LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 2 avril 2025
Rejet
Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 371 F-D
Pourvoi n° W 23-20.374
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 AVRIL 2025
M. [W] [R], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° W 23-20.374 contre l'arrêt rendu le 29 juin 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société K par K, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à France travail, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommé Pôle emploi,
défendeurs à la cassation.
La société K par K a formé un pourvoi incident et un pourvoi provoqué contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
La demanderesse aux pourvois incident et provoqué invoque, à l'appui de chacun de ses recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Rodrigues, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [R], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société K par K, après débats en l'audience publique du 5 mars 2025 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Rodrigues, conseiller référendaire rapporteur, Mme Deltort, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 29 juin 2023), M. [R] a été engagé en qualité de représentant VRP (voyageur représentant placier), responsable des ventes, à compter du 1er janvier 2010, par la société K par K.
2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 31 janvier 2018 de demandes en résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement de rappels de salaires, notamment au titre des heures supplémentaires, et de diverses indemnités au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.
3. Son licenciement lui a été notifié le 12 juin 2018.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal et le moyen du pourvoi incident, pris en ses trois dernières branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une indemnité pour manquement à l'obligation de sécurité, de prononcer la résiliation du contrat de travail, de dire qu'elle produit les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner en conséquence à verser au salarié diverses sommes à ce titre, alors « que lorsque le VRP est libre dans l'organisation de son temps de travail, la réglementation sur la durée légale du travail ne s'applique pas à lui ; qu'il ne peut donc être déduit du seul fait que le VRP ait eu une grande quantité de travail que l'employeur aurait manqué à son obligation de sécurité pour ne pas avoir pris de mesures pour assurer la protection de la santé du salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que M. [R] ne démontrait pas qu'il ne disposait pas d'autonomie et d'indépendance dans l'organisation et l'exercice de son travail de représentation, qu'il fixait lui-même ses heures de réunion et qu'il n'était pas soumis à un horaire déterminé et a donc débouté M. [R] de ses demandes formées au titre du non-respect de la réglementation de la durée du travail, des heures supplémentaires et du travail dissimulé ; qu'en jugeant pourtant que la société K par K avait manqué à son obligation de sécurité au motif que l'employeur se contente d'alléguer n'avoir commis aucun manquement sans justifier des mesures prises pour assurer la protection de la santé de M. [R] alors que ses plannings et les attestations communiquées démontrent une quantité importante de travail peu important à cet égard que les règles de droit commun sur la durée du travail ne lui soient pas applicables en raison de l'application du statut de VRP", la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il ressortait que le salarié était maître de sa charge de travail, a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
6. Il résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail, dans ses rédactions antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017 et issue de celle-ci, que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s'il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.
7. Le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles.
8. La cour d'appel, qui avait jugé que le statut de VRP pouvait valablement être appliqué au salarié et estimé qu'il n'était pas établi qu'il était soumis à un horaire déterminé de sorte qu'elle n'a pas retenu que la législation de droit commun sur la durée du travail lui était applicable, a, par motifs propres, relevé que l'employeur se contentait d'alléguer n'avoir commis aucun manquement sans justifier des mesures prises pour assurer la protection de la santé du salarié alors que ses plannings et les attestations communiquées démontraient une quantité importante de travail, et, par motifs adoptés, que le salarié avait été soumis à un rythme de travail préjudiciable à sa santé et à son équilibre, et n'avait pas toujours pu bénéficier du temps de repos nécessaire à une récupération effective, propice à éviter toute altération de son état de santé.
9. Elle en a déduit, à bon droit, un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et souverainement évalué le montant de l'indemnisation du préjudice en résultant.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
Et sur le moyen du pourvoi provoqué
Enoncé du moyen
11. L'employeur fait grief à l'arrêt de lui ordonner d'office le remboursement des indemnités de chômage versées par Pôle emploi au salarié à la suite de son licenciement dans la limite de trois mois, alors « que la cassation de l'arrêt sur le fondement du pourvoi incident de la société K par K entraînera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a ordonné à la société K par K de rembourser à Pôle emploi devenu France travail les indemnités de chômage payées au salarié dans la limite de trois mois. »
Réponse de la Cour
12. Le rejet du moyen du pourvoi incident prive de portée le moyen du pourvoi provoqué qui invoque une cassation par voie de conséquence.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille vingt-cinq.