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19/04/2023 | FRANCE | N°22-10914;22-10919;22-10930;22-10941;22-10944

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 avril 2023, 22-10914 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 avril 2023

Cassation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 412 F-D

Pourvois n°
T 22-10.914
Y 22-10.919
K 22-10.930
X 22-10.941
A 22-10.944 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBR

E SOCIALE, DU 19 AVRIL 2023

1°/ M. [K] [H], domicilié [Adresse 6],

2°/ Mme [O] [M], domiciliée [Adresse 1],

3°/ M. [W] [E], domicilié [Adresse 2],

4...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 avril 2023

Cassation

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 412 F-D

Pourvois n°
T 22-10.914
Y 22-10.919
K 22-10.930
X 22-10.941
A 22-10.944 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 19 AVRIL 2023

1°/ M. [K] [H], domicilié [Adresse 6],

2°/ Mme [O] [M], domiciliée [Adresse 1],

3°/ M. [W] [E], domicilié [Adresse 2],

4°/ M. [J] [S], domicilié [Adresse 7],

5°/ M. [X] [N], domicilié [Adresse 4],

ont formé respectivement les pourvois n° T 22-10.914, Y 22-10.919, K 22-10.930, X 22-10.941 et A 22-10.944 contre cinq arrêts rendus le 29 janvier 2020 par la cour d'appel de Versailles (17ème chambre civile), dans les litiges les opposant à :

1°/ la société [Z] [P], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], prise en la personne de M. [C] [P], en qualité de liquidateur de la société Sernam services,

2°/ l'association CGEA IDFO, dont le siège est [Adresse 3]

défenderesses à la cassation.

Les demandeurs invoquent, chacun, à l'appui de leurs pourvois, un moyen commun de cassation.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de M. Carillon, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de M. [H], Mme [M], MM. [E], [S] et [N], de la SCP Doumic-Seiller, avocat de la société [Z] [P], ès qualités, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Carillon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° T 22-10.914, Y 22-10.919, K 22-10.930, X 22-10.941 et A 22-10.944 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Versailles, 29 janvier 2020), MM. [H], [E], [S], [N] et Mme [M] ont été engagés par le Service national de messagerie, filiale de la SNCF devenue en 2005 la société Sernam services. Ils exerçaient des mandats représentatifs en qualité de représentant syndical, délégués du personnel ou membre du CHSCT.

3. En 2006, les sociétés Butler Capital Partners et FCPR France Private Equity III sont entrées au capital de la société Sernam express. Cette dernière a été absorbée par la société Financière Sernam qui détenait le capital des sociétés Sernam services et Aster.

4. Par jugement du 31 janvier 2012, le tribunal de commerce a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Sernam services, M. [P] étant désigné en qualité de liquidateur, et par jugement du 13 avril 2012, prononcé la liquidation judiciaire de la société Sernam services.

5. Un plan de sauvegarde de l'emploi a été présenté au comité d'entreprise les 25 et 27 avril 2012. Après autorisation de l'inspecteur du travail du 12 juillet 2012, les salariés ont été licenciés pour motif économique les 18 et 20 juillet 2012.

6. Contestant la validité du plan de sauvegarde de l'emploi et de leur licenciement, ils ont saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la fixation au passif de la société de diverses sommes.

Examen du moyen

Sur le moyen commun aux pourvois, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demande tendant à ce qu'il soit dit que le licenciement pour motif économique est contraire aux dispositions des articles L. 1233-61 et L. 1233-62 du code du travail, ainsi que de leurs demandes indemnitaires subséquentes, alors « que le plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi doit comporter des mesures précises et concrètes propres à permettre le reclassement effectif des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité et doit, notamment, préciser le nombre, la nature et la localisation des emplois proposés en vue d'un reclassement dans les sociétés du groupe dont relève l'employeur ; que le groupe de reclassement s'entend des sociétés dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent entre elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; que, pour dire le plan de reclassement suffisant, la cour d'appel a retenu que ‘'la seule circonstance que le fonds d'investissement Butler Capital Partners participe au capital de sociétés exerçant des activités proches ou similaires à celles de la société Sernam services n'implique pas en soi la possibilité d'effectuer entre ces entités la permutation de tout ou partie du personnel et ne caractérise pas l'existence d'un groupe au sein duquel le reclassement devait s'effectuer'‘ ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les activités, l'organisation ou les lieux d'exploitation de la société Sernam services et des sociétés détenues par le fonds d'investissement Butler Capital Partners ayant une activité de transport ou de logistique permettaient d'effectuer une permutation de leurs personnels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-10 du code du travail en sa rédaction issue de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1235-10 du code du travail, dans sa version issue de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 :

8. Selon ce texte, dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciements concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l'article L. 1233-61 et s'intégrant au plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés. La validité du plan de sauvegarde de l'emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou l'unité économique et sociale ou le groupe. Le premier alinéa n'est pas applicable aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaires.

9. Il en résulte, d'une part, que s'agissant des possibilités de reclassement au sein du groupe, la pertinence d'un plan de sauvegarde de l'emploi doit s'apprécier parmi les autres sociétés de ce groupe dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel, d'autre part, que lorsque la nullité de la procédure de licenciement et des licenciements subséquents n'est pas encourue en raison de l'insuffisance d'un plan de sauvegarde de l'emploi établi à l'occasion d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire de l'employeur, les salariés protégés dont le licenciement a été autorisé par l'inspecteur du travail peuvent prétendre à la réparation du préjudice causé par l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi.

10. Pour débouter les salariés de leur demande indemnitaire au titre de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi, les arrêts retiennent que la seule circonstance que le fonds d'investissement Butler Capital Partners participe au capital de sociétés exerçant des activités proches ou similaires à celles de la société Sernam services n'implique pas en soi la possibilité d'effectuer entre ces entités la permutation de tout ou partie du personnel et ne caractérise pas l'existence d'un groupe au sein duquel le reclassement devait s'effectuer et en déduisent que le groupe de reclassement est composé de la société Sernam services, de la société Aster et de la société Eurodis.

11. Ils ajoutent qu'aucun poste n'était disponible au sein de la société Financière Sernam qui n'employait aucun salarié, ni au sein des sociétés Sernam services et Aster dont la liquidation judiciaire avait été prononcée et les salariés non repris licenciés, qu'un poste de reclassement d'assistant commercial basé à Weinheim au sein de la filiale allemande Eurodis a été proposé dans le plan de sauvegarde de l'emploi, en sorte que les propositions de reclassement interne correspondent aux moyens du groupe de reclassement.

12. En se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation des entreprises du groupe auquel l'entreprise appartenait, ne permettaient pas d'effectuer la permutabilité de tout ou partie du personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 29 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet les affaires et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne M. [P], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Sernam services, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. [P], ès qualités, et le condamne à payer aux cinq salariés la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf avril deux mille vingt-trois.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22-10914;22-10919;22-10930;22-10941;22-10944
Date de la décision : 19/04/2023
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 29 janvier 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 avr. 2023, pourvoi n°22-10914;22-10919;22-10930;22-10941;22-10944


Composition du Tribunal
Président : Mme Mariette (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Cabinet François Pinet, SCP Doumic-Seiller

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2023:22.10914
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