lui a jamais été signifié. Par ailleurs, elle n'a jamais donné son accord contrairement à ce que vous indiquiez à l'huissier que ce soit directement ou par l'intermédiaire de quelque conseil que ce soit. A ma connaissance, aucune publicité n'a eu lieu dans la presse concernant cette cession. Aucun transfert de siège social n'est repris au greffe de BOULOGNE-SUR-MER » ; qu'en retenant que cette lettre était insuffisante à caractériser que la SCI de L'ETOILE CESAR avait été informée du défaut d'immatriculation de la Société FTA au Registre du commerce et des sociétés, quand une telle connaissance résultait nécessairement du reproche fait à la locataire de n'avoir effectué aucun transfert de siège social auprès du greffe du Tribunal de commerce de BOULOGNE-SUR-MER; la Cour d'appel a violé les articles L. 145-1, L. 145-17 du Code de commerce et 1134 du Code civil ;
2°) ALORS QUE si le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité, s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant, il peut toutefois renoncer sans équivoque et en connaissance de cause, à se prévaloir du défaut d'immatriculation de son locataire au Registre du commerce et des sociétés pour lui accorder le renouvellement du bail commercial ; qu'en ajoutant qu'en admettant que la SCI de L'ETOILE CESAR ait été informée de l'absence d'immatriculation, la seule connaissance par celle-ci du défaut d'immatriculation de la Société FTA en 2005 pour le fonds de commerce de STELLA PLAGE ne suffisait pas à caractériser sa volonté non équivoque de se prévaloir des conditions auxquelles était subordonné le statut des baux commerciaux, sans rechercher si l'acceptation du renouvellement du bail commercial, intervenue par acte extra-judiciaire le 19 août 2010, soit plus de deux mois après la demande de renouvellement formée par la Société FTA, ne démontrait pas que la bailleresse avait accepté ce renouvellement en toute connaissance de cause, en renonçant tacitement mais nécessairement et sans équivoque à se prévaloir du défaut d'immatriculation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 145-17 du Code de commerce ;
3°) ALORS QUE si le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité, s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant, il ne peut ultérieurement refuser le renouvellement pour motif grave et légitime, en invoquant des faits dont il avait connaissance à la date d'acceptation du renouvellement ; qu'en retenant enfin que le défaut d'immatriculation de la Société FTA au Registre du commerce et des sociétés à la date de demande de renouvellement de bail et l'exercice par cette dernière d'une activité commerciale pendant plus de cinq années sans immatriculation constituaient un motif grave et légitime justifiant le congé donné le 26 octobre 2010, quand précisément la SCI de L'ETOILE CESAR ne pouvait valablement rétracter son acceptation sur le principe du renouvellement du bail commercial dans la mesure où il résultait des termes de la lettre du 13 juin 2005 qu'elle avait découvert antérieurement à son acceptation que la locataire n'était pas immatriculée au Registre du commerce et des sociétés, de sorte que l'acceptation du 19 août 2010 emportait tacitement mais nécessairement et sans équivoque renonciation à se prévaloir de ce défaut d'inscription, la Cour d'appel a violé l'article L. 145-17 du Code de commerce.