LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° G 24-82.627 F- D
N° 00423
SB4
1ER AVRIL 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 1ER AVRIL 2025
La société [1] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Cayenne, chambre correctionnelle, en date du 26 mars 2024, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 21 mars 2023, pourvoi n° 22-82.343, publié au Bulletin), pour infractions au code de l'environnement, l'a condamnée à 100 000 euros d'amende avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Rouvière, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de La société [1], les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de l'Office national des forêts, et les conclusions de M. Bigey, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 mars 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Rouvière, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. A l'issue d'une opération conduite par l'Office national des forêts (ONF), la société [1], qui exploitait une mine aurifère sur le territoire de la commune de [Localité 2] (Guyane), a été poursuivie devant le tribunal correctionnel des chefs, d'une part, de déversement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer, d'autre part, de rejet en eau douce ou pisciculture de substance nuisible au poisson ou à sa valeur alimentaire.
3. Les juges du premier degré l'ont déclarée coupable, condamnée à 100 000 euros d'amende avec sursis, et ont prononcé sur les intérêts civils.
4. La prévenue et l'ONF, partie civile, ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les exceptions de nullité soulevées par la société [1], sauf celle portant sur les prélèvements et analyses réalisées par le laboratoire [3], et a déclaré cette société coupable de déversement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou les eaux de la mer et de rejet en eau douce ou pisciculture de substance nuisible au poisson ou à sa valeur alimentaire, alors « qu'il appartient au président de la chambre des appels correctionnels, ou à l'un des assesseurs, par lui désigné, d'informer la personne morale poursuivie, en la personne de son représentant à l'audience, de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; qu'en l'espèce où il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué et des notes d'audience versées à la procédure que Mme [H] [F] et M. [G] [F], représentants légaux de la société [1] qui ont comparu, n'ont pas été informés, ès qualités, de leur droit de se taire au cours des débats, la cour d'appel a méconnu les articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 406, 512 et 591 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 406 et 512 du code de procédure pénale :
6. Il résulte du premier de ces textes que devant le tribunal correctionnel, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu, sans distinction entre les personnes physiques et les personnes morales, de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. La méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief.
7. En application du second, ces dispositions sont applicables également devant la chambre des appels correctionnels.
8. Il ne résulte pas de l'arrêt attaqué ni des notes d'audience que Mme [H] [F] et M. [G] [F], qui ont comparu à l'audience de la cour d'appel du 24 octobre 2023, en qualité de représentants légaux de la prévenue, aient été informés par le président ou l'un des assesseurs de leur droit de se taire au cours des débats.
9. La cassation est par conséquent encourue.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés, la Cour :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Cayenne, en date du 26 mars 2024, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Fort-de-France, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Cayenne et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du premier avril deux mille vingt-cinq.