La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/11/2024 | FRANCE | N°52401112

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2024, 52401112


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


ZB1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 6 novembre 2024








Rejet




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 1112 F-D


Pourvoi n° U 23-16.163






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
__________

_______________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 NOVEMBRE 2024


La société Sanofi Pasteur, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 23-16.163 contre l'arrêt rendu le 13 av...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 novembre 2024

Rejet

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1112 F-D

Pourvoi n° U 23-16.163

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 NOVEMBRE 2024

La société Sanofi Pasteur, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 23-16.163 contre l'arrêt rendu le 13 avril 2023 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [C] [Y], domicilié [Adresse 2],

2°/ au Pôle emploi Haute-Normandie, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Deltort, conseiller, les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Sanofi Pasteur, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [Y], après débats en l'audience publique du 2 octobre 2024 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Deltort, conseiller rapporteur, M. Flores, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 13 avril 2023), M. [Y] a été engagé en qualité d'opérateur de production par la société Sanofi Pasteur suivant contrat de travail à durée déterminée du 5 février 2018 au 27 avril 2018, renouvelé plusieurs fois jusqu'au 26 avril 2019, puis mis à sa disposition suivant plusieurs contrats de mission conclus avec la société Adecco entre les 16 septembre 2019 et 26 avril 2020.

2. Le 16 janvier 2020, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée et en paiement de sommes au titre de la requalification et de la rupture de celle-ci.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt d'ordonner la requalification des contrats de travail temporaire en un contrat à durée indéterminée et de le condamner à payer au salarié certaines sommes à titre d'indemnité de requalification, d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'ordonner le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage versées au salarié à compter de son licenciement, alors :

« 1°/ que le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ; que le salarié doit être affecté à l'accomplissement de tâches à caractère saisonnier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté d'une part, que M. [Y] était exclusivement affecté à l'étape initiale de fabrication Vrac du vaccin contre la grippe et d'autre part, qu'il ne pouvait être contesté que la fabrication du vaccin contre la grippe était saisonnière, en ce qu'à chaque
hiver de l'hémisphère Nord et Sud, l'Organisation mondiale de la santé définissait les souches devant constituer le vaccin avec une modification bi-annuelle des souches de vaccin ; qu'en retenant néanmoins que n'était pas en cause un emploi à caractère saisonnier alors qu'il résultait de ses constatations que la fabrication du vaccin contre la grippe était saisonnière, correspondant ainsi à des tâches appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes en fonction de critères indépendants de la volonté de l'employeur et que M. [Y] était uniquement affecté à la fabrication dudit vaccin, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1242-2 3° et L. 1251-6 3° du code du travail ;

2°/ qu'en outre, en affirmant, pour se déterminer comme elle l'a fait, que l'activité de production et de commercialisation du vaccin contre la grippe s'exerçait tout au long de l'année de sorte que l'emploi de M. [Y] était lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, cependant qu'il ne résultait ni des énonciations de l'arrêt, ni des écritures de M. [Y] que celui-ci avait soutenu un tel moyen, ce dernier se bornant à affirmer que la circonstance que la fabrication du vaccin Vrac puisse s'étaler sur près de huit mois avec une cessation complète d'activité pendant quatre mois empêchait de considérer qu'était en cause un emploi saisonnier, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

3°/ qu'à tout le moins, le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant, pour se déterminer comme elle l'a fait, que l'activité de production et de commercialisation du vaccin contre la grippe s'exerçait tout au long de l'année de sorte que l'emploi de M. [Y] était lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, cependant qu'il ne résultait ni des énonciations de l'arrêt, ni des écritures de M. [Y] que celui-ci avait soutenu un tel moyen, ce dernier se bornant à affirmer que la circonstance que la fabrication du vaccin Vrac puisse s'étaler sur près de huit mois avec une cessation complète d'activité pendant quatre mois empêchait de considérer qu'était en cause un emploi saisonnier, la cour d'appel, qui a soulevé ce moyen d'office sans mettre les parties en mesure d'en débattre contradictoirement, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en toute hypothèse, le fait qu'une société spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de vaccins ait une activité normale et permanente n'exclut pas le recours aux contrats de travail saisonniers dès lors que la fabrication de l'un des vaccins est saisonnière et que le salarié est exclusivement affecté à la fabrication de celui-ci ; qu'en l'espèce, en retenant, pour se déterminer comme elle l'a fait, que l'activité de production et de commercialisation du vaccin contre la grippe s'exerçait tout au long de l'année de sorte que l'emploi de M. [Y] était lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise après avoir pourtant relevé que M. [Y] était exclusivement affecté à l'étape initiale de fabrication Vrac du vaccin contre la grippe et d'autre part, qu'il ne pouvait être contesté que la fabrication du vaccin contre la grippe était saisonnière, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant a violé les articles L. 1242-2 3° et L. 1251-6 3° du code du travail ;

5°/ qu'au surplus, en retenant, pour se déterminer comme elle l'a fait, que l'activité de production et de commercialisation du vaccin contre la grippe s'exerçait tout au long de l'année de sorte que l'emploi de M. [Y] était lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise après avoir pourtant relevé que M. [Y] était exclusivement affecté à l'étape initiale de fabrication Vrac du vaccin contre la grippe et en aucun cas au processus entier de fabrication et à sa commercialisation, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a derechef, violé les articles L. 1242-2 3° et L. 1251-6 3° du code du travail ;

6°/ qu'encore, dans ses écritures, la société Sanofi Pasteur avait démontré, sans être contestée et pièces à l'appui, que chaque étape de la production d'un vaccin allant de l'atelier Vrac à l'atelier mirage, répartition puis conditionnement faisait l'objet d'une formation spécifique et que la permutabilité sur ces postes n'était pas envisageable ; qu'en affirmant, pour statuer comme elle l'a fait, que l'activité de production et de commercialisation du vaccin contre la grippe s'exerçait tout au long de l'année sans s'expliquer sur les écritures de la société dont il ressortait que M. [Y], lorsque l'étape saisonnière de fabrication en Vrac n'était pas en activité, ne pouvait être affecté à un autre poste de sorte que son emploi, exclusivement affecté à l'étape Vrac, avait nécessairement un caractère saisonnier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-2 3° et L. 1251-6 3° du code du travail ;

7°/ que par ailleurs, en affirmant qu'il résultait du graphique établi par la société Sanofi Pasteur que l'étape initiale de production "Vrac-Formulation" constituait une activité quasi-ininterrompue à l'exception d'une courte suspension entre la fin du mois de décembre et la mi-janvier, quand il résultait pourtant précisément de ce graphique, qu'outre la période allant de mi-décembre à mi-janvier, l'activité était totalement interrompue de mi-juin à mi-septembre, la cour d'appel, qui a dénaturé cette pièce déterminante, a violé le principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer l'écrit ;

8°/ que de plus fort, dans ses écritures et tel que la société Sanofi Pasteur n'avait pas manqué de le faire valoir, M. [Y] reconnaissait lui-même qu'il résultait du graphique établi par la société que la durée de fabrication du vaccin contre la grippe était en moyenne de huit mois avec une fermeture totale du service le reste du temps ; qu'en retenant que l'activité de fabrication initiale du vaccin contre la grippe à laquelle était affecté M. [Y] était quasi-ininterrompue sur l'année avec une seule courte suspension entre la fin du mois de décembre et de la mi-janvier, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

9°/ qu'en affirmant que l'analyse suivant laquelle était en cause une activité normale et permanente de l'entreprise était confirmée par la durée du contrat initial de M. [Y] qui n'était pas prévue pour la durée de la saison et son motif initial, tiré de l'accroissement temporaire d'activité, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a derechef violé les articles L. 1242-2 3° et L. 1251-6 3° du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. Ayant énoncé, à bon droit, qu'il incombait à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif de recours au contrat à durée déterminée et, appréciant souverainement, sans dénaturation, les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, constaté que la production du vaccin contre la grippe représentait 30 à 35 % de l'activité de l'employeur et que l'étape de fabrication des souches de ce vaccin, à laquelle le salarié était affecté en qualité d'opérateur production « vrac », avait une durée quasiment ininterrompue, chaque année, de septembre à juin à l'exception d'une courte période de suspension entre la fin décembre et la mi-janvier, le site de production étant fermé entre la fin du mois de juin et le début du mois de septembre, la cour d'appel, qui, abstraction faite de motifs surabondants, a retenu que le salarié, employé suivant plusieurs contrats de travail entre le 19 février 2018 et le 26 avril 2020, occupait un emploi correspondant à l'activité normale et permanente de l'entreprise, a pu, sans méconnaître les termes du litige ni le principe de la contradiction, en déduire que la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée devait être ordonnée.

5. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Sanofi Pasteur aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Sanofi Pasteur et la condamne à payer à M. [Y] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401112
Date de la décision : 06/11/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 13 avril 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2024, pourvoi n°52401112


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401112
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award