LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la procédure de sauvegarde de la société Hôtel Aalborg (la société Aalborg) a été ouverte par un jugement du 21 mai 2013, M. A... étant désigné mandataire judiciaire ; que le 3 juillet 2013, la société CIC Lyonnaise de banque (la banque) a adressé au mandataire judiciaire trois déclarations de créances au titre du solde débiteur d'un compte courant et de deux prêts ; que la société Aalborg a contesté le pouvoir du signataire des déclarations et soulevé la nullité du taux effectif global (TEG) mentionné par la banque ; que par une ordonnance du 3 septembre 2014, confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 11 février 2016, le juge-commissaire, saisi de la déclaration de créance relative à l'un des prêts d'un montant de 691 455,48 euros, a reçu en la forme la déclaration de créance de la banque, prononcé un sursis à statuer, et renvoyé les parties devant le juge du fond ; que par un arrêt du 20 septembre 2017 (chambre commerciale, financière et économique, pourvoi n° U 16-14.341), l'arrêt du 11 février 2016 a été cassé en toutes ses dispositions, la cause et les parties étant renvoyées devant la cour d'appel de Chambéry ; que par un acte du 17 octobre 2014, la banque a assigné la société Aalborg devant le tribunal pour voir statuer sur la contestation relative au TEG ; qu'invoquant le caractère tardif de cette saisine du juge du fond, la société Aalborg a présenté une requête au juge-commissaire, lui demandant de rejeter la créance ; que par une ordonnance du 29 avril 2016 (n° 2016JC01558), le juge-commissaire a rejeté la créance ; que la banque a fait appel de l'ordonnance ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que la société Aalborg fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable en raison de la forclusion de la contestation la demande d'annulation du TEG du prêt et d'admettre la créance alors, selon le moyen, que lorsque le juge commissaire sursoit à statuer sur une contestation d'une créance alléguée et invite les parties à saisir le juge compétent pour apprécier le bien-fondé de cette créance dans le délai d'un mois de la notification de sa décision, il incombe au créancier d'effectuer régulièrement cette saisine dans ce délai à peine de forclusion et en conséquence de rejet de sa créance alléguée ; que la banque prétendait appliquer à sa créance en principal un Teg erroné contesté par la société Aalborg et le mandataire judiciaire ; qu'en déclarant que le défaut de saisine du juge compétent dans le délai légal entraînait la forclusion de la contestation de la prétendue créance d'intérêts de la banque et en conséquence l'admission de cette créance, sans rechercher s'il n'incombait pas à ce prétendu créancier d'établir le bien-fondé du Teg qu'il avait appliqué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 624-5 du code de commerce, ensemble de l'article 1315 ancien du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que l'ordonnance du 3 septembre 2014 avait été notifiée le 16 septembre 2014 et que la banque avait assigné la société Aalborg devant le juge du fond compétent pour trancher la contestation relative au TEG par un acte du 17 octobre 2014, soit le lendemain de l'expiration du délai, la cour d'appel a retenu, à bon droit, qu'à défaut de saisine de ce juge dans le délai d'un mois de la notification de la décision de sursis à statuer, par le créancier, mais aussi par la société débitrice à l'origine de la contestation, la demande de celle-ci tendant à l'annulation du TEG était irrecevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 562 du code de procédure civile ;
Attendu que pour admettre la créance de la banque, l'arrêt relève que le juge compétent pour trancher la demande d'annulation du TEG appliqué par la banque n'a pas été régulièrement saisi ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'autre contestation de la société Aalborg relative à la régularité de la déclaration de créance était pendante devant la cour d'appel de Chambéry, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il admet au passif de la société Hôtel Aalborg la créance de la société CIC Lyonnaise de banque pour la somme de 3 084,10 euros à titre hypothécaire échu et celle de 688 371,38 à titre hypothécaire à échoir, et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt n° RG 16/02180 rendu le 9 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;
Condamne la société CIC Lyonnaise de banque aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Hôtel Aalborg la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour la société Hôtel Aalborg.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR reçu l'appel de la société Cic Lyonnaise de Banque et, infirmant l'ordonnance entreprise, d'AVOIR déclaré irrecevable en raison de la forclusion de sa contestation « la demande en nullité » présentée par la société Hôtel Aalborg et en conséquence d'AVOIR admis au passif de cette société les créances de cette banque pour les sommes de 3 084,10 € à titre hypothécaire échu et de 688 371,38 € à titre hypothécaire à échoir ;
AUX MOTIFS QU'un juge qui prononce un sursis à statuer n'est pas dessaisi et peut suivant les circonstances révoquer le sursis ;
que la demande de forclusion pour défaut de saisine du juge du fond s'analyse en une demande de révocation du sursis prononcé par le juge commissaire et est donc recevable ;
que par ordonnance du 3 septembre 2014 notifiée le 16 septembre 2014, le juge commissaire, saisi de la contestation de la société Hôtel Aalborg qui alléguait la nullité du Teg du prêt, a prononcé le sursis à statuer pour le montant de 2 673 480,91 € et renvoyé les parties devant le juge du fond conformément aux dispositions de l'article R. 624-5 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable ;
qu'il appartenait à la débitrice de saisir le juge du fond pour qu'il soit statué sur sa contestation ;
qu'en effet, l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 4 mai 2017 invoqué par l'intimée n'est pas applicable en l'espèce, s'agissant d'une incompétence du juge commissaire entraînant son dessaisissement et non d'un sursis à statuer pour défaut de pouvoir ;
qu'à défaut de saisine du juge du fond dans le délai d'un mois de la notification de la décision de sursis à statuer, par le créancier, mais également par la débitrice à l'origine de la contestation, la demande de celle-ci en nullité du Teg du prêt est irrecevable ; que la créance de la banque est admise à son passif pour les sommes de 3 084,10 € à titre hypothécaire échu et de 688 371,38 € à titre hypothécaire à échoir ;
que par ailleurs, le défaut d'assignation du mandataire judiciaire qui doit être partie s'agissant d'une procédure indivisible ne trouve application que devant le juge du fond saisi par l'exploit du 17 octobre 2014 et non pas devant la présente juridiction ;
que par conséquence, l'ordonnance déférée se voit infirmée en toutes ses dispositions ;
ALORS QU'en matière de procédure collective, il existe un lien d'indivisibilité entre le créancier, le débiteur et le mandataire judiciaire pour tout ce qui concerne la vérification du passif et l'admission des créances ; que pour recevoir et faire droit à l'appel de la société Cic Lyonnaise de Banque qui n'avait pas régulièrement intimé le mandataire judiciaire et prononcer l'admission de la créance de cette banque au passif de la société Hôtel Aalborg, la cour d'appel a énoncé que le défaut d'assignation du mandataire judiciaire qui doit être partie s'agissant d'une procédure indivisible ne trouve application que devant le juge du fond saisi par l'exploit du 17 octobre 2014 et non pas devant la présente juridiction ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui incombait de relever, au besoin d'office, l'irrecevabilité de l'appel, eu égard au lien d'indivisibilité unissant les parties à l'instance relativement à l'admission des créances et en l'absence d'appel régulier contre le mandataire judiciaire, la cour d'appel a violé les articles 125, 553 et 902 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR révoqué le sursis à statuer prononcé par l'ordonnance du juge commissaire du 3 septembre 2014, déclaré irrecevable, à raison de la forclusion de sa contestation, « la demande de nullité » présentée par la société Hôtel Aalborg et d'AVOIR en conséquence admis au passif de cette société les créances de la Cic Lyonnaise de Banque pour les sommes de 3 084,10 € à titre hypothécaire échu et de 688 371,38 € à titre hypothécaire à échoir ;
AUX MOTIFS QU'un juge qui prononce un sursis à statuer n'est pas dessaisi et peut suivant les circonstances révoquer le sursis ;
que la demande de forclusion pour défaut de saisine du juge du fond s'analyse en une demande de révocation du sursis prononcé par le juge commissaire et est donc recevable ;
que par ordonnance du 3 septembre 2014 notifiée le 16 septembre 2014, le juge commissaire, saisi de la contestation de la société Hôtel Aalborg qui alléguait la nullité du Teg du prêt, a prononcé le sursis à statuer pour le montant de 2 673 480,91 € et renvoyé les parties devant le juge du fond conformément aux dispositions de l'article R. 624-5 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable ;
qu'il appartenait à la débitrice de saisir le juge du fond pour qu'il soit statué sur sa contestation ;
qu'en effet, l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 4 mai 2017 invoqué par l'intimée n'est pas applicable en l'espèce, s'agissant d'une incompétence du juge commissaire entraînant son dessaisissement et non d'un sursis à statuer pour défaut de pouvoir ;
qu'à défaut de saisine du juge du fond dans le délai d'un mois de la notification de la décision de sursis à statuer, par le créancier, mais également par la débitrice à l'origine de la contestation, la demande de celle-ci en nullité du Teg du prêt est irrecevable ; que la créance de la banque est admise à son passif pour les sommes de 3 084,10 € à titre hypothécaire échu et de 688 371,38 € à titre hypothécaire à échoir ;
que par ailleurs, le défaut d'assignation du mandataire judiciaire qui doit être partie s'agissant d'une procédure indivisible ne trouve application que devant le juge du fond saisi par l'exploit du 17 octobre 2014 et non pas devant la présente juridiction ;
que par conséquence, l'ordonnance déférée se voit infirmée en toutes ses dispositions ;
1°) ALORS QUE l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugements qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendant ; que l'appel par la Cic Lyonnaise de Banque de l'ordonnance du juge commissaire du 29 avril 2016 qui avait déclaré sa saisine du juge du fond tardive et rejeté en conséquence sa créance ne pouvait qu'entraîner la révocation du sursis à statuer prononcé par l'ordonnance du 3 septembre 2014 sans pouvoir porter à la connaissance de la cour d'appel l'autre chef de cette dernière ordonnance ayant déclaré recevable en la forme la déclaration de créance de cette banque pour lequel l'arrêt confirmatif rendu le 11 février 2016 par la cour d'appel de Grenoble a été cassé en toutes ses dispositions par l'arrêt rendu le 20 septembre 2017 par la Cour de cassation, l'affaire étant pendante devant la Cour de Chambéry désignée comme cour de renvoi lorsque la cour d'appel a statué par son arrêt du 9 novembre 2017 et reste toujours pendante actuellement ; qu'en admettant la créance de la banque au passif de la société Hôtel Aalborg, la cour d'appel a statué sur un chef de l'ordonnance du 3 septembre 2014 qui ne lui était pas dévolu mais qui avait été attribué par la Cour de cassation à la cour d'appel de Chambéry devant laquelle l'affaire était pendante lorsqu'elle a statué et reste toujours pendante, excédant ses pouvoirs, en violation de l'article 562 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE les termes du litiges sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'il ne résulte ni des conclusions de la banque ni de celles de la société Hôtel Aalborg que les parties aient discuté devant la cour d'appel la recevabilité en la forme de la déclaration de créance de la banque dévolue à la cour d'appel de Chambéry ; qu'en admettant dès lors la créance de la banque et en tranchant implicitement mais nécessairement la recevabilité de sa déclaration de créance pour y faire droit, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, violant l'article 4 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en tranchant implicitement mais nécessairement la recevabilité de la déclaration de créance de la banque pour pouvoir y faire droit et admettre celle-ci, sans inviter les parties à faire valoir au préalable leurs explications contradictoires sur cette question, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable en raison de la forclusion de sa contestation « la demande en nullité du Teg du prêt » présentée par la société Hôtel Aalborg et d'AVOIR en conséquence admis au passif de cette société les créances de la Cic Lyonnaise de Banque pour les sommes de 3 084,10 € à titre hypothécaire échu et de 688 371,38 € à titre hypothécaire à échoir ;
AUX MOTIFS QU'un juge qui prononce un sursis à statuer n'est pas dessaisi et peut suivant les circonstances révoquer le sursis ;
que la demande de forclusion pour défaut de saisine du juge du fond s'analyse en une demande de révocation du sursis prononcé par le juge commissaire et est donc recevable ;
que par ordonnance du 3 septembre 2014 notifiée le 16 septembre 2014, le juge commissaire, saisi de la contestation de la société Hôtel Aalborg qui alléguait la nullité du Teg du prêt, a prononcé le sursis à statuer pour le montant de 2 673 480,91 € et renvoyé les parties devant le juge du fond conformément aux dispositions de l'article R. 624-5 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable ;
qu'il appartenait à la débitrice de saisir le juge du fond pour qu'il soit statué sur sa contestation ;
qu'en effet, l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 4 mai 2017 invoqué par l'intimée n'est pas applicable en l'espèce, s'agissant d'une incompétence du juge commissaire entraînant son dessaisissement et non d'un sursis à statuer pour défaut de pouvoir ;
qu'à défaut de saisine du juge du fond dans le délai d'un mois de la notification de la décision de sursis à statuer, par le créancier, mais également par la débitrice à l'origine de la contestation, la demande de celle-ci en nullité du Teg du prêt est irrecevable ; que la créance de la banque est admise à son passif pour les sommes de 3 084,10 € à titre hypothécaire échu et de 688 371,38 € à titre hypothécaire à échoir ;
que par ailleurs, le défaut d'assignation du mandataire judiciaire qui doit être partie s'agissant d'une procédure indivisible ne trouve application que devant le juge du fond saisi par l'exploit du 17 octobre 2014 et non pas devant la présente juridiction ;
que par conséquence, l'ordonnance déférée se voit infirmée en toutes ses dispositions ;
ALORS QUE lorsque le juge commissaire sursoit à statuer sur une contestation d'une créance alléguée et invite les parties à saisir le juge compétent pour apprécier le bien-fondé de cette créance dans le délai d'un mois de la notification de sa décision, il incombe au créancier d'effectuer régulièrement cette saisine dans ce délai à peine de forclusion et en conséquence de rejet de sa créance alléguée ; que la Cic Lyonnaise de Banque prétendait appliquer à sa créance en principal un Teg erroné contesté par la société Hôtel Aalborg et le mandataire judiciaire ; qu'en déclarant que le défaut de saisine du juge compétent dans le délai légal entraînait la forclusion de la contestation de la prétendue créance d'intérêts de la banque et en conséquence l'admission de cette créance, sans rechercher s'il n'incombait pas à ce prétendu créancier d'établir le bien-fondé du Teg qu'il avait appliqué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 624-5 du code de commerce, ensemble de l'article 1315 ancien du code civil.