LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 juin 2014), que Mme X... épouse Y..., née le 25 avril 1947, engagée en décembre 1970 par la société Septodont, dont elle est devenue en 1990 directeur administratif, a été licenciée pour faute grave par lettre du 6 février 2013, cette lettre précisant que la salariée pourrait bénéficier du maintien des droits à complémentaire santé et prévoyance conformément à l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 pendant une durée de neuf mois, sous réserve de satisfaire aux conditions exigées ; que l'intéressée, qui avait adhéré le 10 décembre 2008, dans le cadre de son activité professionnelle, au contrat d'assurance de groupe souscrit par l'employeur auprès de la société Generali vie instituant un régime complémentaire de santé et de prévoyance, la gestion des contrats étant assurée par la société Génération, et qui avait été placée en arrêt de travail le 6 février 2013, a fait assigner ces sociétés devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins notamment d'obtenir le paiement des indemnités journalières qu'elle estimait lui être dues depuis le 7 mai 2013 ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses prétentions au bénéfice des garanties santé et prévoyance du contrat d'assurance de groupe souscrit par la société Septodont et de la débouter en conséquence de sa demande en paiement par la société Generali vie des indemnités journalières, alors, selon le moyen, qu'il y a discrimination en raison de l'âge, dès lors qu'une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d'entraîner un désavantage particulier pour des personnes d'un âge donné par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime, et sous réserve que les moyens de réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires ; qu'en l'espèce, le contrat d'assurance groupe souscrit par la société Septodont stipulait que le paiement des indemnités journalières de travail résultant d'une incapacité temporaire de travail prenait fin au plus tard, au 65e anniversaire de l'assuré ; que pour débouter Mme Y... de sa demande tendant au bénéfice de la prévoyance du contrat d'assurance-groupe, la cour d'appel a retenu que cette disposition ne présentait aucun caractère discriminatoire puisqu'elle s'appliquait de manière égalitaire à l'ensemble des salariés concernés par cette limite d'âge ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la poursuite d'un but légitime ainsi que le caractère nécessaire et approprié des moyens mis en oeuvre pour l'atteindre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1133-2 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu, par des motifs non critiqués par le pourvoi, d'une part, que la salariée ne justifiait pas remplir la condition de prise en charge de l'assurance chômage, exigée par l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 pour prétendre au maintien des garanties par l'effet de la portabilité instituée par cet accord, d'autre part, qu'il n'existait aucune disposition contractuelle prévoyant le maintien de la garantie prévoyance pour les salariés licenciés ; que le moyen, qui s'attaque à des motifs surabondants de l'arrêt, est inopérant ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Y... de ses prétentions au bénéfice des garanties santé et prévoyance du contrat d'assurance groupe souscrit par la société Septodont, et de l'avoir en conséquence déboutée de sa demande tendant à voir ordonner à la société Generali de procéder au paiement des indemnités journalières lui étant dues depuis le 7 mai 2013 ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« alors que le bénéfice de la portabilité ne permettrait pas à l'appelante d'obtenir des garanties supérieures à celles prévues par le contrat auquel elle a adhéré, Mme Y... ne pourrait pas bénéficier du paiement des indemnités journalières prévues par la garantie prévoyance puisque, aux termes de la notice d'information 2008 dont elle a nécessairement eu connaissance puisqu'elle la produit aux débats accompagnée du message accompagnant l'envoi de cette notice, le paiement des indemnités journalières dues en cas d'incapacité temporaire de travail prenait fin au plus tard au 65ème anniversaire de l'assuré, âge qu'elle a atteint le 25 avril 2012, cette disposition ne présentant aucun caractère discriminatoire puisqu'elle s'applique de manière égalitaire à l'ensemble des salariés concernés par cette limite d'âge et ne rendant pas sans cause le paiement des cotisations postérieurement à ses 65 ans dès lors qu'elle pouvait continuer à bénéficier d'une garantie décès ; qu'alors que les dispositions de la loi Evin citées par l'appelante ne concernent pas le régime de prévoyance et qu'il n'existe aucune disposition contractuelle prévoyant le maintien de la garantie prévoyance pour les salariés licenciés puisque le maintien des garanties n'est prévu que pour le produit « Génération santé », c'est à juste titre que les premiers juges, dont la décision sera confirmée, ont débouté Mme Y... de l'ensemble de ses prétentions au bénéfice des garanties prévoyance et de ses prétentions au bénéfice des garanties santé sur le fondement de l'article 14 de l'ANI » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« il est établi qu'un contrat groupe santé-prévoyance a été conclu (à une date indéterminée) entre la société Septodont, pour son personnel salarié et la société Generali, par l'intermédiaire de la société Verlingue, courtier ; que selon un bulletin individuel, signé le 10 décembre 2008 par Mme Y..., celle-ci a sollicité son affiliation au régime de prévoyance proposé par la société Septodont en souscrivant à l'option n° 1 des garanties obligatoires ; que la notice d'information (année 2008) jointe à ce bulletin prévoit que « l'assurance est maintenue pour le produit génération santé aux salariés licenciés percevant les prestations en espèces de la sécurité sociale au titre de l'incapacité de travail ou de l'invalidité permanente, ainsi qu'aux assurés licenciés percevant des allocations Assedic, sous réserve du paiement de la cotisation correspondante. La demande doit être faite auprès de l'employeur dans le mois suivant le départ de l'entreprise … » ; que pour la partie prévoyance, la notice précise que les prestations incapacité temporaire de travail et invalidité permanente prennent fin au plus tard au 65ème anniversaire de l'assuré ; que Mme Y..., née le 25 avril 1947, ce qui fait 65 ans au 25 avril 2012, a fait partie du personnel de la société Septodont jusqu'au licenciement (contesté), qui lui a été notifié le 11 février 2013 ; que dans cette lettre de licenciement, il lui a été rappelé qu'en vertu de l'article 14 modifié de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, elle avait la possibilité de conserver le bénéfice des couvertures santé et prévoyance, en vigueur dans l'entreprise, pendant une durée de 9 mois, le financement du maintien de la garantie étant assuré conjointement par la société Septodont et elle-même ; que sauf à retourner dans un délai de 10 jours le formulaire qui lui était communiqué, elle était présumée vouloir bénéficier du maintien des garanties santé et prévoyance de l'entreprise ; que ces éléments mettent ainsi en évidence la juxtaposition du régime contractuel qui prévoit simplement la faculté de maintenir le bénéfice du régime santé, moyennant une démarche volontaire, et du régime instauré par l'accord national interprofessionnel (la portabilité), qui instaure le maintien présumé du régime santé-prévoyance en vigueur dans l'entreprise, dans la limite d'une durée maximale de 9 mois – moyennant le paiement par l'assuré de la part salariale de la cotisation ; que le formulaire, rempli le 6 mars 2013 par Mme Y... et adressé à la société Septodont, consacre la volonté de la demanderesse de bénéficier du maintien de la couverture prévoyance et frais médicaux, en vertu de l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008, puisqu'il fait expressément référence à ce texte et qu'il est accompagné d'une attestation sur l'honneur de Mme Y... indiquant qu'elle remplit les conditions permettant le bénéfice de l'assurance chômage ; que le formulaire est même accompagné d'une notice intitulée « l'essentiel sur le maintien des garanties prévoyance et frais de santé en cas de rupture de contrat de travail » qui rappelle que le dispositif instauré par l'article 14 de l'accord national interprofessionnel « prévoit le maintien des garanties santé et prévoyance complémentaire applicables chez le dernier employeur, au profit des salariés qui viennent de perdre leur emploi et bénéficient d'allocations chômage » ; qu'il est, tout particulièrement souligné, dans un cadre intitulé « Important », que « le dispositif ne s'exerce que pendant le versement des allocations chômage » ; qu'il apparaît donc qu'en remplissant et adressant ce formulaire à son ancien employeur, Mme Y... n'a pas sollicité le maintien de la garantie santé prévue dans la notice d'information ; qu'elle a sollicité la mise en oeuvre pure et simple de la portabilité prévue par l'accord national interprofessionnel portant sur l'ensemble des garanties santé et prévoyance ; que contrairement au maintien automatique des garanties santé et prévoyance évoqué dans la lettre de licenciement, et présumé en l'absence même de réaction du salarié licencié, la société Génération, gestionnaire du contrat d'assurance-groupe a édité, le 15 mars 2013, un certificat de radiation de la complémentaire santé pour Mme Y..., son mari et sa fille Sarah a effet du 7 février 2013 ; que le 6 avril 2013, ce certificat de radiation a été remplacé par un certificat d'adhésion à la complémentaire santé pour les mêmes personnes, depuis le 7 février 2013 ; que ce certificat consacre, de fait, les dispositions spécifiques du contrat d'assurance groupe, prévoyant que le salarié licencié peut solliciter le maintien de la garantie santé ; qu'il n'a manifestement pas été émis au titre de la portabilité puisque, d'une part, il faite suite à un certificat de radiation et puisque, d'autre part, il ne vise que la garantie santé et non la prévoyance ; que s'il est, d'autre part, exact que Mme Y... n'a pas justifié avoir sollicité l'application des dispositions contractuelles dans le délai d'un mois imparti (absence de production de l'AR), ce certificat exclut que ce moyen puisse lui être opposé, puisque son établissement démontre que sa demande a alors été considérée comme régulière, en la forme, sur le plan contractuel ; qu'une forme de malentendu s'instaure, dès cette époque, puisque la société Génération applique les dispositions contractuelles (sous réserve du problème des cotisations), tandis que Mme Y... invoque simplement la mise en oeuvre de la portabilité, c'est-à-dire le maintien des garanties santé et prévoyance, comme si elle faisait encore partie des effectifs actifs de l'entreprise (ce qui correspond exactement à la notion de portabilité) ; que dans son ordonnance en date du 24 juillet 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris ne fait que constater l'absence de contestation sérieuse pour les seules prétentions de Mme Y... qui concernent la garantie des frais de santé, puisque le contrat prévoit clairement le maintien de cette garantie pour la personne licenciée qui bénéficie de prestations en espèces de la sécurité sociale au titre de l'incapacité de travail, ce qui est le cas de la demanderesse, et puisque le paiement des cotisations n'a pas été contesté ; que pour ce qui concerne le régime de prévoyance, il relève deux difficultés, en ce que Mme Y... n'est pas inscrite à Pôle Emploi (et ne bénéficie donc pas de l'assurance chômage), et qu'elle est âgée de plus de 65 ans, alors que les prestations sollicitées ne sont pas versées au-delà de 65 ans ; que le présent litige porte donc sur le point de savoir si Mme Y... est fondée à se prévaloir de la portabilité de la couverture santé-prévoyance, mécanisme qui a été instauré par l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 portant sur la modernisation du marché du travail (…) ; qu'elle ne prouve pas qu'elle remplit les conditions exigées pour bénéficier de la portabilité ; qu'il doit être ajouté que, quand bien même elle en bénéficierait, cette portabilité ne permettrait pas de faite échec à la limite d'âge (65 ans) prévue par les dispositions contractuelles, puisque le mécanisme du maintien des garanties ne peut pas porter sur des garanties supérieures à ce qui a été prévu dans la sphère contractuelle ; que le fait que Mme Y... ait réglé des cotisations complètes (part salariale) pour le régime santé-prévoyance, pendant qu'elle était employée par la société Septodont, alors même qu'elle avait dépassé l'âge de 65 ans, ne peut pas avoir la moindre incidence sur le cadre des garanties prévues au contrat dont, au demeurant, elle était censée avoir connaissance et les avoir acceptées en tant que telles ; que Mme Y... doit donc être déboutée de ses prétentions au bénéfice des garanties santé-prévoyance prévues dans le contrat-groupe souscrit par la société Septodont auprès de la société Generali Vie, en ce que ces prétentions sont fondées sur la portabilité instaurée par l'article 14 de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 ; qu'il n'existe aucune disposition contractuelle lui permettant de continuer à bénéficier de la garantie prévoyance, puisque le maintien des garanties n'est prévu que pour le produit génération santé (page 4 de la notice) ; que le maintien de la garantie santé est subordonnée à la double condition de l'avoir demandée dans le délai en temps utile (le certificat d'adhésion du 6 avril 2013 suffisant à démontrer que cette condition est remplie), et du paiement des cotisations ; que cette double condition est parfaitement indépendante des dispositions de la loi Evin, laquelle n'est aucunement évoquée dans la notice d'information qui a été communiquée à la demanderesse pour son affiliation au contrat groupe ; qu'il s'agit d'une disposition purement contractuelle par laquelle le contrat d'assurance groupe prévoit que le bénéfice de la garantie santé pourra être maintenu au profit du salarié licencié et de sa famille (ce qui n'exclut évidemment pas l'application de la loi Evin si les droits qu'elle consacre n'étaient pas respectées) ;
ALORS QU'il y a discrimination en raison de l'âge, dès lors qu'une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d'entraîner un désavantage particulier pour des personnes d'un âge donné par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement et raisonnablement justifiée par un objectif légitime, et sous réserve que les moyens de réaliser cet objectif soient appropriés et nécessaires ; qu'en l'espèce, le contrat d'assurance groupe souscrit par la société Septodont stipulait que le paiement des indemnités journalières de travail résultant d'une incapacité temporaire de travail prenait fin au plus tard, au 65ème anniversaire de l'assuré ; que pour débouter Mme Y... de sa demande tendant au bénéfice de la prévoyance du contrat d'assurance-groupe, la Cour d'appel a retenu que cette disposition ne présentait aucun caractère discriminatoire puisqu'elle s'appliquait de manière égalitaire à l'ensemble des salariés concernés par cette limite d'âge ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la poursuite d'un but légitime ainsi que le caractère nécessaire et approprié des moyens mis en oeuvre pour l'atteindre, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1133-2 du code du travail.