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18/05/2022 | FRANCE | N°20-20091

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 mai 2022, 20-20091


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mai 2022

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 305 F-D

Pourvoi n° B 20-20.091

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 MAI 2022

L

'association Novalliance, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 20-20.091 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2020 par la cour d'ap...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 mai 2022

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 305 F-D

Pourvoi n° B 20-20.091

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 MAI 2022

L'association Novalliance, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 20-20.091 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-3), dans le litige l'opposant à la société Interim Provence Méditerranée, société coopérative d'intérêt collectif par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de l'association Novalliance, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Interim Provence Méditerranée, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 22 mars 2022 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 juillet 2020) et les productions, suivant contrat du 7 juillet 2015, l'association Novalliance, ayant pour objet d'apporter un soutien administratif à des entreprises de travail temporaire régionales, s'est engagée à effectuer au profit de la société Medicoop Provence Méditerranée devenue Interim Provence Méditerranée (la société Medicoop), spécialisée dans le travail temporaire du secteur médico-sanitaire et social, différentes prestations de services, et notamment, avec le concours d'un expert comptable, sa comptabilité, pour une durée d'un an renouvelable par tacite reconduction, moyennant une rémunération égale à 6 % du chiffre d'affaires de sa cocontractante. Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 24 juin 2016, la société Medicoop a résilié le contrat à effet au 31 décembre 2016.

2. Craignant de ne pouvoir recouvrer sa facture du quatrième trimestre 2016, l'association Novalliance a pratiqué en décembre 2017 une saisie conservatoire sur les comptes bancaires de la société Medicoop pour la somme de 139 520,81 euros, puis l'a assignée en paiement des sommes qu'elle estimait lui rester dues.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L'association Novalliance fait grief à l'arrêt de dire que sa créance envers la société Medicoop devenue Intérim Provence Méditerranée s'élève à une certaine somme, de cantonner la saisie pratiquée à hauteur de cette somme, de la débouter de toutes ses demandes et d'ordonner, en tant que de besoin, la mainlevée de la saisie, alors « que le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'article 2 du contrat du 7 juillet 2015 stipulait "qu'en contrepartie de la réalisation des prestations définies à l'article 1 ci-dessus, l'adhérent versera à l'association l'équivalent de 6 % du chiffre d'affaires réalisé par Medicoop Provence Méditerranée" sans aucune restriction ni réserve, et notamment sans prévoir que seul le chiffre d'affaires "traité" par l'association Novalliance servirait d'assiette de calcul ; qu'en estimant au contraire que "l'article 2 s'entend donc d'une rémunération de 6 % de l'ensemble du chiffre d'affaires réalisé par l'adhérente si sa comptabilité est intégralement faite par l'appelante" et que "si la comptabilité n'est tenue que partiellement, l'association Novalliance ne peut percevoir que la contrepartie de la réalisation de sa prestation, soit 6 % du chiffre d'affaires qu'elle a traité", la cour d'appel, qui a dénaturé le contrat qui lui était soumis, a violé le principe selon lequel le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction antérieure l'ordonnance du 10 février 2016). »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

4. Pour juger que l'article 2 du contrat « s'entend [...] d'une rémunération de 6 % de l'ensemble du chiffre d'affaires réalisé par l'adhérente si sa comptabilité est intégralement faite par l'association Novalliance », et que, « si la comptabilité n'est tenue que partiellement, l'association Novalliance ne peut percevoir que la contrepartie de la réalisation de sa prestation, soit 6 % du chiffre d'affaires qu'elle a traité », l'arrêt relève que le contrat ne contient pas de clause d'exclusivité et que son article 1, qui décrit l'ensemble des prestations que doit assurer l'association Novalliance, et notamment la tenue comptable intégrale, ne comporte aucune obligation pour Medicoop de fournir sa comptabilité en son entier.

5. En statuant ainsi, alors que le contrat prévoyait, en son article 1, au titre des moyens mis à disposition de la société Medicoop par l'association Novalliance : «... la tenue comptable intégrale en partenariat avec le cabinet Actuarius... », en son article 2 qu'en contrepartie de la réalisation des prestations définies à l'article 1 ci-dessus, « l'adhérent versera à l'association l'équivalent de 6 % du chiffre d'affaires réalisé », et en son article 6 qu'il « tiendra à la disposition de l'association toutes les informations pouvant contribuer à la bonne réalisation de l'objet de la présente convention, et... fournira tout élément contractuel...toute information administrative...toute donnée sociale et comptable... », ce dont il résultait que la prestation comptable due par l'association Novalliance concernait l'ensemble de l'activité de la société Medicoop et ouvrait droit à rémunération de 6 % du chiffre d'affaires global de la société Medicoop, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis du contrat, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe à 95 289,50 euros la créance de l'association Novalliance envers la société Intérim Provence Méditerranée, dont la somme de 10 449,52 euros au titre de décembre 2016, et cantonne à 95 289,50 euros la saisie pratiquée, l'arrêt rendu le 6 juillet 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société Intérim Provence Méditerranée aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Intérim Provence Méditerranée et la condamne à payer à l'association Novalliance la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Krivine et Viaud, avocat aux Conseils, pour l'association Novalliance.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'association Novalliance fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la créance de l'association Novalliance envers la société Medicoop Provence Méditerranée (devenue SCIC SAS Intérim Provence Méditerranée) s'élevait à 95.289,50 € se décomposant en 43.844,98 € pour octobre 2016, 40.995 € pour novembre 2016 et 10.449,52 € pour décembre 2016, D'AVOIR en conséquence cantonné la saisie pratiquée à hauteur de 95.289,50 €, DE l'AVOIR déboutée de toutes ses demandes et D'AVOIR ordonné, en tant que de besoin, la levée de la saisie ;

1. ALORS QUE le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'article 2 du contrat du 7 juillet 2015 stipulait qu'« en contrepartie de la réalisation des prestations définies à l'article 1 ci-dessus, l'adhérent versera à l'association l'équivalent de 6 % du chiffre d'affaires réalisé par Medicoop Provence Méditerranée » sans aucune restriction ni réserve, et notamment sans prévoir que seul le chiffre d'affaires « traité » par l'association Novalliance servirait d'assiette de calcul ; qu'en estimant au contraire que « l'article 2 s'entend donc d'une rémunération de 6 % de l'ensemble du chiffre d'affaires réalisé par l'adhérente si sa comptabilité est intégralement faite par l'appelante » et que « si la comptabilité n'est tenue que partiellement, l'association Novalliance ne peut percevoir que la contrepartie de la réalisation de sa prestation, soit 6 % du chiffre d'affaires qu'elle a traité » (arrêt p. 5, alinéa 8), la cour d'appel, qui a dénaturé le contrat qui lui était soumis, a violé le principe selon lequel le juge a l'interdiction de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016) ;

2. ALORS, subsidiairement, QUE l'association Novalliance faisait valoir qu'aux termes de l'article 1er du contrat du 7 juillet 2015, il était prévu, non seulement qu'elle assure la tenue intégrale de la comptabilité de la société Medicoop, mais encore que l'ensemble des éléments financiers de la société devaient être mis à disposition, en sorte que peu important l'absence de clause d'exclusivité, c'est nécessairement l'intégralité du chiffre d'affaires de la société qui servait d'assiette de calcul de sa rémunération, fixée à 6 % de celui-ci (conclusions d'appel de l'association Novalliance du 17 janvier 2020, p. 7-9) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, avant de retenir que seul le chiffre d'affaires « traité » par l'association Novalliance devait servir d'assiette de calcul, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016) ;

3. ALORS, plus subsidiairement, QUE l'association Novalliance soutenait encore qu'alors que l'activité de la société Medicoop générait tous les mois un chiffre d'affaires d'environ 40.000 €, seule une activité à hauteur de 8.000 € lui avait été donnée à traiter pour le mois de décembre 2016, ce qui ne pouvait s'expliquer que par le recours par la société Medicoop à un tiers pour assurer le traitement du reste du chiffre du mois de décembre 2016, en contravention avec le contrat qui prévoyait que l'association assurerait le traitement intégral de la comptabilité et que la société devait lui adresser l'ensemble de ses éléments financiers (conclusions d'appel de l'association Novalliance du 17 janvier 2020, p. 9 et p. 13) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ce point, avant de fixer la créance, la cour d'appel a de ce point de vue également privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016).

SECOND MOYEN DE CASSATION :

(subsidiaire)

L'association Novalliance fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la société Medicoop Provence Méditerranée (devenue SCIC SAS Intérim Provence Méditerranée) de produire son bilan comptable et son compte de résultat pour le 4e trimestre 2016 et pour 2017 afin de déterminer s'il n'y avait pas eu un report de facturation et, en conséquence, D'AVOIR dit que la créance de l'association Novalliance envers la société Medicoop s'élevait à 95.289,50 € se décomposant en 43.844,98 € pour octobre 2016, 40.995 € pour novembre 2016 et 10.449,52 € pour décembre 2016, D'AVOIR en conséquence cantonné la saisie pratiquée à hauteur de 95.289,50 €, DE l'AVOIR déboutée de ses autres demandes et D'AVOIR ordonné, en tant que de besoin, la levée de la saisie ;

ALORS QU'en rejetant sans donner aucun motif la demande de l'association Novalliance tendant à ce qu'il soit enjoint à la société Medicoop Provence Méditerranée de produire son bilan comptable et son compte de résultat pour le 4e trimestre 2016 et pour 2017 afin de déterminer s'il n'y avait pas eu un report de facturation, avant de confirmer le jugement et rejeter les autres demandes de l'association, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 20-20091
Date de la décision : 18/05/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 06 juillet 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 mai. 2022, pourvoi n°20-20091


Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Krivine et Viaud, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.20091
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