LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° D 15-13.426 et n° K 15-13.731 ;
Sur la recevabilité du pourvoi n° K 15-13.731 :
Vu l'article 978 du code de procédure civile ;
Attendu que la déclaration de pourvoi ne formule aucun moyen de cassation; que cette omission n'a pas été réparée par la production d'un mémoire en demande dans le délai de quatre mois prévu par le texte susvisé ; que la déchéance du pourvoi est dès lors encourue ;
Sur le pourvoi n° D 15-13.426 :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 décembre 2014), que Mme X... a été engagée le 1er avril 1983 par la Clinique Saint Jean en qualité d'auxiliaire puéricultrice ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser une somme provisionnelle au titre du rappel de salaire en paiement des temps d'habillage et de déshabillage et des congés payés afférents alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article L. 3121-2 du code du travail, le temps nécessaire à l'habillage et au déshabillage doit faire l'objet de contreparties lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par les dispositions légales, des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail, et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, ces deux conditions étant cumulatives ; que dès lors, en accordant à Mme X... des sommes au titre des dix minutes quotidiennes qu'elle aurait consacrées à son habillage et à son déshabillage, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée si l'une et l'autre de ces actions étaient bien réalisées sur le lieu de travail, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;
Mais attendu que, selon l'article L. 3121-3 du code du travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage et de déshabillage fait l'objet de contreparties, que ces contreparties sont accordées soit sous forme de repos, soit sous forme financière, lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, par des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, que ces contreparties sont déterminées par convention ou accord collectif de travail ou, à défaut, par le contrat de travail, sans préjudice des clauses des conventions collectives, de branche, d'entreprise ou d'établissement, des usages ou des stipulations du contrat de travail assimilant ces temps d'habillage et de déshabillage à du temps de travail effectif ;
Et attendu qu'ayant constaté qu'il n'était pas contesté que la salariée portait une tenue de travail, et que le règlement intérieur prévoyant que, dans la mesure où la tenue de travail est imposée, les temps d'habillage et de déshabillage devaient être considérés comme du travail effectif, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche que ces constatations rendait inopérante, a exactement décidé qu'il appartenait à l'employeur de rapporter la preuve qu'il avait rémunéré ces temps comme du travail effectif ;
PAR CES MOTIFS :
CONSTATE la déchéance du pourvoi n° K 15-13.731 ;
REJETTE le pourvoi n° D 15-13.426 ;
Condamne la Clinique Saint Jean aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la Clinique Saint-Jean, demanderesse au pourvoi n° D 15-13.426.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la Clinique Saint-Jean à verser à Mme X... à titre provisionnel la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour perte d'une chance d'obtenir sa reclassification en groupe B sur les années 2003 à 2005 ;
AUX MOTIFS QUE sur le manquement de l'employeur quant à l'obligation de négocier sur le passage du groupe A au groupe B, Mme Catherine X... fait valoir que l'évolution de sa carrière a été bloquée par le refus de l'employeur de conclure un accord collectif d'entreprise stipulé à l'article 90-6 de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée, dite CCU du 18 avril 2002, en vigueur à compter du 1er mai 2002, qu'il est incontestable que l'employeur n'a satisfait à son passage au groupe B qu'à la suite d'une sommation de faire délivrée le 21 avril 2005, lors d'un entretien en date du 10 juin 2005, qu'en l'absence de tout entretien organisé par l'employeur, antérieurement au 10 juin 2005, au cours duquel, eu égard à son expérience et à son ancienneté, elle aurait obtenu le passage au groupe B, générant une augmentation de salaire, elle a subi un préjudice résultant de la perte d'une chance d'obtenir cette augmentation de salaire, préjudice dont elle peut demander, à titre provisionnel, la réparation sur la période du 4 février 2003 jusqu'au 10 juin 2005 pour un montant de 1 518,48 € correspondant à la perte de salaire et pour un montant de 151,85 € d'indemnité de congés ; que la SA Clinique Saint-Jean fait valoir que la salariée ne peut prétendre automatiquement au passage au niveau B, qu'un accord d'entreprise a été conclu en date du 10 juin 2005 qui précise bien les modalités de passage au niveau B, que conformément aux dispositions dudit accord, il incombe à la direction de prendre souverainement la décision du passage en catégorie B, que la cour de céans pourra constater que certaines salariées, bien qu'ayant une ancienneté significative, sont toujours en catégorie A, que Mme Catherine X... a bénéficié du passage en catégorie B dès le 2 février 2006 et que la conclusion de l'accord en date du 10 Juin 2005 n'a en rien pesé sur son passage en catégorie B, en sorte que la salariée doit être déboutée de sa demande ; qu'il résulte des pièces versées aux débats que l'employeur a été sollicité par les délégués du personnel le 27 janvier 2003 pour ouvrir une négociation sur la mise en oeuvre des entretiens individuels prévus à l'article 90-6 de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 et conditionnant le changement de groupe (passage de A à B) et qu'il a été sommé le 20 avril 2005 par le syndicat CGT de convoquer les représentants des organisations syndicales en vue de la négociation pour le protocole d'accord visé à l'article 90-6 de la convention collective ; que l'employeur n'a satisfait à cette obligation qu'au mois de mai 2005, la négociation ayant abouti le 10 juin 2005 à la signature d'un « accord d'entreprise sur l'entretien individuel professionnel et pour le passage du groupe A au groupe B », modifié le 28 décembre 2006 ; que la direction, après l'organisation de l'entretien individuel avec Mme Catherine X... le 2 février 2006, a accordé à cette dernière le bénéfice de cette reclassification en groupe B, comme aux salariés du groupe A ayant plus de 5 ans d'ancienneté, étant précisé que toutes les auxiliaires de puériculture ont été classées dans le groupe B à tout le moins après le second entretien ; qu'il est indiscutable que la SA Clinique Saint-Jean a tardé à engager la négociation prévue par l'article L.132-27 du code du travail et par les dispositions conventionnelles, faisant ainsi perdre à la salariée, présentant 20 ans d'ancienneté dans ses fonctions en 2003, une chance de reclassification en groupe B sur les années 2003 à 2005 ; qu'en conséquence, en vertu des dispositions de l'article R.1455-7 du code du travail, le préjudice de Mme Catherine X... résultant de cette perte de chance sera réparé, à titre provisionnel, par l'octroi d'une somme de 1 000 € à titre de dommages intérêts ;
ALORS D'UNE PART, QU'aux termes de l'article 90-6 de la convention collective nationale de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002, « à l'intérieur de chaque niveau et hormis promotion correspondant à un changement d'emploi, le passage du groupe A au groupe B pourra s'effectuer pour tenir compte de l'apport personnel de chaque salarié dans l'accomplissement de sa fonction (…) que ce changement de groupe ne pourra être attribué que s'il résulte d'une procédure d'entretien individuel (…) qu'à l'issue de l'entretien, une proposition de changement de groupe pourra être faite au salarié concerné » ; qu'en concluant dès lors du caractère jugé tardif de la négociation par la clinique de l'accord collectif mettant en oeuvre l'article 90.6 de la convention collective, que Mme X... aurait pu se prévaloir plus tôt d'un classement dans le groupe B, quand ce classement n'était, aux termes de ces dispositions conventionnelles, pas automatique et était décidé par l'employeur seul, au regard de l'apport personnel du salarié dans l'accomplissement de ses fonctions, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'en retenant, pour conclure à l'existence d'une perte de chance de Mme X... de bénéficier de sa classification au groupe B dès 2003, qu'à cette date elle totalisait 20 ans d'ancienneté dans ses fonctions, quand les dispositions de l'article 90.6 ne subordonnent pas le passage du salarié du groupe A au groupe B à son ancienneté, mais uniquement à son apport personnel dans l'accomplissement de ses fonctions, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et l'a privée en conséquence de base légale au regard de l'article susvisé.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la Clinique Saint-Jean à verser à Mme X... à titre provisionnel les sommes de 2 227,50 € bruts à titre de rappel de salaire pour les temps d'habillage et de déshabillage, et de 222,75 € au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE sur le paiement des temps d'habillage et de déshabillage, Mme Catherine X... fait valoir qu'elle est tenue de porter une tenue de travail en application du règlement intérieur, qu'il est incontestable qu'elle arrive cinq minutes avant l'heure indiquée sur le planning pour s'habiller et part cinq minutes après l'heure de fin de service, le temps de se déshabiller, que ces temps doivent être payés comme temps de travail et qu'elle est en droit de percevoir 2 227,50 € de rappel de salaire au titre des temps d'habillage et de déshabillage, outre 222,75 € de congés payés y afférents ; que la SA Clinique Saint-Jean réplique que la salariée ne rapporte nullement la preuve qu'elle est obligée de s'habiller et se déshabiller sur le lieu de travail, que de plus le temps d'habillage et de déshabillage est compris dans le temps de travail et payé comme tel, ainsi que figurant dans le règlement intérieur du système de gestion des temps ; que le règlement intérieur de la Clinique Saint-Jean prévoit, en son article 4 relatif aux horaires et temps de travail que « dans la mesure où le port d'une tenue de travail est imposé par des dispositions législatives ou réglementaires, par des clauses conventionnelles, par le règlement inférieur ou le contrat de travail, il sera considéré comme du temps de travail effectif. La direction se réserve toutefois la faculté de minorer le temps qui est consacré à l'habillage et déshabillage s'il s'avère que les salariés y passent un temps supérieur à celui nécessaire » ; que la SA Clinique Saint-Jean ne conteste pas que Mme Catherine X... porte une tenue de travail et le règlement intérieur prévoyant que, dans la mesure où la tenue de travail est imposée, les temps d'habillage et de déshabillage doivent être considérés comme des temps de travail effectif, il appartient à la société intimée de rapporter la preuve qu'elle a rémunéré ces temps comme du temps de travail effectif ; qu'il résulte de la « note d'information : système de gestion des temps » établie le 8 novembre 2000 par le service du personnel et produite par l'employeur que le salarié pointe le matin, lorsqu'il prend son service « à l'horaire prévu après habillage en tenue de travail (temps d'habillage : 5 minutes) », et pointe « lorsqu'il part le soir avant habillage en tenue de ville à l'horaire prévu (temps de déshabillage : 5 minutes » (reprenant ainsi les dispositions du « règlement intérieur du système des temps », produit également par l'employeur) ; qu'en conséquence, il est indiscutable que la SA Clinique Saint-Jean rémunère uniquement le temps de travail décompté par la pointeuse (après habillage en début de service et avant déshabillage en fin de service) ; qu'en conséquence, la cour accorde à Mme Catherine X..., en vertu de l'article R.1455-7 du code du travail et au vu du tableau de calcul des temps d'habillage et de déshabillage présenté par la salariée sur la période de janvier 2008 à août 2014 et non utilement discuté par l'employeur, sur la base de 10 minutes quotidiennes de temps d'habillage et de déshabillage tel qu'évalué par l'employeur lui-même dans sa note d'information sur le système de gestion des temps, la somme provisionnelle de 2 227,50 € bruts à titre de rappel de salaire, ainsi que la somme provisionnelle de 222,75 € à titre d'indemnité de congés payés afférente ;
ALORS QU'aux termes de l'article L.3121-2 du code du travail, le temps nécessaire à l'habillage et au déshabillage doit faire l'objet de contreparties lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par les dispositions légales, des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail, et que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, ces deux conditions étant cumulatives ; que dès lors, en accordant à Mme X... des sommes au titre des 10 minutes quotidiennes qu'elle aurait consacrées à son habillage et à son déshabillage, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée (conclusions de la Clinique, p. 5) si l'une et l'autre de ces actions étaient bien réalisées sur le lieu de travail, la cour d'appel a violé l'article susvisé.