LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° X 15-20.481, Y15-20.482 et Z15-20.483 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par actes du 10 août 2011, M. [K] et 31 autres salariés de la société Etablissements Bocahut ont saisi le conseil de prud'hommes afin d'obtenir, notamment, la condamnation de leur employeur à leur payer diverses sommes à titre de rappel de salaire et de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant de la violation du principe d'égalité de traitement ; que le syndicat CGT Bocahut est intervenu volontairement à ces instances ; que par jugements du 27 janvier 2014, le conseil de prud'hommes a fait droit à ces demandes ;
Sur le premier et le second moyen des pourvois principaux de l'employeur :
Attendu qu'il n'y pas lieu de statuer sur ces moyens, ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique des pourvois incidents des salariés :
Vu le principe d'égalité de traitement, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Attendu que pour rejeter la demande de fixation du salaire pour l'avenir, l'arrêt énonce qu'il n'incombe pas au juge de fixer, en l'absence de litige et donc de données d'un litige, le salaire, élément du contrat ;
Attendu, cependant, que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ;
Qu'en se déterminant comme elle l'a fait, sans rechercher si les salariés ne continuaient pas à subir, au moment où elle statuait, une rupture d'égalité qu'il lui appartenait alors de réparer, ainsi qu'il lui était demandé, en fixant le salaire dû pour l'avenir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute les salariés de leur demande de fixation du salaire pour l'avenir, l'arrêt rendu le 24 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne la société Etablissements Bocahut aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Etablissements Bocahut à payer à MM. [N], [D], [K] et au syndicat CGT Bocahut chacun la somme de 200 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé et prononcé par Mme Slove, conseiller le plus ancien non empêché, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits au pourvoi principal par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Bocahut
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les mécaniciens font un travail de valeur égale, et en conséquence, avant dire droit, d'avoir ordonné a ordonné la communication à M. [K] des bulletins de paie de l'ensemble des mécaniciens sur la période 2006-2014 ;
AUX MOTIFS D'UNE PART, QUE
Les demandes de rappels de salaires fondées sur le principe « à travail égal, salaire égal».
L'employeur a pour obligation de verser la même rémunération aux travailleurs accomplissant un travail égal ou de valeur égale et il incombe au salarié qui invoque une inégalité de traitement de présenter des éléments de fait susceptibles de caractériser une telle inégalité.
La preuve de l'inégalité de traitement.
En l'espèce, Monsieur [K] se prévaut des données communiquées par l'expert-comptable missionné par le comité d'entreprise en application des articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail, pour en conclure à l'existence à son détriment d'une inégalité de traitement et calculer le rappel de salaire.
L'employeur estime que ces éléments constituent un mode de preuve illicite en ce que l'expert-comptable d'une part, est sorti du cadre de sa mission en procédant au contrôle du respect par l'employeur du principe d'égalité de traitement en matière de rémunération, d'autre part a violé le secret professionnel et l'obligation de confidentialité auxquels il est tenu en les communiquant au comité d'entreprise.
La mission de l'expert-comptable désigné en application des articles L. 2325-35 et L.2325-36 du code du travail porte sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise et l'analyse des fichiers relatifs à la rémunération du personnel relève de cette mission. Ce d'autant qu'en l'espèce, l'expert-comptable avait relevé une situation sociale marquée par une judiciarisation des relations collectives témoignant d'un passif social non soldé.
C'est donc à bon droit que l'expert-comptable s'est penché sur l'éventail des rémunérations versées aux ouvriers.
De même, il ne peut lui être reproché d'en avoir fait part aux membres du comité d'entreprise, dès lors que c'est cette instance qui lui a confié sa mission.
S'agissant du secret, l'expert du comité d'entreprise est tenu dans les termes de l'article L2325-42 du code du travail, au secret et à l'obligation de discrétion définis à l'article L2325-5 applicable aux membres du comité d'entreprise. Il s'agit d'une application particulière à l'expert missionné par le comité d'entreprise du secret professionnel édicté par le code de déontologie. C'est donc au regard du code du travail qu'il convient d'en apprécier le respect par le cabinet Alter.
Le dit code distingue le secret professionnel applicable aux secrets de fabrication et le devoir de discrétion concernant toute information revêtant un caractère confidentiel et présentée comme telle par l'employeur.
Dans la mesure où l'employeur n'a pas en l'espèce, présenté les tableaux litigieux comme confidentiels, seule la confidentialité attachée à l'obligation générale de respecter la vie privée s'impose à l'expert-comptable, la défense de ce droit appartenant à leur titulaire.
En l'espèce, les tableaux reprenaient les éléments relatifs à l'âge, à la date d'entrée dans l'entreprise, l'emploi et la classification, à la filière, au niveau de l'emploi, au montant du salaire sur les trois dernières années. Seuls l'âge et la date d'entrée, ainsi que le salaire, diffèrent. Il en résulte que les salariés concernés ne pouvaient le cas échéant être identifiés que par des proches. Etant par ailleurs observé que seuls les éléments analysés permettaient de faire la preuve du non-respect de la règle « à travail égal, salaire égal », et étaient détenus par l'employeur, et donc qu'une éventuelle atteinte à la vie privée était proportionnelle au but recherché, il convient de considérer que l'expert-comptable a respecté son obligation de discrétion.
En outre, l'employeur n'a fait l'objet d'aucune critique de la part des salariés dont l'identité aurait ainsi été dévoilée, ni aucune poursuite engagée à l'encontre des salariés parties à l'instance.
Dès lors les éléments communiqués par le cabinet d'expertise comptable constituent un mode de preuve loyal et recevable ;
1°) ALORS QUE le comité d'entreprise peut se faire assister d'un expertcomptable de son choix, en vue de l'examen annuel des comptes prévu aux articles L. 2323-8 et L.2323-9 du code du travail, dont la mission porte alors sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise ; qu'ainsi, si l'étude de la structure des rémunérations du personnel destinée à fournir au comité des explications cohérentes sur la situation de l'entreprise relève de la mission de l'expert-comptable désigné en vue de l'examen annuel des comptes et des documents prévisionnels, de même que l'étude des charges du personnel et du système de rémunération, l'analyse de la situation comparée des salariés au sein de l'entreprise, qui est nécessairement de nature juridique, ne peut relever d'une telle mission ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
2°) ALORS QU' en retenant par ailleurs que la constatation par l'expert d'une situation sociale au sein de l'entreprise marquée par une judiciarisation des relations collectives témoignant d'un passif social non soldé justifiait que l'expert-comptable ait été investi d'une mission de contrôle du principe d'égalité de traitement en matière de rémunération au sein de l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
3°) ALORS QU' en retenant encore, pour justifier la communication par l'expert-comptable au comité d'entreprise des tableaux litigieux, que seuls les éléments analysés permettaient de faire la preuve du non-respect de la règle « à travail égal, salaire égal », quand il n'incombait pas à l'expert-comptable d'apporter une telle preuve, la cour d'appel a de plus fort violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
4°) ALORS QUE l'employeur est tenu de veiller en toutes circonstances au respect de la vie privée de ses salariés, notamment quant aux montants de leurs rémunérations ; qu'en retenant que les tableaux transmis par l'employeur à l'expert-comptable puis par ce dernier au comité d'entreprise, et enfin aux salariés, constituaient un mode de preuve loyal et recevable, au motif inopérant que ces salariés, dont le montant des rémunérations étaient ainsi dévoilés, ne s'en étaient pas plaints, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS D'AUTRE PART, QUE
Un travail égal ou de valeur égale
En vertu de l'article L3221-4 du sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités, et de charge physique et nerveuse.
Monsieur [K] demande à titre principal la communication des bulletins de paie de l'ensemble des mécaniciens, pour calculer le rappel de salaire dû en application du principe d'égalité de rémunération pour un travail égal, et à titre subsidiaire, un rappel de salaire sur la base du salaire de deux autres salariés mieux rémunérés.
Pour s'y opposer, la société BOCAHUT soutient que le salarié ne fait pas la preuve de l'identité de situation justifiant l'atteinte à la vie privée de l'ensemble des mécaniciens que constituerait la communication de tous les bulletins de paie. Elle distingue, s'agissant des mécaniciens, deux emplois différents impliquant selon elle des responsabilités, des compétences et des charges physiques et nerveuses différentes, le mécanicien de carrière et le mécanicien d'atelier dont le travail ferait appel à des compétences supérieures. Elle produit les fiches de poste internes à l'entreprise, ainsi que le rapport réalisé à sa demande, de manière non contradictoire, par un expert. Elle fait valoir également que le salarié ne fait pas la preuve de l'identité parfaite de situation au regard de la classification.
Toutefois, il convient de relever que les partenaires sociaux ont aux termes l'accord de classification du 1er juillet 2008, défini un seul emploi de mécanicien, classé au niveau 3 de la catégorie des ouvriers de maintenance, dont les fonctions consistent à assurer les travaux courants de maintenance mécanique, sans distinguer les conditions de travail, en atelier ou en carrière. L'expert commis par l'employeur, fait état de la différence des fonctions exactes, maintenance des engins roulants en atelier ou maintenance des installations fixes en carrière, sans pour autant mettre en évidence de manière circonstanciée des compétences et des responsabilités plus ou moins importantes, ni une charge physique ou nerveuse différente.
Dès lors, la cour considère qu'il existe une présomption de l'accomplissement d'un travail de valeur égale, présomption non combattue par l'employeur.
La classification est éventuellement susceptible de justifier une différence de traitement, mais il incombe à l'employeur qui seul la connaît, d'en justifier, ce qu'il ne fait pas pour chacun des mécaniciens, de sorte que les différences de rémunération ne font l'objet d'aucun critère objectif.
Dès lors, la demande de communication de l'ensemble des bulletins de paie des mécaniciens est fondée. Elle sera ordonnée sous astreinte ;
5°) ALORS QU' il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; qu'en l'espèce pour conclure que « les mécaniciens font un travail de valeur égale », la cour d'appel s'est référée à la définition donnée par l'accord du 1er juillet 2008 (en réalité du 10 juillet) des missions et compétences des ouvriers de maintenance, et en a déduit « une présomption de l'accomplissement d'un travail de valeur égale » ; qu'en retenant ainsi que la seule appartenance du salarié à la catégorie des ouvriers de maintenance, niveau 3, suffisait à faire présumer l'accomplissement d'un travail de valeur égale, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
6°) ALORS QUE la situation du salarié qui prétend à une inégalité de salaire ne peut être comparée qu'aux seuls salariés ayant la même classification, étant affectés à la même activité et exerçant les mêmes fonctions dans le cadre du même poste de travail ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait et démontrait que les mécaniciens occupent des postes liés à des activités techniquement spécifiques, faisant appel à des compétences professionnelles différentes, selon leur affectation en atelier ou en carrière ; qu'en reprochant à la société Bocahut de n'apporter aucune justification pour chacun des mécaniciens, « de sorte que les différences de rémunération ne font l'objet d'aucun critère objectif », quand il était versé aux débats les fiches descriptives détaillées des deux postes de mécaniciens ainsi qu'une note établie par un expert judiciaire décrivant ces postes et qu'il était également précisé pour chaque salarié le poste occupé ainsi que la nature des fonctions exercées et procédé à des comparaisons de postes entre différents mécaniciens, la cour d'appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal » et l'article 1315 du Code civil ;
7°) ALORS QUE l'employeur faisait valoir (conclusions n°2, p.16) d'abord que le tableau établi par l'expert-comptable pour les années 2006-2007-2008 ne prenait pas en compte les classifications en vigueur sur cette période qui pouvaient être, selon le cas, OQ1 coefficient 160, à OHQ coefficient 200, ce qui excluait qu'il y ait eu une identité de classification pour l'ensemble des mécaniciens et ensuite qu'à compter de 2008, le niveau 3 était assorti de trois échelons différents de sorte que parmi les mécaniciens d'atelier et de carrières, certains étaient classés N3E2 et d'autres N3E3 (conclusions p.19) ; qu'en se basant sur ce tableau pour affirmer que les mécaniciens accomplissent tous un travail de valeur égale, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'existence au sein de cette catégorie des différents échelons de classification n'était pas justifiée par des différences de tâches et de fonctions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » et de l'article 1315 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit recevable l'action du syndicat CGT Bocahut, et d'avoir condamné la société Bocahut à lui payer la somme de 250 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE
L'action du syndicat CGT
La société BOCAHUT estime que le syndicat ne fait pas la preuve d'une atteinte aux intérêts collectifs de la profession.
Mais le non-respect de l'égalité de traitement, l'absence de critères objectifs pour la fixation des rémunérations individuelles, ainsi que l'absence d'information effective des institutions représentatives du personnel, portent atteinte à l'intérêt collectif de la profession.
Il lui sera alloué la somme de 250€ à titre de dommages et intérêts ;
1°) ALORS QUE la cassation d'un chef de décision entraîne la cassation par voie de conséquence de tous les autres chefs de décision qui en sont la suite nécessaire, en application de l'article 625 du code de procédure civile ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen ne pourra qu'entraîner la cassation du chef de l'arrêt relatif à l'indemnisation du syndicat en raison du non-respect de l'égalité de traitement ;
2°) ALORS QUE l'article L 2132-3 du Code du travail donne qualité à agir au syndicat dans l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ; qu'en affirmant que l'absence d'information effective des institutions représentatives du personnel porte atteinte à l'intérêt collectif de la profession, sans autre précision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions.
Moyens produits au pourvoi principal par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Bocahut
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les mécaniciens font un travail de valeur égale, et en conséquence, avant dire droit, d'avoir ordonné a ordonné la communication à M. [D] des bulletins de paie de l'ensemble des mécaniciens sur la période 2006-2014 ;
AUX MOTIFS D'UNE PART, QUE
Les demandes de rappels de salaires fondées sur le principe « à travail égal, salaire égal».
L'employeur a pour obligation de verser la même rémunération aux travailleurs accomplissant un travail égal ou de valeur égale et il incombe au salarié qui invoque une inégalité de traitement de présenter des éléments de fait susceptibles de caractériser une telle inégalité.
En l'espèce, Monsieur [D] se prévaut des données communiquées par l'expert-comptable missionné par le comité d'entreprise en application des articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail, données relatives à la rémunération des ouvriers filière maçon-électricien-agents d'entretien pour en conclure à l'existence à son détriment d'une inégalité de traitement et calculer le rappel de salaire.
La mission de l'expert-comptable désigné en application des articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail porte sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise et l'analyse des fichiers relatifs à la rémunération du personnel relève de cette mission. Au surplus, en l'espèce, l'expert-comptable avait relevé une situation sociale marquée par une judiciarisation des relations collectives témoignant d'un passif social non soldé. Une telle constatation rendait d'autant plus fondée l'analyse critiquée.
C'est donc à bon droit que l'expert-comptable s'est penché sur l'éventail des rémunérations versées aux ouvriers occupant le même emploi de conducteur d'installation.
De même, il ne peut lui être reproché d'en avoir fait part aux membres du comité d'entreprise, dès lors que c'est cette instance qui lui a confié sa mission.
S'agissant du secret, l'expert du comité d'entreprise est tenu dans les termes de l'article L2325-42 du code du travail, au secret et à l'obligation de discrétion définis à l'article L2325-5 applicable aux membres du comité d'entreprise. Il s'agit d'une application particulière à l'expert missionné par le comité d'entreprise du secret professionnel édicté par le code de déontologie. C'est donc au regard du code du travail qu'il convient d'en apprécier le respect par le cabinet Alter.
Le dit code distingue le secret professionnel applicable aux secrets de fabrication et le devoir de discrétion concernant toute information revêtant un caractère confidentiel et présentée comme telle par l'employeur.
Dans la mesure où l'employeur n'a pas en l'espèce, présenté les tableaux litigieux comme confidentiels, seule la confidentialité attachée à l'obligation générale de respecter la vie privée s'impose à l'expert-comptable, la défense de ce droit appartenant à leur titulaire.
En l'espèce, les tableaux reprenaient les éléments relatifs à l'âge, à la date d'entrée dans l'entreprise, l'emploi et la classification, à la filière, au niveau de l'emploi, au montant du salaire sur les trois dernières années. Seuls l'âge et la date d'entrée, ainsi que le salaire, diffèrent. Il en résulte que les salariés concernés ne pouvaient le cas échéant être identifiés que par des proches. Etant par ailleurs observé que seuls les éléments analysés permettaient de faire la preuve du non-respect de la règle « à travail égal, salaire égal », et étaient détenus par l'employeur, il convient de considérer que l'expert-comptable a respecté son obligation de discrétion.
En outre, l'employeur n'a fait l'objet d'aucune critique de la part des salariés dont l'identité aurait ainsi été dévoilée, ni aucune poursuite engagée à l'encontre des salariés parties à l'instance.
Dès lors les éléments communiqués par le cabinet d'expertise comptable constituent un mode de preuve loyal et recevable ;
1°) ALORS QUE le comité d'entreprise peut se faire assister d'un expert-comptable de son choix, en vue de l'examen annuel des comptes prévu aux articles L. 2323-8 et L.2323-9 du code du travail, dont la mission porte alors sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise ; qu'ainsi, si l'étude de la structure des rémunérations du personnel destinée à fournir au comité des explications cohérentes sur la situation de l'entreprise relève de la mission de l'expert-comptable désigné en vue de l'examen annuel des comptes et des documents prévisionnels, de même que l'étude des charges du personnel et du système de rémunération, l'analyse de la situation comparée des salariés au sein de l'entreprise, qui est nécessairement de nature juridique, ne peut relever d'une telle mission ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
2°) ALORS QU' en retenant par ailleurs que la constatation par l'expert d'une situation sociale au sein de l'entreprise marquée par une judiciarisation des relations collectives témoignant d'un passif social non soldé justifiait que l'expert-comptable ait été investi d'une mission de contrôle du principe d'égalité de traitement en matière de rémunération au sein de l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
3°) ALORS QU'en retenant encore, pour justifier la communication par l'expert-comptable au comité d'entreprise des tableaux litigieux, que seuls les éléments analysés permettaient de faire la preuve du non-respect de la règle « à travail égal, salaire égal », quand il n'incombait pas à l'expert-comptable d'apporter une telle preuve, la cour d'appel a de plus fort violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
4°) ALORS QUE l'employeur est tenu de veiller en toutes circonstances au respect de la vie privée de ses salariés, notamment quant aux montants de leurs rémunérations ; qu'en retenant que les tableaux transmis par l'employeur à l'expert-comptable puis par ce dernier au comité d'entreprise, et enfin aux salariés, constituaient un mode de preuve loyal et recevable, au motif inopérant que ces salariés, dont le montant des rémunérations étaient ainsi dévoilés, ne s'en étaient pas plaints, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS D'AUTRE PART, QUE
En vertu de l'article L3221-4 du sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités, et de charge physique et nerveuse.
Monsieur [D] demande à titre principal la communication des bulletins de paie de l'ensemble des mécaniciens, pour calculer le rappel de salaire dû en application du principe d'égalité de rémunération pour un travail égal, et à titre subsidiaire, un rappel de salaire sur la base du salaire de deux autres salariés mieux rémunérés.
Pour s'y opposer, la société BOCAHUT soutient que le salarié ne fait pas la preuve de l'identité de situation justifiant l'atteinte à la vie privée de l'ensemble des mécaniciens que constituerait la communication de tous les bulletins de paie. Elle distingue, s'agissant des mécaniciens, deux emplois différents impliquant selon elle des responsabilités, des compétences et des charges physiques et nerveuses différentes, le mécanicien de carrière et le mécanicien d'atelier dont le travail ferait appel à des compétences supérieures. Elle produit les fiches de poste internes à l'entreprise, ainsi que le rapport réalisé à sa demande, de manière non contradictoire, par un expert. Elle fait valoir également que le salarié ne fait pas la preuve de l'identité parfaite de situation au regard de la classification.
Toutefois, il convient de relever que les partenaires sociaux ont aux termes l'accord de classification du 1er juillet 2008, défini un seul emploi de mécanicien, classé au niveau 3 de la catégorie des ouvriers de maintenance, dont les fonctions consistent à assurer les travaux courants de maintenance mécanique, sans distinguer les conditions de travail, en atelier ou en carrière. L'expert commis par l'employeur, fait état de la différence des fonctions exactes, maintenance des engins roulants en atelier ou maintenance des installations fixes en carrière, sans pour autant mettre en évidence de manière circonstanciée des compétences et des responsabilités plus ou moins importantes, ni une charge physique ou nerveuse différente.
Dès lors, la cour considère qu'il existe une présomption de l'accomplissement d'un travail de valeur égale, présomption non combattue par l'employeur.
La classification est éventuellement susceptible de justifier une différence de traitement, mais il incombe à l'employeur qui les connaît, d'en justifier, ce qu'il ne fait pas pour chacun des mécaniciens, de sorte que les différences de rémunération ne font l'objet d'aucun critère objectif.
Dès lors, la demande de communication de l'ensemble des bulletins de paie des mécaniciens est fondée. Elle sera ordonnée sous astreinte ;
5°) ALORS QU' il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; qu'en l'espèce pour conclure que « les mécaniciens font un travail de valeur égale », la cour d'appel s'est référée à la définition donnée par l'accord du 1er juillet 2008 (en réalité du 10 juillet) des missions et compétences des ouvriers de maintenance, et en a déduit « une présomption de l'accomplissement d'un travail de valeur égale » ; qu'en retenant ainsi que la seule appartenance du salarié à la catégorie des ouvriers de maintenance, niveau 3, suffisait à faire présumer l'accomplissement d'un travail de valeur égale, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
6°) ALORS QUE la situation du salarié qui prétend à une inégalité de salaire ne peut être comparée qu'aux seuls salariés ayant la même classification, étant affectés à la même activité et exerçant les mêmes fonctions dans le cadre du même poste de travail ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait et démontrait que les mécaniciens occupent des postes liés à des activités techniquement spécifiques, faisant appel à des compétences professionnelles différentes, selon leur affectation en atelier ou en carrière ; qu'en reprochant à la société Bocahut de n'apporter aucune justification pour chacun des mécaniciens, « de sorte que les différences de rémunération ne font l'objet d'aucun critère objectif », quand il était versé aux débats les fiches descriptives détaillées des deux postes de mécaniciens ainsi qu'une note établie par un expert judiciaire décrivant ces postes et qu'il était également précisé pour chaque salarié le poste occupé ainsi que la nature des fonctions exercées et procédé à des comparaisons de postes entre différents mécaniciens, la cour d'appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal » et l'article 1315 du Code civil ;
7°) ALORS QUE l'employeur faisait valoir (conclusions n°2, p.16) d'abord que le tableau établi par l'expert-comptable pour les années 2006-2007-2008 ne prenait pas en compte les classifications en vigueur sur cette période qui pouvaient être, selon le cas, OQ1 coefficient 160, à OHQ coefficient 200, ce qui excluait qu'il y ait eu une identité de classification pour l'ensemble des mécaniciens et ensuite qu'à compter de 2008, le niveau 3 était assorti de trois échelons différents de sorte que parmi les mécaniciens d'atelier et de carrières, certains étaient classés N3E2 et d'autres N3E3 (conclusions p.20) ; qu'en se basant sur ce tableau pour affirmer que les mécaniciens accomplissent tous un travail de valeur égale, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'existence au sein de cette catégorie des différents échelons de classification n'était pas justifiée par des différences de tâches et de fonctions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » et de l'article 1315 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit recevable l'action du syndicat CGT Bocahut, et d'avoir condamné la société Bocahut à lui payer la somme de 250 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE
L'action du syndicat CGT
La société BOCAHUT estime que le syndicat ne fait pas la preuve d'une atteinte aux intérêts collectifs de la profession.
Mais le non respect de l'égalité de traitement, l'absence de critères objectifs pour la fixation des rémunérations individuelles, ainsi que l'absence d'information effective des institutions représentatives du personnel, portent atteinte à l'intérêt collectif de la profession.
Il lui sera alloué la somme de 250€ à titre de dommages et intérêts ;
1°) ALORS QUE la cassation d'un chef de décision entraîne la cassation par voie de conséquence de tous les autres chefs de décision qui en sont la suite nécessaire, en application de l'article 625 du code de procédure civile ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen ne pourra qu'entraîner la cassation du chef de l'arrêt relatif à l'indemnisation du syndicat en raison du non-respect de l'égalité de traitement ;
2°) ALORS QUE l'article L 2132-3 du Code du travail donne qualité à agir au syndicat dans l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ; qu'en affirmant que l'absence d'information effective des institutions représentatives du personnel, porte atteinte à l'intérêt collectif de la profession, sans autre précision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions.Moyens produits au pourvoi principal par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Bocahut
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les mécaniciens font un travail de valeur égale, et en conséquence, avant dire droit, d'avoir ordonné a ordonné la communication à M. [N] des bulletins de paie de l'ensemble des mécaniciens sur la période 2006-2014 ;
AUX MOTIFS D'UNE PART, QUE
Les demandes de rappels de salaires fondées sur le principe « à travail égal, salaire égal».
L'employeur a pour obligation de verser la même rémunération aux travailleurs accomplissant un travail égal ou de valeur égale et il incombe au salarié qui invoque une inégalité de traitement de présenter des éléments de fait susceptibles de caractériser une telle inégalité.
En l'espèce, Monsieur [N] se prévaut des données communiquées par l'expert-comptable missionné par le comité d'entreprise en application des articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail, données relatives à la rémunération des ouvriers filière maçon-électricien-agents d'entretien pour en conclure à l'existence à son détriment d'une inégalité de traitement et calculer le rappel de salaire.
La mission de l'expert-comptable désigné en application des articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail porte sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise et l'analyse des fichiers relatifs à la rémunération du personnel relève de cette mission. Au surplus, en l'espèce, l'expert-comptable avait relevé une situation sociale marquée par une judiciarisation des relations collectives témoignant d'un passif social non soldé. Une telle constatation rendait d'autant plus fondée l'analyse critiquée.
C'est donc à bon droit que l'expert-comptable s'est penché sur l'éventail des rémunérations versées aux ouvriers occupant le même emploi de conducteur d'installation.
De même, il ne peut lui être reproché d'en avoir fait part aux membres du comité d'entreprise, dès lors que c'est cette instance qui lui a confié sa mission.
S'agissant du secret, l'expert du comité d'entreprise est tenu dans les termes de l'article L2325-42 du code du travail, au secret et à l'obligation de discrétion définis à l'article L2325-5 applicable aux membres du comité d'entreprise. Il s'agit d'une application particulière à l'expert missionné par le comité d'entreprise du secret professionnel édicté par le code de déontologie. C'est donc au regard du code du travail qu'il convient d'en apprécier le respect par le cabinet Alter.
Le dit code distingue le secret professionnel applicable aux secrets de fabrication et le devoir de discrétion concernant toute information revêtant un caractère confidentiel et présentée comme telle par l'employeur.
Dans la mesure où l'employeur n'a pas en l'espèce, présenté les tableaux litigieux comme confidentiels, seule la confidentialité attachée à l'obligation générale de respecter la vie privée s'impose à l'expert-comptable, la défense de ce droit appartenant à leur titulaire.
En l'espèce, les tableaux reprenaient les éléments relatifs à l'âge, à la date d'entrée dans l'entreprise, l'emploi et la classification, à la filière, au niveau de l'emploi, au montant du salaire sur les trois dernières années. Seuls l'âge et la date d'entrée, ainsi que le salaire, diffèrent. Il en résulte que les salariés concernés ne pouvaient le cas échéant être identifiés que par des proches. Etant par ailleurs observé que seuls les éléments analysés permettaient de faire la preuve du non-respect de la règle « à travail égal, salaire égal », et étaient détenus par l'employeur, il convient de considérer que l'expert-comptable a respecté son obligation de discrétion.
En outre, l'employeur n'a fait l'objet d'aucune critique de la part des salariés dont l'identité aurait ainsi été dévoilée, ni aucune poursuite engagée à l'encontre des salariés parties à l'instance.
Dès lors les éléments communiqués par le cabinet d'expertise comptable constituent un mode de preuve loyal et recevable ;
1°) ALORS QUE le comité d'entreprise peut se faire assister d'un expert-comptable de son choix, en vue de l'examen annuel des comptes prévu aux articles L. 2323-8 et L.2323-9 du code du travail, dont la mission porte alors sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise ; qu'ainsi, si l'étude de la structure des rémunérations du personnel destinée à fournir au comité des explications cohérentes sur la situation de l'entreprise relève de la mission de l'expert-comptable désigné en vue de l'examen annuel des comptes et des documents prévisionnels, de même que l'étude des charges du personnel et du système de rémunération, l'analyse de la situation comparée des salariés au sein de l'entreprise, qui est nécessairement de nature juridique, ne peut relever d'une telle mission ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
2°) ALORS QU' en retenant par ailleurs que la constatation par l'expert d'une situation sociale au sein de l'entreprise marquée par une judiciarisation des relations collectives témoignant d'un passif social non soldé justifiait que l'expert-comptable ait été investi d'une mission de contrôle du principe d'égalité de traitement en matière de rémunération au sein de l'entreprise, la cour d'appel a violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
3°) ALORS QU'en retenant encore, pour justifier la communication par l'expert-comptable au comité d'entreprise des tableaux litigieux, que seuls les éléments analysés permettaient de faire la preuve du non-respect de la règle « à travail égal, salaire égal », quand il n'incombait pas à l'expert-comptable d'apporter une telle preuve, la cour d'appel a de plus fort violé les articles L. 2325-35 et L. 2325-36 du code du travail ;
4°) ALORS QUE l'employeur est tenu de veiller en toutes circonstances au respect de la vie privée de ses salariés, notamment quant aux montants de leurs rémunérations ; qu'en retenant que les tableaux transmis par l'employeur à l'expert-comptable puis par ce dernier au comité d'entreprise, et enfin aux salariés, constituaient un mode de preuve loyal et recevable, au motif inopérant que ces salariés, dont le montant des rémunérations étaient ainsi dévoilés, ne s'en étaient pas plaints, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS D'AUTRE PART, QUE
En vertu de l'article L3221-4 du sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités, et de charge physique et nerveuse.
Monsieur [N] demande à titre principal la communication des bulletins de paie de l'ensemble des mécaniciens, pour calculer le rappel de salaire dû en application du principe d'égalité de rémunération pour un travail égal, et à titre subsidiaire, un rappel de salaire sur la base du salaire de deux autres salariés mieux rémunérés.
Pour s'y opposer, la société BOCAHUT soutient que le salarié ne fait pas la preuve de l'identité de situation justifiant l'atteinte à la vie privée de l'ensemble des mécaniciens que constituerait la communication de tous les bulletins de paie. Elle distingue, s'agissant des mécaniciens, deux emplois différents impliquant selon elle des responsabilités, des compétences et des charges physiques et nerveuses différentes, le mécanicien de carrière et le mécanicien d'atelier dont le travail ferait appel à des compétences supérieures. Elle produit les fiches de poste internes à l'entreprise, ainsi que le rapport réalisé à sa demande, de manière non contradictoire, par un expert. Elle fait valoir également que le salarié ne fait pas la preuve de l'identité parfaite de situation au regard de la classification.
Toutefois, il convient de relever que les partenaires sociaux ont aux termes l'accord de classification du 1er juillet 2008, défini un seul emploi de mécanicien, classé au niveau 3 de la catégorie des ouvriers de maintenance, dont les fonctions consistent à assurer les travaux courants de maintenance mécanique, sans distinguer les conditions de travail, en atelier ou en carrière. L'expert commis par l'employeur, fait état de la différence des fonctions exactes, maintenance des engins roulants en atelier ou maintenance des installations fixes en carrière, sans pour autant mettre en évidence de manière circonstanciée des compétences et des responsabilités plus ou moins importantes, ni une charge physique ou nerveuse différente.
Dès lors, la cour considère qu'il existe une présomption de l'accomplissement d'un travail de valeur égale, présomption non combattue par l'employeur.
La classification est éventuellement susceptible de justifier une différence de traitement, mais il incombe à l'employeur qui les connaît, d'en justifier, ce qu'il ne fait pas pour chacun des mécaniciens, de sorte que les différences de rémunération ne font l'objet d'aucun critère objectif.
Dès lors, la demande de communication de l'ensemble des bulletins de paie des mécaniciens est fondée. Elle sera ordonnée sous astreinte ;
5°) ALORS QU' il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe « à travail égal, salaire égal » de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération ; qu'en l'espèce pour conclure que « les mécaniciens font un travail de valeur égale », la cour d'appel s'est référée à la définition donnée par l'accord du 1er juillet 2008 (en réalité du 10 juillet) des missions et compétences des ouvriers de maintenance, et en a déduit « une présomption de l'accomplissement d'un travail de valeur égale » ; qu'en retenant ainsi que la seule appartenance du salarié à la catégorie des ouvriers de maintenance, niveau 3, suffisait à faire présumer l'accomplissement d'un travail de valeur égale, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
6°) ALORS QUE la situation du salarié qui prétend à une inégalité de salaire ne peut être comparée qu'aux seuls salariés ayant la même classification, étant affectés à la même activité et exerçant les mêmes fonctions dans le cadre du même poste de travail ; qu'en l'espèce, l'employeur soutenait et démontrait que les mécaniciens occupent des postes liés à des activités techniquement spécifiques, faisant appel à des compétences professionnelles différentes, selon leur affectation en atelier ou en carrière ; qu'en reprochant à la société Bocahut de n'apporter aucune justification pour chacun des mécaniciens, « de sorte que les différences de rémunération ne font l'objet d'aucun critère objectif », quand il était versé aux débats les fiches descriptives détaillées des deux postes de mécaniciens ainsi qu'une note établie par un expert judiciaire décrivant ces postes et qu'il était également précisé pour chaque salarié le poste occupé ainsi que la nature des fonctions exercées et procédé à des comparaisons de postes entre différents mécaniciens, la cour d'appel a violé le principe « à travail égal, salaire égal » et l'article 1315 du Code civil ;
7°) ALORS QUE l'employeur faisait valoir (conclusions n°2, p.17) d'abord que le tableau établi par l'expert-comptable pour les années 2006-2007-2008 ne prenait pas en compte les classifications en vigueur sur cette période qui pouvaient être, selon le cas, OQ1 coefficient 160, à OHQ coefficient 200, ce qui excluait qu'il y ait eu une identité de classification pour l'ensemble des mécaniciens et ensuite qu'à compter de 2008, le niveau 3 était assorti de trois échelons différents de sorte que parmi les mécaniciens d'atelier et de carrières, certains étaient classés N3E2 et d'autres N3E3 (conclusions p.20) ;
qu'en se basant sur ce tableau pour affirmer que les mécaniciens accomplissent tous un travail de valeur égale, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'existence au sein de cette catégorie des différents échelons de classification n'était pas justifiée par des différences de tâches et de fonctions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe « à travail égal, salaire égal » et de l'article 1315 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit recevable l'action du syndicat CGT Bocahut, et d'avoir condamné la société Bocahut à lui payer la somme de 250 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE
L'action du syndicat CGT
La société BOCAHUT estime que le syndicat ne fait pas la preuve d'une atteinte aux intérêts collectifs de la profession.
Mais le non-respect de l'égalité de traitement, l'absence de critères objectifs pour la fixation des rémunérations individuelles, ainsi que l'absence d'information effective des institutions représentatives du personnel, porte atteinte à l'intérêt collectif de la profession.
Il lui sera alloué la somme de 250€ à titre de dommages et intérêts ;
1°) ALORS QUE la cassation d'un chef de décision entraîne la cassation par voie de conséquence de tous les autres chefs de décision qui en sont la suite nécessaire, en application de l'article 625 du code de procédure civile ; que la cassation à intervenir sur le premier moyen ne pourra qu'entraîner la cassation du chef de l'arrêt relatif à l'indemnisation du syndicat en raison du non-respect de l'égalité de traitement ;
2°) ALORS QUE l'article L 2132-3 du Code du travail donne qualité à agir au syndicat dans l'intérêt collectif de la profession qu'il représente ; qu'en affirmant que l'absence d'information effective des institutions représentatives du personnel, porte atteinte à l'intérêt collectif de la profession, sans autre précision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard desdites dispositions.Moyen produit au pourvoi incident n° X 15-20.481 par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils pour M. [K] et le syndicat CGT Bocahut
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit le salarié mal fondé en sa demande de fixation du salaire pour l'avenir et l'en avoir débouté ;
AUX MOTIFS QU'il n'incombe pas au juge, en l'absence de litige et de données du litige, de fixer pour l'avenir, un élément du contrat ;
ALORS QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en déboutant le salarié de sa demande tendant à la fixation de son salaire pour l'avenir, aux motifs qu'il n'appartenait pas au juge, en l'absence de litige et de données du litige, de fixer pour l'avenir, un élément du contrat, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs au titre de la réparation de la violation du principe « à travail égal, salaire égal » qu'elle constatait, en violation du principe susvisé ;
Moyen produit au pourvoi incident n° Y 15-20.482 par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils pour M. [D] et le syndicat CGT Bocahut
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit le salarié mal fondé en sa demande de fixation du salaire pour l'avenir et l'en avoir débouté ;
AUX MOTIFS QU'il n'incombe pas au juge, en l'absence de litige et de données du litige, de fixer pour l'avenir, un élément du contrat ;
ALORS QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en déboutant le salarié de sa demande tendant à la fixation de son salaire pour l'avenir, aux motifs qu'il n'appartenait pas au juge, en l'absence de litige et de données du litige, de fixer pour l'avenir, un élément du contrat, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs au titre de la réparation de la violation du principe « à travail égal, salaire égal » qu'elle constatait, en violation du principe susvisé ;
Moyen produit au pourvoi incident n° Z 15-20.483 par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils pour M. [N] et le syndicat CGT Bocahut
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit le salarié mal fondé en sa demande de fixation du salaire pour l'avenir et l'en avoir débouté ;
AUX MOTIFS QU'il n'incombe pas au juge, en l'absence de litige et de données du litige, de fixer pour l'avenir, un élément du contrat ;
ALORS QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en déboutant le salarié de sa demande tendant à la fixation de son salaire pour l'avenir, aux motifs qu'il n'appartenait pas au juge, en l'absence de litige et de données du litige, de fixer pour l'avenir, un élément du contrat, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs au titre de la réparation de la violation du principe « à travail égal, salaire égal » qu'elle constatait, en violation du principe susvisé ;