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12/03/2025 | FRANCE | N°52500256

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mars 2025, 52500256


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CH9






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 12 mars 2025








Cassation




M. SOMMER, président






Arrêt n° 256 FS-B


Pourvoi n° A 23-17.756


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [K].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 27 avril 2023.


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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MARS 2025


M. [H] [K], ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mars 2025

Cassation

M. SOMMER, président

Arrêt n° 256 FS-B

Pourvoi n° A 23-17.756

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [K].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 27 avril 2023.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MARS 2025

M. [H] [K], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 23-17.756 contre l'arrêt rendu le 12 octobre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à la société Checkport sécurité, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Brinet, conseiller, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de M. [K], et l'avis de M. Gambert, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 février 2025 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Brinet, conseiller rapporteur, Mme Mariette, conseiller doyen, MM. Barincou, Seguy, Mmes Douxami, Panetta, conseillers, M. Carillon, Mme Maitral, M. Redon, conseillers référendaires, M. Gambert, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 octobre 2022) et les productions, M. [K], engagé en qualité d'agent de sécurité confirmé le 4 décembre 2012 par la société Sodaic sécurité a été promu le 1er juillet 2015, chef de poste. Il est devenu salarié protégé à compter du 7 avril 2014.

2. Le 6 juin 2017, la société Checkport sécurité (la société entrante) a informé la société Sodaic sécurité (la société sortante) qu'elle reprenait le marché des aéroports de [Localité 3], la date de changement de prestataire étant fixée au 1er août 2017. Le 4 juillet 2017, la société entrante a informé la société sortante qu'elle ne pouvait reprendre le contrat de travail du salarié, représentant de la section syndicale, faute d'autorisation de l'inspection du travail quant à ce transfert. L'inspection du travail, saisie par la société sortante le 10 juillet 2017, a donné son autorisation au transfert du contrat de travail du salarié le 9 août 2017. La société sortante a remis le 23 août 2017 au salarié l'attestation Pôle emploi, le dernier jour travaillé étant fixé au 11 août 2017.

3. La société entrante n'ayant fourni aucun travail au salarié, celui-ci a pris acte le 1er août 2018 de la rupture de son contrat de travail et a saisi la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire qu'il n'est pas salarié de la société entrante et de le déclarer irrecevable en toutes ses demandes, alors « que lors de la perte d'un marché ne constituant pas une entité économique autonome, un manquement de l'entreprise sortante à son obligation de communiquer à l'entreprise entrante les documents prévus par un accord ne peut empêcher un changement d'employeur qu'à la condition qu'il mette l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché ; qu'il en résulte que lorsque la société sortante a communiqué les éléments requis à l'entreprise entrante, il appartient au juge d'apprécier si l'éventuel retard de transmission ou l'insuffisance des éléments fournis rendait impossible l'organisation de la reprise effective du marché ; que, pour déclarer irrecevables les demandes de M. [K], la cour d'appel - après avoir rappelé que, ''par courrier du 4 juillet 2017, la société Checkport sécurité informe que le dossier de monsieur [K] n'est pas à jour, l'autorisation de l'inspection du travail faisant défaut'' et que ''ce n'est qu'après réception de ce courrier le 10 juillet 2017 que la société Sodaic sécurité formulera cette demande et qu'elle recevra cette autorisation postérieurement au changement de prestataire du marché'' - a retenu, d'une part, que, ''si les textes conventionnels ne fixent pas de délai pour l'obtention de cette demande et permettent avec l'accord du salarié sa mise à disposition à la société entrante, il convient toutefois que la société agisse avec diligence et fournisse dans les meilleurs délais les dossiers complets de salariés transférables'', d'autre part, que ''la société Sodaic, informée dès le 6 juin 2017 de l'ouverture de la procédure de transfert pour une reprise du marché de Sécurité aéroport de [Localité 3] le 1er août 2017, s'est abstenue de solliciter l'autorisation de transfert du contrat de monsieur [K], salarié protégé, à l'inspection du travail dans un délai utile'' et que ''cette demande n'a été formée tardivement sur la seule relance de la société Checkport sécurité'', si bien que ''le contrat de travail n'ayant pas été transféré au 1er août 2017, monsieur [K] est resté le salarié de la société Sodaic sécurité jusqu'à la remise le 23 août 2017 au salarié de l'attestation Pôle emploi, le dernier jour travaillé étant fixé au 11 août 2017'' ; qu'en se déterminant ainsi par des motifs inopérants tiré du caractère tardif de la communication de l'autorisation de transfert du contrat de travail de M. [K] dont elle constatait pourtant qu'elle n'était soumise à aucun délai, sans constater que le défaut de transmission de cette seule autorisation avait mis la société Checkport sécurité dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché, la cour d'appel a violé l'article 2.3.1 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel, attaché à la Convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985. »

Réponse de la Cour

Vu le préambule et les articles 2.2, 2.3.2 et 4 de l'accord du 28 janvier 2011 relatif à la reprise du personnel annexé à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985 :

5. D'abord, il résulte de ces textes que l'entreprise entrante, nouveau titulaire du marché, s'engage à reprendre l'ensemble des salariés figurant sur la liste fournie par l'entreprise sortante qui remplissent les conditions de transfert fixées à l'article 2.2. Les salariés titulaires d'un mandat de représentation du personnel bénéficient des dispositions légales applicables en matière de protection et de transfert de contrat de travail. L'entreprise sortante joint la copie de l'autorisation de transfert des salariés concernés. Dans l'attente de la décision, les salariés concernés restent salariés de l'entreprise sortante mais peuvent, avec leur accord, être mis à disposition de l'entreprise entrante.

6. Ensuite, un manquement de l'entreprise sortante à son obligation de communiquer à l'entreprise entrante les documents prévus par l'accord ne peut empêcher un changement d'employeur qu'à la condition qu'il mette l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché.

7. Pour déclarer irrecevables les demandes du salarié, l'arrêt relève d'abord que, par lettre du 4 juillet 2017, l'entreprise entrante avait signalé que le dossier de l'intéressé n'était pas à jour, l'autorisation de l'inspection du travail faisant défaut et que ce n'était qu'après réception de ce courrier le 10 juillet 2017 que l'entreprise sortante avait formulé cette demande d'autorisation, qu'elle avait reçue postérieurement au changement de prestataire du marché.

8. L'arrêt retient ensuite que si les textes conventionnels ne fixent pas de délai pour l'obtention de cette demande et permettent avec l'accord du salarié sa mise à disposition à la société entrante, il convient toutefois que la société sortante agisse avec diligence et fournisse dans les meilleurs délais les dossiers complets de salariés transférables. Il ajoute que la société sortante, informée dès le 6 juin 2017 de l'ouverture de la procédure de transfert pour une reprise du marché de Sécurité aéroport de [Localité 3] le 1er août 2017, s'est abstenue de solliciter l'autorisation de transfert du contrat du salarié protégé, à l'inspection du travail dans un délai utile et que cette demande a été formée tardivement sur la seule relance de la société entrante, si bien que le contrat de travail n'ayant pas été transféré au 1er août 2017, l'intéressé est resté le salarié de la société sortante jusqu'à la remise le 23 août 2017 de l'attestation Pôle emploi, le dernier jour travaillé étant fixé au 11 août 2017.

9. En statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que le salarié remplissait les conditions exigées par l'accord pour que son contrat de travail soit transféré, l'inspecteur du travail ayant autorisé ce transfert le 9 août 2017, et qu'il résultait de ses constatations que le retard pris par l'entreprise sortante dans la transmission des documents relatifs au transfert du contrat de travail de ce salarié protégé n'avait pas placée l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 octobre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Checkport sécurité aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Checkport sécurité à payer à la SARL Jérôme Ortscheidt la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500256
Date de la décision : 12/03/2025
Sens de l'arrêt : Cassation

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Conventions diverses - Convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985 - Accord du 5 mars 2002 relatif à la reprise du personnel - Avenant du 28 janvier 2011 - Préambule et articles 2.2, 2.3.2 et 4 - Reprise de marché - Transfert des salariés protégés - Conditions - Autorisation de l'inspecteur du travail - Manquement - Cas - Demande d'autorisation formée tardivement par l'entreprise sortante - Autorisation délivrée après le changement de titulaire du marché - Effets - Détermination - Portée

Il résulte du préambule et des articles 2.2, 2.3.2 et 4 de l'accord du 28 janvier 2011 relatif à la reprise du personnel annexé à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985, que l'entreprise entrante, nouveau titulaire du marché, s'engage à reprendre l'ensemble des salariés figurant sur la liste fournie par l'entreprise sortante qui remplissent les conditions de transfert fixées à l'article 2.2. Les salariés titulaires d'un mandat de représentation du personnel bénéficient des dispositions légales applicables en matière de protection et de transfert de contrat de travail. L'entreprise sortante joint la copie de l'autorisation de transfert des salariés concernés. Dans l'attente de la décision, les salariés concernés restent salariés de l'entreprise sortante mais peuvent, avec leur accord, être mis à disposition de l'entreprise entrante. Doit en conséquence être cassé l'arrêt qui déclare irrecevables les demandes d'un salarié protégé à l'encontre de l'entreprise entrante, nouveau titulaire du marché auquel il était affecté, aux motifs que la société sortante s'est abstenue de solliciter l'autorisation de transfert de son contrat, à l'inspection du travail dans un délai utile, alors qu'il n'était pas contesté que le salarié remplissait les conditions exigées par l'accord pour que son contrat de travail soit transféré, l'inspecteur du travail ayant autorisé ce transfert neuf jours après le changement de prestataire, et qu'il résultait de ses constatations que le retard pris par l'entreprise sortante dans la transmission des documents relatifs au transfert du contrat de travail de ce salarié protégé n'avait pas placée l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché


Références :

Préambule et articles 2.2, 2.3.2 et 4 de l'avenant du 28 janvier 2011 à l'accord du 5 mars 2002, relatif à la reprise du personnel, annexé à la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 12 octobre 2022

Sur le principe qu'un manquement de l'entreprise sortante à son obligation de communiquer à l'entreprise entrante toutes les informations, ne peut empêcher un changement d'employeur qu'à la condition qu'il mette l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché, à rapprocher : Soc., 30 novembre 2010, pourvoi n° 09-40386, Bull. 2010, V, n° 274 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mar. 2025, pourvoi n°52500256


Composition du Tribunal
Président : M. Sommer
Avocat(s) : SARL Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500256
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