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12/10/2021 | FRANCE | N°20-86181

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 octobre 2021, 20-86181


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° P 20-86.181 F-D

N° 01191

EA1
12 OCTOBRE 2021

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 12 OCTOBRE 2021

Mmes [H] [G], [R] [T], [J] [T], MM. [D] [W], [E] [W], [L] [W] et [K] [T], parties civiles, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 8

e chambre, en date du 28 octobre 2020, qui les a déboutés de leurs demandes après relaxe de la société Clinique [1] du chef...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° P 20-86.181 F-D

N° 01191

EA1
12 OCTOBRE 2021

REJET

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 12 OCTOBRE 2021

Mmes [H] [G], [R] [T], [J] [T], MM. [D] [W], [E] [W], [L] [W] et [K] [T], parties civiles, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 8e chambre, en date du 28 octobre 2020, qui les a déboutés de leurs demandes après relaxe de la société Clinique [1] du chef d'homicide involontaire.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Un mémoire commun aux demandeurs et un mémoire en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.

Sur le rapport de M. Sottet, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mmes [H] [G], [R] [T], [J] [T], MM. [D] [W], [E] [W], [L] [W] et [K] [T], les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Clinique [1] anciennement la société [Adresse 2], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 septembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Sottet, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. [N] [P] est décédée le [Date décès 1] 2004, des suites d'une chute dans l'escalier de la clinique où elle était hospitalisée depuis deux semaines.

3. L'enquête diligentée par le parquet a été classée sans suite pour absence d'infraction. Les ayants droit de la défunte ont porté plainte contre personne non dénommée et se sont constitués partie civile pour homicide involontaire.

4. Le 24 septembre 2015, la chambre de l'instruction a renvoyé M. [O] [Z], médecin psychiatre et directeur médical de la clinique, M. [A] [F], président directeur général de l'établissement, et la société [Adresse 2] devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire, pour ne pas avoir accompli les diligences normales pour satisfaire à leur obligation de prudence ou de sécurité, en laissant libre accès à une cage d'escalier béante dans un établissement accueillant des patients souffrant de troubles psychiatriques et notamment à tendance suicidaire.

5. Les juges du premier degré ont constaté l'extinction de l'action publique concernant [O] [Z], décédé le [Date décès 2] 2017, renvoyé M. [F] des fins de la poursuite, déclaré la société Clinique [1], nouvelle dénomination de la personne morale, coupable d'homicide involontaire, condamné cette dernière à 200 000 euros d'amende, ordonné la publication de la décision et statué sur les intérêts civils.

6. La société Clinique [1], le ministère public et les parties civiles ont relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, sur l'action publique, infirmé le jugement déféré et renvoyé la société Clinique [1] des fins de la poursuite et, sur l'action civile, infirmé le jugement sur le fond et débouté les parties civiles de leurs demandes, alors :

« 1°/ qu'un établissement de santé est tenu de prendre les mesures nécessaires à la sécurité des patients et adaptées à leur état de santé ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter toute faute de la société Clinique [1] et partant la renvoyer des fins de la poursuite, que les différents experts intervenus avaient considéré qu'il n'y avait pas eu de faute commise dans la prise en charge thérapeutique de la victime, ni dans la décision de transfert du pavillon de l'horloge au pavillon [Adresse 1], ni dans la surveillance de la patiente même si celle-ci devait faire l'objet d'une réévaluation, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne s'évinçait pas des rapports d'expertise des docteurs [M] et [B] que la société Clinique [1] avait commis une négligence fautive en ce que l'aménagement architectural de la clinique aurait dû empêcher ou à tout le moins limiter les gestes suicidaires, notamment en installant une défense dans la cage d'escalier contre les précipitations, laquelle faute avait justifié la déclaration de culpabilité prononcée par les premiers juges, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 221-6, 121-2 et 121-3 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ;

2°/ qu'un établissement de santé est tenu de prendre les mesures nécessaires à la sécurité des patients et adaptées à leur état de santé ; qu'en retenant, pour écarter toute faute de la société Clinique [1] et partant la renvoyer des fins de la poursuite, que celle-ci avait fait l'objet de deux contrôles par l'ANAES entre 2001 et 2005, qui avaient conduit à son accréditation et d'une visite quelques jours avant les faits, du 27 au 30 avril 2004, en vue d'une nouvelle accréditation expérimentale, contrôles qui n'avaient donné lieu à aucune observation s'agissant de cette cage d'escalier, sans rechercher, comme elle y était invitée, si lesdits contrôles n'avaient pas eu pour but principal de vérifier les appareils de secours contre l'incendie et les moyens d'évacuation au vu de la réglementation en vigueur, de sorte qu'ils ne justifiaient nullement d'écarter la négligence fautive de la clinique tirée de l'existence d'une cage d'escalier béante dans un établissement qui accueillait des personnes souffrant de troubles psychiques à tendance suicidaire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 221-6, 121-2 et 121-3 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

8. Pour relaxer la société Clinique [1] du chef d'homicide involontaire, l'arrêt attaqué énonce notamment que les deux experts missionnés pour dire si le régime d'hospitalisation de [N] [P] avait été conforme aux données médicales actuelles, et donner leur avis sur l'encadrement et la surveillance dont elle avait fait l'objet, ont conclu à l'absence de dysfonctionnement de la prise en charge médicamenteuse, du régime d'hospitalisation, de l'encadrement et de la surveillance de la patiente, mais ont souligné la particularité de l'aménagement architectural de la clinique, la présence d'un escalier avec cage béante et non protégée étant peu adaptée à la prévention des gestes suicidaires.

9. Les juges ajoutent que cette configuration des lieux n'a été à l'origine d'aucun autre accident, alors que la clinique accueille un public à risque suicidaire depuis 1930, et que les contrôles effectués par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, en 2001 et du 27 au 30 avril 2004, qui ne se limitent pas à la prévention des incendies et à la vérification des procédures d'évacuation, n'ont donné lieu à aucune remarque spécifique à l'agencement des locaux en termes de sécurité, en dehors de la mention générale que les mesures de sécurité des personnes et des biens étaient prises.

10. Ils observent qu'il n'existe pas de texte prescrivant une norme impérative relative à la hauteur des garde-corps des paliers d'escalier, spécifique aux établissements de santé accueillant des patients dépressifs.

11. Ils en déduisent que la société Clinique [1] n'a pas manqué à l'obligation de moyens mise à sa charge au regard de l'absence de prévisibilité du passage à l'acte de sa patiente au moment des faits.

12. En l'état de ces énonciations, qui relèvent de son pouvoir souverain d'appréciation, la cour d'appel a justifié sa décision.

13. Dès lors, le moyen doit être écarté.

14. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze octobre deux mille vingt et un.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 20-86181
Date de la décision : 12/10/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 28 octobre 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 oct. 2021, pourvoi n°20-86181


Composition du Tribunal
Président : M. Soulard (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.86181
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