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06/11/2024 | FRANCE | N°52401100

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2024, 52401100


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CH9






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 6 novembre 2024








Cassation partielle




Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 1100 F-D


Pourvoi n° J 23-15.878








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPL

E FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 NOVEMBRE 2024


La société Climinvest, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 23-15....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 novembre 2024

Cassation partielle

Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1100 F-D

Pourvoi n° J 23-15.878

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 NOVEMBRE 2024

La société Climinvest, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 23-15.878 contre l'arrêt rendu le 16 mars 2023 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à Mme [E] [Y], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Laplume, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Climinvest, après débats en l'audience publique du 1er octobre 2024 où étaient présents Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Laplume, conseiller référendaire rapporteur, Mme Nirdé-Dorail, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 16 mars 2023), Mme [Y] a été engagée en qualité de réceptionniste polyvalente le 29 décembre 2010 par la société Climinvest. Elle occupait en dernier lieu le poste de directrice d'hôtel.

2. Le 29 mars 2018, la salariée a été victime d'un accident du travail et placée en arrêt de travail.

3. Le 12 octobre 2018, elle a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.

4. Déclarée inapte à son poste par le médecin du travail le 1er février 2019, la salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 1er mars 2019.

Examen des moyens

Sur les premier et deuxième moyens

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le troisième moyen, pris en ses première et quatrième branches

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce qu'elle pouvait écarter le barème de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans un litige opposant un salarié à son ancien employeur, au prétexte que le gouvernement aurait manqué à son obligation de répondre aux injonctions du Conseil d'administration de l'OIT en matière d'évaluation dudit barème, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que résiliation judiciaire du contrat de travail ayant été prononcée à raison d'un manquement de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité, ce dernier avait porté atteinte à sa liberté fondamentale tirée du droit à la santé, ce qui justifiait de faire application de l'article L. 1235-3-1 du code du travail excluant l'application du barème, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

7. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

8. Pour écarter l'application du barème prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail et condamner l'employeur à payer à la salariée une somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient d'une part, que lors de sa session le conseil d'administration de l'OIT n'a pas seulement adopté le rapport du comité d'expert chargé d'examiner la réclamation alléguant l'inexécution par la France de la convention n° 158 sur le licenciement de 1982, mais a également mis à la charge du gouvernement français une obligation particulière dans le cadre de l'application de l'article 10 de cette convention en ce que, si le juge national n'a pas le pouvoir de vérifier que le barème institué par l'article L. 1235-3 du code du travail garantit au salarié, ayant fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse jugé compatible avec l'article 10 de la convention OIT n° 158, une indemnisation adéquate de son préjudice dans le cadre de cet accord international, un salarié est fondé à solliciter que le barème soit écarté au regard du préjudice dont il justifie, dans un litige l'opposant à son employeur, à raison de l'absence d'examen à intervalles réguliers par le gouvernement, en concertation avec les partenaires sociaux, des modalités du dispositif d'indemnisation prévu à l'article L. 1235-3 de façon à assurer que les paramètres d'indemnisation prévus par le barème permettent, dans tous les cas, une réparation adéquate du préjudice subi pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, que la Cour de cassation a jugé les barèmes compatibles avec l'article 10 de la convention n° 158 de l'OIT mais ne les a pas jugés conformes, ce qui implique que ceux-ci sont susceptibles de devoir faire l'objet d'adaptation, que lesdits barèmes sont entrés en vigueur le 24 septembre 2017 et qu'aucune évaluation n'a été faite de ceux-ci dans les conditions sus-mentionnées de sorte qu'il manque une condition déterminante pour que les barèmes de l'article L. 1235-3 du code du travail puissent trouver application dans le litige soumis à la juridiction.

9. L'arrêt relève d'autre part, que la résiliation du contrat de travail a été prononcée à raison d'un manquement de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité de sorte qu'il a porté atteinte à la liberté fondamentale du droit à la santé garanti constitutionnellement et que l'article L. 1235-3-1 du code du travail trouve également application, peu important que la nullité du licenciement ne soit pas sollicitée.

10. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ces moyens relevés d'office et tirés de l'inapplicabilité de l'article L. 1235-3 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

11. La cassation du chef de dispositif condamnant l'employeur à payer à la salariée la somme de 40 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt le condamnant aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Climinvest à payer à Mme [Y] la somme de quarante mille euros bruts (40 000 euros) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 16 mars 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne Mme [Y] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401100
Date de la décision : 06/11/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 16 mars 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2024, pourvoi n°52401100


Composition du Tribunal
Président : Mme Capitaine (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401100
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