LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC. / ELECT
CZ
COUR DE CASSATION
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Arrêt du 6 mai 2025
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 472 F-D
Pourvoi n° A 24-15.368
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 MAI 2025
La société Electricité de France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° A 24-15.368 contre le jugement rendu le 7 mai 2024 par le tribunal judiciaire de Bobigny (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :
1°/ au syndicat national UNSA énergie, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à M. [D] [I], domicilié [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la société Electricité de France, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat national UNSA énergie et de M. [I], et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 26 mars 2025 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Bobigny, 7 mai 2024), la société EDF (la société) a organisé courant novembre 2023 les élections de la délégation du personnel au comité social et économique (CSE) au sein de ses quarante-huit établissements distincts.
2. Les élections se sont déroulées du 6 au 13 novembre 2023 (premier tour) et du 23 au 27 novembre 2023 (second tour).
3. Dans l'établissement Unité d'ingénierie d'exploitation et état major direction de la production nucléaire, qui compte au moins cinq cents salariés, le syndicat UNSA énergie (le syndicat UNSA) a déposé au premier tour une liste de candidats en son nom propre pour le premier collège.
4. Pour le deuxième et le troisième collèges, le syndicat UNSA et le syndicat CFE-CGC énergies (le syndicat CFE-CGC) ont présenté des listes communes de candidats en application d'un accord d'entente électorale conclu le 12 octobre 2023 prévoyant le dépôt de listes communes dans les deuxième et troisième collèges sous le nom « Alliance CFE-CGC UNSA énergies », les parties déterminant, d'un commun accord, que la répartition des suffrages s'opérerait à concurrence de 70 % en faveur du syndicat CFE-CGC et 30 % au bénéfice du syndicat UNSA.
5. Le syndicat UNSA a obtenu un élu titulaire dans le premier collège et la liste commune un siège de titulaire dans le deuxième collège et onze sièges dans le troisième collège.
6. Le 16 janvier 2024, le syndicat UNSA a informé la société de la désignation sur le périmètre de l'établissement de M. [I] en qualité de délégué syndical supplémentaire.
7. La société a saisi le tribunal judiciaire en annulation de cette désignation.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
8. La société fait grief au jugement de la débouter de ses demandes tendant à l'annulation de la désignation de M. [I] en qualité de délégué syndical supplémentaire sur le périmètre du comité social et économique de l'UNIE - État-major DPN , alors « qu'un syndicat ayant constitué une liste commune pour les élections au comité social et économique ne peut procéder à la désignation d'un délégué syndical supplémentaire que s'il réunit à lui seul l'ensemble des conditions posées à l'article L. 2143-4 du code du travail, sans préjudice de la possibilité pour les syndicats ayant constitué cette liste commune de désigner ensemble un délégué syndical supplémentaire ; que le scrutin est de liste à deux tours avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, les candidats étant proclamés élus dans l'ordre de leur présentation, sauf à ce que l'un d'eux ait été raturé dans les proportions suffisantes pour être exclu de l'élection ; qu'en l'absence d'identification de l'appartenance syndicale des salariés figurant sur la liste commune, il n'est pas possible d'apprécier si l'un des syndicat composant cette liste remplit à lui seul les conditions posées par l'article L. 2143-4 du code du travail pour désigner un délégué syndical supplémentaire, notamment la condition relative à l'obtention d'un élu dans tel collège dans lequel il a constitué cette liste commune avec une autre organisation syndicale ; que le tribunal, qui a considéré qu'il pouvait être satisfait à cette condition en calculant le nombre d'élus obtenus par chacun des syndicat ayant constitué la liste commune sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de la liste, a par la même méconnu les dispositions des articles L. 2143-4 et L. 2314-29 du code du travail. »
Réponse de la Cour
9. Aux termes de l'article L. 2143-4, alinéa 1, du code du travail, dans les entreprises d'au moins cinq cents salariés, tout syndicat représentatif dans l'entreprise peut désigner un délégué syndical supplémentaire s'il a obtenu un ou plusieurs élus dans le collège des ouvriers et employés lors de l'élection du comité social et économique et s'il compte au moins un élu dans l'un des deux autres collèges.
10. Lorsque plusieurs syndicats ont constitué une liste commune aux élections du comité social et économique, chacun d'eux peut procéder à la désignation d'un délégué syndical supplémentaire dès lors qu'il remplit à lui seul l'ensemble de ces conditions, sans préjudice de la possibilité pour les syndicats ayant constitué une liste commune de désigner ensemble un délégué syndical supplémentaire.
11. Le nombre d'élus obtenu par chaque organisation syndicale s'apprécie sur la base indiquée par les organisations syndicales concernées lors du dépôt de leur liste commune et, à défaut, par parts égales entre les organisations concernées.
12. L'indication de la base de répartition permettant de déterminer le nombre d'élus de chaque syndicat peut également résulter de la mention sur la liste de candidature présentée aux électeurs, pour chacun des candidats de la liste commune, de leur appartenance à l'un ou l'autre des syndicats de la liste.
13. Il en résulte que lorsqu'une clé de répartition a été indiquée lors du dépôt de la liste, elle sert de base au calcul du nombre d'élus obtenu par chaque syndicat composant la liste commune.
14. Le tribunal judiciaire, qui a constaté que l'accord d'entente électorale communiqué lors du dépôt de la liste commune prévoyait une répartition de 30 % des suffrages exprimés pour le syndicat UNSA et que la liste commune avait obtenu onze élus au sein du troisième collège, en a déduit à bon droit qu'il résultait de l'application de cette clé de répartition que le syndicat UNSA avait obtenu au moins un élu dans le troisième collège, peu important que la liste commune ne fasse pas apparaître l'appartenance syndicale de chacun des candidats.
15. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société EDF et la condamne à payer à M. [I] et au syndicat national UNSA énergie la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le six mai deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.