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11/09/2024 | FRANCE | N°42400464

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 septembre 2024, 42400464


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


FM






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 11 septembre 2024








Rejet




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 464 F-D


Pourvoi n° X 23-10.370




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT D

E LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 SEPTEMBRE 2024


1°/ La société B-Squared Investments, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4] (Luxembourg), venant aux droits de la s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 11 septembre 2024

Rejet

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 464 F-D

Pourvoi n° X 23-10.370

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 SEPTEMBRE 2024

1°/ La société B-Squared Investments, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4] (Luxembourg), venant aux droits de la société Nacc,

2°/ M. [U] [T], domicilié [Adresse 1],

3°/ Mme [B] [P], divorcée [T], domiciliée [Adresse 3],

ont formé le pourvoi n° X 23-10.370 contre l'arrêt rendu le 24 octobre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige les opposant à la société Crédit industriel et commercial, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Calloch, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société B-Squared Investments, et M. et Mme [T], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Crédit industriel et commercial, après débats en l'audience publique du 11 juin 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Calloch, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 octobre 2022) rendu sur renvoi après cassation (Com., 5 mai 2021, n° 19-10.358), les 28 mai 1999 et 15 mars 2000, M. [T] et Mme [P] épouse [T] ont signé avec la société Etna Finance deux mandats de gestion de portefeuille ainsi qu' à la dernière date une convention d'ouverture d'un compte dans les livres de la société EIFB devenue la société Crédit industriel et commercial (la banque).

2. Le 21 novembre 2002, M. et Mme [T] ont signé avec la société Nacc, aux droits de laquelle vient la société B-Squared Investments, un contrat de cession des créances.

3. Les 26 et 30 décembre 2002, la société Nacc a assigné la société Etna Finance puis la banque en responsabilité.

4. Le 11 avril 2012, la directrice générale de la société Etna Finance a été condamnée par la cour d'appel de Paris pour des faits d'abus de confiance et d'escroquerie au préjudice de M. [T].

Examen des moyens

Sur le second moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. M. et Mme [T] et la société font grief à l'arrêt de déclarer la société irrecevable en toutes ses demandes formées à l'encontre de la banque alors « que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ; que pour déclarer la société irrecevable en toutes ses demandes à défaut de justifier de son intérêt à agir en responsabilité contractuelle ou délictuelle à l'encontre de la banque, l'arrêt attaqué retient que l'acte de cession ne porte, selon les termes clairs et précis de l'article 3, que sur des créances certaines, liquides et exigibles, ne vise aucun acte ayant donné naissance à des créances indemnitaires de M. et Mme [T] à l'encontre de la banque et ne contient aucune stipulation permettant d'identifier des créances incertaines et litigieuses détenues par M. et Mme [T] à l'encontre de la banque qui auraient été portées à la connaissance et acceptées de la société ; qu'en statuant ainsi quand l'existence du droit invoqué par le demandeur n'était pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte des articles 1615 et 1692 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-31 du 10 février 2016 que la cession de créance transfère au cessionnaire les droits et actions appartenant au cédant et attachés à la créance cédée.

8. L'arrêt relève que l'acte de cession conclu entre la société Nacc et M. et Mme [T] ne visait aucun acte ayant donné naissance à des créances indemnitaires de ces derniers à l'encontre de la banque, et que ces créances avaient une nature incertaine en l'absence d'une action en justice ayant consacré la responsabilité contractuelle de la banque. Il énonce ensuite que selon les termes clairs et précis de l'article 3 de cet acte de cession, les créances incertaines et litigieuses n'avaient pas été cédées à la société par M. et Mme [T].

9. En l'état de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel, qui était tenue de déterminer les conditions dans lesquelles le droit à agir avait été transmis par l'acte de cession et n'a pas statué sur le bien-fondé de la demande, a pu retenir que la société cessionnaire ne justifiait pas de son intérêt à agir en responsabilité contractuelle ou extracontractuelle à l'encontre de la banque.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Et sur le second moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

11. M. et Mme [T] et la société font grief à l'arrêt de déclarer la société irrecevable en toutes ses demandes formées à l'encontre de la banque alors :

« 1°/ que le contrat de cession de créances conclu le 21 novembre 2002 au profit de la société stipule en préambule que M. et Mme [U] [T] considèrent, notamment, détenir des créances indemnitaires à l'encontre des sociétés Refco et EIFB-Groupe CIC (CIC Securities) au titre des fautes manifestes commises par ces dernières dans la gestion des comptes ouverts dans leurs livres" et ont souhaité céder l'ensemble de ces créances et leurs accessoires indissociables pour, notamment, supprimer une part substantielle de l'aléa relatif aux modalités et au délai de recouvrement desdites créances. Les garanties et droits accessoires des créances cédées sont des éléments indissociables desdites créances" ; que dans son article 1er, objet", l'acte indique que M. et Mme [U] [T] cèdent et transportent à la société Nacc, cessionnaire, qui l'accepte, la totalité des créances en capital, intérêts et accessoires (comprenant notamment les garanties désignées ci-dessous), qu'ils détiennent, à l'encontre des débiteurs ci-après désignés à l'article 2, du fait de la perte ou de la dissipation de l'ensemble des sommes par eux versées sur les comptes ouverts dans les livres des sociétés Refco et EIFB-Groupe CIC (CIC Securities) et que" par opération de cession de créances, les parties désignent l'opération par laquelle des créances sont transmises par M. et Mme [U] [T] à la société Nacc qui acquerra ainsi les droits que M. et Mme [U] [T] détenaient contre Mme [J] [D], la société Etna Finance, les établissements dépositaires des comptes ainsi que tout tiers, en 10 vertu des actes et dispositions suivantes" ; que les créances cédées sont désignées à l'article 2, désignation des créance", qui prévoit que la cession concerne les créances détenues par les époux [T] afférentes à l'ensemble des opérations de placement effectuées par l'intermédiaire de la société Etna Finance, dont le montant nominal en principal est de 9 557 340 ¿ à l'encontre des sociétés dépositaires des comptes dont la société CIC au titre des fautes commises dans l'exécution des contrats de gestion de sommes déposées et des comptes ouverts dans ses livres ainsi que les créances détenues par les époux [T], à l'encontre de Mme [D], à titre personnel, des sociétés dépositaires Refco, EIFB-Groupe CIC (CIC Sécurities) et des tiers ayant directement ou indirectement perçu des sommes en provenance de leurs comptes au titre de différentes opérations de virement non autorisés ou de prêts réalisés au profit de Mme [D] ; qu'en se fondant sur les seules stipulations de l'article 3 obligations des cédants", relatives aux garanties données au cessionnaire qui au demeurant ne les revendique pas, pour retenir que les créances cédées s'entendent de créances certaines, liquides et exigibles et ne portent pas sur les créances incertaines et litigieuses détenues par M. et Mme [T] à l'encontre de la banque, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

2°/ qu'à supposer que l'article 3 obligations des cédants", aux termes duquel les époux [T] s'engagent à céder des créances certaines, liquides et exigibles", participe à la détermination des caractéristiques des créances cédées, il découle du rapprochement de cette clause avec les autres stipulations de la convention une ambiguïté quant à la nature et à l'objet des créances cédées et de leurs accessoires qu'il incombait au juge de lever en interprétant la convention à la lumière de l'intention réelle des parties ; qu'en jugeant néanmoins, par une application littérale des termes clairs et précis" de l'article 3 de la convention, que seules des créances certaines, liquides et exigibles" avaient été cédées à la société NACC à l'exclusion des créances indemnitaires incertaines et litigieuses détenues par M. et Mme [T] à l'encontre de la société CIC, la cour d'appel, qui s'est abstenue d'interpréter la convention à la lumière de la réelle intention des parties, a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

3°/ que le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties, qui peut notamment être recherchée dans tout comportement ultérieur de nature à la manifester, plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes ; qu'en retenant que les déclarations effectuées par M. et Mme [T] dans la présente instance, confirmées par la société, consistant à soutenir que leur intention était bien de céder des créances indemnitaires éventuelles et litigieuses, sont inopérantes dès lors qu'elles n'étaient corroborées par aucune pièce extérieure à l'acte qui lui soit antérieure ou contemporaine, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 devenu 1103 du code civil, ensemble l'article 1188 du code civil. »

Réponse de la Cour

12. C'est par une interprétation souveraine des stipulations de la convention et de la commune intention des parties que la cour d'appel a estimé que M. et Mme [T] avaient cédé à la société les seules créances certaines, liquides et exigibles au jour de l'acte, et non les créances indemnitaires incertaines pouvant résulter d'actions dirigées contre la banque.
13. le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société B. Squared Investments, ès qualités, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société B. Squared Investments, ès qualités, et la condamne à payer à la société Crédit industriel et commercial la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400464
Date de la décision : 11/09/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 octobre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 sep. 2024, pourvoi n°42400464


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 17/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400464
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