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04/09/2024 | FRANCE | N°52400819

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 septembre 2024, 52400819


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CH9






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 4 septembre 2024








Cassation partielle sans renvoi




M. FLORES, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président






Arrêt n° 819 F-D




Pourvois n°
T 23-11.815
T 23-12.597 JONCTION












R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I

S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 SEPTEMBRE 2024




I. La société Viking Life-Saving Equipment France, société à responsa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 septembre 2024

Cassation partielle sans renvoi

M. FLORES, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président

Arrêt n° 819 F-D

Pourvois n°
T 23-11.815
T 23-12.597 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 SEPTEMBRE 2024

I. La société Viking Life-Saving Equipment France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 23-11.815, contre un arrêt rendu le 8 décembre 2022 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [B] [G], domicilié [Adresse 2],

2°/ à France travail, anciennement dénommée Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

II. M. [B] [G], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 23-12.597 contre le même arrêt rendu le 8 décembre 2022 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), et contre une ordonnance rendue le 16 décembre 2021 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale) dans le litige l'opposant à la société Viking Life-Saving Equipment France, société à responsabilité limitée, dont le siege est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

La demanderesse au pourvoi n° T 23-11.815 invoque, à l'appui de son recours, cinq moyens de cassation.

Le demandeur au pourvoi n° T 23-12.597 invoque, à l'appui de son recours, neuf moyens de cassation.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [G], de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Viking Life-Saving Equipment France, après débats en l'audience publique du 19 juin 2024 où étaient présents M. Flores, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Deltort, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois N° T 23-11.815 et T 23-12.597 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 8 décembre 2022), M. [G] a été engagé en qualité de « service planner » par la société Viking Life-Saving Equipment France suivant contrats à durée déterminée du 2 décembre 2013 au 10 septembre 2014 puis du 18 mai 2015 au 17 novembre 2015, prorogé au 31 mai 2016. La relation s'est poursuivie suivant contrat à durée indéterminée à compter du 2 juin 2016.

3. Le salarié a été licencié le 12 janvier 2018.

4. Le 9 janvier 2019, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, en contestation de la rupture du contrat de travail et en condamnation de l'employeur au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur les premier à quatrième moyens du pourvoi n° T 23-11.815 de l'employeur, les premier à troisième, cinquième à neuvième moyens du pourvoi n° T 23-12.597 du salarié,

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le quatrième moyen du pourvoi T 23-11.815, le sixième moyen du pourvoi T 23-12.597, pris en sa troisième branche qui sont irrecevables et qui, pour les autres griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le quatrième moyen du pourvoi n° T 23-12.597

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à ce que l'employeur soit condamné à lui verser un rappel de salaire pour le temps de travail effectué au cours des périodes d'astreinte outre congés payés afférents et en conséquence de limiter le montant de la condamnation au titre des repos non pris, de le débouter de sa demande en paiement d'une indemnité au titre du travail dissimulé, de sa demande tendant à ce que la décision soit transmise au procureur de la République, de fixer le salaire de référence à une certaine somme et d'allouer certaines sommes à titre de rappel de salaire entre le licenciement et le 31 décembre 2022 outre congés payés afférents, alors :

« 1°/ qu'en affirmant dans ses motifs, qu'il y avait lieu de rejeter la demande de rappels de salaires formés par l'exposant au titre des astreintes et en jugeant, dans son dispositif, qu'il y avait lieu de confirmer le jugement, lequel avait condamné la société Viking Life-Saving Equipment France à verser à M. [G] la somme de 300,57 euros à titre de rappel de paiement des astreintes et des congés payés afférents, la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; que constitue une astreinte la période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif ; que dans ses écritures, M. [G] avait démontré, pièces à l'appui, que ses temps d'astreinte hors intervention constituaient nécessairement du temps de travail effectif dès lors qu'il était tenu, de 8 à 19 h, de vérifier en permanence si une demande avait été formulée sur les différents supports téléphoniques et informatiques à l'aide d'un ordinateur portable mis à sa disposition et d'être en mesure de répondre au maximum dans les deux heures ce qui impliquait ainsi une démarche proactive systématique et continue, une connexion internet permanente, empêchant de se déconnecter physiquement et mentalement et ce faisant, le privant de toute possibilité effective de gérer librement les temps pendant lesquels ses services n'étaient pas sollicités et vaquer à ses occupations personnelles, ce que la société Viking Life-Saving Equipment France avait d'ailleurs reconnu en supprimant ensuite la consultation régulière de la boîte mail ; qu'en l'espèce pour débouter M. [G] de sa demande, la cour d'appel s'est bornée à relever qu'il disposait d'outils (un ordinateur et un téléphone portables) lui assurant une certaine autonomie et que le risque d'intervention était relativement peu élevé ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi cependant qu'elle y était invitée, si les modalités de l'astreinte impliquant notamment une consultation permanente des mails et une connexion internet quasi continue n'étaient pas d'une intensité telle qu'elles avaient affecté objectivement et très significativement la faculté du salarié de gérer librement, au cours de ces périodes, le temps pendant lequel ses services professionnels n'étaient pas sollicités et de vaquer à ses occupations personnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3121-5 du code du travail, dans sa rédaction alors en vigueur et de l'article L. 3121-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel n'ayant pas statué sur le chef de demande se rapportant aux astreintes, le moyen dénonce en réalité une omission de statuer qui, pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, ne donne pas ouverture à cassation.

8. Le moyen n'est donc pas recevable.

Mais sur le cinquième moyen du pourvoi n° T 23-11.815

Enoncé du moyen

9. L'employeur fait grief à l'arrêt d'ordonner le remboursement aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités chômage versées dans la limite de six mois, alors « que lorsque le licenciement est nul, le juge ordonne le remboursement par l'employeur de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, dans les seuls cas de nullité visés aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, et L. 1235-11 par le code du travail, lesquels incluent le cas où le licenciement est discriminatoire ou a été prononcé à l'encontre d'un salarié ayant intenté une action en justice relative à des faits de discrimination ou sur le fondement des dispositions relatives à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ou d'un salarié victime de harcèlement moral ou sexuel ; qu'en ordonnant le remboursement par la société Viking Life-Saving Equipment France aux organismes concernés des indemnités de chômage payées à monsieur [G] du jour du licenciement au jour de la décision, dans la limite de 6 mois d'indemnité de chômage, cependant qu'elle avait annulé le licenciement du salarié pour avoir été prononcé pour un motif lié à l'exercice par monsieur [G] de sa liberté d'expression, cas de nullité du licenciement non visé à l'article L. 1235-4 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

10. Selon ce texte, dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

11. Après avoir déclaré nul le licenciement au motif que l'employeur avait reproché au salarié l'exercice de sa liberté d'expression, l'arrêt ordonne le remboursement par l'employeur des allocations de chômage versées au salarié à la suite de son licenciement, dans la limite de six mois.

12. En statuant ainsi, alors que le remboursement des indemnités de chômage ne pouvait être ordonné que dans les cas de nullité du licenciement visés à l'article L. 1235-4 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

13. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

14. La cassation prononcée sur le cinquième moyen du pourvoi n° T 23-11.815 n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond. Il convient de retrancher de l'arrêt attaqué le chef de dispositif par lequel l'employeur a été condamné au remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage.

15. La cassation du chef de dispositif se rapportant à la condamnation de l'employeur à rembourser des indemnités chômage n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt le condamnant aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

REJETTE le pourvoi n° T 23-12.597 ;

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement en ce qu'il ordonne le remboursement par la société Viking Life-Saving Equipment France aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage versées à M. [G], du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de six mois d'indemnité de chômage, l'arrêt rendu le 8 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi sur ce point ;

DIT que chacune des parties conservera la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille vingt-quatre, et signé par lui et par Mme Deltort, conseiller, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400819
Date de la décision : 04/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 08 décembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 sep. 2024, pourvoi n°52400819


Composition du Tribunal
Président : M. Flores (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400819
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