LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 octobre 2015), que la société A... Y... (la société) ayant été condamnée, dans un litige l'opposant à M. Y... à la suite de son licenciement, par un jugement du 5 septembre 2013, a signé le 18 septembre 2013 l'avis de réception de la lettre du 11 septembre 2013 contenant notification de cette décision par le greffe du tribunal, puis a reçu le 30 septembre 2013 signification par huissier de justice de cette même décision à la requête de M. Y... ; que la société a interjeté appel de la décision le 29 octobre 2013 ;
Attend que la société fait grief à l'arrêt de déclarer son appel irrecevable comme tardif, alors, selon le moyen :
1°/ que la signification régulière d'un jugement, effectuée à l'initiative d'une partie non appelante dans le délai de recours ouvert par une première notification même régulière, fait courir un nouveau délai à compter de sa date ; qu'en décidant que la signification à l'employeur, à l'initiative du salarié, d'un jugement prud'homal, intervenue dans le délai d'appel ouvert par une première notification effectuée par le greffe, n'avait pu faire courir un nouveau délai d'appel au profit de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui découlaient de ses propres constatations au regard de l'article 528 du code de procédure civile et des articles R. 1454-26 et R. 1461-1 du code du travail ;
2°/ que la signification régulière d'un jugement, intervenue dans le délai d'appel ouvert par une précédente notification même régulière, fait courir un nouveau délai d'appel à compter de sa date, sauf si elle a été effectuée à l'initiative de l'appelant lui-même ou si, dans les circonstances de l'espèce, elle n'a pas pu l'induire en erreur sur l'étendue de ses droits ; qu'en décidant que la signification à l'employeur, par acte d'huissier de justice délivrée à l'initiative du salarié, le 30 septembre 2013, du jugement prud'homal rendu le 5 septembre 2013 et notifié le 18 septembre 2013, n'avait pu faire courir un nouveau délai d'appel, sans rechercher comme lui était invitée si, eu égard aux mentions de l'acte de signification du 30 septembre 2013 ainsi que des indications expresses données à deux reprises par l'huissier, l'employeur avait pu croire à l'ouverture d'un nouveau délai d'appel et se méprendre sur ses droits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 528 du code de procédure civile, et R. 1454-26 et R. 1461-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la notification reçue par la société le 18 septembre 2013 était régulière, la cour d'appel a exactement retenu que cette notification avait fait courir le délai de recours, sans que la signification ultérieure de la décision ait pu valablement faire courir un second délai d'appel, de sorte que l'appel formé le 29 octobre était irrecevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société A... Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société A... Y... à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Ohl et Vexliard, avocat aux Conseils, pour la société A... Y...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable l'appel interjeté par la société A... Y... à l'encontre du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 5 septembre 2013,
AUX MOTIFS QU'aux termes des dispositions combinées des articles 528 et 538 du code de procédure civile, le délai pour interjeté appel et d'un mois à compter de la date de la notification du jugement ; que par lettre portant la date d'expédition du 29 octobre 2013, la société A... Y... a interjeté appel d'un jugement rendu le 5 septembre 2013 par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt dans un litige l'opposant à monsieur François Y... ; que la société A... Y... soutient que cet appel est recevable dans la mesure où il a été provoqué par la signification de la décision intervenue à la requête de monsieur Y... par ministère d'huissier le 30 septembre 2013 ; qu'en l'espèce, il est établi que le jugement du conseil de prud'hommes a été notifié à la société par lettre recommandée du 11 septembre 2013 dont elle a signé l'accusé de réception le 18 septembre 2013 ; que la société ne fait valoir aucune irrégularité à l'encontre de la première notification ; que dès lors, la signification intervenue le 30 septembre 2013 n'a pu valablement faire courir un second délai d'appel ; qu'il appartenait, dès lors, à la société, par application des dispositions susvisées, de former appel au plus tard le vendredi 18 septembre 2013 ; qu'en conséquence, l'appel interjeté par la société le 29 octobre 2013 doit être déclaré irrecevable (arrêt, p. 2),
ALORS D'UNE PART QUE la signification régulière d'un jugement, effectuée à l'initiative d'une partie non appelante dans le délai de recours ouvert par une première notification même régulière, fait courir un nouveau délai à compter de sa date ; qu'en décidant que la signification à l'employeur, à l'initiative du salarié, d'un jugement prud'homal, intervenue dans le délai d'appel ouvert par une première notification effectuée par le greffe, n'avait pu faire courir un nouveau délai d'appel au profit de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui découlaient de ses propres constatations au regard de l'article 528 du code de procédure civile et des articles R. 1454-26 et R. 1461-1 du code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE la signification régulière d'un jugement, intervenue dans le délai d'appel ouvert par une précédente notification même régulière, fait courir un nouveau délai d'appel à compter de sa date, sauf si elle a été effectuée à l'initiative de l'appelant lui-même ou si, dans les circonstances de l'espèce, elle n'a pas pu l'induire en erreur sur l'étendue de ses droits ; qu'en décidant que la signification à l'employeur, par acte d'huissier de justice délivrée à l'initiative du salarié, le 30 septembre 2013, du jugement prud'homal rendu le 5 septembre 2013 et notifié le 18 septembre 2013, n'avait pu faire courir un nouveau délai d'appel, sans rechercher comme lui était invitée (conclusions, pp. 2 – 3) si, eu égard aux mentions de l'acte de signification du 30 septembre 2013 ainsi que des indications expresses données à deux reprises par l'huissier, l'employeur avait pu croire à l'ouverture d'un nouveau délai d'appel et se méprendre sur ses droits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 528 du code de procédure civile, et R. 1454-26 et R. 1461-1 du code du travail.