Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Joseph X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 3 novembre 2015, qui, pour violences aggravées l'a condamné à dix ans d'emprisonnement avec période de sûreté fixée au deux tiers de la peine, ordonné un suivi socio-judiciaire d'une durée de dix ans et une mesure de retrait de l'autorité parentale, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 octobre 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller BELLENGER, les observations de la société civile professionnelle FABIANI, LUC-THALER et PINATEL, de la société civile professionnelle DELAPORTE et BRIARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Joseph X... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, du chef de violences aggravées, en raison de multiples coups et sévices ayant entraîné, à des dates différentes, des fractures des membres et des côtes de sa fille Jade, âgée de huit ans, qui présentait, en outre, d'importants hématomes sur la tête et le corps ; que les juges du premier degré ont déclaré le prévenu coupable ; que M. X..., le procureur de la République et la partie civile ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-11, 222-12, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 et 132-19-2 du code pénal, préliminaire, 2, 3, 427, 485, 512, 520, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de violences volontaires sur mineure de quinze ans par ascendant ;
" alors que l'article préliminaire du code de procédure pénale exige que la procédure pénale soit équitable et contradictoire et préserve l'équilibre des droits des parties ; qu'il s'ensuit qu'en l'état de conclusions d'appel prévenu qui se bornent, sans conclure sur le fond, à solliciter l'annulation du jugement, improprement qualifié de contradictoire à signifier, alors qu'il aurait dû être rendu par défaut, et à demander à la cour d'appel de dire que le point de départ du délai d'opposition audit jugement sera reporté au jour de l'arrêt à intervenir, la cour d'appel qui, faisant application des dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale, décide, après annulation du jugement, d'évoquer, doit nécessairement rouvrir les débats afin de permettre au prévenu de présenter ses observations sur le fond de l'affaire ;
" que, dès lors, en se bornant, pour statuer au fond sans rouvrir les débats et pour déclarer le demandeur coupable des faits visés à la prévention, à relever qu'il convient d'annuler le jugement improprement qualifié de jugement contradictoire à signifier, et qu'en cet état il lui appartient d'évoquer et de statuer sur le fond, quand il résulte des pièces de la procédure que l'avocat du prévenu n'avait conclu que sur la procédure sans aborder le fond, de sorte que l'intéressé n'a pas été mis en mesure de présenter utilement ses moyens de défense sur le fond, la cour d'appel, qui aurait dû d'office rouvrir les débats, a violé les textes susvisés, ensemble l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme " ;
Attendu que, pour annuler le jugement, évoquer et déclarer le prévenu coupable de violences ayant entraîné une incapacité temporaire totale supérieure à huit jours sur mineure de quinze ans par ascendant, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'après avoir invité les parties à s'expliquer contradictoirement sur le fond, elle a annulé le jugement, improprement qualifié de contradictoire à signifier, et a évoqué, comme elle était tenue de le faire, conformément aux dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen, subsidiaire, de cassation, pris de la violation des articles 222-11, 222-12, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 et 132-19-2 du code pénal, préliminaire, 2, 3, 427, 485, 512, 520, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de violences volontaires sur mineure de quinze ans par ascendant ;
" aux motifs que l'infraction reprochée à M. X... est suffisamment caractérisée, les dénégations et explications de ce dernier, au regard des constatations faites et des déclarations de la victime n'apparaissant en rien convaincantes ; qu'en effet, il résulte de l'ensemble des certificats médicaux recueillis lors de l'enquête que les blessures relevées sur Jade sont d'âges différents et ne peuvent avoir été causées que par l'intervention d'un tiers ; qu'or, il est établi que M. X... élevait seul sa fille depuis 2008 de sorte que les traumatismes physiques ne sauraient être imputés à Mme Natacha Y...comme le prévenu tente de le faire croire et ce d'autant plus que M. Z..., médecin, indique dans son expertise que la quasi-totalité des fractures sont postérieures à 2009 ; que le certificat médical établi par le docteur, M. A..., médecin, en 2009 à la suite d'une chute de Jade d'un toboggan remis par le prévenu aux enquêteurs, afin d'expliquer les fractures relevées sur cette dernière, ne sauraient remettre en cause les analyses médicales des experts ; qu'en effet, la cour souligne que la date mentionnée sur ce certificat médical ressemble plus à 2004 qu'à 2009 mais surtout constate que M. A..., médecin, avait diagnostiqué un oedème au front mais en aucun cas une fracture ; que d'ailleurs, Jade a toujours accusé son père d'être à l'origine de ses blessures, et ce même lors de la confrontation avec ce dernier, rendue particulièrement difficile en raison du comportement du prévenu, ses déclarations étant au surplus parfaitement corroborées par les constatations médicales, l'expertise psychiatrique et l'examen psychologique de Jade ne relevant aucune tendance à l'affabulation ou à la mythomanie ; qu'enfin, M. X... a été dans l'incapacité de démontrer ce qu'il affirmait à savoir que les blessures relevées sur Jade lors de son entrée à l'hôpital s'expliquaient par l'accident de moto dont elle avait été victime ; qu'il lui aurait été aisé de remettre aux enquêteurs les vêtements que Jade était censée porter le jour de l'accident, lesquels auraient été immanquablement abîmés, voire déchirés tenant l'état des blessures que Jade présentait notamment au niveau des fesses ; qu'il résulte de l'ensemble de ces observations que le délit reproché à M. X... est caractérisé en tous ses éléments tant matériel qu'intentionnel ; qu'il convient dès lors de retenir le prévenu dans les liens de la prévention et de le déclarer coupable des faits qui lui sont reprochés ;
" alors qu'il appartient à la partie poursuivante de rapporter la preuve de la culpabilité du prévenu et non à ce dernier de prouver son innocence, le doute devant toujours profiter à l'accusé ; qu'en l'espèce, pour déclarer le demandeur coupable des faits visés à la prévention, la cour d'appel a relevé que M. X... a été dans l'incapacité de démontrer ce qu'il affirmait à savoir que les blessures relevées sur Jade lors de son entrée à l'hôpital s'expliquaient par l'accident de moto dont elle avait été victime ; qu'en l'état de ces seules énonciations qui méconnaissent le principe de la présomption d'innocence, en imposant au prévenu la charge de prouver son innocence, quand il appartenait à la partie poursuivante de démontrer la culpabilité de l'intéressé, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et violé l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et l'article préliminaire du code de procédure pénale " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, sans renverser la charge de la preuve ni méconnaître la présomption d'innocence, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de violences volontaires ayant entraîné une incapacité temporaire totale de travail supérieure à huit jours sur mineure de quinze ans par ascendant dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 3 000 euros la somme que M. Joseph X... devra payer à la société civile professionnelle Delaporte et Briard, avocat en la Cour, au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale et de l'article 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991 modifiée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six décembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.