LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Y... ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 janvier 2015), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 18 décembre 2012, pourvoi n° W 11-24. 305), que Mme Z... et MM. A..., B..., C..., D..., E... et X..., médecins, étaient associés de la société par actions simplifiée Clinique esthétique de Paris Spontini (la société CEPS) ayant pour objet l'exploitation d'une clinique ; que M. X... était membre du comité de direction de la société CEPS ; que le 2 avril 2003, MM. X... et E... ont cédé leurs actions à leurs confrères et le 21 février 2005, ces derniers ont cédé leurs actions à la Compagnie générale de santé ; que reprochant à M. X... et à M. Y..., notaire et beau-frère du premier, d'avoir, au mois de janvier 2003, fait l'acquisition, par sociétés interposées, de l'immeuble dans lequel était exploitée la clinique, cependant que le premier connaissait l'objectif poursuivi par les autres associés d'acquérir cet immeuble en leur nom propre et que le second avait reçu mandat de négocier l'opération pour leur compte, Mme Z... et MM. A..., B..., C... et D... les ont assignés en paiement de dommages-intérêts ; que M. E... est intervenu volontairement à l'instance ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire qu'en sa qualité de dirigeant de la société CEPS, il a manqué à son obligation de loyauté envers ses associés en réalisant pour son compte personnel et à leur insu l'opération immobilière que ceux-ci souhaitaient effectuer ensemble pour l'exercice de leur activité professionnelle et de le condamner à payer des dommages-intérêts auxdits associés alors, selon le moyen, que les statuts de la société par actions simplifiée fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ; qu'en se fondant, pour retenir la qualité de dirigeant de M. X..., sur la considération qu'il aurait été administrateur de la société, après avoir constaté que les statuts de la Sas Ceps stipulaient que la société était dirigée et administrée par un « comité de direction » et que s'il avait été décidé, lors d'une assemblée générale du 2 avril 2002, que ce « comité de direction » serait remplacé par un « conseil d'administration », aucune modification des statuts n'était produite, la cour d'appel, qui n'a pas établi la qualité de dirigeant de droit de monsieur X..., a violé les articles L. 225-251, L. 227-5, L. 227-6 et L. 227-8 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant affirmé, dans ses conclusions d'appel, que dès lors qu'il n'avait pas commis, ne serait-ce qu'une faute morale à l'égard de ses associés, la cour d'appel n'aurait pas besoin de s'interroger sur le point de savoir si le membre du comité de direction ou du conseil d'administration d'une société par actions simplifiée est un dirigeant au sens de l'article L. 225-251 du code de commerce, M. X... ne peut présenter devant la Cour de cassation un moyen incompatible avec la position qu'il a soutenue devant les juges du fond ; que le moyen est irrecevable ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en ses première et troisième à septième branches, ni sur le second moyen, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à Mme Z... et MM. E..., A..., B..., C... et D... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Matuchansky, Vexliard et Poupot, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, D'AVOIR dit que monsieur X..., en sa qualité de dirigeant de la Sas Ceps, avait manqué à son obligation de loyauté envers ses associés en réalisant pour son compte personnel et à leur insu l'opération immobilière que ceux-ci souhaitaient effectuer ensemble pour l'exercice de leur activité professionnelle et D'AVOIR condamné monsieur X... à payer auxdits associés, madame Z... et messieurs A..., B..., C..., D... et E... les sommes de 250. 000 euros chacun au titre de leur préjudice économique et 5. 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des articles L. 227-8 et L. 225-251, alinéa 1er du code de commerce que le dirigeant d'une société est tenu à l'égard tant de la société que de ses associés d'une obligation de loyauté et qu'il engage sa responsabilité si l'inexécution de cette obligation engendre un préjudice ; que l'obligation de loyauté du dirigeant à l'égard des coassociés avait déjà été exprimée et il importe peu qu'elle ait été retenue dans des circonstances particulières, dès lors qu'il s'agit d'une obligation générale qui ne peut voir son application limitée à des domaines précis et exclusifs ; que les statuts de la Sas Ceps du 2 octobre 2001 stipulent que la société est dirigée et administrée par un comité de direction composée de 5 membres minimum ; que les statuts n'ont pas fait apparaître monsieur X... parmi les membres du comité de direction ; que lors d'une assemblée générale du 2 avril 2002, il a été décidé que le « comité de direction » était remplacé par un « conseil d'administration » ; que cependant, la lecture de ce document dont les pages ne sont pas paraphées, amène à considérer que ce changement de termes s'effectue dans le cadre du pacte d'actionnaire et il n'est produit aucune modification des statuts ; que néanmoins, il est versé aux débats des procès-verbaux du conseil d'administration des 16 mai et 2 septembre 2002 qui font apparaître monsieur X... parmi les administrateurs ainsi qu'un procès-verbal du conseil d'administration du 2 avril 2003 relatif à la démission de monsieur X... de son mandat d'administrateur, qu'il avait présentée dans une lettre du 4 mars 2003 ; qu'ainsi même s'il n'est pas produit de décision ayant formalisé la désignation de monsieur X... en qualité d'administrateur, il ressort suffisamment de ces pièces qu'il a exercé ces fonctions à tout le moins entre le 16 mai 2002 et le 4 mars 2003, période pendant laquelle l'acquisition de l'immeuble de la rue Spontini s'est négociée et réalisée ; qu'enfin, il convient de relever que l'article L. 225-251 du code de commerce vise tant les administrateurs que le directeur général et que les articles L. 227-7 et L. 227-8 du code de commerce soumettent les dirigeants des sociétés anonymes simplifiées aux mêmes règles de responsabilité que ceux des sociétés anonymes ; que monsieur X... étant tenu à une obligation de loyauté vis à vis de ses coassociés, il convient donc de rechercher s'il a agi dans le respect de cette obligation ; que dans un compte-rendu de réunion tenue entre les praticiens et la Cgs le 24 septembre 2001 en vue d'un accord cadre prévoyant une augmentation de capital réservée à la Cgs, il est fait état de la possibilité d'acheter l'immeuble de la rue Spontini alors que les travaux à réaliser-qui sont acquis au propriétaire-représentent une somme importante et que celui-ci est prêt à vendre ; que l'idée était de faire un achat en crédit bail en incluant les travaux ; qu'en cas d'acquisition immobilière, il aurait été créé une Sa pour l'activité et une Sci pour l'immobilier ; qu'il était proposé que la Cgs approche le bailleur par le biais de son département immobilier ; que monsieur X... déduit de ce compte-rendu que l'acquisition de l'immeuble devait être réalisée par une Sci filiale de la Sas Ceps et que le projet d'un achat des médecins à travers une Sci qu'ils auraient constituée entre eux sans la Cgs, n'existait pas ; que pour établir le défaut d'implication de la Cgs, les praticiens ont versé une attestation de monsieur F... président de son directoire mais cette attestation n'a pas de valeur probante, ainsi que l'ont retenu les 1ers juges, dès lors quelle a été établie en 2008 par une personne qui n'a pas participé aux négociations de l'époque, et qui ne précise pas quelles ont pu être ses sources d'information sur le sujet ; que néanmoins, les appelants produisent une lettre du 3 juillet 2007 de monsieur G..., consultant en études et financements, qui fait état du projet d'acquisition des praticiens et en détaille les conditions matérielles ; qu'ils versent également aux débats une lettre du Cic du 2 juillet 2007 par laquelle la banque confirme le souhait du docteur B... d'acquérir l'immeuble avec d'autres associés et la Cgs et l'existence de négociations avec le propriétaire ; que ces éléments suffisent à établir que les praticiens avaient effectivement le projet d'acquérir l'immeuble abritant la clinique par le biais d'une Sci à créer, que des négociations avec le bailleur avaient été entamées et que des démarches avaient été entreprises afin d'envisager le financement ; que le fait que le montage juridique n'ait pas été définitivement fixé ou que la participation de la Cgs ne puisse pas être précisément définie est sans incidence dans la détermination de la faute reprochée à l'intimé dès lors que la volonté des praticiens de participer à cet investissement est suffisamment établie ; que par ailleurs, monsieur X... ne conteste pas avoir été informé du projet d'acquisition avant même de devenir associé de la Ceps, indiquant seulement qu'il s'agissait d'un projet de la Sas ; qu'or la société était elle-même à ce moment exclusivement constituée par des praticiens et même si l'entrée de la Cgs était en discussion, leur départ n'était nullement d'actualité ; que monsieur X... ne conteste pas non plus être resté totalement silencieux sur l'opération qu'il a effectuée avec son beau-frère, monsieur Y..., et qui lui a permis par l'intermédiaire d'une Sci et d'une Eurl, de réaliser l'acquisition de l'immeuble abritant la clinique ; que ce silence, étonnant compte tenu des relations existant entre l'ensemble des praticiens impliqués dans la création de la clinique Spontini, tiendrait au fait que le projet d'acquisition de l'immeuble avait été abandonné ; que monsieur X... en veut pour preuve la signature du contrat de bail le 30 octobre 2001 ; que néanmoins la signature d'un bail permettait à la Sas Ceps de sécuriser son exploitation et ne l'empêchait nullement de chercher à acquérir l'immeuble alors surtout qu'elle allait réaliser de très importants travaux de rénovation qui selon le contrat de bail, seraient acquis au propriétaire ; qu'il ne peut donc se déduire de ce seul élément que les praticiens avaient renoncé à acquérir l'immeuble où ils entendaient exercer leur activité professionnelle ; qu'une déclaration d'aliéner a été déposée le 3 juin 2002 et l'immeuble a été vendu le 17 janvier 2003 sans que la Ceps en soit informée, celle-ci ayant seulement reçu une lettre le 24 juillet 2003 au nom de l'ancien propriétaire, la Sa Foncière François 1er, l'avisant de ce qu'il existait un changement dans le mandat de gestion désormais confié au cabinet Pierre Guigou ; que le nom du nouveau propriétaire, la Sci Foncière François 1er n'est apparu sur les factures de loyer qu'à compter du mois d'août 2003, sans que l'attention de la Ceps ne soit autrement attirée sur le transfert de propriété ; qu'il y a donc lieu de retenir que bien que connaissant la volonté de ses coassociés de se porter acquéreurs de l'immeuble, monsieur X... a mené des négociations dans son seul intérêt et s'est abstenu de les informer de ses propres démarches ayant abouti à la vente du bien à son profit et celui de son beau-frère ; que cette attitude doit être qualifiée de déloyale ; qu'il y a donc lieu de retenir que monsieur X... en sa qualité de dirigeant de la Sas Ceps a manqué à son obligation de loyauté envers ses associés en réalisant en son nom personnel et à leur insu l'opération immobilière que ceux-ci souhaitaient effectuer ensemble ; qu'il a donc commis une faute engageant sa responsabilité dans la mesure où celle-ci a engendré un préjudice (arrêt, pp. 5 à 8) ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE les dispositions de l'article L. 225-251 du code de commerce ne visent que les agissements commis par un dirigeant de droit et non ceux commis par un dirigeant de fait ; qu'en retenant que monsieur X... aurait été tenu d'une obligation de loyauté vis-à-vis de ses coassociés en sa qualité de dirigeant, cette qualité se déduisant de ce qu'il aurait exercé les fonctions d'administrateur entre le 16 mai 2002 et le 4 mars 2003, cependant qu'elle avait constaté qu'il n'était pas établi que monsieur X... avait été formellement désigné pour exercer ces fonctions, de sorte qu'il ne pouvait être qualifié de dirigeant de droit, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 225-251, L. 227-6 et L. 227-8 du code de commerce ;
ALORS, EN DEUXIEME LIEU, QUE les statuts de la société par actions simplifiée fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ; qu'en se fondant, pour retenir la qualité de dirigeant de monsieur X..., sur la considération qu'il aurait été administrateur de la société, après avoir constaté que les statuts de la Sas Ceps stipulaient que la société était dirigée et administrée par un « comité de direction » et que s'il avait été décidé, lors d'une assemblée générale du 2 avril 2002, que ce « comité de direction » serait remplacé par un « conseil d'administration », aucune modification des statuts n'était produite, la cour d'appel, qui n'a pas établi la qualité de dirigeant de droit de monsieur X..., a violé les articles L. 225-251, L. 227-5, L. 227-6 et L. 227-8 du code de commerce ;
ALORS, EN TROISIEME LIEU ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la qualité de dirigeant suppose que soit établie une activité positive de direction dans la société, exercée en toute indépendance par l'intéressé ; qu'après avoir constaté que les statuts ne prévoyaient pas que la société soit dirigée par un conseil d'administration et qu'il n'était pas établi que monsieur X... avait été formellement désigné en qualité d'administrateur, la cour d'appel, qui s'est bornée, pour retenir néanmoins la qualité de dirigeant de monsieur X..., à relever qu'avaient été versés aux débats des procès-verbaux le mentionnant parmi les administrateurs puis faisant part de sa démission de son mandat d'administrateur, et n'a pas constaté le moindre acte positif de direction réalisé par monsieur X... dans la société, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 225-251, L. 227-5, L. 227-6 et L. 227-8 du code de commerce ;
ALORS, EN QUATRIEME LIEU ET SUBSIDIAIREMENT, QUE la cour d'appel a relevé que, selon monsieur X..., le projet d'acquisition de l'immeuble concernait, non les associés mais la Sas, et elle a constaté que celle-ci pouvait chercher à acquérir l'immeuble dès lors qu'elle allait réaliser de très importants travaux de rénovation qui, selon le contrat de bail qu'elle avait conclu, seraient acquis au propriétaire ; qu'en retenant que la responsabilité civile de monsieur X... était engagée en sa qualité de dirigeant de la Sas Ceps à l'égard des associés de cette société pour avoir, à leur insu, acheté l'immeuble litigieux pour son propre compte, sans rechercher qui, de la société ou des associés, avait également projeté d'acheter cet immeuble, par la considération que l'absence de fixation définitive du montage juridique était « sans incidence », cependant qu'une telle recherche était déterminante, en ce que l'achat de l'immeuble par la société aurait privé les associés de la possibilité de rechercher individuellement la responsabilité civile du dirigeant sur ce fondement, sauf à démontrer un préjudice personnel, distinct de celui subi par la personne morale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce, ensemble l'article 1842 du code civil ;
ALORS, EN CINQUIEME LIEU ET SUBSIDIAIREMENT, QUE si le dirigeant, en vertu du devoir de loyauté dont il est tenu en cette qualité, doit s'interdire de réaliser, à titre personnel, toute opération qui aurait pu être avantageuse pour la société, en revanche un tel devoir ne lui interdit pas de réaliser une opération économique étrangère à l'activité sociale, quand bien même celle-ci aurait pu avoir un intérêt pour les associés ; qu'à supposer que l'opération immobilière litigieuse, correspondant à l'acquisition de l'immeuble dans lequel l'activité sociale était exploitée, ait été envisagée par les associés, il résultait des constatations de l'arrêt que cette opération était étrangère à l'activité sociale et qu'elle n'était de nature à intéresser les associés qu'en raison des « avantages financiers » qu'elle pouvait leur apporter en leur permettant « de pérenniser leur outil de travail, d'obtenir des revenus pour leur retraite et d'augmenter leur capital » ; qu'en retenant que monsieur X... avait manqué au devoir de loyauté dont il était tenu à l'égard des associés en sa qualité de dirigeant de la Sas en réalisant en son nom personnel ladite opération immobilière, cependant qu'il résultait des propres constatations de l'arrêt que ladite opération ne relevait pas du strict champ social, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales desdites constatations, a violé, par fausse application, les articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce ;
ALORS, EN SIXIEME LIEU, QUE si le devoir de loyauté du dirigeant lui impose de communiquer aux associés toute information sociale de nature à influer sur leur consentement, un tel devoir ne saurait s'étendre au-delà de la sphère strictement sociale, pour porter sur des informations qui ne concernent pas directement la société, mais sont relatives à une opération économique que les associés souhaitent réaliser à des fins personnelles ; qu'en retenant que monsieur X... avait manqué au devoir de loyauté dont il était tenu à l'égard des associés en sa qualité de dirigeant de la Sas en réalisant à leur insu l'opération immobilière litigieuse qu'ils avaient eux-mêmes projeté, cependant qu'il résultait des propres constatations de l'arrêt que ce projet ne relevait pas du strict champ social mais était justifié par des « avantages financiers » qu'une telle opération pouvait leur apporter en leur permettant « de pérenniser leur outil de travail, d'obtenir des revenus pour leur retraite et d'augmenter leur capital », la cour d'appel a derechef violé, par fausse application, les articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce ;
ALORS, EN SEPTIEME LIEU, QU'à supposer que l'opération d'acquisition ait été envisagée au profit de la société elle-même, et non des associés, seule celle-ci pouvait être considérée comme bénéficiaire d'un devoir de loyauté du dirigeant dont le non-respect aurait été constitutif d'un manquement, les associés n'étant recevables à agir à titre personnel que s'ils démontraient l'existence d'un préjudice qui leur était personnel, distinct du préjudice social ; qu'en énonçant, pour retenir la responsabilité de monsieur X... à l'égard des associés, que la société était « exclusivement constituée par des praticiens » et que monsieur X..., en réalisant l'opération à leur insu, avait commis une faute engageant sa responsabilité dans la mesure où celle-ci avait engendré un préjudice, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé un préjudice personnel à chacun des associés seul de nature à justifier leur action individuelle, a violé les articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce, ensemble l'article 1842 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)Le moyen reproche à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, D'AVOIR condamné monsieur X..., en sa qualité de dirigeant de la Sas Ceps, à payer aux associés de cette société, madame Z... et messieurs A..., B..., C..., D... et E... les sommes de 250. 000 euros chacun au titre de leur préjudice économique et 5. 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral ;
AUX MOTIFS QUE monsieur X... a commis une faute engageant sa responsabilité dans la mesure où celle-ci a engendré un préjudice ; qu'il fait valoir que les appelants n'avaient pas les moyens d'acquérir le bien et que lui-même n'était pas intéressé à réaliser un investissement avec eux ; que néanmoins l'immeuble a été acquis le 17 janvier 2003 au prix de 3. 753. 000 € au moyen d'un crédit bail consenti pour une durée de douze ans ; que les appelants versent aux débats plusieurs simulations de financement pour un investissement de 3. 750. 000 € sur 15 ans qui font apparaître une charge mensuelle de 26. 195 € avec apport personnel et de 34. 102 € sans apport personnel ; qu'ainsi le paiement des loyers versés par la Sas Ceps au bailleur soit 41. 795, 83 € TTC par mois permettait de couvrir le montant des échéances du crédit bail ; qu'aussi, il y a lieu de retenir que les praticiens unis au sein d'une Sci auraient eu la possibilité d'acquérir l'immeuble dans lequel la clinique exerce son activité ; que les appelants invoquent la perte de chance de pérenniser leur outil de travail, d'obtenir des revenus pour leur retraite et d'augmenter leur capital ; que monsieur E... fait ainsi valoir qu'il opérait régulièrement de nombreux patients au sein de la clinique et qu'il a continué à le faire après avoir cédé ses parts dans la Sas Ceps ; que l'intérêt pour un praticien de posséder les locaux dans lesquels il exerce son activité est confirmé par monsieur H..., expert-comptable, en ce que cette situation permet d'assurer la stabilité du lieu d'exercice et de la clientèle ; que par ailleurs, les praticiens auraient pu percevoir les revenus provenant de l'immeuble ; que ces revenus auraient été particulièrement importants compte tenu du montant des loyers versés par la clinique, une fois que le crédit bail aurait été terminé, étant précisé que celui conclu par la société Foncière François 1er doit s'achever en 2015 et que s'il avait été d'une durée de 15 ans, il se serait achevé en 2018 ; qu'il est à souligner que cet investissement présente un rendement spécialement élevé par rapport aux autres types de placement et constitue en toute hypothèse, une opération recherchée compte tenu des caractéristiques de stabilité et de sécurité qu'assurent des baux de longue durée, avec les grosses réparations à la charge des locataires exploitants ; qu'enfin, les appelants ont été privés de la possibilité de faire entrer dans leur patrimoine un immeuble dont la valeur a été estimée à 7. 150. 000 € net vendeur en 2006 ; que monsieur X... fait valoir que la détermination du préjudice subi par chacun des appelants est d'autant plus compliquée qu'ils n'étaient pas propriétaires du même nombre d'actions dans la Sas Ceps ; que néanmoins, il y a lieu de considérer que l'opération consistant à devenir acquéreur de l'immeuble par le biais d'une Sci présentait les mêmes avantages financiers pour chacun de sorte que leur perte de chance est identique ; que compte tenu de l'ensemble des éléments versés aux dossiers, cette perte de chance doit être fixée pour chacun des appelants à la somme de 250. 000 € ; que les appelants qui ont vu leur confiance en l'un de leurs pairs et associés trahie ont subi un préjudice moral qui sera évalué pour chacun à la somme de 5. 000 € (arrêt, pp. 8 et 9) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la participation de chaque associé dans les résultats d'une société se détermine à proportion de sa part dans le capital social ; que la cour d'appel a retenu que les associés avaient été privés de la possibilité de faire entrer dans « leur patrimoine » un immeuble dont la valeur avait été estimée à 7. 150. 000 € en 2006, après avoir constaté que les praticiens avaient le projet d'acquérir l'immeuble abritant la clinique par le biais d'une Sci à créer, de sorte que c'était bien cette dernière qui devait devenir propriétaire de l'immeuble ; qu'en retenant que cette opération présentait les mêmes avantages financiers pour chacun, de sorte que leur perte de chance était identique, cependant que du fait de la création d'une société, personne morale indépendante, qui se serait portée acquéreur de l'immeuble, l'avantage que chaque associé pouvait retirer d'une telle opération devait nécessairement être apprécié au seul regard de la participation de chacun au capital de ladite Sci, la cour d'appel a violé les articles 1842 et 1844-1 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la réparation du dommage résultant de la perte d'une chance ne saurait présenter un caractère forfaitaire et doit correspondre à une fraction du préjudice subi calculée au regard de la chance perdue ; qu'en se bornant à relever les motifs précités, pour ensuite affirmer que, compte tenu de l'ensemble des éléments versés au dossier il convenait de fixer la perte de chance pour chacun des associés de monsieur X... à la somme de 250. 000 €, sans expliquer comment était calculée, pour chaque prétendue victime, la probabilité de succès de l'opération litigieuse et cependant que l'interposition d'une personne morale impliquait nécessairement que le préjudice de chacun d'entre eux soit évalué de manière individuelle, en fonction de son apport à cette structure, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant sa décision de base légale au regard des articles L. 225-251 et L. 227-8 du code de commerce et du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, ensemble l'article 1844-1 du code civil.