LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 6 juillet 2016), que la société Coopérative agricole Cofruid'oc a engagé Mme A... par plusieurs contrats saisonniers ; que les relations de travail ayant cessé, la salariée a saisi la juridiction prud'homale aux fins de requalification des contrats en contrat à durée indéterminée et de condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de requalifier les contrats saisonniers en un contrat à durée indéterminée et de le condamner au paiement d'indemnités de requalification, de rupture et de licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque les contrats de travail saisonniers à durée déterminée sont conclus à terme imprécis, ils doivent comporter une durée minimale ; que celle-ci est librement fixée par les parties ; que relevant de la volonté des parties, elle doit nécessairement être distincte de la saison constituant le terme imprécis, laquelle est indépendante de la volonté des parties ; qu'en l'espèce, il est constant que le second contrat, pris en compte par la cour d'appel, prévoyait que le contrat était conclu « jusqu'à courant août/début septembre 2000 », durée minimale librement fixée par les parties, la campagne de pommes précoces (2000) en constituant le terme imprécis ; qu'en requalifiant néanmoins le contrat de travail saisonnier en contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 1242-7 et L. 1242-12 du code du travail ;
2°/ que lorsque les contrats de travail saisonniers à durée déterminée sont conclus à terme imprécis, ils doivent comporter une durée minimale ; que celle-ci est librement fixée par les parties ; qu'ainsi, il n'est nullement exigé que la durée minimale soit précise ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé que la durée minimale d'exécution devait être précise et que telle n'était pas le cas, de sorte que le contrat de travail saisonnier qui prévoyait que le contrat était conclu « jusqu'à novembre/décembre 2008 » ne comportait pas de durée minimale et devait en conséquence être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée, qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1242-7 et L. 1242-12 du code du travail ;
Mais attendu que, conformément à l'article L. 1242-7 du code du travail, le contrat saisonnier doit comporter un terme fixé avec précision dès sa conclusion ou, à défaut, une durée minimale ;
Et attendu qu'ayant relevé que le premier contrat saisonnier du 4 janvier 2000 se bornait à faire état d'un "engagement jusqu'à fin janvier/courant février" et que le second, du 7 août 2000, se bornait à faire état d'un engagement "pour le début de la campagne pommes précoces 2000, qui s'étalera jusqu'à courant août/début septembre, en fonction du rythme de conditionnement" , ce dont il résultait qu'il ne comportait ni terme précis, ni durée minimale, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il y avait lieu à requalification des contrats saisonniers successifs en un contrat à durée indéterminée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Coopérative agricole Cofruid'oc aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Coopérative agricole Cofruid'oc à payer à Mme A... la somme de 600 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Rémy-Corlay , avocat aux Conseils, pour la société Coopérative agricole Cofruid'oc
La SA Coopérative agricole Cofruid'oc fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR requalifié les contrats de travail saisonniers à durée déterminée successifs en une relation de travail à durée indéterminée et de l'avoir condamnée au règlement de différentes indemnités de requalification, de rupture et de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QUE : « sur la demande de requalification La validité des contrats à durée déterminée initiés à compter du 4 janvier 2000 jusqu'au terme du dernier des contrats le 5 mai 2011, au regard des dispositions des articles L. 1242-7 et L. 1242-12 du Code du travail suppose qu'ils comportent, soit un terme précis, soit une durée minimale. Or, les contrats, ne seraient-ce que ceux des 4 janvier et 7 août 2000 ne comportent pas de termes précis puisqu'ils indiquent respectivement qu'ils se termineront « jusqu'à fin janvier/courant février 2000 » et « jusqu'à courant août/début septembre 2000 en fonction du rythme de conditionnement ». Le paragraphe portant article 1er sur la durée du contrat du 7 août 2000 est ainsi rédigé : « Mademoiselle Y... A... est engagé(e) à
compter du 7 août 2000 pour le début de la campagne Pommes précoces 2000, qui s'étalera jusqu'à courant août/début septembre 2000, en fonction du rythme de conditionnement ». Ainsi ce contrat ne comporte pas plus de durée minimale d'exécution, durée qui doit être précise et ne peut se mesurer à l'aune de la « campagne pommes précoces 2000 ». En conséquence la demande de requalification présentée doit être accueillie et la société Cofruid'oc condamnée au paiement d'une somme de 1.547,05 € (1 mois de salaire) d'indemnité de requalification ; « 2) sur la rupture La relation contractuelle est ainsi à durée indéterminée dès le 7 août 2000. Il est mis fin à cette relation contractuelle à l'issue du dernier terme, le 5 mai 2011, par remise des documents sociaux, sans procédure de licenciement. En conséquence, la rupture constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse. 3) sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse En raison de l'ancienneté du salarié (en tout état de cause supérieure à deux ans), de son âge au moment du licenciement (né [...] ), du fait que l'employeur emploie habituellement plus de onze salariés et des précisions et justificatifs sur sa situation ultérieure, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être fixée à la somme de 9300 €. En application des dispositions contractuelles et conventionnelles, Madame Y... Z... A... est également fondée en sa réclamation des sommes de : - 3094 € d'indemnité compensatrice de préavis (l'article 24 de la convention collective nationale de travail concernant les coopératives agricoles, unions de coopératives agricoles et SICA de fleurs, de fruits et légumes et de pommes de terre prévoyant un préavis d'une durée de
2 mois pour les salariés justifiant d'au moins 2 ans de services continus) et 309,40 € de congés payés afférents ; - 3867,51 € d'indemnité de licenciement (article 26 de la convention collective) ».
ALORS QUE 1°) lorsque les contrats de travail saisonniers à durée déterminée sont conclus à terme imprécis, ils doivent comporter une durée minimale ; que celle-ci est librement fixée par les parties ; que relevant de la volonté des parties, elle doit nécessairement être distincte de la saison constituant le terme imprécis, laquelle est indépendante de la volonté des parties ; qu'en l'espèce, il est constant que le second contrat, pris en compte par la Cour d'appel, prévoyait que le contrat était conclu « jusqu'à courant août/début septembre 2000 », durée minimale librement fixée par les parties, la campagne de pommes précoces (2000) en constituant le terme imprécis ; qu'en requalifiant néanmoins le contrat de travail saisonnier en contrat de travail à durée indéterminée, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 1242-7 et L. 1242-12 du Code du travail.
ALORS QUE 2°) lorsque les contrats de travail saisonniers à durée déterminée sont conclus à terme imprécis, ils doivent comporter une durée minimale ; que celle-ci est librement fixée par les parties ; qu'ainsi, il n'est nullement exigé que la durée minimale soit précise ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a estimé que durée minimale d'exécution devait être précise (arrêt attaqué p. 3, §7) et que telle n'était pas le cas, de sorte que le contrat de travail saisonnier qui prévoyait que le contrat était conclu « jusqu'à novembre/décembre 2008 » ne comportait pas de durée minimale et devait en conséquence être requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée, qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé les articles L. 1242-7 et L. 1242-12 du Code du travail.