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11/09/2024 | FRANCE | N°C2400961

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 septembre 2024, C2400961


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :


N° N 23-85.663 F-D


N° 00961




GM
11 SEPTEMBRE 2024




CASSATION PARTIELLE






M. BONNAL président,
















R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________




AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 11 SEPTEMBRE 2024


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M. [L] [O] [I] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France, chambre correctionnelle, en date du 31 août 2023, qui, pour infractions à la législation sur les stupéfiants et importation en contreband...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° N 23-85.663 F-D

N° 00961

GM
11 SEPTEMBRE 2024

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 11 SEPTEMBRE 2024

M. [L] [O] [I] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France, chambre correctionnelle, en date du 31 août 2023, qui, pour infractions à la législation sur les stupéfiants et importation en contrebande de marchandises dangereuses pour la santé, l'a condamné à sept ans d'emprisonnement, une interdiction définitive du territoire français et une confiscation.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [L] [O] [I], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 juin 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par jugement du 27 septembre 2022, le tribunal correctionnel a condamné M. [L] [O] [I] pour importation, transport, détention, offre ou cession, acquisition, illicites, de stupéfiants, et importation en contrebande de marchandises prohibées dangereuses pour la santé, à sept ans d'emprisonnement, une interdiction définitive du territoire français et une confiscation.

3. M. [O] [I] a relevé appel de cette décision. Le ministère public a formé appel incident.

Examen des moyens

Sur les deux premiers moyens

Énoncé des moyens

4. Le premier moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [O] [I] coupable d'acquisition non autorisée de stupéfiants, alors « que tout jugement ou arrêt de condamnation doit constater à la charge du prévenu l'existence de chacun des éléments constitutifs de chacune des infractions dont il est reconnu coupable ; que, pour entrer en voie de condamnation à l'encontre du prévenu des chefs d'importation, transport, détention, offre ou cession et acquisition non autorisés de stupéfiants, la cour d'appel relève que le prévenu a reconnu s'être rendu en Guadeloupe en tant qu'intermédiaire des trafiquants, avoir reçu de l'argent et en avoir transmis ; que la cour d'appel ajoute que le prévenu a eu un rôle d'émissaire des fournisseurs vénézuéliens ; qu'en l'état de ces motifs qui ne caractérisent aucun acte d'acquisition des stupéfiants pour l'importation, la détention, le transport, l'offre ou la vente desquels le prévenu, en qualité d'intermédiaire ou de représentant des fournisseurs, a été condamné ni même un acte de complicité de ce délit, la cour d'appel a violé les articles 222-37 du code pénal et 485 du code de procédure pénale. »

5. Le deuxième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [O] [I] coupable d'importation, transport, détention et offre ou cession non autorisés de stupéfiants et d'importation en contrebande de marchandises dangereuses pour la santé publique, alors « que nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ; qu'est auteur de l'infraction celui qui commet les faits incriminés, et coauteur celui qui commet ces faits avec l'auteur ou assiste ce dernier dans les faits même de consommation de l'infraction ; que, pour déclarer monsieur [O] coupable des faits d'importation, transport, détention et offre ou cession non autorisés de stupéfiants et d'importation en contrebande de marchandises dangereuses pour la santé publique, la cour d'appel constate que le prévenu a reconnu s'être rendu en Guadeloupe en tant qu'intermédiaire des trafiquants, avoir reçu de l'argent et en avoir transmis, qu'il était titulaire d'un passeport porteur de nombreux timbres confirmant qu'il était entré en Guadeloupe les 8 mai et 1er juin 2014, qu'il était également découvert un papier manuscrit avec l'identité de [V] [J], des codes PIN et des coordonnées GPS, de nombreux téléphones et cartes SIM ; que la cour d'appel ajoute que le prévenu a participé à des réunions en vue de la préparation de l'importation des stupéfiants ; qu'en l'état de ces constatations, dont il ne résulte aucun acte d'importation, transport, détention, offre ou cession de stupéfiants commis par le prévenu lui-même, ni une participation de ce dernier dans les faits mêmes de consommation par d'autres de ces infractions, la cour d'appel, qui n'a caractérisé aucun acte positif permettant de retenir la culpabilité du prévenu en qualité d'auteur ou de coauteur des faits d'importation, transport, détention, offre ou cession de stupéfiants visés par la prévention, n'a pas légalement justifié sa décision et a violé les articles 121-1, 121-4, 222-36 et 222-37 du code pénal et 414 du code des douanes, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

6. Les moyens sont réunis.

7. Pour déclarer M. [O] [I] coupable d'infractions à la législation sur les stupéfiants et d'infraction douanière, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé que le prévenu a été envoyé par des fournisseurs vénézuéliens au contact d'une personne organisant, par voie maritime, depuis le Vénézuéla, une importation de drogue en Guadeloupe, énonce que l'intéressé a rencontré les clients et divers protagonistes de l'opération, a été, lors de sa réalisation, tenu informé et a rendu compte du transbordement de la marchandise au large des côtes guadeloupéennes.

8. Les juges ajoutent que le prévenu a reconnu s'être rendu en Guadeloupe en qualité d'intermédiaire des trafiquants, avoir reçu de l'argent et en avoir transmis.

9. Ils observent également que les mentions figurant sur son passeport attestent de ses déplacements en Guadeloupe. Ils relèvent plusieurs éléments permettant d'établir les liens entre M. [O] [I] et de nombreux autres participants au trafic.

10. En se déterminant ainsi, par des motifs qui établissent que le prévenu a participé directement à la commission de chacune des infractions dont il a été reconnu coupable, la cour d'appel a justifié sa décision.

11. D'où il suit que les moyens doivent être écartés.

Mais sur le troisième moyen

Énoncé du moyen

12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la confiscation des biens ou instruments ayant servi à commettre l'infraction, alors « que hormis le cas où la confiscation, qu'elle soit en nature ou en valeur, porte sur un bien qui, dans sa totalité, constitue le produit de l'infraction, le juge, en ordonnant une telle mesure, doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé lorsqu'une telle garantie est invoquée ou procéder à cet examen d'office lorsqu'il s'agit d'une confiscation de tout ou partie du patrimoine ; qu'il incombe en conséquence au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure et, le cas échéant, de s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du prévenu ; que la cour d'appel énonce qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné à l'encontre du prévenu la confiscation des biens ou instruments ayant servi à commettre l'infraction ; qu'en statuant ainsi, sans mieux s'expliquer sur la nature et l'origine de chacun des biens confisqués, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les exigences de motivation rappelées ci-dessus ont été respectées et a violé les articles 1er du protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 131-21 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 132-1 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale :

13. Il se déduit de ces textes qu'en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle.

14. Hormis le cas où la confiscation porte sur un bien qui, dans sa totalité, constitue l'objet ou le produit de l'infraction, le juge, en ordonnant une telle mesure, doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé lorsqu'une telle garantie est invoquée ou procéder à cet examen d'office lorsqu'il s'agit d'une confiscation de tout ou partie du patrimoine.

15. Il incombe, en conséquence, au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure et, le cas échéant, de s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du prévenu.

16. En se bornant à énoncer, sans autre motif ni désignation des biens concernés, que, eu égard à la nature des faits, il convient de confirmer la confiscation des biens ou instruments ayant servi à commettre l'infraction, le jugement ne contenant, au surplus, pas plus d'indications permettant d'identifier les biens confisqués ni de s'assurer en quoi ils auraient servi à commettre l'infraction, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler la légalité de sa décision.

17. La cassation est en conséquence encourue de ce chef.

Portée et conséquences de la cassation

18. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la peine de confiscation. Les autres dispositions seront donc maintenues.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 31 août 2023, mais en ses seules dispositions relatives à la peine de confiscation, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Fort-de-France et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du onze septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : C2400961
Date de la décision : 11/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort de France, 31 août 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 sep. 2024, pourvoi n°C2400961


Composition du Tribunal
Président : M. Bonnal (président)
Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 17/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:C2400961
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