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18/10/2018 | FRANCE | N°17-18058

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 18 octobre 2018, 17-18058


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 32 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que lors d'une vente aux enchères publiques organisée par la société de ventes volontaires agréée Camard et associés (la société de ventes volontaires), M. Roland A... se portait acquéreur d'un tableau intitulé « Une Ville », présenté par le catalogue de la vente établi par la société de ventes volontaires, sur les indications de

M. X..., propriétaire de l'œuvre, comme réalisé par l'artiste Alexandra Z... (1882 - 1949...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 32 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que lors d'une vente aux enchères publiques organisée par la société de ventes volontaires agréée Camard et associés (la société de ventes volontaires), M. Roland A... se portait acquéreur d'un tableau intitulé « Une Ville », présenté par le catalogue de la vente établi par la société de ventes volontaires, sur les indications de M. X..., propriétaire de l'œuvre, comme réalisé par l'artiste Alexandra Z... (1882 - 1949), le prix étant réglé par la société Mullion ; qu'un rapport d'expertise judiciaire ayant conclu à un défaut d'authenticité du tableau, Mme A..., venant aux droits de son époux décédé, a fait assigner la société de ventes volontaires et M. X... aux fins d'annulation de la vente et d'indemnisation de ses préjudices ; que par jugement du 26 mai 2015, un tribunal de grande instance a rejeté les fins de non-recevoir soulevées à l'encontre des demandes de Mme A..., prononcé la nullité de la vente du tableau entre celle-ci et M. X... et condamné ce dernier à restituer la somme de 62 000 euros avec intérêts au taux légal ;

Attendu que pour déclarer irrecevable l'action de Mme A..., faute de qualité pour agir, l'arrêt retient qu'il est acquis que le prix a été réglé, non par Roland A..., mais par la société Mullion SA, ayant son siège social à Panama et dont les associés étaient les époux A..., que cette société a été dissoute le 6 mars 2012 et que ses avoirs ont fait l'objet d'une régularisation fiscale par les époux A... en mai 2012, que Mme A... invoque l'article 1236, alinéa 2, ancien du code civil, que cependant les bordereaux d'adjudication à M. A... pour le compte de... sous le numéro de client 26831, dont celui du 15 juin 2007 est seul établi conformément à l'article L. 321-9, alinéa 2, du code de commerce, sont corroborés, d'une part, par la mention manuscrite Pour compte de ... sur la carte de visite de Roland A... jointe au premier bordereau, dont l'origine n'est pas contestée par Mme A..., d'autre part, par le règlement du prix d'adjudication par la société Mullion SA, la circonstance que les époux A... en soient les associés étant à cet égard inopérante, qu'il s'ensuit que la preuve n'est pas rapportée de l'acquisition du tableau par Roland A... en son nom personnel, que selon l'article 2257 du code civil, Quand on a commencé à posséder pour autrui, on est toujours présumé posséder au même titre, s'il n'y a preuve du contraire, qu'il est ainsi fait obstacle à la prescription acquisitive en matière mobilière, faute de possession à titre de propriétaire, que Mme A... ne justifie pas de son acquisition auprès de la société Mullion SA et qu'il résulte de ce qui précède que Mme A..., ne venant pas aux droits de l'acheteur, n'a pas qualité à agir en nullité de la vente sur adjudication ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher s'il ne résultait pas de la dissolution de la société Mullion et du décès de Roland A... que Mme A... venait aux droits tant de la société Mullion que de son époux défunt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Camard et associés et M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejettes les demandes de la société Camard et associés et de M. X..., les condamne in solidum à payer à Mme A... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour Mme A...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'action de Mme A... faute de qualité pour agir,

AUX MOTIFS QUE Jean-Gérard X... et la société CAMARD etamp; Associés soulèvent l'irrecevabilité des demandes, aux motifs que B... A... n'a pas qualité pour agir, Roland A... ayant acheté le tableau pour le compte de, le prix de la vente réglé par la société MULLION SA par virement de la banque suisse PICTET ET CIE et à défaut d'acte de cession de la société MULLION SA à Roland A... versé aux débats, ni d'intérêt légitime à agir, l'acquisition de l'oeuvre et son financement représentant une opération de blanchiment de fraude fiscale, soit une cause illicite du contrat, et B... A... ne pouvant invoquer sa propre turpitude; que B... A... soutient la recevabilité de son action, en sa qualité de propriétaire de l'oeuvre, la réalité de la fraude n'étant nullement établie et une régularisation avec l'administration fiscale ayant été effectuée ; que selon l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ; que l'article 32 du même code dispose que « est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir » ; que la qualité à agir en nullité de la vente de B... A..., venant aux droits de Roland A..., son époux marié sous le régime de la communauté universelle, est fonction de l'identité de l'acquéreur du tableau ; qu'à cet égard, l'article L.321-9 alinéa 2 du code de commerce prévoit que le procès-verbal est arrêté au plus tard un jour franc après clôture de la vente ; il mentionne les nom et adresse du nouveau propriétaire déclarés par l'adjudicataire, l'identité du vendeur, la désignation de l'objet ainsi que son prix constaté publiquement ; que le procès-verbal d'adjudication indique comme acheteur A... et le bordereau d'adjudication, établi au jour de la vente, mentionne A..., dont le numéro de client est 4361 ; que, cependant, à ce bordereau est joint la carte de visite de Roland A... portant la mention manuscrite « Pour compte de... » ; que sur ce même bordereau, le numéro de client 4361 a été biffé et qu'un numéro 26831 y a été porté ; que, le 15 juin 2007, la société CAMARD etamp; Associés a adressé copie du bordereau d'adjudication et communiqué ses coordonnées bancaires à Monsieur A... pour le compte de... sous le numéro de client 26831, dans le délai de l'article L.321-9 ; que ce courrier a été réitéré le 18 juin 2007, à l'adresse de Monsieur A... sous le numéro de client 4361; que, le 21 juin 2007, la société CAMARD etamp; Associés a reçu un virement d'un montant de 75 712,18 euros de la société MULLION SA et a édité un bordereau définitif, au nom de Monsieur A... pour le compte de... portant le numéro d'acheteur 26831 et la mention manuscrite réglé par virement bancaire de Mullion SA le 22/06/07; que ce même bordereau a été édité au nom de Mr A..., sous le numéro d'acheteur 4361 portant la mention manuscrite réglé par virement bancaire le 22/06/07; qu'il est acquis que le prix a été réglé, non par Roland A..., mais par la société MULLION SA, ayant son siège social à PANAMA et dont les associés étaient les époux A... ; que cette société a été dissoute le 6 mars 2012 et que ses avoirs ont fait l'objet d'une régularisation fiscale par les époux A... en mai 2012; que B... A... invoque l'article 1236 alinéa 2 ancien du code civil, aux termes duquel l'obligation peut même être acquittée par un tiers qui n'y est point intéressé, pourvu que ce tiers agisse au nom et en l'acquit du débiteur, ou que, s'il agit en son nom propre, il ne soit pas subrogé aux droits du créancier ; que les bordereaux d'adjudication à Monsieur A... pour le compte de... sous le numéro de client 26831, dont celui du 15 juin 2007 est seul établi conformément à l'article L.321-9 alinéa 2 du code de commerce, sont corroborés, d'une part, par la mention manuscrite Pour compte de ...sur la carte de visite de Roland A... jointe au premier bordereau, dont l'origine n'est pas contestée par B... A..., d'autre part, par le règlement du prix d'adjudication par la société MULLION SA, la circonstance que les époux A... en soient les associés étant à cet égard inopérante ; qu'il s'ensuit que la preuve n'est pas rapportée de l'acquisition du tableau par Roland A... en son nom personnel ; que selon l'article 2257 du code civil, « quand on a commencé à posséder pour autrui, on est toujours présumé posséder au même titre, s'il n'y a preuve du contraire »; qu'il est ainsi fait obstacle à la prescription acquisitive en matière mobilière, faute de possession à titre de propriétaire ; que B... A... ne justifie pas de son acquisition auprès de la société MULLION SA; qu'il résulte de ce qui précède que B... A..., ne venant pas aux droits de l'acheteur, n'a pas qualité à agir en nullité de la vente sur adjudication ; que, par infirmation de la décision de première instance, ses demandes, principale et accessoires, seront déclarées irrecevables, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la légitimité de son intérêt à agir ; que l'infirmation du jugement emporte restitution des sommes versées pour son exécution,

1) ALORS QUE le procès-verbal d'adjudication tient lieu d'acte de vente ; que la cour d'appel a constaté que le « procès-verbal d'adjudication indique comme acheteur A... et le bordereau d'adjudication établi le jour de la vente mentionne A... dont le numéro client est 4361 » ; qu'en retenant que Mme B... A..., venant aux droits de son époux, n'était pas propriétaire du tableau dont elle a relevé qu'il avait été acheté par ce dernier, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constations et a violé l'article L321-9 du code de commerce ;

2) ALORS QU'en déclarant irrecevable l'action de B... A..., faute de qualité pour agir, tandis qu'elle constatait que le procès-verbal d'adjudication indiquait comme acheteur A... et le bordereau établi le jour même le mentionnait également, ce dont il résultait que l'acquisition avait été réalisé par Roland A... dont B... A... est l'ayant droit, ce qui lui donne qualité pour agir, la cour d'appel a violé les articles 31 et 32 du code de procédure civile ;

3) ALORS QUE le prix peut être acquitté par un tiers, qui ne devient pas propriétaire dès lors qu'il agit pour le compte du débiteur ; que pour juger que la preuve n'était pas rapportée que Roland A... était propriétaire du tableau, la cour d'appel s'est bornée à constater que le prix en avait été réglé par la société Mullion, dont il était, avec son épouse, les seuls associés ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si la société Mullion n'avait pas réglé le prix pour le compte de ses associés, M. et Mme A..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1236 al 2 ancien du code civil, devenu 1342-1 du code civil ;

4) ALORS QU'en tout état de cause, à considérer la société Mullion comme propriétaire du tableau, la cour d'appel a constaté que M. et Mme A... en étaient les seuls associés et qu'elle avait été dissoute le 6 mars 2012 ; qu'elle a encore relevé que M. et Mme A... étaient mariés sous le régime de la communauté universelle, ce dont il résultait qu'au décès de Roland A..., son épouse avait recueilli tous les biens dépendant de la communauté ; qu'en retenant que Mme A... ne justifiait pas être propriétaire du tableau, sans rechercher s'il ne résultait pas de la dissolution de la société Mullion et du décès de Roland A... que Mme A... venait aux droits tant de la société Mullion que de son époux défunt, de sorte qu'elle avait qualité pour agir en nullité de la vente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 32 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 17-18058
Date de la décision : 18/10/2018
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 18 oct. 2018, pourvoi n°17-18058


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Delamarre et Jehannin, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.18058
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