La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/04/2025 | FRANCE | N°52500361

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 avril 2025, 52500361


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


ZB1






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 2 avril 2025








Cassation partielle




Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président






Arrêt n° 361 F-D


Pourvoi n° N 23-23.724


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [B].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cass

ation
en date du 19 octobre 2023.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHA...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 avril 2025

Cassation partielle

Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 361 F-D

Pourvoi n° N 23-23.724

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [B].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 19 octobre 2023.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 AVRIL 2025

M. [L] [B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 23-23.724 contre l'arrêt rendu le 15 décembre 2022 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Generale Costruzioni Ferroviarie, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 3], Italie, prise en sa succursale française sis [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Quellec, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [B], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Generale Costruzioni Ferroviarie, après débats en l'audience publique du 5 mars 2025 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Quellec, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 15 décembre 2022), M. [B] a été engagé en qualité de conducteur d'engins de travaux publics par la société Generale Costruzioni Ferroviarie, à compter du 1er avril 2014.

2. Le 10 décembre 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes en résiliation judiciaire du contrat de travail et en paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de ce contrat.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater le paiement régulier des différentes majorations et de le débouter de ses demandes en paiement de rappels de salaire au titre des majorations sur heures de nuit et d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, alors « que l'employeur doit rapporter la preuve du paiement des salaires, nonobstant la délivrance de bulletin de paie, notamment par la production de documents comptables ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de majoration de nuit aux motifs propres et adoptés inopérants que les bulletins de paie mentionnent des majorations, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil et l'article L. 3243-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour

4. Vu les articles 1315, devenu 1353, du code civil et L. 3243-3 du code du travail :

5. Selon le premier de ces textes, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

6. Aux termes du second, l'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir, de sa part, renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en vertu de la loi, du règlement, d'une convention ou d'un accord collectif de travail ou d'un contrat.

7. Il résulte de la combinaison de ces textes que, nonobstant la délivrance de la fiche de paie, l'employeur doit prouver le paiement du salaire.

8. Pour débouter le salarié de sa demande tendant au paiement d'un rappel de salaire au titre des majorations sur les heures de nuit, l'arrêt retient par motifs propres que sur les bulletins de salaire produits par le salarié, figure le paiement de sommes au titre des majorations de nuit et par motifs adoptés qu'à la lecture des feuilles de paie, il ressort que sont versées régulièrement des heures de nuit. Il conclut qu'il semble que le salarié ait bien bénéficié des contreparties prévues en termes d'heures de nuit.

9. En statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu'il appartient à l'employeur de prouver le paiement du salaire, notamment par la production des pièces comptables, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater l'absence de manquements graves de l'employeur et de le débouter de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, en résiliation judiciaire et en paiement d'indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, compensatrice de préavis et légale de licenciement, alors « que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur ; qu'en écartant le grief du salarié tenant au non-respect des durées maximales de travail, qu'elles soient hebdomadaires ou journalières, aux motifs que ''M. [B] procède là-encore par voie d'affirmation, la démonstration de celle-ci n'étant pas rapportée par la production d'un rapport du « grand conseil ¿ secrétariat général » du Canton de Vaud et de trois arrêts de la cour d'appel de Dijon rendus dans des procédures distinctes'', quand la preuve pèse sur l'employeur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1353 du code civil :

11. Selon ce texte, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

12. Il en résulte que la preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l'Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l'employeur.

13. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, l'arrêt relève que s'agissant du fait de s'affranchir du respect des durées maximales de travail hebdomadaires ou journalières, le salarié procède par voie d'affirmation, la démonstration de celle-ci n'étant pas rapportée par la production d'un rapport du « Grand Conseil-Secrétariat Général » du Canton de Vaud et de trois arrêts de la cour d'appel de Dijon rendus dans des procédures distinctes. Il retient que le grief n'est pas fondé.

14. En statuant ainsi, alors que le salarié invoquait un manquement de l'employeur à ses obligations en matière de durée maximale à la fois journalière et hebdomadaire du temps de travail, sans constater que l'employeur justifiait avoir respecté ces durées maximales prévues par le droit interne, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

15. Le salarié fait grief à l'arrêt de constater le paiement régulier des remboursements de frais et de le débouter de sa demande en paiement d'une indemnité forfaitaire contractuelle, alors « qu'en cas de contrat de travail écrit, l'employeur est celui qui stipule ; qu'en déboutant le salarié de sa demande d'indemnité forfaitaire au motif inopérant que cette indemnité ne résultait pas du "contrat de travail signé des deux parties, seul valable", quand les deux contrats produits, l'un par le salarié, l'autre par l'employeur, comportaient la signature de ce dernier, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

16. Aux termes de ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

17. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article 5.3 de son contrat de travail, l'arrêt, après avoir constaté que la copie du contrat daté du 1er avril 2014 produite par l'employeur était la seule qui fût signée des deux parties et paraphée par le salarié, que celle produite par le salarié n'était signée et paraphée que de l'employeur et que l'article 5.3 sur lequel reposait la demande du salarié ne figurait pas dans la copie produite par l'employeur, retient l'absence de fondement contractuel à la demande formulée à ce titre dans le contrat de travail signé des deux parties, qu'il déclare seul valable.

18. En se déterminant ainsi, alors qu'elle relevait que l'employeur était par principe à l'origine de l'établissement des contrats de travail datés du même jour et qu'il n'apportait aucune explication quant à l'existence de deux exemplaires différents, de sorte que l'exemplaire détenu par le salarié, dont elle avait constaté qu'il était revêtu de la signature et du paraphe de l'employeur, obligeait celui-ci, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si cet exemplaire comportait, ainsi que le soutenait le salarié, un article 5.3 prévoyant une indemnité forfaitaire en sa faveur, n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. [B] de ses demandes en paiement de rappels de salaire au titre du repositionnement, l'arrêt rendu le 15 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;

Condamne la société Generale Costruzioni Ferroviarie aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Generale Costruzioni Ferroviarie et la condamne à payer à la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille vingt-cinq.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52500361
Date de la décision : 02/04/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 15 décembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 avr. 2025, pourvoi n°52500361


Composition du Tribunal
Président : Mme Monge (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 22/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:52500361
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award