La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/2018 | FRANCE | N°16-28566

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 janvier 2018, 16-28566


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, qu'abstraction faite du motif erroné mais surabondant visé par la première branche, que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de manque de base légale et de dénaturation, le moyen ne tend pour le surplus qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui, ayant constaté que les faits reprochés au salarié relativement aux vols de transports publics des 1er, 2 et 3 juin 2010,

sans contrôle, ligne et hors ligne à jour étaient matériellement établis, a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, qu'abstraction faite du motif erroné mais surabondant visé par la première branche, que sous le couvert de griefs non fondés de violation de la loi, de manque de base légale et de dénaturation, le moyen ne tend pour le surplus qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel qui, ayant constaté que les faits reprochés au salarié relativement aux vols de transports publics des 1er, 2 et 3 juin 2010, sans contrôle, ligne et hors ligne à jour étaient matériellement établis, a pu en déduire que les agissements de l'intéressé rendaient impossible la poursuite du contrat de travail et constituaient une faute grave ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé et prononcé par le président et Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller le plus ancien en ayant délibéré conformément aux dispositions des articles 452 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. Y....

- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit le licenciement pour faute grave fondé, et débouté, en conséquence, M. Y... de ses demandes d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis.

- AU MOTIF QUE L'avertissement litigieux, du 28 juin 2010, est ainsi formulé :

« Monsieur, malgré mes 3 précédents rappels, vous n 'avez toujours pas transmis les documents demandés, relatifs à votre statut de pilote. Ceci démontre un manque de professionnalisme et engage votre responsabilité. Ces documents doivent être transmis à réception de la présente par message électronique et courrier. Devant votre attitude, je vous informe que ce courrier constitue un avertissement. »

L'employeur verse aux débats les éléments suivants :

· le courriel adressé le 31 mai 2010, en ces termes : a bonjour à tous, merci de me faire parvenir aux plus vile les documents suivants (..) :Y... : autorisation helisurface entrainement VSV hors ligne EC 135 (...)

E... D... , responsable opération sol, groupe Saf »

· le courriel adressé le 7 juin 2010 en ces termes : « bonjour à tous, merci de me faire parvenir aux plus vite les documents suivants : Y... : 21 rappel entrainement VSV hors ligne EC 135 autorisation helisurface (..)

E... D... , responsable opération sol groupe Saf »

· le courriel adressé le 14 juin 2010 en ces termes :

: « bonjour à tous, merci de me faire parvenir aux plus vite les documents suivants

Y... : Y rappel HORS LIGNE 135 qui a dû être fait avant le 31/05/2010 (..)

E... D... responsable opération sol groupe Saf »

Il n'est pas contesté par M. Y... que l'adresse à laquelle ces messages ont été envoyés ([...]) est bien son adresse personnelle ; qu'il a reçu ces messages et n'y a pas répondu. Les pièces versées aux débats par M. Y... lui-même (demande de congé paternité du 3 mai 2010) démontrent d'ailleurs que l'intéressé utilisait cette adresse personnelle dans ses rapports avec l'employeur.

Par courrier du 17 juillet 2010 M. Y... a contesté cet avertissement, indiquant être dans l'impossibilité de communiquer les documents justificatifs sollicités, et précisant que son arrêt de travail ne lui permettait pas de se soumettre aux contrôles en l'état. S'il est constant qu'à compter du 8 juin 2010, M. Y... était en arrêt de travail, et s'il est établi par les pièces qu'il verse aux débats que cet arrêt de travail a été précédé d'une admission aux urgences le 31 mai 2010 pour une « suspicion de colique néphrétique », le salarié ne peut se retrancher derrière ces difficultés médicales contemporaines aux ultimes relances de son employeur alors même que :

- L'employeur justifie avoir dès le 11 décembre 2009 (soit 6 mois plutôt) indiqué à l'intéressé : « suite à la vérification de ton dossier voici les documents qu'il me manque : contrôle hors-ligne 355

contrôle ligne

Qt 135

contrôle hors-ligne 135

contrôle hors-ligne Mono

merci de me les faire parvenir au plus tôt à l'Alpe d'Huez (fax : [...]        )

E... D...

Opération aériennes „

- l'employeur justifie avoir relancé par courriel du 9 mars 2010 son salarié en ce termes « bonjour, il me manque encore ta QT 135, contrôle hors ligne 355 et mono. Pour info : les documents sans nom partent à la poubelle. A bientôt

E... D... , opérations aériennes »

M. Y... ne justifie pas de l'impossibilité de répondre à son employeur au mail du 31 mai 2010, avant son arrêt de travail du 8 juin 2010, au moins pour l'informer que son état de santé ne lui permettait pas de se soumettre aux contrôles litigieux

L'avertissement du 28 juin 2010 apparaît dès lors fondé, et la demande de dommages-intérêts pour avertissement abusif doit être rejetée.

Sur le licenciement : La charge de la preuve de la faute grave pèse sur l'employeur. Il résulte de la lettre de licenciement que la rupture est fondée sur les 2 motifs suivants :

· avoir volé, en transport public, les 1er , 2 et 3 juin 2010 sans être à jour de ses contrôles, ligne et hors-ligne

· n'avoir pas adressé la carte autorisation d'utilisation des hélisurfaces malgré différents rappels de l'employeur

Vols de transports publics les 1er, 2 et 3 juin 2010, sans contrôle, ligne et hors ligne à jour

Au terme de l'article 10 du contrat de travail liant les parties, M. Y... s'est engagé à accepter toutes les missions qui lui seront demandées, compatibles avec la législation en vigueur, et à maintenir à jour toutes ses différentes licences professionnelles. Il est précisé que de manière générale, il sera assujetti, en ce qui concerne les conditions pratiques de son emploi, aux règles propres au personnel navigant définies par le code de l'aviation civile. M. Y... ne conteste pas être soumis en qualité de pilote d'hélicoptères, à une réglementation qui lui impose de subir des contrôles périodiques, notamment des contrôles « ligne » et « hors ligne ». M. Y... ne conteste pas avoir les 1er, 2 et 3 juin 2010, piloté sur des vols de transports publics, alors qu'il n'avait pas passé les contrôles ligne et hors-ligne qui étaient venus à échéance, le concernant, le 31 mai 2010.

La matérialité du premier grief est donc établie.

Pour soutenir que ce grief ne pouvait justifier son licenciement, M. Y... invoque différents moyens qu'il convient d'examiner.

- Les manquements de l'employeur

Monsieur Y... fait valoir que c'est l'employeur qui a fixé et maintenu ces vols les 1er, 2 et 3 juin 2010, et qu'en effectuant ceux-ci il n'a fait qu'exécuter les instructions de la société Saf hélicoptères.

L'employeur verse aux débats, outre les mails des 11 décembre 2009 et 9 mars 2010, d'ores et déjà analysés, les pièces suivantes :

· le courriel du 31 mai 20I0, date à laquelle Monsieur Y... n'était pas en arrêt de travail, par lequel l'employeur lui rappelle qu'il doit faire parvenir « autorisation hélisurface » « entrainement VSV hors ligne EC 135 ».

· le courrier de contestation de l'avertissement portant la date du 17 juillet 2010 adressé par M. Y... à son employeur, dont il résulte que c'est à la date de réception de cette lettre que la société Saf Hélicoptères a pu prendre connaissance du fait que M. Y..., malgré les différentes relances qui lui avaient été adressées, n'avait pas passé les contrôles

· attestations de Madame E... D... en ces termes : « j'ai contacté Monsieur Y... le 18 mai 2010 concernant ses contrôles ligne et hors-ligne EC 135. Celui-ci a confirmé une prise de rendez-vous avec Monsieur A... le 25 mai 2010. Je l'ai relancé par e-mail le 31 mai 2010 afin d'obtenir le justificatif manquant pour la bonne tenue de son dossier » ; « le contrôle hors-ligne EC 135 organisé le 25 mai 2010 entre Monsieur A... et Monsieur Y... n'a pas eu lieu. Celui-ci a été annulé par Monsieur Y... sans en avertir le service des opérations »

· attestation de Monsieur B..., pilote professionnel hélicoptères, responsable des opérations SMVH Groupe Saf en ces termes : « le 28 mai 2010, j'ai contacté Madame E... D... responsable des opérations au sol pour vérifier qu'elle avait bien eu confirmation que Monsieur Said Y... avait passé comme prévu ses contrôles en ligne et hors-ligne le 25 mai 2010. Elle m'a répondu que oui et qu'elle était dans l'attente des justificatifs de ces contrôles. Je précise que ces contrôles devaient être effectués avec Monsieur Jean-Pierre A... pilote instructeur, lequel avait rendez-vous le 25 mai 2010 au matin pour passer la visite médicale semestrielle au centre d'expertise de [...]. À l'issue de sa visite médicale il était convenu que Monsieur A... réaliserait les vols d'instruction et de contrôle de Monsieur Y..., J'ai appris par la suite que ces vols de contrôle n'avaient pas été effectués et que Monsieur Y... s'était mis en infraction en assurant son service avec des documents et licences non à jour. Je rappelle que chaque pilote commandant de bord est seul responsable de la validité de ces documents licences comme le prévoit la réglementation »

· attestation de Monsieur Louis C... pilote d'hélicoptère, RDFE Saf hélicoptères, en ces termes « il est obligatoire pour les pilotes effectuant des missions de transport public de s 'assurer d'être à jour de leur contrôle en ligne et hors-ligne ainsi que de la validité de leur licence. Durant ma carrière de RDFE je n'ai jamais eu à faire à un pilote qui ait pris le risque de voler sans être à jour de ses contrôles en dehors du cas de Monsieur Y.... Le manuel d'exploitation de Saf hélicoptères en vigueur au moment des faits précise bien qu'en tant que commandant de bord le pilote doit s'assurer être détenteur des titres et attestation requis pour l'exercice de ses fonctions ».

L'employeur démontre ainsi avoir mis en mesure son salarié de passer les contrôles auxquels il est assujettis, de l'avoir relancé à plusieurs reprises, et de n'avoir eu connaissance du fait que l'intéressé n'avait en réalité pas passé les contrôles requis avant le 31 mai 2010, que courant juillet 2010. Le salarié quant à lui verse aux débats la sommation interpellative qu'il a fait délivrer à M. A... dont il résulte que l'intéressé confirme être pilote instructeur à la Saf et faire effectuer les contrôles « ligne » et « hors ligne » des pilotes, et qui à la question « Monsieur Y... a-t-il personnellement pris rendez-vous auprès de vous afin d'effectuer ses contrôles ligne et hors-ligne pour le 25 mai 2010 ? » a répondu « non il n'a pas pris rendez-vous pour le 25 mai 2010 » Or dans son courrier du 17 juillet 2010 par lequel il contestait l'avertissement, Monsieur Y... a indiqué qu'il avait en effet reçu un mail et qu'il avait l'intention de passer son test en ligne à l'issue de sa semaine de travail « grâce à ce rappel », et de fournir les documents en attestant, mais que suite à 2 admissions aux urgences pendant cette semaine de travail du 28 mai au 3 juin, il a consulté son médecin traitant qui l'a placé en arrêt à compter du 8 juin 2010. Il ressort de ce courrier émanant du salarié lui-même que l'intéressé a bien reçu son rappel, qu'il avait l'intention de passer le contrôle dans la semaine du 28 mai au 3 juin, et que ce n'est pas l'attitude de l'employeur qui l'en a empêché. Il en ressort que M. Y... ne verse aucun élément de nature à combattre les éléments fournis par l'employeur aux termes desquelles il avait dit qu'il passerait les contrôles le 25 mai 2010, et en tout cas à établir que la société Saf hélicoptère a pu avoir connaissance avant la réception du courrier du 17 juillet 2010, qu'il n'avait pas passé les contrôles avant la date butoir du 31 mai 2010, alors que de son propre aveu, il avait l'intention de passer son test. Le manquement de l'employeur selon lequel celui-ci aurait contraint son salarié à piloter les 1er,
2 et 3 en toute connaissance de cause n'est donc pas établi. Monsieur Y... soutient en outre que si l'organisation et le maintien des licences professionnelles pèsent sur le salarié, tel n'est pas le cas des contrôles ligne et hors-ligne, lesquels doivent être organisés par l'employeur qui est tenu de s'assurer de leur accomplissement avant tout vol. La cour constate toutefois qu'à aucun moment, que ce soit en réponse aux relances qu'il recevait de la part de son employeur, ou dans son courrier du 17 juillet 2010, Monsieur Y... n'a fait valoir auprès de son employeur qu'aucun rendez-vous n'avait été fixé pour lui permettre de passer ces tests ou que la société Saf ne le mettait pas en mesure de le faire. Il ressort au contraire des éléments de chronologie et des pièces versées aux débats tels que d'ores et déjà analysés, que l'employeur mettait son salarié en mesure de passer les tests, et a tenté vainement de s'assurer que Monsieur Y... avait accompli les contrôles dans le délai requis, mais s'est heurté à la carence et au silence de l'intéressé, qui ne l'a pas informé du fait qu'il n'avait pas passé les tests avant le 25 mai 2010. La réponse de M. A... à la sommation interpellative concerne seulement une prise de rendez-vous par M. Y... « personnellement » et n'établit nullement qu'aucun rendez-vous n'aurait été pris par quiconque, ni que M. Y... n'aurait pas indiqué faussement à Mme D... qu'il avait rendez-vous le 25 mai alors qu'il n'en était rien. En outre l'arrêté du 23 septembre 1999 relatif aux conditions techniques d'exploitation d'hélicoptères par une entreprise de transport aérien public, fait seulement obligation à l'exploitant de s'assurer que chacun des membres de l'équipage de conduite subit un maintien de ses compétences et des contrôles périodiques. La réglementation n'impose pas à l'exploitant d'organiser lesdits contrôles périodiques, mais seulement de permettre aux pilotes le maintien de leurs compétences, et de contrôler que chaque équipage est à jour. Le fait allégué par l'appelant qu'aucun vol n'ait été prévu dans le planning sur la semaine du 21 au 27 mai 2010 en ce qui concerne M. Y... n'est pas de nature à contredire les éléments versés aux débats par l'employeur qui démontre que l'intéressé avait dit qu'il devait passer son test avec l'instructeur le 25 mai 2010.

Les développements de M. Y... relatifs à un accident survenu le 28 octobre 2010 à l'occasion d'un appontage sur un navire, sont étrangers au litige. Le fait que l'employeur ait l'obligation réglementaire de connaître en temps réel les contrôles subis ou non par chacun de ses pilotes, est sans incidence sur l'appréciation du comportement du salarié qui s'est abstenu d'une part de passer le contrôle, malgré des relances depuis plus de 6 mois, et d'autre part d'en tenir informé l'employeur.

Les remarques de Monsieur Y... quant au niveau hiérarchique de Madame D... , qui n'aurait été que « le salarié chargé de collecter des documents », sont d'une part contredites par l'organigramme qu'il a lui-même versé aux débats dont il résulte que l'intéressée était directement rattachée au directeur des opérations et était responsable des opérations sol, et d'autre part inopérantes dès lors qu'il appartenait à Monsieur Y... en tout état de cause de répondre aux messages de celle-ci, à la supposer seulement chargé de collecter les documents relatifs au suivi des contrôles.

Sur la prescription du grief

Il résulte de l'analyse qui précède que la société Saf démontre n'avoir eu connaissance que Monsieur Y... ne s'était pas rendu au contrôle le 25 mai 2010, que courant juillet 2010, à la réception de son courrier de contestation de l'avertissement. Le moyen tiré la prescription doit donc en conséquence être rejetée.

Sur le délai restreint.

Monsieur Y... soutient que l‘employeur n'a pas mis en oeuvre le licenciement pour faute grave dans le délai restreint exigé par la jurisprudence en matière de faute grave. M. Y... ne verse pas aux débats l'accusé réception du courrier qu'il a adressé en RAR, tel que cela figure en en-tête, le 17 juillet 2010, alors même que c'est par ce courrier que l'employeur a appris qu'il n'avait pas passé son test. Aucun élément ne permet à la cour de retenir qu'en convoquant par courrier RAR du 3 août 2010, l'employeur n'aurait pas agi dans le délai restreint applicable en matière de faute grave.

Absence de transmission à l'employeur de la carte d'autorisation d'utilisation des hélisurfaces malgré nos multiples rappels.

Il résulte des pièces versées aux débats que la carte d'autorisation d'utilisation des hélisurfaces est délivrée par l'autorité administrative, et a pour objectif de constituer des fiches de renseignements de police. Il s'agit bien d'une obligation, sanctionnée d'une amende. L'employeur verse aux débats le cahier des clauses techniques particulières du marché public souscrit avec le centre hospitalier de [...] concernant la mise à disposition d'un hélicoptère sanitaire. Ce cahier des charges énonce que le titulaire du marché doit adresser au préfet du Var une demande d'autorisation d'utiliser la plate-forme comme hélisurface, et qu'en cas de refus de l'autorisation, le marché sera résilié automatiquement, sans droit à un dédommagement pour le titulaire. L'absence d'obtention par le pilote de son autorisation d'utiliser la plate-forme comme hélisurface est donc de nature à entraîner une incidence négative pour l'employeur dans le cadre de son marché public. Il résulte des pièces d'ores et déjà analysées que l'autorisation hélisurface a été réclamée à Monsieur Y... par courriel des 31 mai 2010 et 7 juin 2010, soit avant son arrêt maladie, et que l'intéressé ne justifie pas avoir transmis le document demandé. La matérialité du grief est dès lors établie.

Appréciation de la gravité des manquements et de la faute grave.

S'agissant de documents importants engageant la responsabilité de l'employeur, ainsi que celle du pilote, Monsieur Y... se devait de délivrer les documents demandés avec diligence. Il apparaît que l'intéressé bien que parfaitement informé que son dossier n'était pas complet, non seulement n'a pas mis en oeuvre les mesures nécessaires, alors pourtant que l'employeur mettait à sa disposition les moyens nécessaires, mais a omis de répondre aux demandes répétées de son employeur, et a en outre dissimulé à celuici qu'au 31 mai 2010, date d'échéance de ces contrôles, il n'avait en réalité passé les tests. Ce comportement caractérise un manque de professionnalisme grave compte tenu de la nature et du niveau de responsabilité exercée, ainsi qu'une violation des obligations résultant du contrat de travail, rendant impossible le maintien de la relation de travail dès lors que Monsieur Y... ne peut pas piloter d'hélicoptères sans les documents litigieux. Il y a lieu dès lors d'infirmer la décision du conseil de prud'hommes et de juger fondé le licenciement pour faute grave. Les demandes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés sur préavis, doivent être rejetées.

- ALORS QUE D'UNE PART l'employeur qui a notifié à un salarié un avertissement pour sanctionner certains faits a épuisé son pouvoir disciplinaire ; qu'il ne peut en l'absence de nouveau grief ou de persistance des mêmes faits fautifs prononcer un licenciement fondé sur les mêmes faits, même autrement qualifiés ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que la société Saf Hélicoptères a notifié un avertissement à M. Y... pour ne pas avoir transmis, malgré 3 précédents rappels, les documents demandés relatif à son statut de pilote ; qu'en relevant que la société Saf Hélicoptères avait pu valablement licencier M. Y... en se fondant sur l'absence de transmission à l'employeur de la carte d'autorisation d'utilisation des hélisurfaces malgré de multiples rappels alors que ce fait avait déjà été sanctionné antérieurement par un avertissement, la cour d'appel a violé les articles L. 1331-1 et L. 1235-1 du code du travail et le principe « non bis in idem » ;

- ALORS QUE D'AUTRE PART la lettre de licenciement fixe les limites du litiges ; qu'en l'espèce, l'employeur avait notamment dans sa lettre de licenciement reproché à M. Y... de ne pas lui avoir transmis la carte d'autorisation d'utilisation des hélisurfaces malgré de multiples rappels ; que cette autorisation ne relève pas de considérations de sécurité des vols mais d'une simple exigence de police émise par le ministère de l'intérieur ; qu'il n'était donc pas reproché à M. Y... de ne pas avoir obtenu l'autorisation d'utiliser la plate-forme comme hélisurface ou de s'être vu refusé ladite autorisation ; qu'en décidant cependant que M. Y... avait commis une faute grave dès lors que l'absence d'obtention par le pilote de son autorisation d'utiliser la plate-forme comme hélisurface était donc de nature à entrainer une incidence négative pour l'employeur dans le cadre de son marché public alors qu'il était seulement reproché à M. Y... le fait de ne pas avoir transmis à son employeur la carte d'autorisation d'utilisation des hélisurfaces malgré plusieurs rappels, la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement en violation de l'article 1134 du code civil devenu l'article 1103 du code civil ;

- ALORS QUE DE TROISIEME PART le délai de deux mois pour engager les poursuites disciplinaires court à compter du jour où l'employeur a eu une connaissance des faits reprochés au salarié ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que l'employeur savait parfaitement que les contrôles ligne et hors ligne de son salarié devaient être faits avant le 31 mai 2010 et qu'il devait s'assurer que les inscriptions étaient faites en temps réel ou sans délai et de manière irréversible ; qu'en énonçant cependant que la société SAF Hélicoptères n'avait eu connaissance qu'à réception de la lettre recommandée du 17 juillet 2017, soit dans le délai de prescription que M. Y... n'avait pas passé ses contrôles ligne et hors ligne avant la date butoir du 31 mai 2010 et qu'il avait donc piloté les 1er, 2 et 3 juin sur des vols de transports publics sans être à jour de ses contrôles ligne et hors ligne alors que tant la règlementation que le manuel d'exploitation de la SAF Hélicoptères qui précise (p 25) que « les contrôles semestriels sont initiés par le Responsable désigné formation ou le RDOA qui désignent le pilote contrôleur Groupe SAF qui sera en charge de son exécution. Les contrôles semestriels regroupent les contrôles en ligne et les contrôles hors ligne » imposent à l'exploitant de contrôler que chaque équipage est à jour, ce dont il résulte que la société SAF Hélicopères, qui devait avoir connaissance en temps réel des contrôles subis par ses pilotes en application de l'arrêté du 23 septembre 1999, ne pouvait ignorer que les contrôles ligne et hors ligne n'avaient pas été effectués par M. Y... avant la date butoir, la cour d''appel, qui a pourtant déclaré les faits non prescrits, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L 1332-4 du code du travail ;

- ALORS QUE DE QUATRIEME PART l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise et doit en assurer l'effectivité ; que l'initiative qui pèse sur un pilote de maintenir à jour ses différentes licences professionnelles n'ôte pas à l'employeur, qui est parfaitement informé que les contrôles ligne et hors ligne de son salarié devaient être faits avant le 31 mai 2010 de son obligation de s'assurer que celui-ci a effectué les contrôles dans les délais ; qu'en effet, l'exploitant aux termes de l'arrêté du 23 septembre 1999, doit s'assurer que les inscriptions sont faites en temps réel ou sans délai et de manière irréversible ; que de même le manuel d'exploitation de la SAF Hélicoptères (p 25) précise que « les contrôles semestriels sont initiés par le Responsable désigné formation ou le RDOA qui désignent le pilote contrôleur Groupe SAF qui sera en charge de son exécution. Les contrôles semestriels regroupent les contrôles en ligne et les contrôles hors ligne » ; qu'en l'espèce, M. Y... avait d'ailleurs pris soin de rappeler (cf ses conclusions p 6) que les contrôles ligne et hors ligne n'étaient en rien assimilables à des licences professionnelles et étaient étrangers aux obligations du salariés mentionnés à l'article 10 de son contrat de travail lui imposant « de maintenir à jour toutes ses différentes licences professionnelle, être titulaire de la qualification de radio internationale ou l'acquérir rapidement et avoir en permanence un passeport en court de validité » ; qu'il ressort des propres constatations de la cour que la société SAF Hélicoptères a laissé M. Y... piloter les 1er, 2 et 3 juin 2010 sans vérifier au préalable que ce dernier avait passé les contrôles ligne et hors ligne avant le 30 mai 2010 alors pourtant que son manuel d'exploitation précise (p 25) que « les contrôles semestriels sont initiés par le Responsable désigné formation ou le RDOA qui désignent le pilote contrôleur Groupe SAF qui sera en charge de son exécution. Les contrôles semestriels regroupent les contrôles en ligne et les contrôles hors ligne » ; qu'en décidant cependant qu'un tel fait était sans incidence sur l'appréciation du comportement du salarié qui s'était abstenu d'une part de passer le contrôle malgré des relances depuis plus de six mois et d'autre part d'en tenir informé l'employeur, la cour d'appel a violé l'article L 4121-1 du code du travail ;

- ALORS QUE DE CINQUIEME PART et en tout état de cause, comme l'avait fait valoir M Y... dans ses conclusions d'appel (p 8), le manuel d'exploitation de la SAF Hélicoptères précise (p 25) que « les contrôles semestriels sont initiés par le Responsable désigné formation ou le RDOA qui désignent le pilote contrôleur Groupe SAF qui sera en charge de son exécution. Les contrôles semestriels regroupent les contrôles en ligne et les contrôles hors ligne » ; qu'il s'en évinçait que les contrôle ligne et hors ligne sont effectués avec le propre personnel et les propres hélicoptères de la SAF Hélicoptères ; qu'en décidant cependant que la réglementation n'impose pas à l'exploitant d'organiser lesdits contrôles spécifiques mais seulement de permettre aux pilotes le maintien de leurs compétences et de contrôler que chaque équipage est à jour sans rechercher, comme elle y était expressément invités, si le manuel d'exploitation n'imposait pas à l'employeur d'organiser lui-même les contrôles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 devenu l'article 1103 du code civil, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail

- ALORS QUE DE SIXIEME PART lorsque l'employeur fonde le licenciement sur une faute grave, la charge de la preuve lui incombe exclusivement et le salarié n'a rien à démontrer ; que d'autre part, les juges du fond ne peuvent considérer qu'un fait est établi en se fondant sur les affirmations de la partie sur laquelle repose la charge de la preuve ou de ses salariés ; qu'en se fondant, pour considérer que le licenciement pour faute grave était justifié, sur l'absence de preuve apportée par M. Y... pour démontrer l'absence de fondement des griefs avancés par l'employeur et sur les affirmations de ce dernier ou de ses salariés, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil devenu l'article 1353 du code civil ;

- ALORS QU'ENFIN la cour d'appel ne pouvait sans se contredire énoncer que M. Y... n'apportait aucun élément de nature à combattre la preuve les éléments fournis par l'employeur aux termes desquelles il aurait dit qu'il passerait ses contrôles le 25 mai tout en constatant que M. Y... avait reconnu dans sa lettre du 17 juillet 2010 avoir l'intention de passer ses tests postérieurement la semaine du 28 mai au 3 mai 2010, ce dont il résultait qu'il n'avait pas connaissance de la date du 25 mai pour passer lesdits contrôle d'où une violation de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-28566
Date de la décision : 31/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 27 octobre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 jan. 2018, pourvoi n°16-28566


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boullez, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.28566
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award